Au fil des jours chez Fossard.
2 participants
Page 1 sur 3
Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Au fil des jours chez Fossard.
Sur le domaine Fossard vont et viennent une multitude de personnalités : des employés, des partenaires occasionnels ou réguliers, des prospects et des clients, des fournisseurs, des prétendants, des membres de l’Autorité Royale ou de la Chancellerie, des Gardes, des voyous, des curieux, des voisins, des promeneurs et même de vulgaires jaloux.
Tout ce petit monde alimente de rumeurs et ragots divers l’ensemble du domaine. Ces petites histoires, qui peuvent avoir été entendues directement ou rapportées par les uns et les autres, font parfois la joie des commères...
Tout ce petit monde alimente de rumeurs et ragots divers l’ensemble du domaine. Ces petites histoires, qui peuvent avoir été entendues directement ou rapportées par les uns et les autres, font parfois la joie des commères...
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais... j’aurais dû faire quoi alors ? ». Lysange se trémoussait en tirant son gilet, mal à l’aise face à la rousse pleine d’assurance qui partageait le travail de Tom. Mise au courant de ses déboires au marché et ayant entendu Tom se vanter d’avoir tenté sa chance auprès de la jeune femme, Barbara s’enquérait de sa version des faits.
« Il vous plaît ? »
« Euh... un peu, mais bon... c’est surtout qu’à un moment on s’est retrouvés en ... situation délicate et.... »
Le visage de la rousse se durcit et elle s’approcha pour prendre les mains de Lysange.« Il vous a blessée ? forcée ? »Lysange sursauta. « Mais non ! Non, il a juste essayé de ... de m’embrasser. Je dis pas que…. et puis de toute façon il était bourré ! Mais moi ça m’a ... ça m’a troublée et .... et depuis j’arrête pas d’y penser et... et je sais pas si... ».
Barbara esquissa un sourire énigmatique.« C’est vrai qu’il a du charme... et un certain potentiel ».
Lysange tiqua, continuant.« Oui mais... je crois que lui il veut juste... vous savez... me culbuter et puis c’est tout. Et moi je.... ben... j’en aurais bien envie aussi, je dis pas, mais... enfin pas comme ça, et surtout pas que ça, quoi. Vous comprenez ? Vous me trouvez cruche ?».
Barbara secoua la tête, le sourire toujours aussi énigmatique.« L’amour est un jeu Lysange. Un jeu de pouvoir, ou plutôt d’échange de pouvoirs. Mais il doit être librement consenti de part et d’autre, et donc compris et accepté pour ce qu’il est. Cela ne se construit pas en quelques heures. Vos hésitations sont donc légitimes. Mais pour y arriver, il ne faut pas confondre désir d’un moment et le Désir d’être soi-même.»
Lysange observa la femme qui lui parlait comme jamais personne ne lui avait parlé. Un monde inconnu s’ouvrait derrière ses paroles. «Euh... je comprends pas. Un jeu ? Comment ça ? Aimer, c’est pas sérieux alors ? C’est tout faux ? Vous pensez que j’ai des rêves de gamine ? Que je suis naïve ? ridicule ?».
Barbara secoua dans un rire léger son beau visage au teint clair. « Pas du tout Lysange, bien au contraire. L’amour est la chose la plus sérieuse au monde. C’est même la seule façon de trouver un sens à la vie, croyez-moi. C’est la clé pour savoir qui on est, car sans vraie rencontre avec un autre à aimer, jamais vous ne découvrirez qui vous êtes. Voilà pourquoi il est impératif qu’il soit compris comme un jeu et accepté comme tel. Vous saisissez ? ».
La jeune femme secouait la tête, incrédule devant son aînée. « Euh…je suis pas sûre… J’ai pas envie de jouer à faire semblant d’aimer, moi, je veux aimer pour de vrai. Je vois bien que ça m’aide pas à trouver un gars qui pense comme moi, mais j’arrive pas à voir les choses autrement. Alors me dire que c’est un jeu…. non, ça…. je saisis pas».
Barbara sauta souplement sur la barrière qui bordait le champ de potirons, s’installa au mieux sur le rondin et incita Lysange à faire de même. « Quand je dis que c’est un jeu, cela signifie qu’il y a des règles à respecter, pour que la relation reste équilibrée et bénéfique aux deux. Ces règles sont édictées, même tacitement, afin que chacun puisse s’épanouir dans un cadre construit pour durer, mais dans le respect de la personnalité et des envies de l’un et de l’autre. Il faut que cela devienne un projet commun. »
Lysange se redressa, emportée d’enthousiasme.« Aaaaah ouiii… je comprends !!! Vous parlez du mariage !!! C’est ça ? »
Le rire de Barbara fit se retourner les réfugiés qui travaillaient non loin.«Pas du tout Lysange ! Je vous parle d’un contrat tacite, entre deux personnes consentantes, qui décident entre elles de ce qui va leur permettre de s’épanouir au mieux. Il faut de la confiance, du respect, la capacité de se regarder faire, d’écouter l’autre, de partager ce qu’on ressent. C’est un jeu, oui, mais justement, dans tout jeu il y a des règles, qu’il est important de préciser et de respecter, sinon on ne joue pas le même jeu, et tout va mal. »
Lysange écoutait avec une attention accrue.« Alors…. quand il a essayé de m’embrasser, pour lui c’était un jeu… mais comme ce n’était pas le même pour moi, ça pouvait pas coller ? C’est ça ? ».
Barbara acquiesça dans un sourire.« C’est un peu plus compliqué que ça, mais oui, par exemple ». Lysange opina, toute à sa réflexion.« Mais alors…. comment on peut savoir que c’est le bon, parce que c’est ça mon problème à moi. J’ai pas envie de m’embarquer dans un truc pour un soir en me disant que peut-être ça collera ou peut-être ça collera pas. Je peux avoir envie, je dis pas, mais ça m’intéresse pas, disons. Surtout si en plus je vais le revoir après. Je vais pas savoir faire ça sans m’impliquer avec mon coeur, moi, je sais pas faire ça. Vous, de ce que vous dites, vous y mettez pas d’amour, hein, c’est ça ? ».
La rousse éclata de nouveau d’un rire franc.« Bien au contraire. Mais j’en ai peut-être une vision très particulière. Je suis…. très exigeante ».
Lysange l’observait du coin de l’oeil, perplexe.« Vous êtes du genre commandeuse, c’est ça ? ». Barbara s’amusait des questions de la jeune femme.« Ce n’est pas le mot que j’emploierais, mais disons que…. j’aime un jeu dont les règles peuvent être strictes, voire même très strictes, mais seulement de temps en temps. Et elles doivent être régulièrement discutées voire même potentiellement inversées, ce qui demande d’avoir un partenaire particulièrement …. joueur, ce qui ne se rencontre pas facilement. »
Lysange dodelinait de la tête, de bien curieuses images en tête. « Ah… je vois… enfin je crois… et c’est pour ça que vous parlez de potentiel ? ».
Barbara sauta à terre tout en se recoiffant, un nouveau sourire énigmatique aux lèvres.« Je ne le connais pas suffisamment pour le dire. Et puis….. ». Elle se défaisait d’une poussière imaginaire, dans un double geste coordonné de mains frottant ses fesses, qui trahissait, pensa Lysange, un trouble qui ne voulait pas se dire.« … vous savez…. tous les hommes ont ce désir.. ou ce potentiel en eux, même si la plupart sont incapables de l’admettre, faute d’intelligence ou d’éducation. Toute la difficulté est là, cerner le potentiel et le rendre acceptable. C’est un chemin difficile, mais c’est le seul qui vaille la peine d’être pratiqué, selon moi ».
Elle adressa à Lysange un sourire volontaire et franc qui tranchait avec celui qui se dessinait dans ses silences. « On en reparlera si vous le souhaitez ! Restez vous-même. Et pour y arriver, continuez d’écouter votre coeur Lysange, il ne vous trompera pas. Au plaisir ! »
Lysange resta un long moment sur la barrière. La lumière avait largement décliné avant qu’elle ne se décide à retourner dans le bureau pour reprendre le travail. Ce discours était bien éloigné des conseils simples et bruts de Benjamin, mais curieusement, il résonnait en elle comme un chant ancien qui remontait des origines du monde.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Mais quelle idée !!! Quelle idée d’avoir accepté cette réunion de soit disant réconciliation !!! Quelle idée d’en avoir caché la tenue à l’intendant qui n’était pas prêt à rencontrer ces nains félons ! Et quelle idée d’avoir demandé à Tom de l’accompagner pour la protéger des possibles mécréants qu’elle risquait de rencontrer sur la route de Comté de l’Or.
Car c’était un piège ! Un vulgaire piège dans lequel elle était tombée, entraînant à sa suite le pauvre fermier qui avait été sauvagement frappé par des nains en rage, incités à la haine par leur soit disant « Vénérable ». En fait, les mécréants n’étaient pas sur le chemin mais dans la petite maison finalement mise à sac !
Choquée par la violence des faits qu’elle avait reportés au Capitaine Milburn, la collaboratrice de Mr. Pignac avait été escortée par deux gardes jusqu’au domaine Fossard afin de lui assurer une protection qui s’avérait de toute évidence nécessaire. Inquiète de son retard, elle s’était dépêchée de revenir pour le client qui venait voir les chevaux proposés à la vente, pensant trouver l’intendant et se préparant à devoir s’expliquer. Mais le client attendait seul.
« Vous êtes certain que Mr Pignac n’est pas dans les parages ? ». Lysange était agitée, encore sous le choc de l’attaque des nains lors de la réunion, inquiète pour Tom laissé à l’infirmerie du Guet Urbain, coupable à ses propres yeux d’une suite d’erreurs impardonnables, profondément déçue d’elle même.
Un verre de rhum, vite bu, lui avait donné le courage de s’expliquer, mais ses paroles virevoltantes n’avaient pas aidé à rassurer le client qui s’était dit choqué par l’histoire qu’elle lui narrait. Il avait promis de reprendre contact mais Lysange ne l’avait cru qu’à moitié, le laissant repartir sans même songer à reprendre rendez-vous.
Une erreur de plus... Une soirée déplorable.... tout ça à cause de ces horribles nains... menteurs... imbus d’eux-mêmes.... violents... fourbes... de dangereuses brutes que jamais plus elle ne voulait voir, même de loin. Rien que l’idée de leur existence....
« Et bien Lysange ! Votre client est déjà parti ? J’étais aux écuries, pensant vous voir et.... ».
Incapable de regarder l’intendant dans les yeux, Lysange rangeait les catalogues avec une fébrilité qui ne l’empêchait pas de percevoir les traces de la maladie sur les traits du vieil homme. Il s’était encore endormi, mais il ne l’avouerait jamais... elle le regarda, si faible, si vulnérable.... heureusement qu’elle ne lui avait rien dit, ils l’auraient tué...mais oui !!!! .... c’était tout à coup évident... cette réunion avait pour but de le tuer !!!
Elle lâcha les catalogues et vint brusquement sans réfléchir lui prendre les mains.
« Ooooohhhh !!!!! Monsieur Pignac !!!! Je suis désolée !!!! Tellement désolée !!! Si vous saviez comme je regrette !!!!! »
L’intendant regardait ses mains prises dans celles de Lysange, atteint d’une perplexité grandissante. Il les dégagea comme si toute cette effusion d’émotions le dégoûtait.
« Mais qu’est-ce qui vous prend ? Reprenez vous mon petit ! Vous êtes désolée, j’entends bien, mais de quoi ? Vous avez fait fuir le client ? ».
Lysange s’était reculée, se frottant le bras droit, de nouveau fébrile, en proie à un déluge de remords. L’intendant l’observait en silence.
« J’attends vos explications Lysange... Et qu’est-ce que vous avez au bras ? On vous a de nouveau violentée ? Ce n’est tout de même pas la fuite d’un client qui vous met dans cet état ? ».
Comment lui expliquer l’inexplicable ? Lysange se redressa, happa l’air, prête à affronter la colère de l’intendant lorsqu’on frappa à la porte. Un garde se présentait au domaine pour avertir du déplacement sous bonne escorte de Tom, de l’infirmerie de la caserne au dispensaire de la Cathédrale, afin qu’il puisse recevoir des soins indispensables à son état, jugé grave.
L’intendant remercia sans rien y comprendre et se tourna brusquement vers Lysange dès que la porte fut refermée. « Mais vous allez m’expliquer ce qui se passe ici nom de nom ?!? Pourquoi vous demande-t-il si vous allez mieux ? Qu’est-ce que vous me cachez ? Lysange !!!! Parlez !!! Ne restez pas ainsi comme une jouvencelle qui vient de voir le loup !!! Vous ... argh !!! ».
Monsieur Pignac tenta de se rattraper au dossier de la chaise mais s’effondra sur lui-même, emportant avec lui tous les catalogues posés sur le bureau.
« Oooohhhhh !!!! Monsieur Pignac !!!! ». Elle n’avait même pas eu le temps de s’expliquer, et le voilà de nouveau en train de faire une attaque ! Mais tous les dieux étaient contre elle, à n’en pas douter ! Tout en aidant le vieil homme à se relever Lysange essayait de calmer l’ébullition qui grandissait en elle. Cela ne pouvait durer, il fallait prévenir le grand patron, l’avertir que son intendant déclinait, que les nains avaient menacé de le tuer, qu’elle craignait pour sa vie, que...
« Tout va bien ? ». Le forgeron avait dû frapper, suite aux cris, mais Lysange ne l’avait pas entendu entrer. Elle sursauta au son de sa voix. « Oh ! Nealson !!! Il faut m’aider ! Il faut emmener Monsieur Pignac au dispensaire ! Vite ! Il va me refaire une attaque là !!! ».[/color][/i][/color]
D’un regard le forgeron jaugea la situation. Ce n’était pas le genre d’homme à se perdre en explications. De toute évidence la jeune femme avait l’air agitée mais indemne de blessures graves. Par contre Pignac était manifestement bien mal en point et requérait une intervention d’urgence. Recroquevillé sur le sol il geignait tout en essayant de se relever, assommé de douleur.
« Va me chercher mon cheval, je l’emmène. Prends quelques unes de ses affaires et rattrape moi ensuite pour t’expliquer avec les soigneurs. Moi je le dépose mais ensuite je reviens. J’ai du travail qui m’attend ».
Le blond musclé emporta l’intendant dans ses bras, sans l’ombre d’une difficulté. Lysange éprouva une forme de contentement qui la désarçonna quelques secondes. Décidément, la présence d’un homme fort et rassurant ne la laissait pas de marbre. Elle se morigéna et se mit rapidement en quête de vêtements propres.
Il ne lui fallut que quelques minutes pour faire un sac pour l’intendant, un quart d’heure plus tard elle était au chevet de Tom à qui elle racontait toute l’histoire.
« Et t’as pas eu le temps de lui expliquer alors ?"
« Ben non… il a gueulé et…. oh là là…. tout ça c’est de ma faute… j’aurais dû y aller seule… ». Elle le regardait, hésitante.« T’es sûr que ça ira ? Ils t’ont bien amoché tout de même… ».« C’est bon, t’inquiète. Je préfère avoir pris pour lui. Parce que là, le vieux, s’il avait été là, c’est pas pour des soins qu’on l’aurait emmené ici, tu vois, mais pour la morgue. » Il ricanait mais le coeur n’y était qu’à moitié. Toute cette affaire avait pris bien mauvaise tournure.
C’est bien plus tard dans la nuit que les soigneurs vinrent chercher la jeune femme pour l’emmener au chevet de l’intendant qui « voulait lui parler ». Un dernier regard angoissé à Tom et Lysange, profondément émue, suivit le prêtre en priant tous les dieux d’Azeroth ne pas s’effondrer en larmes devant son patron…
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
«Ah ouais ?!?! Alors comme ça t’es comme qui dirait ma chef maint’nant ? Tu vas m’demander d’te protéger dans ton lit aussi ? Tu crois pas qu’ça d’vient indispensable ? ».
Comme convenu Lysange était revenue voir Tom au dispensaire de bon matin, des croissants chauds et des nouvelles toutes fraîches en guise de petit déjeuner.
« Tssss.... T’es vraiment impossible, tu sais ». Lysange grignotait un croissant avec un sourire vaguement attendri. « Ça se voit trop que tu forces le trait. Tu sais ce que j’crois, moi ? J’te plais et t’as trop peur que j’te jette, alors tu sur-joues le mec lourd ». Il éclata d’un rire gras, elle enfonça le clou. « Remarque... je dois dire que t’y arrives plutôt bien. Dans le genre impossible, t’es plutôt doué ».
« Mouais... tu peux t’les garder tes explications à la con, c’pas mon truc... ».Il la regardait d’un air que la jeune femme perçu comme suffisamment inquiet pour devenir mauvais. Elle opina et lui adressa un sourire de connivence, recréant immédiatement cette complicité bon enfant qui les avait liés jusque là. Il lâcha. « Donc le vieux t’a nommée chef à sa place ? En pleine nuit ? Comme ça ? Sur un coup d’tête ? Il a perdu la boule ou quoi ? ».
