"F" comme Faust...
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"F" comme Faust...
En cette soirée déjà bien avancée, les dernières lueurs souffreteuses des innombrables ruelles d'Hurlevent, meurent peu à peu, laissant s'installer tranquillement l'atmosphère assoupie d'un été exténuant. Le chien aboie encore tandis que les derniers soudards regagnent d'un pas titubant leurs foyers, l'air hagard, l'oeil terne alors que l'alcool embrume leur vision et engourdit leurs sens. L'aubergiste ferme à double tour la porte grinçante de son établissement, et claudique non sans quelques gémissement chevrotant, vers son lit douillet - vers un repos bien mérité. Le criminel même, ferme un oeil - le ruffian, le truand et le sanguinaire accordent leurs violons, et vont chacun trouver le refuge d'une nuit dans l'ombre d'une impasse oubliée du petit peuple. En cette nuit, au coeur même de l'obscurité ronronnante, chacun et chacune sombre dans l'état léthargique et ensommeillé dûment arraché au prix d'une dure journée. En cette nuit où le fielleux laisse l'épée reposer au fourreau, l'homme s'assoupit à l'ombre d'un réconfort incertain, là bas près du lion sur le trône des savanes, qui ronfle allègrement.
Pourtant - parmi les rayons et les ombres spectrales d'une cité figée, rampe la silhouette floue d'un être préoccupé. Il erre à travers le splendide dédale de ruelles, places et avenues - gravit les pontons pavés et les chemins escarpés, la botte sure, et le pas résonnant. Voilà qu'il traverse la place d'une longue foulée, le pas raide et pressé, lourd et grave. Grave ! Grave comme l'écho d'un glas résonnant au rythme de ses pas, profonds et lourds. Sur la place habituellement peuplée, ne demeure plus que la marche lugubre, qui se propage à travers la cité.
L'homme - silhouette anonyme - n'est vêtu que de noir, une longue toge de satin ne laissant deviner que les contours de son visage et le dessin de ses mains. Son regard, son nez et l'ensemble de ses traits, sont enfouis dans une obscurité coupable, ne renvoyant que le reflet argenté d'un masque travaillé. Voilà qu'une main se découvre : il n'est ni chair ni os visible - rien que l'éclat et le cliquetis d'un gantelet d'acier sans vie. Alors qu'un pan de la toge se voit soulevé par une petite brise soudaine, l'on peut apercevoir des bottes trempée du même alliage que la coquille de ses mains. Là, sous la toge, repose l'armure richement décorée de dorures et de rouge carmin - carapace d'un coeur trop longtemps enfouis dans les ténèbres de l'oubli. À sa taille, pend une zweilhänder de six pied de long, le manche en croix, le fil brillant et acéré.
Voilà que brièvement il sort des ombres, alors qu'il finit de traverser un énième canal, foulant d'un pas rapide les pontons en arc. Son visage disparait derrière un heaume de fer froid - un cylindre imparfait à la nasale prononcée, un dessin sculpté de croix flanqué sur celui ci, deux fentes étroites en seul gage de vision. L'homme continue son épopée, se fondant dans les ombres et surgissant dans les rares éclairci dégagés par la lumière maladive de l'astre lunaire.
Bientôt, son périple touche à sa fin - son pas se ralentit alors que de la caserne peu active, il s'approche. A une heure si avancée, les factionnaires laissés aux portes se relâchent, allant jusqu'à aborder quelques rares jeunes filles égarées, aux corsets trop ouverts et aux lèvres trop accueillantes, le discours penaud et navré s'alliant amoureusement aux grands yeux luisants d'une délicieuse gourmandise. L'homme, stoïque achève sa marche sépulcrale vers la petite porte de la caserne militaire, s'arrêtant un bref instant pour contempler les alentours. Ceci étant fait, il glisse sa main sous un pan de sa toge, allant fouiller brièvement sa cuirasse; la même main gantée en ressort une lettre soigneusement cachetée, qu'elle dépose doucement sur le parvis de la caserne.
Alors même qu'un soldat rappelé au doux univers du devoir, aperçoit la lettre laissée devant la porte, la silhouette cuirassée coule déjà dans les ombres, s'effaçant tel le spectre d'un songe d'une nuit d'été.
