Nous sommes Hedera - Tract #03

Winston Greedy desserra le col de sa chemise de flanelle sur le chemin du retour. La journée avait été bonne. Imprimeur de son état, l'entreprise qu'il avait lancé à ses 19 ans avait connu le plus formidable des succès. La première année de son commerce, il avait dépassé ses prévisions de 300%.
Tout le monde, à Hurlevent, voulait imprimer des affiches et des tracts. Tout le monde. De la plus modeste des tavernes au pire des gredins, l'information n'avait qu'un seul média, et c'était le papier. Le métier de bûcheron n'avait jamais été aussi lucratif, les marchands d'encres se frottaient les mains au point d'en avoir des ampoules, et pour peu qu'on ait pris le temps d'en faire le compte, il eut été à parier que les colleurs d'affiches étaient plus nombreux que la milice de la ville.
Lorsqu'on lui demandait si ses affaires tournaient bien, Winston avait toujours la même répartie :
"Si ça marche ? Ha ha ! Mon jardinier a un jardinier."

Sur le morceau du port où il entretenait sa petite barque en attendant une réponse de la Chancellerie, Charlie put observer l'acquisition des premiers tracts par les porte-faix et autres marins de passage. On déchiffrait comme on pouvait, on butait à chaque mot, on décryptait parfois le vocabulaire comme si il s'était s'agit là du parchemin d'une civilisation disparue. Mais on s'intéressait, au moins.
Et une fois la lecture achevée cahin-caha, on décréta que "ça allait sûrement finir par chier pour quelqu'un" tout en disant aussi que "tout ça était bien beau mais ça ne chargerait pas les bateaux plus vite ni ne remonterait plus efficacement les filets".

Au final, estima le borgne, tout cela créait surtout de la conversation en effrayant les poissons.

Il se demanda si les sphères dites intellectuelles de la ville aux toits bleus considéreraient, elles, plus sérieusement la menace. Plus tard irait-il tendre l'oreille ça et là dans les rues, juste par curiosité.

En se promenant dans les rues d'Hurlevent, elle aura trouver un des tracts encore accroché, le prenant, le lisant de bout en bout, avant de s'exprimer en darnassien, pour elle-même :

Ils ont quand même raison sur beaucoup de points ...

Mais malheureusement, elle savait qu'il n'y avais que peu de chances pour que ce groupuscule réussisse à faire changer les choses, elle mis ensuite le tract dans une des sacoches de son garn, reprenant sa promenade.

Eudoxie Lamisber ferme la banque comme à son habitude ce soir la, après une journée bien remplie. Elle ramasse son trousseau de clés dans son petit sac de sa main droite tandis que de la main gauche elle renverse plusieurs dossiers clients sur les marches de l'établissement... Nul doute qu'il lui a fallut peut de temps pour comprendre qu'elle était en train de ramasser des tracts mélangés à ces feuilles clients. Elle prit alors le temps de s'asseoir sur une des marches et lu le tract... Des positions lui faisant froid dans le dos, un récit poignant, elle regarda autour d'elle la place vide autour d'elle et s'empressa de rentrée dans son domaine rejoindre son père...

Mon barda sur le dos, j'devais retourner à la Cathédrale déposer les fripes que de gentils donateurs m'avaient confiés. La Bourse aux Vêtements n'avait pas démarré sur les chapeaux de roues, mais je me disais qu'il fallait bien que l'idée fasse son chemin... Du moins, j'me réconfortais - si on peut bien être réconforté de voir la misère - d'avoir secouru une pauvre âme sans le sou. Lui filant même mon casse-croûte. Ce que disaient ces gens là, avec leurs papelards, ça me parlait, forcément. Moi qui rend visite aux prisonniers, qui oeuvre de toutes mes forces pour secourir ceux qui doivent l'être, je ne pouvais pas rester de marbre face à ces revendications. Je savais bien, qu'au fond, j'avais les mêmes.

Ils me faisaient pourtant un peu peur... Mais pas une de ces peurs qui vous empêchent de sortir le soir quand tout l'monde dort... Non. C'était la peur qu'ont les vieux cons comme moi, qui sentent dans leur cœur, qu'ils ont fait leur temps. La peur de la fougue de la jeunesse. De l'idéalisme et du changement. Qu'on nous pousse vers la sortie. Nous, et nos idéaux d'un autre âge.

Le Père Brunnus m'a envoyé une lettre pour me demander un rendez-vous. Pas la peine de me triturer l'esprit pour savoir de quoi il allait me parler. Tant qu'il n'y aura pas de sang versé, j'apporterai mon soutien à cet Hedera. C'est dans l'ordre des choses que j'me disais. Le vieil aumônier militaire que j'suis en a trop vu pour ne pas prendre en compte ceux qui veulent la Justice.

Mais pas le temps de cogiter davantage. J'remballais dans ma poche la feuille roulée en boule et salua Brunnus.

Durzo se balader tranquillement dans la cité d'hurlevent respirant l'air frais... Il tombe sur le nouveau tract, il rentre au bateau de la feuillerêve du cap s'installant à table avec une bonne chope de rhum et commence à lire le tract... Plus il le lis et plus il fait des signe affirmatif de la tête bien d'accord avec ce qu'il y a d'écrit dessus.