Lysange ramassait les miettes disséminées sur le lit du fermier dont le visage toujours aussi amoché rappelait la violence de la veille. « Ordre du personnel soignant. Interdiction de reprendre le travail sous peine de passer l’arme à gauche. Il n’avait pas le choix en fait. Du coup il va écrire aux Autorités pour les prévenir, me voilà calife à la place du calife ». La prise de conscience de ce que cela représentait comme responsabilités pointait nettement dans son rire.
« Mmh... Et ça va durer combien d’temps ? ». Tendu, Tom suivait des yeux les faits et gestes de la jeune femme, la main dans la barbe, sous le coup d’une réflexion que Lysange imaginait intense et perplexe.
« Bah... en fait il va prévenir Fossard et j’imagine que ma promotion prendra fin à la minute où le Grand Chef mettra le pied sur ses terres ... ».Elle haussa une épaule en lui adressant un clin d’œil. « T’inquiète, j’aurais pas le temps de te mener la vie dure, juste t’obliger à m’accompagner en ville et donc te laver et changer d’fringues plus d’une fois par semaine ! ». Son rire emplit la salle.
Tom se redressa dans le lit en maugréant. « Non mais ça va pas ?!?! Tu comptes quand même pas sur moi pour laisser mon champ et t’accompagner ?!?! C’pas mon boulot ça !!! Une fois pour t’aider, ça va, mais là c’est terminé ! On a vu ce que ça a donné ! J’m’en vais lui dire c’que j’en pense moi, à Marcel. Hors de question !!! Va lui falloir trouver un autre pigeon pour .... pour .... Oh vindiou !!!! Ça y est t’as réussi à me mettre en rogne ! ».
D’un bond il sortit du lit en envoyant valser draps, couvertures, sachet contenant les miettes, tasse vide et petite cuillère. «File moi mes fringues, elles doivent être par là. Je r’tourne au boulot, ça va bien ! ».
Toujours assise au bout du lit en vrac, Lysange restait interdite.« Mais… ?!? ».
Le fermier virait tout ce qui se trouvait à sa portée, en quête de son pantalon. « Y’ pas de mais qui tienne ! Y’a plus de mais ! Vas lui dire à Marcel, moi je suis fermier, j’sui pas son larbin et encore moins l’tien ! C’était pas dans le contrat, ça ! ».
Le bruit attira une soignante qui passait non loin. Son arrivée dans la chambre calma Tom plus vite que n’aurait su le faire Lysange. Tandis que le fermier réintégrait son lit en maugréant, Lysange s’en retourna voir l’intendant afin de prendre ses ordres et conseils.
Même si elle n’avait rien demandé, il était hors de question que le grand patron ait le moindre reproche à lui faire. Bien sur, tout cela l’inquiétait, car elle était parfaitement consciente du fardeau que cette mission représentait. Mais c’était l’occasion de montrer tout son potentiel, et de transformer un événement dramatique en chance. Une nouvelle vie commençait pour elle, et comme à son habitude, elle n’en voyait que le positif.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Je vous assure, pendant quelques secondes, je me suis vraiment vue lui jeter ma démission à la gueul…. ». Lysange piqua un fard en détournant le regard. « Pardon... c’est pas du tout professionnel, mais là vraiment, il m’a chauffée.... y’a des fois je me demande vraiment ce qui me retient de chercher du travail ailleurs .... »
Barbara la regardait sans jugement, écoutant simplement.
« Vous savez.... si vraiment vous pensez que ce travail vous fait plus de mal que de bien, vous devez démissionner. Rien ni personne ne peut vous obliger à subir ce genre de traitement ».
« Mmh.... disons que... le travail me plait... c’est varié et je rencontre des tas de gens intéressants.. et puis il y a les autres employés… vous, Nealson... Tom... mais lui... lui... là …. là c’est pire qu’avant... ».
Les deux femmes étaient assises sur les marches de la grande bâtisse qui servait de maison commune aux employés.
Barbara pressa gentiment la main de Lysange. « Vraiment ? Pire qu’avant ? ».
La brunette était au bord des larmes, comme épuisée. « Oui… oui parce que c’est comme s’il regrettait d’avoir écrit cette lettre, comme s’il voulait me le faire payer... c’est de toute même pas de ma faute ! Et de toute façon il est toujours là à décider ! En plus il me dit pas tout, et hier soir je suis encore passée pour une idiote parce que j’étais pas au courant d’un truc avec le grand patron et... ».
« Chuuuuuut.... Allez.... Respirez... Respirez doucement... ça va passer, ne vous mettez pas dans des états pareils pour lui. Il n’en vaut pas la peine... Parlez moi plutôt de vous ! » Barbara avait gentiment pris Lysange par l’épaule, cherchant à la rassurer.
« Bah ! Y’a rien à dire. J’ai même plus envie de sortir, et de toute façon, je vais encore moins pouvoir qu’avant, vu que je peux plus aller et venir tranquillement. Avec cette affaire j’ai tout perdu moi ! Ma liberté, le peu de temps que j’avais pour moi et même son respect !! »
«Allez.... je suis bien sûre qu’il vous respecte, c’est tout de même bien vous qu’il a nommée comme responsable auprès de la Chancellerie, non ? Il ne l’aurait pas fait s’il n’avait pas confiance en vous ».
« Mmh.... oui.... mais.... oui... ‘Fin quand même... j’ai l’impression que ça va mal finir tout ça.... ».
Barbara pressa l’épaule de Lysange avec inquiétude. «Comment ça, mal finir ? Vous allez nous quitter alors ? Vous n’allez pas faire une bêtise n’est ce pas ?!? ».
« Naaaan ! Nan pas moi !!!! C’est lui, il est pire qu’avant à toujours ronchonner et s’inquiéter... et il veut pas vraiment lâcher prise alors qu’il devrait... moi je m’attends presque à ce qu’il me claque dans les bras en pestant contre moi, voyez... je peux pas le laisser tout seul pour gérer le domaine justement parce que les affaires reprennent bien…. et en même temps... je….je… j’en viendrais presque à espérer que.... ».
Lysange regarda Barbara avec effarement, le regard halluciné. Son visage vira au cramoisi et sa main vint éteindre un juron.
D’un bond elle fut sur pieds. «Bon ! J’ai du travail qui m’attend !!! À plus tard ! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais c’est grâce à vous alors ? Ou bien c’est l’arrivée prévue du traqueur ? Parce que franchement, là c’est le jour et la nuit.... ». C’était la pause et Lysange avait apporté une tasse de café à Barbara qui travaillait au tri des pommes en vue de la fabrication du désormais fameux « jus de pommes maison » des Établissements Fossard.« Oh non, ce n’est pas grâce à moi. Je pense plutôt que ce sont les tartelettes offertes par la dame qui est passée hier dans l’après-midi, je lui ai indiqué le chemin jusque chez lui».
La toute nouvelle intendante sursauta. « Comment ça des tartelettes ? Monsieur Pignac à accepté quelque chose de quelqu’un ?!?! D’une femme en plus ?!? ». Barbara hocha la tête, amusée. « Mmh... Une petite dame qui habite le quartier, toute douce, elle s’est présentée avec ses gâteaux bien emballés et il n’a pas osé refuser, apparemment, puisque je l’ai vue repasser au retour sans sa boîte de gâteaux et souriante comme une jeune fille qui vient de rencontrer le prince charmant».
Lysange frappa du plat de la main sur sa cuisse. « Saperlipopette !!!! Ah ben ça, ça m’épate !!!! Vrai de vrai, j’aurais pas constaté un changement étonnant dans son attitude, hier soir, je vous croirais pas…. Et il l’a reçue chez lui alors ? Il l’a laissée entrer chez lui.... pénétrer son intimité... Non .... ça c’est pas possible... ».
Barbara éclata de rire à la vue d’une Lysange totalement hallucinée. « Ah ça je ne peux pas dire ! Mais vu le temps qu’elle y est restée, ça m’étonnerait qu’ils aient eu le temps de prendre le thé... ou... autre chose. Ce qui est sûr c’est qu’elle n’avait plus ses gâteaux quand elle est repartie. »
Lysange n’en revenait toujours pas. « Ah ben ... moi qui croyait qu’il était juste trop fatigué pour me houspiller comme d’habitude... mais en même temps je voyais bien qu’il y avait autre chose... comme une forme de gentillesse qui ressortait...plus posé aussi... incroyable... oui, incroyable... ».
Barbara passa sa tasse vide dans l’eau fraîche d’un seau dont elle préleva de quoi se désaltérer, toujours amusée par la réaction de Lysange. « Donc ça va mieux entre vous ? Vous n’êtes plus au trente sixième dessous ? Vous n’envisagez plus de nous quitter ? ».
Lysange avait l’air de revivre en pensées le déroulement de la soirée. « Bah... c’est sûr que je le préfère comme ça hein... C’est pas non plus le grand amour, mais au moins il n’est pas sans arrêt en train de me tirer dans les pattes ou de me pousser à bout ... Et puis y’a le traqueur qui va arriver, ça va pas mal me décharger.... et... Oh ! Vous savez pas qui j’ai vu, tard hier soir ? ».
La rousse repris le travail tout en incitant d’un sourire la jeune femme à poursuivre. « Non... mais mon petit doigt me dit que je ne vais pas tarder à savoir ».
Lysange s’exclama. « Jacob ! Enfin non, Junior en fait, il a de nouveau repris son surnom. Ce sale gamin de Junior !! ».
Barbara s’amusait de tout cet enthousiasme, attendant la suite. « C’est un ami.... enfin... si, je suppose que c’est toujours un ami.... c’était même mon meilleur ami, il y a de ça un an passé... pis y’a eu Joe... et j’ai un peu lâché Junior... pis ensuite je l’ai plus revu... il est parti en voyage... et là il est revenu ...».
Lysange semblait hésitante quant à l’impact de ce retour. Barbara lui adressa un sourire énigmatique. « Et ? On dirait que cela vous chamboule un peu ? Un ami ou... ? ». Lysange la regarda sans comprendre de longues secondes. « Hein ? Quoi ? Ah !!! Mais non ! Non y’a jamais rien eu d’autre hein !!! Et y’aura jamais rien. C’est juste un ami ! Il le sait en plus !! C’est pour ça que.... ».
Lysange s’arrêta net en rougissant. Barbara déposait sur claies les pommes qui devaient encore mûrir. « Que ? ».
La jeune intendante secoua la tête. « Ben.. je viens de me rendre compte que c’est moi qui lui ai proposé de me ramener chez moi... comme dans l’temps... alors que je l’fais jamais, pour pas donner de faux espoirs au gars, qu’il aille pas s’imaginer qu’il pourra aller plus loin que le seuil de ma maison... Oh là là... j’espère qu’il va pas rêver en avoir plus... ».
N’y tenant plus Barbara éclata à nouveau de rire. « S’il vous connaît aussi bien que vous le dites, ça m’étonnerait ! ».
Lysange ne sût que répondre, désarçonnée par cette joyeuse franchise.
« La vache ! » avait dit Junior en essayant de la prendre dans ses bras la veille « t’es devenue drôlement farouche dis donc ! ». Ce à quoi elle avait rétorqué « J’l’ai toujours été, t’as juste oublié », rajoutant après quelques secondes « Je m’suis peut-être un peu fermée, remarque... ».
Ce soir là, c’est une tête pleine de questions qu’elle posa sur l’oreiller. Se pourrait-il qu’elle se soit vraiment durcie au contact du vieux Pignac ? Et si c’était pour cette raison qu’elle n’avait même plus envie de sortir ? Et si elle n’était même plus capable de percevoir cet amour dont elle rêvait ? Et si elle avait définitivement pris le chemin pour finir vieille fille ? Et si.... ? Et si ... ?
« Avec tous tes si, tu pourras bientôt mettre tout l’port en bouteille ! » aurait dit Benjamin en lui donnant une bourrade. «Et arrête donc de penser comme ça, tu m’fatigues ! File moi plutôt la bouteille de rhum !».
La toute nouvelle intendante sursauta. « Comment ça des tartelettes ? Monsieur Pignac à accepté quelque chose de quelqu’un ?!?! D’une femme en plus ?!? ». Barbara hocha la tête, amusée. « Mmh... Une petite dame qui habite le quartier, toute douce, elle s’est présentée avec ses gâteaux bien emballés et il n’a pas osé refuser, apparemment, puisque je l’ai vue repasser au retour sans sa boîte de gâteaux et souriante comme une jeune fille qui vient de rencontrer le prince charmant».
Lysange frappa du plat de la main sur sa cuisse. « Saperlipopette !!!! Ah ben ça, ça m’épate !!!! Vrai de vrai, j’aurais pas constaté un changement étonnant dans son attitude, hier soir, je vous croirais pas…. Et il l’a reçue chez lui alors ? Il l’a laissée entrer chez lui.... pénétrer son intimité... Non .... ça c’est pas possible... ».
Barbara éclata de rire à la vue d’une Lysange totalement hallucinée. « Ah ça je ne peux pas dire ! Mais vu le temps qu’elle y est restée, ça m’étonnerait qu’ils aient eu le temps de prendre le thé... ou... autre chose. Ce qui est sûr c’est qu’elle n’avait plus ses gâteaux quand elle est repartie. »
Lysange n’en revenait toujours pas. « Ah ben ... moi qui croyait qu’il était juste trop fatigué pour me houspiller comme d’habitude... mais en même temps je voyais bien qu’il y avait autre chose... comme une forme de gentillesse qui ressortait...plus posé aussi... incroyable... oui, incroyable... ».
Barbara passa sa tasse vide dans l’eau fraîche d’un seau dont elle préleva de quoi se désaltérer, toujours amusée par la réaction de Lysange. « Donc ça va mieux entre vous ? Vous n’êtes plus au trente sixième dessous ? Vous n’envisagez plus de nous quitter ? ».
Lysange avait l’air de revivre en pensées le déroulement de la soirée. « Bah... c’est sûr que je le préfère comme ça hein... C’est pas non plus le grand amour, mais au moins il n’est pas sans arrêt en train de me tirer dans les pattes ou de me pousser à bout ... Et puis y’a le traqueur qui va arriver, ça va pas mal me décharger.... et... Oh ! Vous savez pas qui j’ai vu, tard hier soir ? ».
La rousse repris le travail tout en incitant d’un sourire la jeune femme à poursuivre. « Non... mais mon petit doigt me dit que je ne vais pas tarder à savoir ».
Lysange s’exclama. « Jacob ! Enfin non, Junior en fait, il a de nouveau repris son surnom. Ce sale gamin de Junior !! ».
Barbara s’amusait de tout cet enthousiasme, attendant la suite. « C’est un ami.... enfin... si, je suppose que c’est toujours un ami.... c’était même mon meilleur ami, il y a de ça un an passé... pis y’a eu Joe... et j’ai un peu lâché Junior... pis ensuite je l’ai plus revu... il est parti en voyage... et là il est revenu ...».
Lysange semblait hésitante quant à l’impact de ce retour. Barbara lui adressa un sourire énigmatique. « Et ? On dirait que cela vous chamboule un peu ? Un ami ou... ? ». Lysange la regarda sans comprendre de longues secondes. « Hein ? Quoi ? Ah !!! Mais non ! Non y’a jamais rien eu d’autre hein !!! Et y’aura jamais rien. C’est juste un ami ! Il le sait en plus !! C’est pour ça que.... ».
Lysange s’arrêta net en rougissant. Barbara déposait sur claies les pommes qui devaient encore mûrir. « Que ? ».
La jeune intendante secoua la tête. « Ben.. je viens de me rendre compte que c’est moi qui lui ai proposé de me ramener chez moi... comme dans l’temps... alors que je l’fais jamais, pour pas donner de faux espoirs au gars, qu’il aille pas s’imaginer qu’il pourra aller plus loin que le seuil de ma maison... Oh là là... j’espère qu’il va pas rêver en avoir plus... ».
N’y tenant plus Barbara éclata à nouveau de rire. « S’il vous connaît aussi bien que vous le dites, ça m’étonnerait ! ».
Lysange ne sût que répondre, désarçonnée par cette joyeuse franchise.
« La vache ! » avait dit Junior en essayant de la prendre dans ses bras la veille « t’es devenue drôlement farouche dis donc ! ». Ce à quoi elle avait rétorqué « J’l’ai toujours été, t’as juste oublié », rajoutant après quelques secondes « Je m’suis peut-être un peu fermée, remarque... ».
Ce soir là, c’est une tête pleine de questions qu’elle posa sur l’oreiller. Se pourrait-il qu’elle se soit vraiment durcie au contact du vieux Pignac ? Et si c’était pour cette raison qu’elle n’avait même plus envie de sortir ? Et si elle n’était même plus capable de percevoir cet amour dont elle rêvait ? Et si elle avait définitivement pris le chemin pour finir vieille fille ? Et si.... ? Et si ... ?
« Avec tous tes si, tu pourras bientôt mettre tout l’port en bouteille ! » aurait dit Benjamin en lui donnant une bourrade. «Et arrête donc de penser comme ça, tu m’fatigues ! File moi plutôt la bouteille de rhum !».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« J’ai vu Tom, ce matin, et il est question qu’il perde définitivement son oeil, si j’en crois le soignant que j’ai vu en sortant… mais je ne suis pas sûre qu’il en ait conscience. ». Lysange resta à l’arrêt, comme si l’information avait du mal à se frayer un chemin dans le fil de ses pensées. « Mais… il va pouvoir reprendre son travail ? Vous allez tout faire pour l’aider n’est ce pas ? ».Barbara hocha la tête en silence puis émit un soupir. «… J’espère qu’il acceptera mon aide… ».
