Violette sait faire un bon café ♪

« Caporal ? » Dit l’Intendant, tout en massant sa moustache comme d’accoutumée, la main au ceinturon et l’air songeur alors que le silence pesait sur la caserne. Une dispute venait d’éclater et rien ne semblait pouvoir changer les esprits encore pensifs. Il devait faire quelque chose… Il regarda longuement cette mage aux cheveux de jais… Inoffensive, mais ce n’était qu’une façade, il ne savait pas encore.

« Oui ? » Dit-elle tout simplement en coulant un regard toujours aussi piquant vers lui, neutre.

« Je peux... Vous demandez un café ? » Dit-il en fronçant les sourcils, l’air sérieux pour le coup.

« Il est trop tard pour ça ! Vous n'en dormiriez pas. »

“ Oh je... Je comptais faire le service de nuit. »

« Et puis, vous clamez haut et fort que votre café est meilleur que le mien ! » Rétorqua la Caporale.

« Je ne peux que goûter celui de ma plus grande rivale. » Tenta-t-il tout en passant les mains sur ses hanches tout en toisant de haut en bas ce Caporal dont le café horrible faisait la renommée.  Violette Crowglade fit craquer ses phalanges, forte de ses gantelets légers elle se lança dans la préparation de son chef d'œuvre du soir, pinacle de sa carrière au sein de la Garde.

« Des préférences ? »

« Surprenez-moi, c'est le mot d'ordre. » Dit-il en souriant, le pauvre fou.

« Soit ! » Violette se cacha lors de la préparation de la boisson mystère, véritablement mystérieuse en cet instant alors que ses mains virevoltaient au-dessus de la machine. Crowglade finit néanmoins par servir le fruit de ses efforts dans une tasse indigne d'un tel breuvage. Elle tendit la sombre merveille aux merveilleux Fabre. Une boisson qui avait l'odeur du café, ressemblait à du café, dans une tasse à café, chaude comme un café fraichement servi.  

« Crowglade... C'est pour vous... » Dit Reed, la regardant, les larmes aux yeux et cul sec ! Le fou ! Et voici à peu près ce que cette expérience lui fit ressentir :

La café - si l'on peut donner un tel nom à cette boisson - semble au premier abord des plus classique. L'arôme amère et revigorant, la douce chaleur qui remplis les tripes. Mais bien sûre, ce n'est qu'une première impression. Loin d’être déterminante au vu de la suite alors que les papilles du blond sont submergées d'informations. Informations Ô combien subliment. Des arômes fort, des arômes subtils. Un mélange complexe et indéchiffrable qui rendrait heureux un lépreux, ramènerait un mort à la vie, un nécromancien à la Lumière. C'est une boisson proche de l'ambroisie, le nectar des dieux. Mais une telle expérience a bien sûr un prix. Les Dieux en question ne peuvent supporter un tel affront, un simple mortel ne devrait pas pouvoir se réchauffer l'estomac avec ce somptueux liquide. Aussi, les Dieux sont en colère. Le styx déborde. La boisson se transforme en un liquide délétère à souhait. La merveille c'est enfui, ne reste plus qu'un profond désespoir. C'est insoutenable. L'âme du pauvre blond est pris d'assaut comme Lordaeron par les réprouvés. Sauf que cette fois les réprouvés en question sont dans sa bouche. Pire que l'eau qui suinte dans les rues de fossoyeuse, cette boisson pourrait terrasser et faire pâlir n'importe quel héro de l'alliance. Il n'y a nul besoin de préciser que l'âme de Fabre se scinde en morceau le temps d’un instant. Âme morcelée donc chaque partie se met à hurler à la mort dans une cacophonie des plus insoutenables. Lorsque finalement la marée est passée, il ne reste rien. Rien qu'un profond désespoir et une horreur intangible.

Joan Haynes observait le fameux duel de café et frissonnait devant tant d’intensité. Que c'est beau ! Le blond bu donc. Il fronça les sourcils en regardant doucement Violette avec bonheur quand soudain, un bruit rauque, hurlement de douleur là où jouissait son estomac, prit place. Ce cri, soudain, tirait les tripes du pauvre Intendant. Il écarquilla les yeux, devenant rouge alors qu'il tenait son ceinturon... Il l'ouvrit d'un cran... Il souffla et se courba en se tenant à l'épaulière de Violette tout en grimaçant... Il souffla encore comme s’il donnait vie à un être aussi contre nature que le goût de cette pisse ! Puis, il courut hors de la caserne la main au visage... Tout devait sortir.

« Oh oh.....C'est pas bon signe, ça, si ? C'est traître ça, Caporal. Vous avez éliminé votre adversaire. » Dit Haynes alors que Reed laissait s’échapper un bruit des plus ignoble... Se purgeant.

« Il a insisté. » Répliqua la mage au café aussi noir que son âme.


Reed Fabre rentra, en sueur, frémissant, le teint blafard... Un homme ayant vu la guerre... Il regarda droit devant lui tout en tenant son ceinturon encore ouvert, cliquetant. Il soupira, souffrant encore de relents gastriques tout en gémissant et non pas de plaisir ! Il se massait le ventre tout en trainant des pieds, ayant été victime des machineries ténébreuses d'un Caporal cachant une terroriste culinaire.

« Ça va Fabre ? Besoin d'eau ? » Dit la blonde tout en restant aux côtés de son bien aimé Stromgardien, haussant un sourcil, amusée la sadique. Haynes, la meilleure amie de Fabre l’observait agoniser sans ciller. Le blond avança doucement, la ceinture se balançant alors qu'il se sert un verre, grognant alors que son ventre hurlait encore de douleur... Comment était-ce possible de faire un… Enfin une chose aussi immonde ?!

« Je me suis démenée pour vous, j'espère qu'il vous a plus. » Ajouta le Caporal, piquante.

« Ce... Ce n'était pas... Pas humain... Vous... » Il toussa en essuyant sa bouche une fois le verre engloutit, regardant d’un œil à moitié ouvert la noiraude, l’air souffrant.

« Vous l'avez demandé. Maintenant, vous savez. » Dit-le Caporal sur un ton solennel, presque religieux en hochant doucement la tête. Le blond avait appris et sa longue nuit lui permettrait de digérer la leçon philosophique… L’humain n’a pas de limite dans l’horreur.