En geôles

Sans lumière naturelle, le Duc Logän van Deversön ne pouvait jamais vraiment savoir quelle heure il était, enfermé dans sa cage dans un sous-sol aménagé pour. Il avait été privé de ses trois montres à goussets, tout comme le reste de son matériel d'ailleurs. Ce qui lui manquait le plus, c'était sa canne, sa si magnifique canne auquel il tenait tant. Il avait été inculpé le samedi 04 pour complicité, le Caporal Husserl lui avait assuré qu'il aurait la peine minimale, soit quatre jours, alors il devrait sortir aujourd'hui. Mais ce n'était pas le cas, car on lui avait annoncé que "pour l'exemple" il passerait 10 jours de plus dans les geôles de la caserne.
Pour l'exemple, répétait-il souvent à voix haute, pour l'exemple. Il était Duc et avait servit avec loyautés le royaume pendant deux ans en gérant l'Île d'Anstreed, et de retour à Hurlevent, il plongeait d'une peine amplifiée de 240% pour l'exemple, ha ! Pour pouvoir concourir à la fonction de Chancelier il avait du apprendre les lois de Hurlevent, particulièrement ce Code des délits et des crimes, aussi incomplet soit-il. L'exemple n'y était pas cité, le pouvoir d'un Major à augmenter une peine de 10 jours sur une base de 4 n'était pas évoqué.

S'il avait bien supporté les premiers jours, le Duc commençait à perdre patience, les repas chaud et l'eau de le comblaient pas, il avait besoin de bouger, et plus il tirait sur ses chaînes accrochées au mur, plus il réalisait au combien il était privé de sa liberté, et il ne le supportait pas. Il ne le supporterait pas dix jours de plus, parce qu'il n'avait rien à faire là.

Craignant la nomination du Duc au poste de Chancelier de Hurlevent, Septimus avait d'ores et déjà rassemblé une série de documents issus de l'ISC et du Salon pouvant compromettre cette entreprise.

L'annonce de sa culpabilité avérée pour d'autres crimes aura eu l'effet espéré, le risque de se compromettre en moins. Le prêtre n'avait plus qu'à ranger précieusement ses documents et attendre la suite de cette affaire.

Finalement, se dit-il, le Duc avait été bien mal inspiré de ne pas suivre ses conseils et méritait amplement ses tourments.
Pour sûr, il ne le plaindrait pas.

Le Duc n'était ce soir non pas occupé à tirer sur ces chaînes mais plutôt à jouer aux cartes. Parfois il faisait un solitaire, parfois il faisait un château de carte, bref même s'il s’ennuyait profondément il n'en laissait pas l'air.
Tout les prisonniers voulaient son paquet de cartes, mais personne ne l'aurait, c'était peut être le seul privilège auquel il avait le droit, pour être duc, pour collaborer avec les enquêteurs et pour sa bonne conduite, avoir un paquet de cartes à jouer. Même s'il préférerait sans aucun doute avoir un plateau d'échec.

Mais plutôt que le divertissement, ce qui manquait à Logän van Deversön dans sa cellule c'était un cigare et du bon vin. Sans oublier le fait qu'on ne le laissait pas se raser, et qu'il n'avait rien pour se changer.
Logän se dit simplement : « Moi chancelier, les conditions de vie des détenus seraient tout de même plus correctes. ». Qui plus est, nous n'étions même pas dans une prison, seulement dans les geôles d'une caserne. Il n'osait imaginer ce que devait être la Prison de Hurlevent.

Le souhait du Duc avait été exaucé par le Commandant de la Garde, un échiquier était parvenu jusqu'à sa cellule, et il c'était dés alors mis à délaisser son paquet de cartes à jouer.
Mais malgré le profond divertissement que lui offrait le plateau d'échec, le temps était long. Logän van Deversön avait reprit pour habitude de tirer parfois sur ses chaînes en espérant qu'elles s'allongent mystérieusement ou bien qu'elles cèdent. Quant il n'avait plus le coeur à jouer il écoutait les conversations des prisonniers, il assumait tranquillement de se faire insulter de nobles pourri et corrompu, ou alors seulement il se massait sa jambe qui le faisait terriblement souffrir.

Le temps était son fléau, et pourtant quatorze jour pour être accusé de tentative de meurtre, c'est vraiment très dérisoire.
Bientôt tout ceci serait fini, mais en attendant il devait encore faire de nombreuses parties d'échec.