Lysange dodelinait de la tête avec perplexité. « Mmh… c’est compliqué un homme, je trouve. Ils sont prêts à se battre contre n’importe qui pour n’importe quoi… et en même temps ils sont incapables d’affronter les vrais problèmes…. Ou alors.. j’les comprends pas.. c’possible aussi. »
Les deux femmes se retrouvaient sans même en avoir décidé, papotant à la pause, assises sur les marches de la maison commune, après le déjeuner.
« Je me demandais.... », Lysange hésitait, « .... est-ce que vous aussi ça vous fait quelque chose... là... », elle posa la main aux environs de son sternum, « ... quand vous voyez ... un homme ... enfin un homme qui... un homme fort, voyez... un homme qui saura vous protéger disons ... ».
Barbara l’écoutait, amusée mais bienveillante. Elle éclata de rire. « Oh, oh, oh !!!! Mais c’est le gardien qui vous a tourné la tête ma parole !!! C’est vrai qu’il est impressionnant dans son armure ! ».
Lysange s’empourpra. « Quoi ? Hein ? Mais non !!! Il m’a rien tourné du tout !!! Qu’est ce que vous allez imaginer ! De toute façon on a rien dit, je vois pas comment il m’aurait retournée ! C’est juste qu’il m’a accompagnée quand je suis allée à la Chope voir la patronne, et après il est resté à surveiller les alentours quand... quand... », elle hésitait de nouveau, partagée entre se livrer sans crainte et prendre garde à ne pas trahir le secret professionnel, « ..quand j’ai discuté avec l’évêque d’un truc que je dois voir avec Monsieur Pignac... un truc vraiment très très grave, et très important... désolée je peux pas en dire plus ».
Barbara secoua la tête en souriant. « Ne vous inquiétez pas, je ne vous demande pas de tout me raconter, vous avez un statut différent maintenant, vous devez garder certaines choses secrètes.... et donc... ce gardien, il vous attire, c’est ça ? ».
Lysange était toute à ses réflexions sur la réunion qu’elle avait promis d’organiser, elle sursauta. « Quoi ? Ted ? Oh ! Euh... je sais pas. Il ... il est trop secret, je le connais pas, moi, pas du tout. Mais... c’est de le voir là… à me protéger… ça vous fait ça à vous aussi, d’être à côté d’un homme et... de ressentir un... enfin... d’avoir envie de... ? ». La rousse esquissa un sourire, l’incitant à poursuivre.
Lysange souffla. « J’ai pas dit que j’avais envie de coucher avec lui, hein ! Me faites pas dire ce que j’ai pas dit ! ». Barbara tâchait de garder son sérieux, même si les questionnements de sa cadette égayaient sa journée. « Je ne me permettrais pas, Lysange, et puis de toute façon, cela ne me regarde pas. Mais vous savez... c’est tout naturel d’avoir du désir et d’en ressentir les effets dans son corps, surtout quand on a personne à aimer au quotidien… Je dirais même que c’est positif ».
La jeune intendante était perdue dans ses réflexions. « Mmh.. Vous en savez des choses… pourtant vous avez pas l’air si vieille… enfin j’veux dire….. plus vieille que moi, c’est sûr mais… ». Barbara esquissa son sourire énigmatique. «Pensez vous qu’il faille être vieux, pour savoir des choses… ou plutôt qu’il faille savoir apprendre de la vie, quel que soit l’âge ? ». La perplexité de la jeune femme grandissait. « Hein… ça veut dire quoi ça ? Je comprends pas… ».
Barbara se leva et frotta son pantalon dans un geste qui lui semblait familier. « Ce que je veux dire, Lysange, c’est que l’on peut être âgé et voir la vie comme si on avait encore vingt ans, ou au contraire n’avoir que vingt ans et agir comme un vieux crouton coincé dans sa bulle. C’est une question de personnalité, peut-être, je ne sais pas. Toujours est-il que l’âge véritable ne compte pas. Ce qui importe c’est d’appréhender la vie comme une découverte permanente, vous comprenez ? ».
Lysange se leva à son tour. « Je crois oui. Donc pour vous, c’est une bonne chose que je me questionne tout le temps comme ça ? C’est pas ce qu’aurait dit Benjy, j’peux vous dire…. ». Barbara éclata de rire gaiement. « J’aurais tant aimé le rencontrer, votre Benjamin ! Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Se questionner sur ses émotions et ses ressentis est une bonne chose, se tourmenter avec des idées de toutes sortes, par contre, là… ».
" Hein ? Quoi ? Mais c’est quoi la différence ? » Barbara s’en allait en riant. « On en reparlera ! Promis ! J’ai du travail qui m’attend ! A bientôt ! Et passez le bonjour à Ted ! ».
Lysange dodelinait de la tête avec perplexité. « Mmh… c’est compliqué un homme, je trouve. Ils sont prêts à se battre contre n’importe qui pour n’importe quoi… et en même temps ils sont incapables d’affronter les vrais problèmes…. Ou alors.. j’les comprends pas.. c’possible aussi. »
Les deux femmes se retrouvaient sans même en avoir décidé, papotant à la pause, assises sur les marches de la maison commune, après le déjeuner.
« Je me demandais.... », Lysange hésitait, « .... est-ce que vous aussi ça vous fait quelque chose... là... », elle posa la main aux environs de son sternum, « ... quand vous voyez ... un homme ... enfin un homme qui... un homme fort, voyez... un homme qui saura vous protéger disons ... ».
Barbara l’écoutait, amusée mais bienveillante. Elle éclata de rire. « Oh, oh, oh !!!! Mais c’est le gardien qui vous a tourné la tête ma parole !!! C’est vrai qu’il est impressionnant dans son armure ! ».
Lysange s’empourpra. « Quoi ? Hein ? Mais non !!! Il m’a rien tourné du tout !!! Qu’est ce que vous allez imaginer ! De toute façon on a rien dit, je vois pas comment il m’aurait retournée ! C’est juste qu’il m’a accompagnée quand je suis allée à la Chope voir la patronne, et après il est resté à surveiller les alentours quand... quand... », elle hésitait de nouveau, partagée entre se livrer sans crainte et prendre garde à ne pas trahir le secret professionnel, « ..quand j’ai discuté avec l’évêque d’un truc que je dois voir avec Monsieur Pignac... un truc vraiment très très grave, et très important... désolée je peux pas en dire plus ».
Barbara secoua la tête en souriant. « Ne vous inquiétez pas, je ne vous demande pas de tout me raconter, vous avez un statut différent maintenant, vous devez garder certaines choses secrètes.... et donc... ce gardien, il vous attire, c’est ça ? ».
Lysange était toute à ses réflexions sur la réunion qu’elle avait promis d’organiser, elle sursauta. « Quoi ? Ted ? Oh ! Euh... je sais pas. Il ... il est trop secret, je le connais pas, moi, pas du tout. Mais... c’est de le voir là… à me protéger… ça vous fait ça à vous aussi, d’être à côté d’un homme et... de ressentir un... enfin... d’avoir envie de... ? ». La rousse esquissa un sourire, l’incitant à poursuivre.
Lysange souffla. « J’ai pas dit que j’avais envie de coucher avec lui, hein ! Me faites pas dire ce que j’ai pas dit ! ». Barbara tâchait de garder son sérieux, même si les questionnements de sa cadette égayaient sa journée. « Je ne me permettrais pas, Lysange, et puis de toute façon, cela ne me regarde pas. Mais vous savez... c’est tout naturel d’avoir du désir et d’en ressentir les effets dans son corps, surtout quand on a personne à aimer au quotidien… Je dirais même que c’est positif ».
La jeune intendante était perdue dans ses réflexions. « Mmh.. Vous en savez des choses… pourtant vous avez pas l’air si vieille… enfin j’veux dire….. plus vieille que moi, c’est sûr mais… ». Barbara esquissa son sourire énigmatique. «Pensez vous qu’il faille être vieux, pour savoir des choses… ou plutôt qu’il faille savoir apprendre de la vie, quel que soit l’âge ? ». La perplexité de la jeune femme grandissait. « Hein… ça veut dire quoi ça ? Je comprends pas… ».
Barbara se leva et frotta son pantalon dans un geste qui lui semblait familier. « Ce que je veux dire, Lysange, c’est que l’on peut être âgé et voir la vie comme si on avait encore vingt ans, ou au contraire n’avoir que vingt ans et agir comme un vieux crouton coincé dans sa bulle. C’est une question de personnalité, peut-être, je ne sais pas. Toujours est-il que l’âge véritable ne compte pas. Ce qui importe c’est d’appréhender la vie comme une découverte permanente, vous comprenez ? ».
Lysange se leva à son tour. « Je crois oui. Donc pour vous, c’est une bonne chose que je me questionne tout le temps comme ça ? C’est pas ce qu’aurait dit Benjy, j’peux vous dire…. ». Barbara éclata de rire gaiement. « J’aurais tant aimé le rencontrer, votre Benjamin ! Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Se questionner sur ses émotions et ses ressentis est une bonne chose, se tourmenter avec des idées de toutes sortes, par contre, là… ».
" Hein ? Quoi ? Mais c’est quoi la différence ? » Barbara s’en allait en riant. « On en reparlera ! Promis ! J’ai du travail qui m’attend ! A bientôt ! Et passez le bonjour à Ted ! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Oui… mais en fait non, moi je peux pas me dire que ça va durer comme ça toute la vie, hein… seule, tous les soirs, comme ça, sans personne à aimer ?!?…. non, mais… c’est juste pas possible, ça ! ».
Lysange était aux écuries, discutant avec Matilda du succès encourageant de leur présence commerciale, la veille sur les quais, lorsque Nealson était passé pour vérifier son travail sur une bête qu’il fallait caparaçonner. De façon tout à fait étonnante, surtout de la part du forgeron, la discussion s’était engagée sur la vie « à côté », cette vie dont chacun rêvait, sans trop en dire.
« Bah… moi les bêtes me suffisent », disait Matilda tout en bouchonnant l’une des juments qui allaient être livrées le soir même aux paladins de l’Eglise qui partaient guerroyer, « je trouve que les gens sont tous pénibles, globalement ». D’un regard inconscient dirigé vers le forgeron, elle sembla démentir ses paroles. «J’ai fini par en prendre mon parti. Il vaut mieux rester seule qu’être mal accompagnée. »
Nealson écoutait, la main dans la nuque, un petit sourire pour toute participation à la conversation, comme souvent lorsqu’il s’agissait de choses personnelles. Lysange se tourna vers lui. « Et toi Nealson ? Tu vas pas me faire croire que tu te satisfais de ton travail, même si ça te passionne ? Tout le monde le sait, hein, que tu vas régulièrement en ville avec l’espoir de te trouver une petite femme ! ».
Il y avait comme de la jalousie dans le ton de la jeune femme. Le forgeron esquissa un sourire amusé. « Et où est le mal Mademoiselle la raisonneuse ? J’ai rien à cacher, c’est une recherche honnête, je veux fonder un foyer et avoir des enfants. Et comme les filles d’ici préfèrent les bêtes aux hommes… ben… ». Son regard s’alluma, et, contre toute attente, il s’approcha de Lysange, la main arrêtée dans un mouvement près de son bras. « Par contre, toi tu clames le contraire… alors je m’disais que… si t’étais intéressée… ben on pourrait en discuter… un peu mieux… devant une bière, par exemple… non ? ». Le ton était faussement séducteur et se voulait humoristique, mais il était évident qu’il y avait quelque chose qui ne se disait pas.
Lysange se recula d’un pas en arrière, comme piquée par une guêpe. « Euh… nan mais… Nealson… t’es …. ‘fin t’es gentil et tout, hein… t’as plein de qualités, je dis pas, mais…. ». Nealson se frotta le haut du crâne, faussement vexé. « Mais j'te plais pas, je sais, j’ai bien compris ». Lysange secoua vivement la tête, désolée. « Mais non c’est pas ça ! Mais alors pas du tout, c’est que…. ». Elle s’empourpra, ne sut que dire de plus au forgeron qui souriait, et se tourna donc vers Matilda pour sortir de l’impasse où elle venait de se mettre.
La dresseuse les observait en silence, bouchonnant une des juments du domaine. « Tu sais que Babash devrait arriver très bientôt ? ». Matilda hocha la tête, présente à chaque réaction émanant du cheval, toujours aussi attentive dans ses gestes pourtant mille fois répétés . « Mmh.. j’ai entendu parler de ça, en effet. Mais je ne sais pas vraiment qui est ce Babash, donc je t’avouerai que cela ne m’a plus que ça interpellée. Il va prendre la direction du dressage des bêtes, c’est ça ? ».
Lysange adressa à Nealson un sourire mitigé, entre gêne, perplexité et questionnement, puis s’approcha de Matilda comme pour mettre une distance physique avec ce qu’elle ne comprenait pas. « Ben… disons qu’il va surtout m’épauler pour les ventes et les présentations de bêtes, en remplacement de M’sieur Pignac, tu vois. Pour ce qui est du travail quotidien, je crois pas qu’il va se mêler de ce que tu fais. Mais si ça te pose problème, faudra me le dire, je verrais avec le vieux ». Matilda se contenta d’acquiescer, la perspective d’avoir un supérieur n’ayant pas l’air de lui causer le moindre souci. « C’est bon pour moi, ne t’inquiète pas ».
Le forgeron les observait, la main de nouveau dans la nuque, songeur. Tout à coup, il s’approcha de la jument que Matilda bouchonnait, comme pour vérifier ses sabots, caressant le flanc, de l’autre côté. « Tout doux ma belle… Toi et moi on apprend à s’connaître … j’te veux que du bien… tu l’sais ça, hein… ».
Lysange écarquillait les yeux, son regard passant du forgeron à la dresseuse, puis de la dresseuse au forgeron, comme si l’évidence émergeait avec une luminosité croissante. « Ah mais ! Ah ben d’accord !!! Bon, ben… j’vous laisse hein ! J’ai du travail, moi ! J’ai un contrat de partenariat à signer, une réunion à préparer et la vente aux enchères à finaliser, et après tout ça faut que j’aille chercher Tom au dispensaire ! Il a enfin la permission de sortir, j'ai hâte de le voir reprendre sa place, à plus tard !».
Lysange était aux écuries, discutant avec Matilda du succès encourageant de leur présence commerciale, la veille sur les quais, lorsque Nealson était passé pour vérifier son travail sur une bête qu’il fallait caparaçonner. De façon tout à fait étonnante, surtout de la part du forgeron, la discussion s’était engagée sur la vie « à côté », cette vie dont chacun rêvait, sans trop en dire.
« Bah… moi les bêtes me suffisent », disait Matilda tout en bouchonnant l’une des juments qui allaient être livrées le soir même aux paladins de l’Eglise qui partaient guerroyer, « je trouve que les gens sont tous pénibles, globalement ». D’un regard inconscient dirigé vers le forgeron, elle sembla démentir ses paroles. «J’ai fini par en prendre mon parti. Il vaut mieux rester seule qu’être mal accompagnée. »
Nealson écoutait, la main dans la nuque, un petit sourire pour toute participation à la conversation, comme souvent lorsqu’il s’agissait de choses personnelles. Lysange se tourna vers lui. « Et toi Nealson ? Tu vas pas me faire croire que tu te satisfais de ton travail, même si ça te passionne ? Tout le monde le sait, hein, que tu vas régulièrement en ville avec l’espoir de te trouver une petite femme ! ».
Il y avait comme de la jalousie dans le ton de la jeune femme. Le forgeron esquissa un sourire amusé. « Et où est le mal Mademoiselle la raisonneuse ? J’ai rien à cacher, c’est une recherche honnête, je veux fonder un foyer et avoir des enfants. Et comme les filles d’ici préfèrent les bêtes aux hommes… ben… ». Son regard s’alluma, et, contre toute attente, il s’approcha de Lysange, la main arrêtée dans un mouvement près de son bras. « Par contre, toi tu clames le contraire… alors je m’disais que… si t’étais intéressée… ben on pourrait en discuter… un peu mieux… devant une bière, par exemple… non ? ». Le ton était faussement séducteur et se voulait humoristique, mais il était évident qu’il y avait quelque chose qui ne se disait pas.
Lysange se recula d’un pas en arrière, comme piquée par une guêpe. « Euh… nan mais… Nealson… t’es …. ‘fin t’es gentil et tout, hein… t’as plein de qualités, je dis pas, mais…. ». Nealson se frotta le haut du crâne, faussement vexé. « Mais j'te plais pas, je sais, j’ai bien compris ». Lysange secoua vivement la tête, désolée. « Mais non c’est pas ça ! Mais alors pas du tout, c’est que…. ». Elle s’empourpra, ne sut que dire de plus au forgeron qui souriait, et se tourna donc vers Matilda pour sortir de l’impasse où elle venait de se mettre.