Quiconque ouvrira l'enveloppe pourra lire sur une lettre simple le message suivant - écrit avec une calligraphie raide et nette :
Dans les geôles de la garde, le prisonnier au masque sombre halète d'une voix rauque; la maladie qu'il combat depuis plus de six mois déjà, semble avoir rongé considérablement ses dernières défenses. Une coulée de sueur descend le long de son dos nu. Il scrute la pièce de son regard froid, inexpressif, masqué par le heaume soudé à sa chair. Sa vision est trouble, sa respiration saccadée. Il soupire de nouveau, se laissant aller contre le mur de sa cellule. Il ferme les yeux, et écoute. Il écoute les bruits du dedans et du dehors - la respiration rauque de la grande cité, lui qui est plongé au centre même de son gosier.
"Aujourd'hui, nous sommes le vingt-huit." murmure-t-il difficilement, marquant une pause.
"Faust..." rajoute-il enfin, se laissant pendre au bout de ses chaînes.
Dans les geôles de la garde, Jugement se meurt.
Une époque s'achève...et une autre perce à l'horizon.
Pourtant - parmi les rayons et les ombres spectrales d'une cité figée, rampe la silhouette floue d'un être préoccupé. Il erre à travers le splendide dédale de ruelles, places et avenues - gravit les pontons pavés et les chemins escarpés, la botte sure, et le pas résonnant. Voilà qu'il traverse la place d'une longue foulée, le pas raide et pressé, lourd et grave. Grave ! Grave comme l'écho d'un glas résonnant au rythme de ses pas, profonds et lourds. Sur la place habituellement peuplée, ne demeure plus que la marche lugubre, qui se propage à travers la cité.
L'homme - silhouette anonyme - n'est vêtu que de noir, une longue toge de satin ne laissant deviner que les contours de son visage et le dessin de ses mains. Son regard, son nez et l'ensemble de ses traits, sont enfouis dans une obscurité coupable, ne renvoyant que le reflet argenté d'un masque travaillé. Voilà qu'une main se découvre : il n'est ni chair ni os visible - rien que l'éclat et le cliquetis d'un gantelet d'acier sans vie. Alors qu'un pan de la toge se voit soulevé par une petite brise soudaine, l'on peut apercevoir des bottes trempée du même alliage que la coquille de ses mains. Là, sous la toge, repose l'armure richement décorée de dorures et de rouge carmin - carapace d'un coeur trop longtemps enfouis dans les ténèbres de l'oubli. À sa taille, pend une zweilhänder de six pied de long, le manche en croix, le fil brillant et acéré.
Voilà que brièvement il sort des ombres, alors qu'il finit de traverser un énième canal, foulant d'un pas rapide les pontons en arc. Son visage disparait derrière un heaume de fer froid - un cylindre imparfait à la nasale prononcée, un dessin sculpté de croix flanqué sur celui ci, deux fentes étroites en seul gage de vision. L'homme continue son épopée, se fondant dans les ombres et surgissant dans les rares éclairci dégagés par la lumière maladive de l'astre lunaire.
Bientôt, son périple touche à sa fin - son pas se ralentit alors que de la caserne peu active, il s'approche. A une heure si avancée, les factionnaires laissés aux portes se relâchent, allant jusqu'à aborder quelques rares jeunes filles égarées, aux corsets trop ouverts et aux lèvres trop accueillantes, le discours penaud et navré s'alliant amoureusement aux grands yeux luisants d'une délicieuse gourmandise. L'homme, stoïque achève sa marche sépulcrale vers la petite porte de la caserne militaire, s'arrêtant un bref instant pour contempler les alentours. Ceci étant fait, il glisse sa main sous un pan de sa toge, allant fouiller brièvement sa cuirasse; la même main gantée en ressort une lettre soigneusement cachetée, qu'elle dépose doucement sur le parvis de la caserne.
Alors même qu'un soldat rappelé au doux univers du devoir, aperçoit la lettre laissée devant la porte, la silhouette cuirassée coule déjà dans les ombres, s'effaçant tel le spectre d'un songe d'une nuit d'été.
Quiconque ouvrira l'enveloppe pourra lire sur une lettre simple le message suivant - écrit avec une calligraphie raide et nette :
"L'été bat son plein en cette soirée fiévreuse, et les esprits, nonchalants et désinvoltes, s'abandonnent aux plaisirs interdit ayant le mérite d'enflammer leurs sens. L'homme perd la raison et ouvre les bras aux plus belles folies et chimères, laissant derrière lui la rigueur du devoir, la morale et le bon sens du citoyen. Bien au delà des ébats amoureux, et des fantasmes lubriques accomplis, se préparent les vices sinistres du poignard et du venin - vices qui prolifèrent en ce moment même, au sein des racines ancestrales de notre belle cité.