La dresseuse les observait en silence, bouchonnant une des juments du domaine. « Tu sais que Babash devrait arriver très bientôt ? ». Matilda hocha la tête, présente à chaque réaction émanant du cheval, toujours aussi attentive dans ses gestes pourtant mille fois répétés . « Mmh.. j’ai entendu parler de ça, en effet. Mais je ne sais pas vraiment qui est ce Babash, donc je t’avouerai que cela ne m’a plus que ça interpellée. Il va prendre la direction du dressage des bêtes, c’est ça ? ».
Lysange adressa à Nealson un sourire mitigé, entre gêne, perplexité et questionnement, puis s’approcha de Matilda comme pour mettre une distance physique avec ce qu’elle ne comprenait pas. « Ben… disons qu’il va surtout m’épauler pour les ventes et les présentations de bêtes, en remplacement de M’sieur Pignac, tu vois. Pour ce qui est du travail quotidien, je crois pas qu’il va se mêler de ce que tu fais. Mais si ça te pose problème, faudra me le dire, je verrais avec le vieux ». Matilda se contenta d’acquiescer, la perspective d’avoir un supérieur n’ayant pas l’air de lui causer le moindre souci. « C’est bon pour moi, ne t’inquiète pas ».
Le forgeron les observait, la main de nouveau dans la nuque, songeur. Tout à coup, il s’approcha de la jument que Matilda bouchonnait, comme pour vérifier ses sabots, caressant le flanc, de l’autre côté. « Tout doux ma belle… Toi et moi on apprend à s’connaître … j’te veux que du bien… tu l’sais ça, hein… ».
Lysange écarquillait les yeux, son regard passant du forgeron à la dresseuse, puis de la dresseuse au forgeron, comme si l’évidence émergeait avec une luminosité croissante. « Ah mais ! Ah ben d’accord !!! Bon, ben… j’vous laisse hein ! J’ai du travail, moi ! J’ai un contrat de partenariat à signer, une réunion à préparer et la vente aux enchères à finaliser, et après tout ça faut que j’aille chercher Tom au dispensaire ! Il a enfin la permission de sortir, j'ai hâte de le voir reprendre sa place, à plus tard !».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais vous vous rendez compte ! Si on doit accueillir des prisonniers de la Garde, ça risque d’être des gars comme ceux que j’ai vus hier soir ! De vrais malabars !!! ». Lysange prenait sa pause avec Barbara, non loin du bureau où travaillait l’intendant Pignac à la relecture d’un contrat de partenariat entre la Maison Fossard et la Maison du Duc d’Althain.
« Mais... je ne comprends pas... vous étiez bien avec Monsieur Pignac pour la livraison des chevaux pour la mission des paladins de L’Eglise ? Où avez vous vu ces combattants ? ». Barbara avait du mal à suivre les explications animées de Lysange.
La jeune femme racontait en les mimant les combats organisés par le patron du Septième Verre, la taverne du quartier nain. « Dans la cour ! Derrière ! Dans cette taverne ! Vous les auriez vus ! Ça cognait sec ! C’était pas du chiqué !! ».
« Mais.... »,la rousse avait bien du mal à imaginer Marcel Pignac dans ce genre d’établissement, « .... il vous a accompagnée ? Comment avez-vous réussi à le convaincre ?». Lysange éclata de rire. « Mais non, c’est lui qui en a eu l’idée !!! Et vous savez quoi ?!?! Il est arrivé un peu en retard pour la livraison des chevaux, tout guilleret à cause d’Ernestine ! Si, si, c’est lui-même qui me l’a dit ! Il a même proposé de partager ses madeleines !!! ».
Difficile d’imaginer le vieil intendant acceptant de converser avec la petite dame. « Des blablas il a dit... n’empêche qu’il mange tous ses gâteaux en cachette ! C’est Ted qui me l’a raconté ! ».
Les deux femmes riaient de bon cœur. Le forgeron passa au loin et Lysange le suivit des yeux. « C’est sûr que si c’est Nealson qui supervise les prisonniers qu’on doit accueillir, ça ira... mais si on doit les mettre dans les enclos avec Matilda ... ou dans les champs avec vous... ça peut déborder, vous croyez pas ? Ça vous fait pas peur ? »
Barbara secoua doucement la tête avec un sourire amusé, l’éventualité de côtoyer des repris de justice n’ayant pas l’air de la terroriser. « Je suppose que ceux qui viendront chez nous seront choisis pour leur volonté de se racheter et leur capacité à se tenir correctement. Et puis cette proposition de Monsieur Pignac est très positive, pour ces personnes mais aussi pour nous ». Lysange réfléchissait en jouant avec un petit morceau de bois qu’elle tailladait au canif.« C’est sûr que de participer à la réinsertion de prisonniers, c’est bon pour notre image... mais de voir ces gros baraqués se battre, ben... ça m’a un peu questionnée.. y’en a... ils aiment vraiment ça, taper et recevoir des coups, ça se voyait bien».
Barbara se redressa, prête à reprendre ses tâches, elle avait retrouvé son sourire énigmatique. « On dirait que cela vous préoccupe... finalement vous ne rêvez plus devant un corps musclé ? ». Lysange rangea son canif et glissa le petit morceau de bois dans la poche arrière de son pantalon. « Bah ! Vous savez ce qu’il m’a dit M’sieur Pignac hier soir ? Que les muscles ça suffisait pas. Sur le coup ça m’a énervée, mais quand j’ai vu un des gars mettre un pain à une femme combattante, aussi rageuse que lui, ben... j’ai trouvé ça moins beau du coup. Cette façon d’être... taper au lieu de parler... c’est pas moi, c’est sûr. Si je dois choisir entre un gars tout en muscles et un autre qui m’fait rire ou me fait rêver, ben... c’est sûr que j’hésite pas une seconde ».
Barbara s’approcha. « Voyez... c’est ce que je vous disais l’autre jour... chaque petit événement vous incite à la réflexion... vous êtes dans la découverte permanente de vous-même et je doute que cela cesse un jour. Muscles ou pas, ce n’est pas le problème. Il faut quelqu’un qui puisse vous suivre dans cette quête, ou du moins qui ne cherche pas à vous enfermer»
Lysange opinait doucement, les paroles de Barbara touchaient juste et risquaient de la perturber. La rousse lui pressa le bras gentiment. «Mais vous trouverez ! Je n’en doute pas, vous trouverez ! Allez, ne perdez pas votre joie de vivre, c’est probablement ce qui vous mènera à lui.... ou lui à vous, allez savoir ! À plus tard ! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Alors comme ça, t’acceptes des rendez-vous en ville avec un type ? ». Le forgeron rinçait à grande eau fraîche une pièce qui sortait tout juste de sa forge. Venue faire l’inventaire des métaux à commander, Lysange lui lança un regard noir. « Comment tu sais ça toi ? ».
Nealson la regardait tout en travaillant, des gestes précis, nets, sans fioritures. « C’est Matilda qui en a parlé ce matin, paraît même que t’en avais deux à tes trousses, des godelureaux, hier soir ». ll gardait son air sérieux histoire de la faire réagir. « Même que le vieux t’as houspillée comme si t’allait t’enfuir avec l’un des deux ». Si Lysange n’avait pas foncé tête baissée dans le piège tendu amicalement, elle aurait vu qu’il blaguait. Au lieu de ça, elle rua immédiatement dans les brancards.
«Non mais !!! De quoi j’me mêle !!! En plus c’était Junior, qui est venu faire le malin…. comme si je lui avais donné rendez-vous. N’importe quoi ! Toujours ses manières de voyou » . Elle bougonnait mais son sourire cachait une forme de tendresse. « Mais l’autre c’est pas « un type », c’est un client, un guerrier, un Comte même, si tu veux savoir. C’est pas n’importe qui ! ».
Nealson remettait la pièce de caparaçon à chauffer, souriant en coin. « Un Comte, rien que ça… », il l’observait sans pour autant surveiller attentivement le métal qui chauffait, « C’est sûr que moi, à côté, je vaux pas tripette ».
Lysange se redressa, prête à bondir. « Mais…. qu’est-ce que tu vas chercher ! Comme si c’était important pour moi !! Tu sais bien que je m’en fiches !! ». Son indignation était sincère. « Mais tu peux pas parler d’un client en disant juste « un type », ça se fait pas ça ! »
« Mmhh… parce que si tu as accepté de prendre un verre avec lui.. et pas avec moi, donc… », il planta son regard vert dans celui de la jeune femme, moqueur, « j’en conclus que c’est uniquement parce que c’est un client ? Et tu le lui as dit ? ».
« Mais…. c’est quoi toutes ces questions ?!? Je te demande, moi, qui tu rencontres en ville ? Je te demande ce que tu fais avec Matilda ? Je … je… ! Ooh !!! Tu m’agaces à la fin !!! ». La pression était montée très vite et Lysange ressemblait à une mine gnome sur le point d’exploser.
Le forgeron laissa la pièce au feu, non sans avoir vérifié au préalable qu’elle ne risquait rien, enleva ses gants et vint se poster devant la jeune femme, ses deux mains posées sur ses épaules. « Tu sais quoi ? Tu m’amuses en fait… T’es mignonne comme tout avec tes rêves, et tes idées bien arrêtées, et tes questions, et ta joie de vivre, et tes rires, et même tes colères, tiens…. ». Il pencha la tête de côté, le regard rieur. « Surtout tes colères, peut-être même… ».
Lysange sursauta au contact des mains larges et fermes du forgeron sur ses épaules, un instant stupéfaite. « Hein ? Tu me cherches là ? C’est ça ? ». Nealson souriait largement. « Ben… tu cours pas, tu voles comme si t’avais des bottes-fusée, avoue que c’est tentant…. ». Il se pencha et posa rapidement un baiser sur sa joue, à peine effleuré. « Mais c’est parce que j’t’apprécie Lysange, sinon.. tu penses bien… je m’amuserais pas à ça ».
Il la regarda un instant, le regard toujours rieur mais le visage tout à coup figé, puis dans un geste brusque il se retourna, mit ses gants, et tout en reprenant la pièce chauffée à blanc, lâcha, presque bougon. « Bon, c’est pas tout ça, mais j’ai du boulot là. »
Fin de la conversation. Lysange n’avait plus qu’à repartir au bureau, son livre d’inventaire sous le bras, la tête bouillonnant de questions multiples, le coeur battant la chamade.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Et puis c’est drôlement bien peint… … j’suis sûre que c’est un tableau qui vaut cher, en plus… ». Lysange terminait la description du tableau que Junior, passant probablement par les toits, était venu accrocher au dessus de son lit dans la soirée du jeudi, pendant qu’elle était à la vente aux enchères.
Barbara écoutait avec un mélange d’amusement et de tendresse. « Et bien dites donc… un homme qui vous tricote une écharpe… un autre qui risque la prison pour vous offrir un tableau… Nealson qui vous embrasse dans un élan que je ne saurais qualifier …sans compter tous ceux que je ne connais pas… vous leur faites tous tourner la tête, ma parole ! Donnez moi vite votre secret.» Elle riait en parlant, mais son désir semblait sincère. Lysange la regarda, stupéfaite. « Non mais… parce que vous croyez que je le fais exprès ?!? Ah mais non hein !!!! Moi je demande rien ! Je fais rien pour avoir tout ça ! Je suis juste… ben je sais pas moi.. je suis moi quoi !! ».
A l’idée que l’on puisse imaginer qu’elle se jouait de tous ces hommes comme une gourgandine du Septième Verre, Lysange en était toute retournée. Barbara posa sa main sur son bras dans un geste d’apaisement. « Non, non, non, ne vous méprenez pas. Je ne vous crois pas du tout volontaire ou séductrice, mais avouez que c’est tout de même étonnant… à votre avis qu’est-ce qui se passe alors ? ».
La nouvelle intendante observait son aînée, sourcils froncés. « Mais qu’est-ce que j’en sais moi ! Sans doute qu’ils me voient comme celle qu’ils espèrent en secret ? Ou…. peut-être que je suis trop gentille, à les écouter… mais je saurais pas faire autrement, j’ai aucune raison de les envoyer paître… ». Elle fronça le nez, dans un sursaut de réflexion. « Remarquez… c’est sûr qu’après je me retrouve à les décevoir… c’est sans doute pas mieux… Je devrais faire comment selon vous ? ».
Elle avait sorti de sa sacoche l’enquête du gnome pour lui montrer les réponses concernant les nains et la garde et avoir son avis, mais Barbara était bien plus passionnée par les déboires amoureux de Lysange que par ces nains qui ne méritaient pas, selon elle, que l’on s’y intéresse.
« Hum…. donc pour vous, ils ne vous voient pas telle que vous êtes vraiment ? C’est peut-être là qu’il faut chercher». Lysange était partie dans une grande réflexion. « Mmh… dit comme ça, c’est comme si je n’étais pas moi-même, alors que si, mais en fait … tant que je m’attache pas, j’m’en fiche moi, de leur vie… alors je peux être moi-même sans risques, mais si je commence à m’attacher … alors là.. oui, c’est sûr, je vais finir par faire peur. »
« Vous, Lysange, vous feriez peur ? Laissez moi rire ! ». Barbara n’avait aucun désir de retourner travailler. Lysange continua, toujours aussi volubile. « Ah mais si ! Si, si, si, je vous assure, je fais peur ! Parce que je sais pas faire les choses à moitié, moi. Jamais ! Alors si je m’attache à un gars ben… je vais avoir du mal à pas être attentive à tout ce qu’il dit ou fait, voyez. J’peux même être jalouse… bon... je le montre pas, enfin j’essaye… je garde ça pour moi….. Mais tout de même, j’suis sûre qu’au final, il va le sentir, que j’suis du genre à trop en vouloir, surtout si j’glisse…». Lysange grimaça.
La rousse souriait largement, Lysange avait l’art de mettre de la joie partout où elle passait, même en se dénigrant. « Comment ça, si vous glissez ? ». Lysange la regarda, suspicieuse. « Ben… si j’tombe amoureuse, pardi. A quoi vous pensiez ? C’pour ça que j’fais gaffe à bien garder mes distances. Faut surtout pas que j’tombe amoureuse, parce que là…. ». Elle grimaça de nouveau.
«Tenez ! Je suis sûre que Nealson c’est un peu ça ! Je lui plais, c’est sûr, mais si je commence à me laisser glisser, ça va pas rater ! Je vais lui faire peur, et envie, mais peur de plus en plus, même s’il s’en rend pas compte… et au final il va fuir, et c’est moi qui vais me retrouver toute seule… ». Elle soupira, comme si tous les malheurs du monde tombaient sur ses épaules. « Y’a pas de solution… c’est fichu… »
Barbara avait vraiment du mal à ne pas rire franchement. Elle posa de nouveau sa main sur le bras de la jeune femme. « Mais non… je suis sûre qu’il y en a un quelque part qui saura vous voir telle que vous êtes ». Lysange opina, sans pourtant y croire. « Bah… ceux que je connais ils sont gentils, c’est sûr, et pour le moment ils ont pas peur, mais je crois qu’ils se trompent sur moi. Ils voient pas que je vais finir par me lasser si y’a pas un peu de folie…. Oui, c’est ça… il m’en faut un qui soit un peu fou. Un qui m’étonne, voyez ? Pas un que j’ai tout compris comment il fonctionne au bout d’une heure, parce que là…. ben… c’est moi qui vais devenir folle. Ou alors je vais m’éteindre et c’est vraiment pas mieux »
Barbara l’observait, le regard affûté. «A vous écouter, j’ai le sentiment que vous ne savez pas choisir entre la douceur d’une relation bien rangée et le piquant d’une relation plus…. chaotique ». L’intendante se redressa, comme emportée par l’évidence. « Ben oui ! C’est exactement ça ! J’veux les deux en fait ! Me faut les deux ! ». Elle s’affaissa sur elle même, dépitée. « Pfff… Voyez… je veux tout…. j’en veux toujours trop… j’me bafferais, tiens, si j’pouvais… ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Matilda restait à l’écart, occupée et même très occupée auprès des félins qui tournaient en rond autour d’elle. Lysange avait réussi à entraîner à sa suite les jumelles Valbran, arrivées la veille et affectées à la sellerie Fossard, pour tenter de dérider la dresseuse.
Accoudées à l’enclos elles observaient toutes trois le manège de la blonde platine qui affichait un mutisme courtois. « Matilda… viens donc discuter un peu avec nous… Je voudrais te présenter nos deux nouvelles artisanes ! ». Lysange avait entendu dire que la dresseuse avait été bien plus affectée qu’elle ne l’avait montré la veille. Comme quoi, le vieux Pignac n’avait pas tort : que le gagnant de la vente aux enchères, un certain Rowan Avasarala, reparte avec le tigre blanc, son préféré, l’avait réellement bien affectée.
« Je ne comprends pas comment on peut être autant attristée… » commença Peggy, « … par le départ d’un animal » termina Djane. Les jumelles avaient cette particularité agaçante de parler à deux, l’une finissant la phrase de l’autre, ce qui n’aidait pas à leur différenciation.
Lysange les observa un moment, ne sachant déjà plus qui était Peggy, et qui était Djane. « Bah… qui vous dit qu’elle ne serait pas encore plus triste pour la perte d’un homme, ça n’empêche pas ».
Les deux jeunes femmes hochèrent la tête de concert, arborant la même petite moue vaguement condescendante. « C’qu’elle peuvent être… filles ! » pensa Lysange bien fort en terminant sa phrase d’un « Mmh » un peu trop réprobateur.
Les deux jumelles se tournèrent de concert vers Lysange, l’une et l’autre plantant leur regard clair dans celui de la jeune intendante qui ne put, encore une fois, s’empêcher de rosir de gêne. «Ceci dit, tout dépend probablement de l’animal.. » compléta Djane gracieusement, « … et des liens que l’on a crées avec lui » termina Peggy dans un sourire charmeur « Cela va sans dire » finirent-elles en choeur avec un léger rire.
Lysange opina, perplexe. Les jumelles avaient ce petit quelque chose de féminin qui l’agaçait mais l’attirait tout autant. Adoptée par le vieux Ben’, elle se savait relativement ignorante sur le sujet et ressentait parfois quelque envie d’entrer dans ce monde inconnu. « Bon… je crois qu’elle n’est pas disposée à discuter. Désolée, on va la laisser, elle ira mieux demain »
L’intendante essayait de remplir son rôle avec professionnalisme. Elle fit signe à Matilda qu’elle repasserait plus tard et s’écarta de l’enclos. Les jumelles lui emboitèrent le pas souplement.
« Avez-vous des questions, des besoins, je suis là pour vous aider, alors dites moi ! ». Il n’était pas question de se laisser distraire par des questionnements aussi puérils sur ce que devait être une « vraie femme » ou pas, et Lysange n’avait nulle envie de laisser paraître ses questionnements.
Les deux soeurs Valbran se regardèrent longuement, échangeant quelques regards et sourires qui semblaient bien être une forme de conversation, puis se tournèrent ensemble vers Lysange le visage souriant. « Et bien.. puisque vous le proposez… », commença Peggy, « nous aimerions être présentées un peu plus officiellement au forgeron » termina Djane en regardant sa soeur.
Lysange les regarda un long moment avant de pouvoir réagir. « Euh…. Nealson ? Vous voulez que je vous présente… Nealson, c’est ça ? ». Les deux artisanes esquissèrent le même sourire amusé dans un hochement de tête. « Si c’est son prénom… » commença Djane, « .. alors c’est bien de lNealson qu’il s’agit », complèta Peggy.
Lysange glissa sur une petite motte de terre en faisant demi-tour. « Ah. Ben…. oui, bien sûr…. euh… suivez moi, je vais vous le présenter…. »
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais quand même.... vous trouvez pas que j’ai eu tort de lui dire tout ça ? ». Lysange avait retrouvé Barbara pour leur petite pause quotidienne et racontait la soirée, un tantinet désemparée par ses propres réactions.
La veille, restée seule avec Ted Mangin pour accueillir la responsable de la Garde-Jour qui venait chercher son cheval offert par La Maison Fossard, elle lui avait reproché d’être trop fermé et froid, caché derrière son casque et son rôle de gardien.
« Est-ce qu’il a eu l’air de vous en vouloir ? ». Barbara essayait de rassurer Lysange qui, disait-elle, s’en voulait à mort. « Ben... c’est difficile de savoir, c’est vraiment pas le genre à dire ce qu’il pense et encore moins ce qu’il ressent hein... ».
Barbara avait beau essayer de relativiser, la jeune intendante restait convaincue qu’elle avait eu tort. « Lui, c’est simple, il veut juste faire son travail du mieux possible, il s’en fout de mes états d’âme. Qu’est-ce qui m’a pris de lui parler de mon besoin de contact... je suis pas possible, vraiment...».
« Vous a-t’il fait une remarque indiquant qu’il vous trouvait intrusive ? ». La rousse restait calme, ne montrait aucune lassitude à contrecarrer les reproches dont Lysange ne pouvait se défaire. « A-t-il changé d’attitude entre le début de la soirée et le moment où il vous a raccompagnée chez vous ? »
Depuis qu’elle devait assumer ses nouvelles responsabilités, la brunette à la joie de vivre communicative s’inquiétait de plus en plus souvent de ne pas être à la hauteur, craignant de ne pas savoir suffisamment mettre de côté son émotivité débordante.
Elle faillit répondre par la négative puis se ravisa. "Maintenant que vous m’y faites penser... je dirais que j’ai tout de même l’impression qu’il s’est un peu détendu au fil des heures, qu’il a essayé de m’aider, en se montrant aimable avec les deux dames de la Garde-Jour, et en sortant les chevaux de l’enclos, alors que c’est pas son boulot, et même qu’il s’est un peu ouvert en fin de soirée puisqu’il m’a parlé de lui sur le chemin du retour… enfin… pas beaucoup hein... mais un peu. »
Barbara l’écoutait avec attention. « Et il vous a donné le sentiment de se dénier ? De renoncer à quelque chose d’important ? D’être mécontent de lui, de son travail ? ». Lysange la regardait sans la voir, plongée dans ses souvenirs. « Oh non. Je crois pas... il m’a raccompagnée, toujours très pro’ , en me donnant du « À vos ordres madame » et… », elle se redressa et lui adressa un sourire presque juvénile, « … il m’a laissée à la porte de chez moi, après m’avoir saluée, comme si j’étais un chef d’armée! ».
De s’en souvenir la jeune femme éclata de rire. Barbara posa sa main sur son avant-bras. « Et bien, vous voyez ! C’est bien la preuve qu’il vous respecte dans vos nouvelles fonctions et qu’il agit en conséquence. Il vous a écoutée, a essayé de correspondre à vos attentes, tout en restant lui même et professionnel. Pour moi c’est la preuve que vous avez su être comme il fallait, Lysange Delabay, nouvelle intendante de la Maison Fossard, avec sa personnalité, son style, et son avenir ! ».
Lysange resta interdit un moment par cette vision inattendue d’elle même. Intendante Lysange Delabay… c’est vrai que ça sonnait pas si mal…
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Ah ouais… et il débarquent comme ça sur la place pile au moment où t’es là ? Tu trouves pas ça bizarre ? ». Lysange observait Nealson avec perplexité. Ruisselant de sueur, penché sur une pièce chauffée à blanc qu’il frappait avec une précision sans faille à rythme soutenu, il dégageait une puissance qui le rendait tout à la fois attirant et inquiétant. « Bah… si, peut-être… surtout qu’ils avaient toute leur place sur le marché ».
Le forgeron se redressa pour la toiser de toute sa hauteur ruisselante, un petit air moqueur se dessinant sous les lunettes protectrices. « Et donc… t’étais avec ton Comte là, sur la place, à papoter… et lui aussi, il était là par hasard ? ».
Lysange lui adressa un haussement d’épaules faussement boudeur. « Faut croire ! J’en sais rien moi ! Je revenais des bureaux et je rentrais chez moi… alors je suis passée par la place et .. et c’est son chien qui m’a trouvée ». Nealson éclata de rire tellement fort qu’il manqua s’étouffer. « Son chien… ben voyons, vous m’en direz tant !». Il s’était de nouveau penché sur sa pièce en riant, mais il se redressa tout à coup, comme pris d’une soudaine idée. « Mais attends… si tu étais avec lui… il a donc entendu que le nain parlait de toi ? ».
Lysange plissa les yeux. « Ben… oui, en plus je le lui ai dit, que ça parlait de moi comme exemple de ce que Hurlevent produisait de pire… et ? Où est-ce que tu veux en venir ? ». Nealson haussa une épaule et se concentra de nouveau sur sa tâche, le sourire en coin. « Bah… pas pressé de défendre ton honneur, le noble, à c’que j’vois… ».
La jeune intendante se redressa, prête à prendre la défense du guerrier, mais le forgeron n’en avait pas fini avec son analyse de la situation. Il se redressa à nouveau vivement. Mais cette fois il ôta ses lunettes et son regard était sombre de colère. « Non mais… attends là…. tu veux pas me répéter ses paroles ? »
« Euh… t’es marrant, toi, je suis pas un gnomophone hein… pourquoi tu veux ça ? ». Le forgeron conservait son regard sombre et une mine qui en disait long sur une colère qui ne demandait qu’à exploser. « Parce que le nain, là, si j’ai bien compris, il a tout simplement dit en place publique qu’il cautionnait des actes de violence pour soi disant se faire justice soi-même, un mec qui cogne une femme parce qu’elle l’a giflé en réponse à un premier coup et il trouve ça normal !!! … mais ça… ben ça faut que ça soit dit, pardi ! ».
Lysange le regarda un moment, étonnée de le voir aussi déterminé. « Bon alors… attends… il a dit…. : « Des personnes comme elles, qui insultent publiquement des gens mais crient à l’agression lorsqu’elles se prennent des torgnoles en retour, sont la preuve que cette ville est un véritable nid à poulets et petites natures. Comment peut-on exiger de la part de quelqu’un de ne pas réagir lorsqu’il se fait frapper » …. j’en suis sûre parce que ça m’a pas mal tourneboulée, sur le moment, qu’il ose dire devant tout le monde que non seulement il cautionnait mon agresseur mais qu’en plus c’était moi la preuve que le monde tournait mal… ».
Nealson la regardait, songeur, sourcils froncés, mains sur les hanches. « Va falloir tout répéter au vieux Pignac, si tu veux mon avis. Et tu devrais demander à ton ami le journaliste s’il peut pas témoigner … parce que là, ça devient du grand n’importe quoi. Menaces, insultes, incitation à la violence sur autrui, violences répétées, collusion entre connards et j’en passe… faut pas que tu restes à garder tout ça pour toi toute seule, Lyly, faut que tu te défendes ! ».
Lysange soupira longuement. « Mais…. mais ça m’emmerde tout ça, tu peux pas savoir… Ca s’arrêtera donc jamais ?!?? On peut pas juste faire notre travail tranquillement sans que systématiquement y’ait une palette d’abrutis qui viennent nous mettre des bâtons dans les roues ?!?? ».
Le forgeron s’avança, son regard avait changé. « Ecoute… ça c’est la vie tu vois. Si tu te défends pas avec tes armes, t’auras toujours des gars qui essayeront de t’voler ton air, juste pour le plaisir de t’emmerder ». Il souriait, vaguement protecteur, et posa sa main sur la joue de Lysange, là où elle avait été frappée. «Mais c’est pas trop ton genre, de pas te défendre, j’me trompe ?»
Elle sursauta, désarçonnée par un geste aussi intime et tendre. « Euh.. oui.… et c’est quoi mes armes alors ? ». La main toujours posée sur son visage, il hésita puis passa son pouce sur la pommette, doucement, comme un baiser. « La vérité ma jolie. Tout simplement. La vérité. Crie la s’il le faut, mais faut qu’elle éclate, avant qu’il y ait des morts. Parce que… si y’en a qui s’avisent de t’toucher encore, j’t’assure que des morts….».
Il inspira, yeux mi-clos, la colère se lisant sur les veines gonflées de son cou. « Allez … va voir Pignac et raconte lui, déjà, au moins. Et fais moi signe si jamais tu veux sortir en ville en l’absence de Ted. Hors de question qu’il t’arrive des bricoles, ça peut plus continuer comme ça ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Et vous l’avez repris devant les clients ?!?! » Barbara la regardait avec attention, ne pouvant cacher son étonnement.
Lysange sursauta. « Mais Non ! Non, pas repris.... Mais… je l’ai vu offrir en catimini un verre de rhum à une fille dans cette taverne, en demandant à la serveuse de le lui offrir en son nom... alors moi au moment de partir, je lui ai proposé tout haut de rester, pour qu’il puisse boire avec la fille qui était là avec Rislon… » Barbara la regarda, légèrement sidérée. « Ah oui... tout de même... c’était mesquin, vous ne trouvez pas ? ».
L’intendante soupira longuement. « Si.... mais.... mais il l’a fait tout à côté de moi, pendant qu’on attendait pour voir le patron ... franchement ! Ça se fait pas des trucs comme ça !! En plus.. je l’ai déjà vue cette fille, c’est... c’est... vous savez, une ... une fille qui vend son corps... franchement... » Lysange se dandinait en la regardant travailler.
« Qu’est-ce qui ne se fait pas ? Qu’un homme paye un verre à une jeune femme pour lui montrer son intérêt ? Ou qu’un homme qui vous accompagne montre de l’intérêt à une autre femme ? ». Barbara rangeait des bottes de carottes dans des paniers qu’elle comptait distribuer aux réfugiés. Elle semblait vouloir aider Lysange à dénouer sa culpabilité pour un fait somme toute assez anodin.
« Euh... je comprends pas... qu’est-ce que vous sous-entendez, là ? Que j’ai fait ça par jalousie ?!?? Nan mais.... ! C’est personne pour moi, Ted !!! .... ‘Fin… j’veux dire.... si, bien sûr, mais…. », la jeune intendante n’était vraiment pas fière d’elle, «…. j’ai aucune relation avec lui autre que professionnelle !!! ».
La rousse éclata de rire avec bienveillance, coula un regard vers Lysange puis reprit son travail avec entrain. « Mais on peut très bien se sentir jalouse d’un homme sans n’être rien d’autre qu’une collègue... si on lui porte de l’intérêt. »
Lysange s’empourpra, cherchant de quoi s’occuper les mains pour se donner contenance. Elle attrapa un panier vide et entreprit de le remplir comme le faisait Barbara. « Ben... c’est évident que je lui porte de l’intérêt... je le vois tous les jours, il m’accompagne partout en ville… il me protège... je lui confie ma vie en fait ! Je peux pas faire comme s’il n’était rien pour moi... »
Barbara lui montra d’un geste qu’elle ne disposait pas les carottes comme elle le souhaitait. « Mmh... je vois ça. De toute évidence en tout cas, le voir s’intéresser à une jeune femme ne vous a pas laissée sans émotion. Et il a réagi comment, lui, ensuite ? ».
Lysange termina un panier en soupirant, disposant les légumes à l’identique de ceux posés par la fermière. « Bah... sur le moment rien mais après, sur le chemin de l’autre taverne, il me l’a dit. Et il avait l’air blessé, vraiment…. et moi je l’ai comme qui dirait mouché en lui disant que la prochaine fois, il ne le fasse pas pendant son service, comme ça je le verrais pas. Alors il a dit qu’il avait eu tort, et il s’est excusé... en plus. »
Barbara leva le nez du panier et l’observa. « En plus? » Lysange haussa les épaules. « Bah oui… moi je le blesse et c’est lui qui s’excuse… tout de même quoi ». Barbara esquissa un sourire et reprit son rangement. « C’est bien la preuve qu’il est irréprochable au niveau professionnel. Vous aviez raison et il a reconnu ses torts. La prochaine fois… il n’y aura pas de prochaine fois, j’imagine. Il a dû se mordre les doigts de laisser transparaître un peu de sa vie privée, si vous voulez mon avis… »
L’intendante posa près des autres son panier rempli et en attrapa un vide. « Ben là c’est sûr que pour ce qui est d’espérer avoir une relation un tant soit peu amicale, c’est fichu pour de bon. Avec tout ça, jamais plus il ne me verra autrement que comme une personne qui n’a rien à voir avec lui… ».
Barbara lui tendit quelques pommes de terre supplémentaires. « Et ? C’est grave ? ». Lysange haussa les épaules en calant les tubercules au fond du panier. « Jen sais rien… franchement j’en sais rien. Je m’en fous, moi, de ces histoires d’origines… je connais pas les miennes et ça m’empêche pas d’être ce que je suis. C’est comme le Comte qui est persuadé que si je garde mes distances avec lui, c’est parce que je suis impressionnée par son titre. M’en fous, moi, qu’il soit Comte, Garde ou simple artisan du cuir…. ou forgeron, tiens ». Elle s’animait, retrouvant son entrain ordinaire. « C’qui compte c’est pas le titre, la fonction, ou même les richesses du gars… c’qui compte c’est c’qu’il est, c’qu’il est vraiment, au fond, caché, dans sa tête et dans son coeur. Le reste… tout ça ce sont des apparences, des illusions, des façons de se montrer, mais c’est pas ça, une personne. Vous croyez pas ? »
La rousse prit un carnet, l’ouvrit, fit le compte des paniers remplis, nota le chiffre sur le carnet et le referma. «Là dessus… ce n’est certainement pas moi qui vais vous contredire … ». Lysange l’observa longuement puis lâcha dans un souffle. « Vous aussi, hein… vous êtes pas c’qu’on croit…. je me trompe ? »
Barbara releva la tête bien trop rapidement pour ne pas apporter la preuve, ce faisant, que la jeune femme avait touché juste. Elle éclata de rire. « Aujourd’hui, je suis fermière pour la Maison Fossard ! Et c’est bien la seule information qu’il vous importe de savoir à mon sujet ! ». Le petit clin d’oeil qui suivit ses paroles entérina pour Lysange un fait qui allait longtemps la questionner par la suite. Barbara faisait une fermière bien étrange, avec ses manières gracieuses et policées, ses conseils avisés et cette façon bien à elle de voir le monde.