L'assassin, le corrupteur, le pêcheur et le perfide dorment paisiblement en cette soirée - horde de loup peu effrayée par l'outil entravé de la justice. Le marteau du juge et l'épée du garde se voient figées par des dissidences intrinsèques - dissidences jamais punies ni reconnues qui empoisonne le fier établissement du lion bleu et or.
Gardes ! Soyez avertis, qu'en ce jour cesse enfin l'âge rêveur des vicieux et des hommes de fiels, qui nagent librement dans cet océan corrompu jusqu'au noyau; soyez avertis que le loup qui reposait sur le palier même de la bergerie sera désormais délogé par la plus féroce des répressions ! Une répression qui ne saurait souffrir aucune entrave, aucune pitié, et aucune loi ! Voici que vient un âge de grande purge, où l'impie et le malin sera sujet à une traque acharnée, qui ne saurait cesser qu'avec la mort du chasseur ou l'extermination du gibier.
Le dernier justicier à fait son temps; il repose dans vos geôles, attendant l'heure de son propre jugement, où il pourra enfin trouver la paix et achever le cycle dont il était l'instigateur. Jugement à fait son devoir ! Mais, si il ne lui reste désormais plus qu'à prendre congé, l'oeuvre qu'il à façonné demande d'autre maçon, d'autre architectes ! Jugement disparait comme il le souhaitait - et ceci faisant, laisse le champs libre à de nouveaux artisans de l'ombre et de la justice impartiale.
Le jugement est terminé ! Place, à l'annihilation !
"F" comme Faust !"
*****
Dans les geôles de la garde, le prisonnier au masque sombre halète d'une voix rauque; la maladie qu'il combat depuis plus de six mois déjà, semble avoir rongé considérablement ses dernières défenses. Une coulée de sueur descend le long de son dos nu. Il scrute la pièce de son regard froid, inexpressif, masqué par le heaume soudé à sa chair. Sa vision est trouble, sa respiration saccadée. Il soupire de nouveau, se laissant aller contre le mur de sa cellule. Il ferme les yeux, et écoute. Il écoute les bruits du dedans et du dehors - la respiration rauque de la grande cité, lui qui est plongé au centre même de son gosier.
"Aujourd'hui, nous sommes le vingt-huit." murmure-t-il difficilement, marquant une pause.
"Faust..." rajoute-il enfin, se laissant pendre au bout de ses chaînes.
Dans les geôles de la garde, Jugement se meurt.
Une époque s'achève...et une autre perce à l'horizon.
Faust...- Citoyen
- Nombre de messages : 1
Lieu de naissance : Hurlevent
Age : ~ 45 ans
Date d'inscription : 28/07/2012
Re: "F" comme Faust...
La prêtresse s'avance vers la civière déposée dans la cour..l'homme au heaume soudé,à la fois courtois et implaccable,talentueux et dérisoire,idéaliste visionnaire et fou prisonnier d'une réthorique figée juqu'à la caricature se meurt.
L'austère officier l'a fait sortir pour une obscure raison,mais J regarde le soleil naissant,comme la dernière chose qui lui soit accordé de voir et dont il ne verra pas la fin.
La prêtresse ne cherche pas à nier sa mort imminente ni ne fait rien pour y remédier,elle lui parle rédemption,il réponds d'une voix faible qu'il n'y en aura aucune pour lui.
La femme est sincère,mais la quête vaine...
L'officier se penche alors vers le mourrant qui sait ce qu'elle désire...des réponses.
L'officier,et non la femme de foi,receuille les derniers mots de l'homme,restant un moment à réfléchir longtemps après qu'on l'eut emmené vers son ultime demeure.
_________________
Semper Fidelis.
Laurelinn Hellenlicht- Officier supérieur de la Garde
- Nombre de messages : 3074
Lieu de naissance : Stratholme
Age : 41
Date d'inscription : 20/09/2011
Re: "F" comme Faust...