Benjamin disait souvent que c’était pas « le froc qui fait l’ galant ou l’viendard », sous entendu l’amateur de chair fraîche à consommer sur place et abandonner à son triste sort, mais son regard et l’intention qu’elle devait apprendre à lire à l’intérieur. Celui de Barbara n’avait rien de mauvais même si tout ce qu’on voyait d’elle devait être une illusion savamment construite. Quant à celui de Ted…. elle aurait été bien incapable d’en définir l’essence, même si, là aussi, il n’y avait en lui aucune volonté de lui nuire, bien au contraire.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais j’en sais rien, moi !!! Une impression comme ça... mais ça commence à bien me travailler... et j’y pense de plus en plus souvent....»
« Tu ne veux pas mieux nous expliquer Lyly, parce que là, franchement, ce n’est pas clair ». Matilda était pour une fois sortie des enclos une fois son travail terminé et papotait tranquillement avec Lysange et Barbara. Toutes les trois s’étaient mises à l’écart de la maison commune en attendant l’heure du déjeuner.
« Mais... ça vous arrive jamais d’avoir l’impression d’être poussée par des forces qui vous dépassent ou d’être incitée à aller dans un sens plutôt qu’un autre ? D’être comme le jouet de... de quelqu’un ou de quelque chose ? ».
Barbara avait sorti de sa poche le carnet de livraison et pointait les lignes des commandes au fur et à mesure. Elle semblait n’écouter que d’une oreille mais suivait toute la conversation avec une attention accrue.
Elle releva la tête, referma son carnet et esquissa un sourire vaguement nostalgique. «Bien sûr que cela arrive, c’est même permanent si vous prenez l’habitude de vous regarder faire et de tenter d’y comprendre quelque chose. Et le plus souvent, ces forces dont vous parlez, Lysange, sont le fruit de vos propres désirs qui s’expriment sans que vous en ayez conscience. Mais... », elle regarda son carnet, comme prise d’hésitation et le glissa dans sa poche arrière de pantalon avant de continuer, « .... la question est, ici, de comprendre si ces forces dont vous parlez viennent de vous ou d’ailleurs, ce qui est tout autant possible. Vous pourriez essayer de préciser ? ».
« Ben... disons que depuis que je suis intendante, on pourrait croire que je fais ce que je veux, comme je veux et quand je veux.... oui ? », les deux autres acquiescèrent, «..et .c’est vrai que ça en donne l’air, mais..... si c’est vrai dans les faits... ben... au fond, je... j’ai comme l’impression qu’il y a quelqu’un qui me pousse, l’air de rien. »
Les deux femmes marquèrent leur incompréhension. « Comment ça quelqu’un ? De qui tu parles ? Qui est-ce qui pourrait bien te pousser sans le dire ? Pignac tu crois ?!? ». Matilda souriait vaguement. Lysange secoua la tête, dépitée. « Non... il est bien trop fatigué et malade. Il glisse dans un autre monde... ».
Barbara se leva et vint s’asseoir près de la jeune femme pour la prendre par l’épaule. « Continuez... vous avez une idée en tête et vous n’osez pas l’exprimer. A quoi pensez vous ? ». Lysange soupira. « Non mais... je vois bien que c’est idiot tout ça hein... c’est juste une sensation mais... je sais pas... ça grandit en moi comme une certitude et j’ai du mal à m’en défaire... ».
« Ce n’est pas moi qui vais vous conseiller de ne pas écouter votre coeur, ou plutôt vos intuitions. A quoi ou à qui pensez vous ? ». Barbara se voulait bienveillante, Lysange se détendit, mais elle se sentait pitoyable. Depuis quelques jours elle avait le sentiment d’être comme « manipulée » ou « dirigée », à distance ou par le biais de pensées induites. Elle fait beau se dire que c’était une conséquence de l’ambiance lourde qui régnait autour d’elle, cela lui semblait évident, quelque chose ou quelqu’un la dirigeait, sans que cela soit perceptible, visible ou peut-être même volontaire.
« Tu crois que ce serait Ted alors ? ». Matilda plissait les yeux. « C’est vrai qu’il est étrange à jamais rien dire… ». Lysange la regarda, retint un rire et faillit lâcher « t’es pas plus bavarde, ma vieille » mais elle n’avait plus le coeur à blaguer. Matilda continuait sur sa lancée. « … comme il te suit partout, si ça se trouve il rapporte tout ce que tu fais à Pignac ! Ce serait même logique, si tu veux mon avis... de la part du vieux »
Lysange secoua la tête. « Non… M’sieur Pignac, il est hors circuit, maintenant. Ca se voit, il s’en fiche de tout ça. C’est à peine s’il m’écoute quand je veux lui faire un rapport sur mes activités. Non…. si Ted rapporte à quelqu’un... c’est pas à lui. »
Ce fut au tour de Barbara de s’étonner. « Mais... il rapporterait à qui alors ? Oh ! Monsieur Fossard ? Vous croyez ?!?». Lysange sursauta, comme prise en faute. « Non mais ! Me faites pas dire ce que j’ai pas dit !!! ». Matilda enfonça le clou avec un léger sourire en coin. « Non, tu l’as pas dit mais tu l’as pensé tellement fort que c’est presque pareil... »
Lysange se leva d’un bond, laissant éclater une colère déjà présente en elle. «Non mais... mais... vous trouvez ça normal, vous, qu’on me laisse tout gérer sans même se préoccuper de la qualité de mon travail ?!? »
Barbara lui l’incita gentiment à se rasseoir. « Ah mais... Lysange… vous ne saisissez apparemment pas la confiance que d’autres vous accordent... cela arrive parfois, on se sent comme un imposteur et .. ». Lysange ne la laissa pas continuer, elle fulminait. « Ouais ben, imposteur ou pas, moi j’ai quand même bien la sensation d’être téléguidée comme une chariote gnome sur un parcours dont je vois même pas les balises vu que je suis pas au courant d’en être une, de chariote. Et puis c’est quoi ce patron qui me laisse tout gérer comme si Pignac n’avait jamais été là ?!? Vous y croyez vous ? Ben moi j’ai du mal... »
L’employée chargée de servir les repas vint faire sonner une cloche en haut des marches du réfectoire et les trois femmes se levèrent pour se diriger vers la grande bâtisse. Barbara prit le bras de Lysange avec une affection quasi maternelle. « Vous savez, Lysange, depuis un an vous avez apporté la preuve que l’on pouvait compter sur vous. Et il ne serait pas étonnant que Monsieur Pignac ait dressé de vous un portrait plus qu’élogieux, malgré toutes ses petites récriminations ».
Lysange appréciait les paroles de la rousse mais continuait de faire la moue. « Ceci étant, il me paraît logique, moi aussi, que Monsieur Fossard se tienne au courant de ce qui se passe dans sa Maison, et il a peut-être ici et là quelques contacts qui le renseignent sur vos activités. Mais de là à penser qu’il vous téléguide... là je crois que vous faites fausse route. Peut-être devriez-vous essayer d’en parler avec Monsieur Pignac ?"
La jeune intendante s’exclama malgré elle avant de baisser le ton pour ne pas se faire entendre. « Lui ?!? Mais si c’est vrai, vous pensez bien qu’il m’en dira rien ! Pire même !!! Il va tout lui raconter et moi je vais carrément passer pour une folle ! »
Elle s’arrêta net et toisa Barbara. « Mais en fait vous aussi, vous me prenez pour une folle… ».
Barbara eut beau faire, il fut impossible de dérider Lysange pendant toute la durée du repas. « Ouais ben t’es folle à lier, ma pauv’fille… c’est clair, là… », fut la seule phrase que Barbara crut entendre de sa bouche.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Si la nouvelle avait mis plusieurs heures à atteindre le domaine, elle s’était par la suite répandue comme une traînée de poudre sur les centaines d’hectares, à travers les bâtiments et les allées, puis au coeur des bureaux et des ateliers : la nouvelle intendante était au dispensaire, blessée, agressée par un worgen dans la soirée de vendredi, et le chien de Monsieur Pignac, Karne, y avait laissé la vie.
Immédiatement les rumeurs étaient allées bon train, était-ce encore un sale coup de l’ancien organisateur du marché et de ses amis nains, nul ne savait. La seule certitude venait de l’état de la jeune femme puisque l’ex intendant l’avait vue, ainsi que Matilda la dresseuse, qui était passée au domicile de Lysange pour lui apporter quelques effets.
« Et donc, elle va comment ? ». Le ton de Nealson était bougon, faussement neutre mais tendu, et Matilda expliqua ce qu’elle avait déjà maintes fois raconté depuis la veille au soir. « Hier soir elle était encore sous le choc, enrubannée comme une momie Mogu, sur le torse et l’épaule gauche. J’ai pu voir des marques de strangulation et elle avait une mine de papier mâché, preuve qu’elle était encore patraque. Mais tu la connais, ce n’est pas le genre à se plaindre. Donc elle dit qu’elle va bien et veut déjà rentrer chez elle. Bien évidemment, ce n’est pas possible, mais j’ai cru comprendre qu’elle avait plusieurs amis… des hommes donc… », elle regardait Nealson en coin, guettant ses réactions, «.. qui sont passés la voir et doivent repasser les jours prochains. Elle ne va pas rester seule bien souvent, si tu veux mon avis… ».
Le forgeron écoutait avec attention, mains dans les poches, tiquant très légèrement à l’évocation de ces amis dont Lysange avait l’étrange pouvoir d’attirer les attentions.. et les faveurs. « Et celui qui a fait le coup, on sait qui c’est ? ». Une colère froide pointait sous la question même si le ton restait neutre.
Matilda n’était pas dupe, Nealson envisageait une réponse physique à la hauteur de la colère qui l’habitait, sourde et ne demandant qu’à exploser. Elle le regarda un moment, hésitante, puis lâcha avec un haussement d’épaule. « De ce que j’en ai compris, c’est un type qui travaille au port, un porte-faix, qu’elle avait simplement croisé à la taverne. Un worgen qui n’a pas su se tenir. Il est emprisonné, je suppose qu’on en saura plus dans les jours prochains».
Nealson cracha par terre, marquant son dégoût puis posa ses bras sur la barrière de l’enclos. « Tu crois que je peux aller la voir ? ». Il semblait touché, mais sans pouvoir l’exprimer véritablement, comme empêtré de sensations qu’il ne savait pas gérer. Matilda l’observait, attendrie, cet homme là lui ressemblait, à sa façon. « Bien sûr, que tu peux y aller, c’est ouvert à tous, à l’heure des visites. Tu veux que je t’accompagne ? ». Nealson secoua rapidement la tête, passant sa main à l’arrière de son crâne. « Non… j'suis pas à ce point … », le mot infamant ne sortit pas, « … elle aime bien les fleurs, tu penses ? ».
Matilda resta quelques secondes à l’observer, hésitant entre rire et répondre simplement, puis reprit les rênes du cheval qu’elle voulait débourrer. « Tu sais, ce qui compte pour une femme, ce n’est pas tant l’objet en lui-même que l’intention. Tu peux bien lui apporter une superbe rose de Talendra d’une rareté absolue, ou une trentaine de pâlerettes que tu auras cueillies derrière la grange, elle sera extrêmement touchée de te voir en face d’elle là bas, tu peux en être certain. Il se pourrait bien même qu’elle t’espère et que tu la feras rougir quand elle t’apercevra ! ». Elle esquissa un rire avant de sauter à cru sur la bête.
« Mmh… ». Le forgeron se renfrognait, n’aimant décidément pas que ses émotions puissent émerger à la surface de sa personne. Il tenta tout de même un sourire de remerciement avant de se retourner en lâchant un sempiternelle, « Bon, c’est pas tout ça, j’ai du boulot. Merci des renseignements ! ».
Il se mettait en route pour la forge mais n’avait pas vu les deux jumelles qui étaient apparues derrière lui, aussi discrètes qu’un courant d’air. Il heurta tout d’abord Djane qui, en se dégageant, le repoussa vers Peggy. Tous deux éclatèrent de rire tandis que Nealson restait interdit.
« Oh là ! Les demoiselles Valbran, pour un peu je vous passais sur le corps ! ». Il avait réalisé une sorte de bond en arrière, et fut éberlué par ses propres paroles. « Non ! Bien sûr que non… jamais je… ». Il leva les bras comme s’il abdiquait d'on ne sait quelle guerre.
« Monsieur Bethauld, voilà des paroles bien curieuses… » commença Peggy, « de la part d’un homme comme vous… » termina Djane. Elles avaient toutes deux ce petit air amusé qui perturbait grandement le forgeron. Moquerie ? Intérêt ? Attendrissement ? Séduction ? Il était totalement incapable de saisir ce qui se cachait derrière ces sourires et toutes ces émotions commençaient à lui taper sur le système. Il éructa. « Rhhaaaa ! J’y comprends rien ! ».
Les jumelles n’essayèrent pas de le retenir. A quoi bon, de, toute évidence l’homme débordait de colère comme du lait trop chauffé déborde de la casserole sur le feu. Tandis qu’elles se tournaient vers Matilda pour avoir des nouvelles elles entendirent nettement à quelques mètres de là, le forgeron qui maugréait puis s’exclama. « Bah ! Les femelles ! Toutes les mêmes ! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
En cette après-midi de dimanche, Lysange se tenait assise sur son lit, le buste calé contre deux oreillers, la mine encore un peu endormie d’une sieste écourtée par l’infirmière venue la réveiller, mais ses cheveux coiffés à la va vite attestaient d’une volonté de se présenter au mieux pour son nouveau visiteur, Ted Mangin.
En fin de matinée Marcel Pignac lui avait rendu visite avec des madeleines tout juste sorties du four. Preuve, selon Lysange, que l’intendant nouait une relation régulière avec Ernestine sans rien en dire ni montrer, à moins qu’il se soit fait alpaguer par la petite dame en passant près de chez elle. Cependant son air légèrement fuyant et joyeux cachait mal les signes d’un comportement plus sociable où l’on reconnaissait la marque d’une présence féminine. En ce dimanche il avait l’air pressé, comme s’il était attendu et Lysange eut vite fait de l’imaginer pieds sous la table, souriant devant un poulet rôti et quelques légumes braisés, acceptant avec certes encore un peu de gaucherie, mais non moins de gourmandise, les attentions enveloppantes d’une vieille dame aux petits soins.
Junior était quant à lui passé à l’heure du déjeuner. Il avait donné des nouvelles de la ville et demandé où en était sa lecture du livre qu’il lui avait déposé la veille. Il s’agissait d’une histoire de jeune fille timide amoureuse d’un patron très entreprenant et surtout très savant sur « les choses de la vie », un livre érotique qui avait déjà fait les choux gras de toute la chambrée ainsi que des soignants qui passaient régulièrement.
Pour compenser l’effet embarrassant de ce livre licencieux, Lysange lui avait alors raconté de nouveau, en parlant bien fort pour être entendue de tous, comment le Comte de Bergsang lui avait sauvé la vie, comment elle se retrouvait avec sa cape en laine comme couverture d’appoint et comment il avait quasiment forcé la porte du dispensaire au petit matin du samedi pour venir la saluer avant son départ en mission. Mais Junior avait déclaré ne pas être jaloux de ses prétendants, lui signifiant même qu’il visait plutôt la place de l’ami sur qui on pouvait compter, de celui à qui on pouvait tout raconter, tout demander, vraiment tout, même …. une partie de jambes en l’air, « en toute amitié ». Toute la chambrée en avait profité pour rire avec eux, et Junior avait finalement laissé la jeune femme pour une sieste nécessaire qui venait tout juste d’être écourtée.
Enfin la porte s’ouvrit et Ted apparut, toujours lourdement armé, les cheveux en brosse tout juste sortis du casque et le regard enfiévré de ceux qui ne cessent de se tenir en alerte. Lysange passa rapidement les mains dans ses cheveux et l’accueillit d’un sourire, il avait sa mine des mauvais jours.
Il s’en voulait, bien évidemment, de ne pas avoir été là pour la défendre. Elle avait beau expliquer qu’elle comprenait, qu’il n’y était pour rien, qu’elle ne lui en voulait pas, que la vie est ainsi faite qu’on ne peut tout prévoir, rien n’y faisait, il se pensait coupable, regrettait d’avoir failli, quand bien même Lysange répétait qu’elle seule était responsable de cette agression puisqu’elle avait choisi de sortir malgré son absence.
« En plus, un worgen, Madame. Un worgen !!! ». Il frappait du poing dans sa paume et tout montrait qu’il aurait souhaité pouvoir assommer de ses mains l’agresseur. Nul doute que le worgen n’aurait pas fini au guet urbain mais dans un coin sombre, agonisant. Lysange aurait aimé changer de sujet mais elle ne pouvait ni lui parler du livre qu’elle lisait, ni raconter la venue du Comte ou de Junior, ni même lui demander des nouvelles des employés du domaine, il était bien trop tendu dans sa colère et sa volonté d’en découdre et puis rien ne semblait intéresser Ted sinon le travail. Elle évoqua alors le chien de Marcel et sa venue le matin.
Enfin Il se calma, l’évocation de l’ex intendant l’incita à reprendre son attitude neutre usuelle. D’un ton redevenu détaché il expliqua qu’il avait suivi les ordres de Marcel et enterré Karne derrière la grange, que l’ex intendant était certes affecté mais qu’il semblait avoir pris sur lui pour ne pas trop montrer sa peine.
« Mais…. vous ne pensez pas plutôt qu’il a maintenant quelqu’un qui le soutient…. affectivement ? ». Ted la regarda comme si elle parlait dans une langue inconnue, interloqué. De toute évidence l’éventualité ne l’avait pas traversé et il ne s’en souciait pas. « Enfin… j’veux dire… il a bien changé ces derniers temps, je trouve… non ? ». Ted la regardait toujours avec circonspection, puis lâcha dans un souffle guindé. « Cela ne me regarde pas, Madame, et de toute façon, il a choisi de se mettre à l’écart des affaires du domaine, ce qu’il fabrique à côté ne devrait donc plus vous préoccuper ». Lysange piqua un fard, comme prise en faute de commérage, mais il enchaîna sur le ton de confidence. « Ceci étant, je dois tout de même vous prévenir qu’il a écrit une lettre à Monsieur Fossard, lettre qu’il m’a demandé de déposer au courrier en venant ici ... ».
Sur le coup de l’émotion, Lysange se redressa un peu trop vite dans son lit et grimaça de douleur. « Ah ? Et vous savez ce qu’il lui a écrit ? De quoi il parlait ? De l’agression, ou… ? » . Ted pencha la tête de côté, resta quelques secondes à la regarder comme s’il s’agissait d’un animal étrange, puis se leva dans un bruit de cuir et de métal qui emplit la salle, reprenant une attitude courtoise mais droite et vaguement rigide. « Il ne m’en a rien dit, et ce n’est pas dans mes attributions que de poser des questions. Donc je ne sais rien, sinon que cela semblait urgent. »
Déjà il remettait ses gants, vérifiait qu’il n’oubliait rien, laissait son regard errer sur la pièce comme s’il la découvrait, puis se tourna vers Lysange et la salua brièvement. « Si vous n’avez plus d’autre question, Madame, je vais vous… ».
« Si ! Ted, si j’en ai une !!! ». Le gardien s’immobilisa, à peine étonné.« Je vous écoute ». Elle avait failli oublier alors que c’était de première importance. Elle avait bien réfléchi, seul Ted pourrait peut-être l’aider. Elle avait bien pensé solliciter Junior mais son babillage l’avait tellement amusée qu’elle en avait oublié son médaillon. Elle essaya de condenser ses paroles pour faire une demande la plus professionnelle possible.
« Je porte depuis toute petite un médaillon qui compte beaucoup pour moi, car c’est le seul objet qu’il me reste de mon passé. Je l’ai fait graver à mon nom il y a dix huit mois, en arrivant sur Hurlevent, et je le porte jour et nuit. Or cet homme l’a arraché au moment de l’agression et je ne l’ai donc plus. Soit c’est lui qui l’a encore, soit il est resté devant chez moi, à terre. Vous... vous pourriez vous en enquérir ... s’il vous plaît ? ».
Il la regarda un moment sans la voir, comme s’il classait intérieurement les informations, puis hocha simplement la tête. « Comptez sur moi. Je vais tâcher d’en savoir plus. ». Un second salut tout aussi guindé que le premier, et Lysange se retrouva seule. Elle s’empara alors avec gourmandise du livre offert par Junior pour connaître la suite de cette aventure qui ne manquait pas de piquant.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Le temps passait bien trop lentement au goût de Lysange. Le médecin de garde, Lyze Ghulin avait beau être un modèle de gentillesse et d’attention, les personnes sous ses ordres, d’adorables soignants, il n’en restait pas moins que Lysange n’en pouvait plus de devoir rester allongée dans ce lit sans réussir à bouger le bras gauche et sans pouvoir se débrouiller seule pour tous ces gestes d’ordinaire pourtant si simples. Elle s’ennuyait et rongeait son frein.
En ce début de semaine, elle attendait donc avec impatience les visiteurs qui pourraient égayer sa journée.
La première tête à passer la porte de la chambre fut celle du conseiller Pignac, comme il aimait désormais à se faire appeler. Il était encore une fois porteur d’un petit sachet rempli de madeleines du jour, ce qui commençait à devenir tout de même étonnant, même si Lysange se contenta d’’un merci chaleureux sans aucun sous-entendu.
La veille il était allé à la Garde, comme convenu, et il lui raconta tout ce que sa mémoire lui avait permis de rapporter au garde nain qui avait pris note de sa plainte. L’ex-intendant n’avait oublié aucun détail de ce que son ancienne collaboratrice lui avait raconté, de la conversation dans la taverne en présence de Dame Beckris avec un homme « qui ne semblait pas dangereux, bien que lourd et collant », à l’arrivée in extremis du Comte de Bergsang qui avait empêché l’agresseur, métamorphosé en worgen enragé, de l’assommer encore plus qu’elle ne l’était déjà pour la violenter.
L’agresseur était déjà sous les verrous, la plainte ne servirait donc pas à le retrouver mais probablement à le condamner plus durement. « Vous imaginez, s’il demande à venir chez nous pour muter sa peine en travaux d’intérêt général ? ». Lysange tremblait, n’osant pas regarder son visiteur. Elle avait beau essayer de réagir de façon mature et responsable, l’idée de devoir affronter son agresseur l’inquiétait bien plus qu’elle ne voulait l’admettre. « Lysange… vous êtes l’intendante, désormais. Si vous ne voulez pas accueillir un prisonnier au domaine, celui-là ou un autre, il vous suffit de refuser, c’est très simple ». Le ton de Monsieur Pignac n’avait plus rien de mordant ou désagréable et la jeune femme remercia intérieurement Ernestine d’avoir su, avec ses madeleines et toutes ses attentions, lui permettre d’être cet homme courtois, respectueux, et simplement heureux de vivre qu’il était devenu.
Au moment du départ, elle faillit lui demander de passer le bonjour à la « petite dame », mais s’en abstint. Après tout, rien n’était sûr concernant les changements de l’ancien intendant, mieux valait donc ne pas évoquer sa vie privée sans connaître avec certitude les raisons de cette évolution positive.
La seconde tête à passer la porte fut celle de Matilda qui revenait avec d’autres effets propres et plusieurs informations. La dresseuse rapportait des nouvelles du domaine et de l’ensemble des employés, en particulier la demande de Nealson qui hésitait à passer, ce à quoi Lysange rétorqua qu’elle saurait bien lui faire la conversation pour peu qu’il accepte, lui, de passer le seuil du dispensaire. Matilda avait aussi des nouvelles de la Chancelière Royale puisqu’elle avait pu remettre la lettre de Lysange en mains propres et en avait reçu réponse. La Chancelière avait pris bonne note de l’incapacité de Lysange, se désolait de son agression, et lui proposait de reporter le rendez vous d’une semaine, ce qui rassura la jeune femme.
Enfin la troisième tête à apparaître derrière la porte interloqua Lysange avant de la faire sourire bien malgré elle. C’était Tom, qui avait sur le nez une paire de bésicles dignes de figurer dans un musée des horreurs.
« Comment va ? ». Bien que très heureuse de sa venue, Lysange ne savait pas trop comment lui parler. Avant l’agression, elle l’avait peu vu car il se cachait, et elle savait par Ted qu’il n’arrivait pas à se sortir de la tête des idées de vengeance, à coups de fourche bien placés dans le ventre de « ces foutus nains ».
« Bah… faut bien qu’ça aille. T’as vu mes nouveaux yeux ? ». Il enleva ses lunettes rapidement, montrant son oeil définitivement fermé et les replaça sur son nez d’un air crâne. « Ça rajoute à mon charme, tu trouves pas ? ».
Lysange opina, le sourire attendri. « On peut dire ça. Alors tu t’es remis au travail… avec Barbara ? ». Il esquissa une moue dépitée. « Ouais… j’préfère la compagnie de mes vaches, en fait, là, tu vois. De toute façon, elle se débrouille très bien sans moi pour les légumes maint’nant. J’ai plus besoin de superviser, et c’est tant mieux ».
Elle le sentait triste, déprimé, mais ne savait pas comment le dérider. Elle attrapa le livre offert par Junior et le lui montra, un léger sourire en coin. « T’as vu ce qu’un copain m’a offert ? ». Il observait le livre de loin, sans bouger, impossible de savoir s’il en connaissait ou devinait le contenu. Elle se demanda s’il savait lire, mais n’osa pas lui demander.
Elle reposa le livre sur sa table de chevet. « C’est un roman…une histoire … euh… d’amour, tu vois ? ». Il la regardait, mais impossible de savoir ce qu’il pensait, caché derrière ses lunettes. Il opina simplement. « Mmh… un truc de fillette alors ? Tu lis ça, toi, à ton âge ? ». Son visage restait impassible, même si un petit tic était apparu au coin des lèvres. Lysange dodelina de la tête, embarrassée. « Euh… oui, enfin…. c’est pas le genre de livre qu’on donne à tout âge… ». Elle n’en était pas sûre mais un semblant de sourire commençait à poindre derrière le tic.
« Ce s’rait pas un d’ces romans torrides que les moinillons des bibliothèques se passent sous le manteau, des fois ? ». Elle baissa le nez, le visage rose de confusion. « Ah ? Tu crois ? Je sais pas…. ».
Il éclata d’un rire gras qui emplit toute la salle, se tapant sur les cuisses. « Parce que tu lis des trucs comme ça, toi ? Ben ma cocotte ! Et tu fais ta mijaurée quand j’te d’mande un p’tit baiser de rien du tout ?!? ».Il riait de bon coeur et l’éclat de sa voix emplissait le coeur de Lysange d’une joyeuse sensation.
« Bah ! C’est pas parce que j’ai plaisir à lire ce genre de roman que je vais donner des baisers à tout va, quand même ! ». Il hoqueta d’une colère théâtralisée. « Quoi ? Parce que d’après toi, je suis n’importe qui ? ». Elle rétorqua immédiatement. « Mais… ! Me fais pas dire ce que j’ai pas dit ! ». Le ton était faussement boudeur, le jeu était lancé, Tom redevenait lui-même et Lysange le laissa la malmener sans même réellement se défendre.
Ce n’est que lorsque le dispensaire fut vide de tous ses visiteurs que Tom accepta de quitter Lysange, le sourire aux lèvres. « Bon ! J’file pour la traite. Mais n’oublie pas, hein, je repasse avant la fin de la semaine et j’veux que tu m’racontes tout en détail, sinon c’est moi qui vais raconter aux autres à quoi tu passes tes après-midis ! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Branle-bas de combat dans le dispensaire ou plus exactement dans la chambre que Lysange partage de façon épisodique avec d’autres blessés.
En plein milieu de la nuit, Junior avait réussi à entrer. On ne savait trop s’il était passé par une fenêtre ou par la porte en déjouant l’attention des gardes, toujours est-il qu’il avait fait irruption dans la chambre occupée par Lysange, un chaton dans les bras.
S’étant déshabillé et glissé dans le lit, en caleçon, il avait tout d’abord réveillé la jeune femme d’un baiser sur le front mais tout en maintenant sa main sur sa bouche afin d’éviter qu’elle ne crie. Il espérait probablement terminer gentiment la nuit dans son lit, armé de son chaton et de blagues dont il avait le secret, mais la réaction de Lysange ne lui en laissa pas la possibilité.
Se débattant dès qu’elle avait senti la main du jeune homme sur sa bouche, elle n’avait eu de cesse de le virer de son lit, griffant, râlant, hurlant même, comme si sa vie en dépendait. Bien évidemment Junior n’avait aucune intention malveillante, mais dans la précipitation du moment, les gestes et le comportement de Junior avaient réveillé en elle de très mauvais souvenirs, pourtant enfouis.
Les cris stridents de la jeune femme n’avaient pas tardé à alerter le personnel soignant, et Junior n’avait rien pu faire pour la calmer, tandis que le chaton s’enfuyait à toute volée dans les recoins inaccessibles du dispensaire.
Quand les deux infirmiers de nuit firent irruption dans la chambre, Junior, jeté en bas du lit, s’était empêtré dans les draps que Lysange avait violemment rejetés et la jeune femme se tenait au milieu de la pièce, tendue, remontée, les cheveux en pétard et la mine effarée, prête à en découdre avec Azeroth tout entier en frappant tout intrus qui s’aventurerait à sa portée.
Il avait fallu toute la patience des deux infirmiers pour la calmer et lui faire entendre raison. Elle n’était pas en danger et il ne servait à rien d’ameuter tout le quartier. Junior avait été gentiment sommé de se rhabiller, tandis que Lysange, elle, remise au lit avec une tisane de simples qu’elle n’accepta pas de porter à sa bouche, tellement la peur et le dégout l’habitaient encore.
Après avoir questionné le jeune homme, tout en surveillant du coin de l’oeil la jeune femme, les infirmiers avaient rapidement compris qu’il n’y avait de la part de Junior aucune volonté de nuire et que tout ce bruit n’était que le fruit d’une méprise.
Ils avaient donc attendu que Lysange se calme afin qu’elle puisse expliquer ce qui venait de se passer. La jeune femme avait tout d’abord refusé, les larmes aux yeux, puis raconté à demi mots que quelques années auparavant *, elle avait été agressée par un garçon qui avait profité qu’elle soit attachée à un arbre tandis que ses compères tentaient de voler Benjamin, pour abuser d’elle. Une violence dont le goût vaguement salé lui restait en travers de la gorge, sans qu’elle ait jamais pu l’évacuer.
Au moment de quitter le dispensaire Junior, bien embarrassé d’avoir réveillé ses mauvais démons, avait fait un petit signe à Lysange qui le lui avait rendu avec la même complicité, sans amertume. L’épisode n’aurait probablement aucune incidence sur leur amitié mais ne pourrait pas de si tôt être remisé de nouveau dans les méandres d’une mémoire toujours sélective.
Quand au chaton, nul n’aurait pu dire où il était passé….
* Episode raconté ici ou là.
En plein milieu de la nuit, Junior avait réussi à entrer. On ne savait trop s’il était passé par une fenêtre ou par la porte en déjouant l’attention des gardes, toujours est-il qu’il avait fait irruption dans la chambre occupée par Lysange, un chaton dans les bras.
S’étant déshabillé et glissé dans le lit, en caleçon, il avait tout d’abord réveillé la jeune femme d’un baiser sur le front mais tout en maintenant sa main sur sa bouche afin d’éviter qu’elle ne crie. Il espérait probablement terminer gentiment la nuit dans son lit, armé de son chaton et de blagues dont il avait le secret, mais la réaction de Lysange ne lui en laissa pas la possibilité.
Se débattant dès qu’elle avait senti la main du jeune homme sur sa bouche, elle n’avait eu de cesse de le virer de son lit, griffant, râlant, hurlant même, comme si sa vie en dépendait. Bien évidemment Junior n’avait aucune intention malveillante, mais dans la précipitation du moment, les gestes et le comportement de Junior avaient réveillé en elle de très mauvais souvenirs, pourtant enfouis.
Les cris stridents de la jeune femme n’avaient pas tardé à alerter le personnel soignant, et Junior n’avait rien pu faire pour la calmer, tandis que le chaton s’enfuyait à toute volée dans les recoins inaccessibles du dispensaire.
Quand les deux infirmiers de nuit firent irruption dans la chambre, Junior, jeté en bas du lit, s’était empêtré dans les draps que Lysange avait violemment rejetés et la jeune femme se tenait au milieu de la pièce, tendue, remontée, les cheveux en pétard et la mine effarée, prête à en découdre avec Azeroth tout entier en frappant tout intrus qui s’aventurerait à sa portée.
Il avait fallu toute la patience des deux infirmiers pour la calmer et lui faire entendre raison. Elle n’était pas en danger et il ne servait à rien d’ameuter tout le quartier. Junior avait été gentiment sommé de se rhabiller, tandis que Lysange, elle, remise au lit avec une tisane de simples qu’elle n’accepta pas de porter à sa bouche, tellement la peur et le dégout l’habitaient encore.
Après avoir questionné le jeune homme, tout en surveillant du coin de l’oeil la jeune femme, les infirmiers avaient rapidement compris qu’il n’y avait de la part de Junior aucune volonté de nuire et que tout ce bruit n’était que le fruit d’une méprise.
Ils avaient donc attendu que Lysange se calme afin qu’elle puisse expliquer ce qui venait de se passer. La jeune femme avait tout d’abord refusé, les larmes aux yeux, puis raconté à demi mots que quelques années auparavant *, elle avait été agressée par un garçon qui avait profité qu’elle soit attachée à un arbre tandis que ses compères tentaient de voler Benjamin, pour abuser d’elle. Une violence dont le goût vaguement salé lui restait en travers de la gorge, sans qu’elle ait jamais pu l’évacuer.
Au moment de quitter le dispensaire Junior, bien embarrassé d’avoir réveillé ses mauvais démons, avait fait un petit signe à Lysange qui le lui avait rendu avec la même complicité, sans amertume. L’épisode n’aurait probablement aucune incidence sur leur amitié mais ne pourrait pas de si tôt être remisé de nouveau dans les méandres d’une mémoire toujours sélective.
Quand au chaton, nul n’aurait pu dire où il était passé….
* Episode raconté ici ou là.