C'est un jugement usé, malade et fatigué qui fut sorti en pleine lumière ce jour là - visage pâle et ternie de celui jadis emprisonné. La voix rauque, les bronches encombrées par quelques mucus maladifs, il avait toussé un long moment, peu habitué aux grandes bouffées d'air frais après avoir passé ses jours et nuit en geôle. Il s'était levé de son mieux tâchant de garder sa fière image devant ce major inexpressif qu'il avait appris à respecter profondément. Menotté à vif, le heaume bien calé sur son visage anonyme, il dit ceci :
« Voici venu le dernier de mes jours, major…Voici que le spectre de la Mort vient m’arracher à ce monde comme il se doit – j’ai fait mon temps parmi les hommes et m’en vais voir Méphisto. Trop longtemps ai-je parcouru la terre et vécu en ces murs, pour demeurer plus longtemps en tant qu’homme vivant, de chair, de sang et d’ossements. Il est temps désormais pour moi de rencontrer mes créateurs, et de subir le courroux de la justice que j’eu été forcé de bafouer pour mieux la servir. Aujourd’hui, je m’éteins et m’apprête à disparaître dans les limbes du temps – monstrueux justicier, grand carnassier d’Hurlevent, homme de justice perdu à jamais par sa foi infinie en la loi des hommes.
Vous vous demandez sans doute comment un être comme moi – un magistrat au sommet de son art, à l’apothéose de sa carrière – eut put emprunté un chemin divergent du votre, vous qui servez le Roy et les hommes avec fidélité et dévotion. La réponse n’en est pas une, tant il s’agit d’une perspective trop subjective pour qu’elle puisse être acceptable aux yeux d’une femme d’ordre et de droit comme vous, Hellenlitch. Pourquoi suis-sortit des sentiers battus, et ai-je embrassé l’anarchie et la justice de l’ombre ? Plus que pour la justice elle même – que je n’aurai pu honorer en la violant – je l’ai fait pour l’homme, la brebis, le citoyen.
J’ai essayé Major, d’incarner le parangon de l’espoir aux yeux d’un peuple terrifié et rongé par la peur quotidienne ; j’ai essayé d’être un rempart anarchique et hors-la-loi pour ce peuple opprimé, qui n’à de cesse de trembler, aux quatre coins d’une ville dirigée par la discorde et l’infamie. J’ai essayé de rendre l’espoir d’un monde meilleur à l’orphelin, à la femme esseulée, à la jeune fille larmoyante à la robe déchirée près du petit port.
Car comment l’homme peut-il vivre paisiblement, sans le moindre espoir à l’horizon ? Comment l’orphelin peut-il sécher ses larmes, si personne ne vient lui tendre la main ? Comment la femme abandonnée peut-elle retrouver le sourire sans voir un être lui porter secours face au voyou et au gredin ? Comment la petite fille peut elle se sentir aidée et soutenue si personne ne vient s’asseoir à ses côtés ?
Mes actes étaient ignobles Major ; j’ai assassiné, éventré, égorgé, abattu froidement le fiel rampant dans les rues de notre cité. Et je ne regrette pas un seul de ces actes ; aucun remords ne vient ronger mon cœur, ni attaquer mon éthique. Pourquoi ? Car chacun des coups portés trouvaient un sens dans la cause qu’ils servaient. Je l’ai fait pour l’homme à mes côtés, pour le petit peuple paralysé, qui supplie à l’aide, couchés sur ses genoux esquintés. Car chacun des coups, avait pour but de faire du monde un lieu meilleurs, un havre de paix.
Je suis un monstre – une ignominie sans nom – qui avait foi en la possibilité d’un meilleur futur, et qui voyait en ce monde du bien pour lequel se battre. Car oui, il y a du bien en ce monde Major. Du bien qui mérite que l’on se batte pour lui jusqu’au bout, jusqu’aux extrêmes paroxysmes, jusqu’aux confins les plus fous et les plus délirants. Je suis fou de l’humanité, fou d’une perspective de paix et de plénitude, fou à lier d’un univers purgé du malin.
La vie est belle Major ! Elle est si belle ! Puissiez vous nettoyer le monde du vice et de la perfidie, afin que les générations futures puissent en profiter pleinement. Que l’homme puisse enfin vivre libre de tout effroi, de tout fantômes ! Qu’il puisse enfin regagner sa chaumière sans se soucier des terreurs du lendemain. Qu’il puisse cheminer dans sa ville sans craindre la dague et le poignard au coin de la ruelle sombre. Il faut que l’homme puisse avoir foi en l’avenir, Major. Que le vieillard, l’orphelin, la veuve et la petite fille lancent à l’horizon un regard plein d’espoir et d’ambition. L’homme doit trouver la paix en cet univers ; il le peut. Il suffit simplement qu’un gardien se dresse à ses côtés à tout moment ; un gardien infaillible, impitoyable et profondément amoureux de l’homme ; un gardien allant jusqu’à bafouer la loi et la justice pour protéger ceux qu’il chérit. Un gardien justicier restant dans l’ombre de la justice ; un chevalier, un croisé à la foi implacable, qui se sacrifiera finalement au nom de l’humanité.
En vérité Major, je ne suis qu’un piètre justicier. Voilà longtemps que la justice – s’enrayant elle même à travers ses imperfections – à été abandonnée derrière mes pas. En vérité, je n’ai tout effectué que pour l’homme ; pour l’innocent – celui qui réchauffe mon cœur avec un seul sourire ; celui pour qui j’ai tout sacrifié.
Voyez vous major…Au final, au delà de ce heaume de croisé en fer froid, au delà de ce masque d’assassin insensible, au delà de cette épée usée pendant à ma taille, au delà de la monstruosité de mes actes, je ne suis qu’un croyant, un homme passionné, un idéaliste, un monstrueux humaniste.
Désormais, je disparais. Après avoir parcouru le monde durant de nombreuses années, je m’en retourne au royaume des ombres où il ne fait ni sourire ni pleurs, et où m’attend impatiemment le diabolique, le déchu, le soleil noir.
La vie est belle, major…La vie est si belle. »
Puis, comme l'homme ayant prononcé sa propre condamnation, il se dirigea vers le bourreau l'attendant d'un pied ferme, là bas, près du petit écurie. Il marchait d'un pas lent, la tête droite sans être trop haute, tel l'homme anodin marchant vers sa destinée - une destinée toute tracée, vers laquelle il partait l'esprit résolu, un regard fier et un léger sourire aux lèvres à offrir au dieu de la mort.
Toutefois, avant de partir, il glissa un petit billet, avec grande discrétion, dans la main du Major. Le billet en question contenait le message suivant :
Alors que déjà Jugement - alias Jalec Delgrad - disparaissait dans la nuit, l'on ne pouvait distinguer, plus que ses pas dans la boue. Ces même pas dans lesquels étaient abandonnés deux petites pièces d'argent.
« Voici venu le dernier de mes jours, major…Voici que le spectre de la Mort vient m’arracher à ce monde comme il se doit – j’ai fait mon temps parmi les hommes et m’en vais voir Méphisto. Trop longtemps ai-je parcouru la terre et vécu en ces murs, pour demeurer plus longtemps en tant qu’homme vivant, de chair, de sang et d’ossements. Il est temps désormais pour moi de rencontrer mes créateurs, et de subir le courroux de la justice que j’eu été forcé de bafouer pour mieux la servir. Aujourd’hui, je m’éteins et m’apprête à disparaître dans les limbes du temps – monstrueux justicier, grand carnassier d’Hurlevent, homme de justice perdu à jamais par sa foi infinie en la loi des hommes.
Vous vous demandez sans doute comment un être comme moi – un magistrat au sommet de son art, à l’apothéose de sa carrière – eut put emprunté un chemin divergent du votre, vous qui servez le Roy et les hommes avec fidélité et dévotion. La réponse n’en est pas une, tant il s’agit d’une perspective trop subjective pour qu’elle puisse être acceptable aux yeux d’une femme d’ordre et de droit comme vous, Hellenlitch. Pourquoi suis-sortit des sentiers battus, et ai-je embrassé l’anarchie et la justice de l’ombre ? Plus que pour la justice elle même – que je n’aurai pu honorer en la violant – je l’ai fait pour l’homme, la brebis, le citoyen.
J’ai essayé Major, d’incarner le parangon de l’espoir aux yeux d’un peuple terrifié et rongé par la peur quotidienne ; j’ai essayé d’être un rempart anarchique et hors-la-loi pour ce peuple opprimé, qui n’à de cesse de trembler, aux quatre coins d’une ville dirigée par la discorde et l’infamie. J’ai essayé de rendre l’espoir d’un monde meilleur à l’orphelin, à la femme esseulée, à la jeune fille larmoyante à la robe déchirée près du petit port.
Car comment l’homme peut-il vivre paisiblement, sans le moindre espoir à l’horizon ? Comment l’orphelin peut-il sécher ses larmes, si personne ne vient lui tendre la main ? Comment la femme abandonnée peut-elle retrouver le sourire sans voir un être lui porter secours face au voyou et au gredin ? Comment la petite fille peut elle se sentir aidée et soutenue si personne ne vient s’asseoir à ses côtés ?
Mes actes étaient ignobles Major ; j’ai assassiné, éventré, égorgé, abattu froidement le fiel rampant dans les rues de notre cité. Et je ne regrette pas un seul de ces actes ; aucun remords ne vient ronger mon cœur, ni attaquer mon éthique. Pourquoi ? Car chacun des coups portés trouvaient un sens dans la cause qu’ils servaient. Je l’ai fait pour l’homme à mes côtés, pour le petit peuple paralysé, qui supplie à l’aide, couchés sur ses genoux esquintés. Car chacun des coups, avait pour but de faire du monde un lieu meilleurs, un havre de paix.
Je suis un monstre – une ignominie sans nom – qui avait foi en la possibilité d’un meilleur futur, et qui voyait en ce monde du bien pour lequel se battre. Car oui, il y a du bien en ce monde Major. Du bien qui mérite que l’on se batte pour lui jusqu’au bout, jusqu’aux extrêmes paroxysmes, jusqu’aux confins les plus fous et les plus délirants. Je suis fou de l’humanité, fou d’une perspective de paix et de plénitude, fou à lier d’un univers purgé du malin.
La vie est belle Major ! Elle est si belle ! Puissiez vous nettoyer le monde du vice et de la perfidie, afin que les générations futures puissent en profiter pleinement. Que l’homme puisse enfin vivre libre de tout effroi, de tout fantômes ! Qu’il puisse enfin regagner sa chaumière sans se soucier des terreurs du lendemain. Qu’il puisse cheminer dans sa ville sans craindre la dague et le poignard au coin de la ruelle sombre. Il faut que l’homme puisse avoir foi en l’avenir, Major. Que le vieillard, l’orphelin, la veuve et la petite fille lancent à l’horizon un regard plein d’espoir et d’ambition. L’homme doit trouver la paix en cet univers ; il le peut. Il suffit simplement qu’un gardien se dresse à ses côtés à tout moment ; un gardien infaillible, impitoyable et profondément amoureux de l’homme ; un gardien allant jusqu’à bafouer la loi et la justice pour protéger ceux qu’il chérit. Un gardien justicier restant dans l’ombre de la justice ; un chevalier, un croisé à la foi implacable, qui se sacrifiera finalement au nom de l’humanité.
En vérité Major, je ne suis qu’un piètre justicier. Voilà longtemps que la justice – s’enrayant elle même à travers ses imperfections – à été abandonnée derrière mes pas. En vérité, je n’ai tout effectué que pour l’homme ; pour l’innocent – celui qui réchauffe mon cœur avec un seul sourire ; celui pour qui j’ai tout sacrifié.
Voyez vous major…Au final, au delà de ce heaume de croisé en fer froid, au delà de ce masque d’assassin insensible, au delà de cette épée usée pendant à ma taille, au delà de la monstruosité de mes actes, je ne suis qu’un croyant, un homme passionné, un idéaliste, un monstrueux humaniste.
Désormais, je disparais. Après avoir parcouru le monde durant de nombreuses années, je m’en retourne au royaume des ombres où il ne fait ni sourire ni pleurs, et où m’attend impatiemment le diabolique, le déchu, le soleil noir.
La vie est belle, major…La vie est si belle. »
Puis, comme l'homme ayant prononcé sa propre condamnation, il se dirigea vers le bourreau l'attendant d'un pied ferme, là bas, près du petit écurie. Il marchait d'un pas lent, la tête droite sans être trop haute, tel l'homme anodin marchant vers sa destinée - une destinée toute tracée, vers laquelle il partait l'esprit résolu, un regard fier et un léger sourire aux lèvres à offrir au dieu de la mort.
Toutefois, avant de partir, il glissa un petit billet, avec grande discrétion, dans la main du Major. Le billet en question contenait le message suivant :
"Ainsi se termine un premier cycle - le justicier devenu loup voit sa propre épée lui saigner la gorge. Ainsi rejoint-il les enfers, où il expiera ses pêchés - ces mêmes pêchés nés de sa bonté, de son attachement et de son trop grand aveuglement. Homme monstrueux, monstre humain, il disparait dans les âges de l'oubli, ne laissant derrière lui qu'un flambeau à reprendre. Ainsi disparait Jugement; un ombre en plein soleil rejoignant la nuit."
Jalec Delgrad
Alors que déjà Jugement - alias Jalec Delgrad - disparaissait dans la nuit, l'on ne pouvait distinguer, plus que ses pas dans la boue. Ces même pas dans lesquels étaient abandonnés deux petites pièces d'argent.
Dernière édition par "Jugement" le Mar 31 Juil 2012 - 21:00, édité 2 fois
"Jugement"- Citoyen
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Re: "F" comme Faust...
[Mis à jour]
"Jugement"- Citoyen
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