- Pbs liens.:
- EDIT : Apparemment les liens ne fonctionnent pas, il s'agit du texte Annonciation, dont voici les deux url : http://maisonfossard.forumactif.com/t97-une-annonciation et sinon sur KTRP : http://kirintor-rp.1fr1.net/t8759-une-annonciation
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Enfin le séjour arrivait à son terme. En début de matinée du 22, Lysange avait reçu l’assurance qu’elle pourrait sortir dès le lendemain matin, une fois la visite du médecin en chef réalisée et les papiers de sortie signés.
L’incident de la nuit passée était oublié, l’utilisation du bras gauche envisagée avec moins de crainte et de douleur, les cicatrices qui n’allaient pas manquer d’orner sa poitrine acceptées, les projets reprenaient vie et l’avenir redevenait radieux, ou presque.
Le chaton offert par Junior était réapparu, en catimini, et Lysange avait eu le temps de le nourrir et le câliner avant que le personnel soignant ne le fasse fuir de nouveau. De toute façon, Junior aurait dû y réfléchir, les animaux quels qu’ils soient étaient interdits dans un dispensaire. Il valait donc mieux que le chaton, surnommé Joe l’inconnu , en souvenir d’un certain Joe de ses amis pour qui elle avait même écrit une chanson*, reste caché le temps qu’elle sorte, car elle avait bien l’intention de le ramener chez elle.
Comme chaque jour, Monsieur Pignac était passé, tôt dans la mâtinée, mais cette fois-ci la bonne humeur n’était pas au rendez-vous. Il n’avait pas avec lui le sempiternel petit sachet de madeleines fraîches et tout sourire l’avait quitté. Il avait retrouvé ses manières de patriarche machiste, de nouveau bougon, désagréable et décidé à retrouver Lysange au travail le plus rapidement possible, quand bien même elle aurait eu besoin d’un peu plus de repos.
Le seul point positif de sa visite était la lettre reçue de la Garde à la maison Fossard, écrite par le Capitaine Milburn et stipulant que la plainte de Tom et Lysange concernant leur agression par les nains de la Guilde du Fer avait été traitée par leurs services. Le Capitaine rajoutait que le Guet Urbain avait été déchargé de toute l’affaire de la guilde du Fer, qui était donc passée sous une autre juridiction. La lettre était accompagnée d’une petite bourse contenant cinq pièces d’or, ce que Marcel Pignac avait commenté d’un ton acerbe « quelques jours de geôle et 5 pièces d’or pour un oeil…. franchement ça donne envie de rendre la pareille ! ».
Après la visite de celui qu’en son for intérieur elle appelait de nouveau « le vieux », assorti même de de l’injure « schnock » qu’elle avait apprise de Ben, Lysange avait perdu un peu de son enthousiasme et c’est avec circonspection qu’elle accueillit Ted, s’attendant presque à devoir descendre un peu plus bas sur l’échelle du contentement.
Mais le gardien était aussi neutre qu’un robot mécanique fraichement sorti d’un atelier d’ingénierie gnome, et il avait de surcroit parfaitement rempli son office. En effet il lui rapportait son médaillon, trouvé coincé entre deux pavés, éraflé mais toujours lisible, sans la chaînette qui, elle, avait probablement été ramassée.
Lysange retrouva donc le sourire. La chaînette n’avait pas une aussi grande importance que le médaillon qui représentait tout de même tout son héritage. Elle aurait aimé remercier Ted à la hauteur du plaisir qu’il lui faisait, d’une accolade chaleureuse, par exemple, sans aller imaginer des embrassades, mais il lui semblait impossible d’entrer en contact avec lui de façon un peu personnelle sans avoir le sentiment de le déranger. Elle se contenta donc d’un simple merci, cordial mais sans effusion, ce qui eut l’air de lui suffire. Il n’avait pas grand chose à ajouter, sinon que trois loups venaient d’intégrer le domaine et avaient été confiés pour dressage aux jumelles naines. Il repartit assez vite, sans que Lysange ait réussi à le dérider.
Plus tard c’est Nealson qui débarqua, presque à reculons. De toute évidence il s’était forcé à venir avant qu’elle ne quitte le dispensaire. En vêtements de travail mais propre comme un sou neuf, il apportait une petite boites de friandises empaquetées, le visage rouge et le sourire contrit. « J’t’aurais bien apporté les fleurs que j’avais cueillies c’matin sur le domaine, mais comme tu rentres demain, à c’qu’on m’a dit, j’les ai mises dans ton bureau et j’suis passé en ville. Tiens ! Tu pourras les manger chez toi.» Il tendait son paquet devant lui comme s’il voulait s’en débarrasser avant qu’il ne lui explose à la figure. Lysange le lui prit des mains, presque aussi embarrassée que lui, et l’ouvrit en cherchant de quoi alimenter une conversation qu’elle peinait à imaginer fluide dans ce contexte.
Finalement, du goût des friandises, « délicieuses », ils en étaient arrivés à parler des rêves amoureux de Lysange, en passant par les madeleines d’Ernestine pour Monsieur Pignac, « c’est fou quand même comme il a pu changer d’attitude, même si ce matin, c’était pas ça », les changements qu’une femme pouvait apporter dans la vie d’un homme, « bien sûr que j’en rêve et que j’aimerais que ça se passe bien, mais faut avouer que ça fait peur ! C’est que ça peut être emmerdant une bonne femme quand même !», les repas donnés à la maison commune où Il arrivait que Nealson puisse déjeuner aux côtés de Matilda, « si tu crois que je vous ai pas vus, à vous faire des oeillades que même Ted il peut comprendre qu’il se passe un truc entre vous ! », puis les questionnements de l’un et de l’autre sur leur désir de mettre fin au célibat, « Bah, si bien sûr que j’en rêve toujours, mais je finis des fois par me dire que c’est fichu par ici, et que je ferais peut-être mieux de repartir sur ma route, toute seule, loin d’ici », les difficultés envisagées de la vie de couple, les compromis qu’il fallait faire, « forcément qu’il y en a, des compromis, mais t’es toujours obligé d’en faire, juste pour vivre, ou alors tu te trouves une grotte au fin fond du désert de Tanaris et t’en sors plus ! », les histoires de couple se disputant pour un oui ou un non, voire un chat, le chaton apporté par Junior, le fait que Lysange l’ait surnommé Joe l’inconnu, la chanson écrite un an auparavant, pour finir par Joe, le seul homme que Lysange regrettait de ne pas avoir eu le temps d’aimer, « même si c’est pas une bonne idée de rêver à un truc, quand au fond c’est pas possible, parce que tant que t’as des signes pour y croire, ça va, tu tiens le coup, mais dès que ça devient évident que t’as cru à un mirage, ben là, c’est sûr, tu tombes de bien plus haut et peut-être que tu pourras même plus te relever», sentence que Nealson avait abondé d'un hochement grave.
De fil en aiguille, le forgeron passa une bonne partie de l’après-midi au dispensaire, assis sur un tabouret, papotant et riant avec la nouvelle intendante, comme si le contexte hospitalier, qui pourtant ne s’y prêtait pas, les avait tous deux aidés à dépasser leurs craintes. Lorsque l’infirmier annonça la fin des visites, la boite de friandises était vide, Lysange arborait un visage rose de joie et Nealson, détendu, s’étonna à voix haute de ne pas avoir vu le temps passer.
L’incident de la nuit passée était oublié, l’utilisation du bras gauche envisagée avec moins de crainte et de douleur, les cicatrices qui n’allaient pas manquer d’orner sa poitrine acceptées, les projets reprenaient vie et l’avenir redevenait radieux, ou presque.
Le chaton offert par Junior était réapparu, en catimini, et Lysange avait eu le temps de le nourrir et le câliner avant que le personnel soignant ne le fasse fuir de nouveau. De toute façon, Junior aurait dû y réfléchir, les animaux quels qu’ils soient étaient interdits dans un dispensaire. Il valait donc mieux que le chaton, surnommé Joe l’inconnu , en souvenir d’un certain Joe de ses amis pour qui elle avait même écrit une chanson*, reste caché le temps qu’elle sorte, car elle avait bien l’intention de le ramener chez elle.
Comme chaque jour, Monsieur Pignac était passé, tôt dans la mâtinée, mais cette fois-ci la bonne humeur n’était pas au rendez-vous. Il n’avait pas avec lui le sempiternel petit sachet de madeleines fraîches et tout sourire l’avait quitté. Il avait retrouvé ses manières de patriarche machiste, de nouveau bougon, désagréable et décidé à retrouver Lysange au travail le plus rapidement possible, quand bien même elle aurait eu besoin d’un peu plus de repos.
Le seul point positif de sa visite était la lettre reçue de la Garde à la maison Fossard, écrite par le Capitaine Milburn et stipulant que la plainte de Tom et Lysange concernant leur agression par les nains de la Guilde du Fer avait été traitée par leurs services. Le Capitaine rajoutait que le Guet Urbain avait été déchargé de toute l’affaire de la guilde du Fer, qui était donc passée sous une autre juridiction. La lettre était accompagnée d’une petite bourse contenant cinq pièces d’or, ce que Marcel Pignac avait commenté d’un ton acerbe « quelques jours de geôle et 5 pièces d’or pour un oeil…. franchement ça donne envie de rendre la pareille ! ».
Après la visite de celui qu’en son for intérieur elle appelait de nouveau « le vieux », assorti même de de l’injure « schnock » qu’elle avait apprise de Ben, Lysange avait perdu un peu de son enthousiasme et c’est avec circonspection qu’elle accueillit Ted, s’attendant presque à devoir descendre un peu plus bas sur l’échelle du contentement.
Mais le gardien était aussi neutre qu’un robot mécanique fraichement sorti d’un atelier d’ingénierie gnome, et il avait de surcroit parfaitement rempli son office. En effet il lui rapportait son médaillon, trouvé coincé entre deux pavés, éraflé mais toujours lisible, sans la chaînette qui, elle, avait probablement été ramassée.
Lysange retrouva donc le sourire. La chaînette n’avait pas une aussi grande importance que le médaillon qui représentait tout de même tout son héritage. Elle aurait aimé remercier Ted à la hauteur du plaisir qu’il lui faisait, d’une accolade chaleureuse, par exemple, sans aller imaginer des embrassades, mais il lui semblait impossible d’entrer en contact avec lui de façon un peu personnelle sans avoir le sentiment de le déranger. Elle se contenta donc d’un simple merci, cordial mais sans effusion, ce qui eut l’air de lui suffire. Il n’avait pas grand chose à ajouter, sinon que trois loups venaient d’intégrer le domaine et avaient été confiés pour dressage aux jumelles naines. Il repartit assez vite, sans que Lysange ait réussi à le dérider.
Plus tard c’est Nealson qui débarqua, presque à reculons. De toute évidence il s’était forcé à venir avant qu’elle ne quitte le dispensaire. En vêtements de travail mais propre comme un sou neuf, il apportait une petite boites de friandises empaquetées, le visage rouge et le sourire contrit. « J’t’aurais bien apporté les fleurs que j’avais cueillies c’matin sur le domaine, mais comme tu rentres demain, à c’qu’on m’a dit, j’les ai mises dans ton bureau et j’suis passé en ville. Tiens ! Tu pourras les manger chez toi.» Il tendait son paquet devant lui comme s’il voulait s’en débarrasser avant qu’il ne lui explose à la figure. Lysange le lui prit des mains, presque aussi embarrassée que lui, et l’ouvrit en cherchant de quoi alimenter une conversation qu’elle peinait à imaginer fluide dans ce contexte.
Finalement, du goût des friandises, « délicieuses », ils en étaient arrivés à parler des rêves amoureux de Lysange, en passant par les madeleines d’Ernestine pour Monsieur Pignac, « c’est fou quand même comme il a pu changer d’attitude, même si ce matin, c’était pas ça », les changements qu’une femme pouvait apporter dans la vie d’un homme, « bien sûr que j’en rêve et que j’aimerais que ça se passe bien, mais faut avouer que ça fait peur ! C’est que ça peut être emmerdant une bonne femme quand même !», les repas donnés à la maison commune où Il arrivait que Nealson puisse déjeuner aux côtés de Matilda, « si tu crois que je vous ai pas vus, à vous faire des oeillades que même Ted il peut comprendre qu’il se passe un truc entre vous ! », puis les questionnements de l’un et de l’autre sur leur désir de mettre fin au célibat, « Bah, si bien sûr que j’en rêve toujours, mais je finis des fois par me dire que c’est fichu par ici, et que je ferais peut-être mieux de repartir sur ma route, toute seule, loin d’ici », les difficultés envisagées de la vie de couple, les compromis qu’il fallait faire, « forcément qu’il y en a, des compromis, mais t’es toujours obligé d’en faire, juste pour vivre, ou alors tu te trouves une grotte au fin fond du désert de Tanaris et t’en sors plus ! », les histoires de couple se disputant pour un oui ou un non, voire un chat, le chaton apporté par Junior, le fait que Lysange l’ait surnommé Joe l’inconnu, la chanson écrite un an auparavant, pour finir par Joe, le seul homme que Lysange regrettait de ne pas avoir eu le temps d’aimer, « même si c’est pas une bonne idée de rêver à un truc, quand au fond c’est pas possible, parce que tant que t’as des signes pour y croire, ça va, tu tiens le coup, mais dès que ça devient évident que t’as cru à un mirage, ben là, c’est sûr, tu tombes de bien plus haut et peut-être que tu pourras même plus te relever», sentence que Nealson avait abondé d'un hochement grave.
De fil en aiguille, le forgeron passa une bonne partie de l’après-midi au dispensaire, assis sur un tabouret, papotant et riant avec la nouvelle intendante, comme si le contexte hospitalier, qui pourtant ne s’y prêtait pas, les avait tous deux aidés à dépasser leurs craintes. Lorsque l’infirmier annonça la fin des visites, la boite de friandises était vide, Lysange arborait un visage rose de joie et Nealson, détendu, s’étonna à voix haute de ne pas avoir vu le temps passer.
La chanson de Joe l’inconnu (sur un air de Joe le taxi)
Joe l’inconnu
Y ronchonne beaucoup
Donne pas l’air comme ça
Ses lunettes jaunes
Il les porte pour cacher son cœur
Ou p’t’et sa peur
Qu’on le cerne
Qu’on l’emmerde
Dans sa vie à lui
Dans ses fringues
Le style de Joe
C’est la rage
Le vieux rock des ménages.
Joe l’inconnu
C’est son style
La rage sur un fil
Dégage de là
Il est comme ça
Rage sur un fil.
Joe - Joe - Joe
Près de lui
Le style de Joe percute
C’est la rage
Le vieux rock qui cache le cœur.
Vas-y Joe
Vas-y Joe
Vas-y fonce
Dans la nuit où dans la zone,
Joe l’inconnu
Et son style à part,
Joe l’inconnu
Et sa rage au cœur.
Joe - Joe - Joe
Joe l’inconnu
C’est son style
La rage sur un fil
Dégage de là.
Joe l’inconnu
C’est pas un perdu,
Joe l’inconnu
C’est pas un vendu,
Joe l’inconnu
Gagne à êtr’ connu.
Vas-y Joe
Vas-y fonce
Dans la nuit où dans la zone
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Dès qu’elle avait eu l’autorisation de sortie du dispensaire, Lysange s’était envolée sans attendre son reste. Junior était passé la prendre, preuve qu’il ne lui en voulait pas, ce qui la rassura d’autant plus qu’elle avait bien besoin d’un chevalier servant pour rentrer chez elle dans l’état où elle était.
Au moment du départ, elle n’avait pas trouvé le petit animal auquel elle s’était attachée, mais c’était tout simplement parce que Junior s’en était occupé et Joe le chat trônait déjà comme un pacha sur son lit. Le jeune homme avait rangé et nettoyé son appartement et même si elle n’aimait pas le savoir chez elle en son absence, elle appréciait ses petites attentions.
Ayant une réunion très importante le lundi soir, elle avait décidé de passer son dimanche seule et tranquille, à se reposer en câlinant le chat qui avait rapidement trouvé ses marques. Au terme de cette semaine compliquée, tout avait l’air d’aller au mieux, malgré les douleurs à l’épaule et celles, bien plus pernicieuses, au torse qui risquait d’être irrémédiablement marqué. Si bien que lorsque l’heure de la réunion était enfin arrivée elle ne s’attendait pas à être aussi inquiète et tendue,.
Il faut dire que c’était une entrevue avec une personne d’une grande notoriété et que l’enjeu de la réunion était d’une très grande importance pour la suite des affaires de la Maison Fossard, et donc des siennes, mais aussi de toute la cité. Tout cela était tellement important que Monsieur Pignac, bien que morose depuis la mort de son chien Karne, et le fait qu’il semblait avoir dégagé de sa vie la pauvre petite dame qui se plaignait à qui voulait l’entendre que « ce ne sont pas manières de se faire bousculer ainsi à son âge », l’intendant avait décidé de sortir de sa torpeur déprimante pour accompagner Lysange.
« Ne vous inquiétez pas » avait-il dit, « je ne vais que pour vous soutenir. Mais comprenez bien qu’il essentiel qu’Oscar puisse avoir un compte-rendu précis de la situation. Vous êtes peut-être une intendante efficace et responsable, mais vous êtes encore jeune et votre émotivité n’est pas toujours adaptée à une prise en charge objective de la situation».
Lysange se savait émotive, beaucoup trop, et de ce fait susceptible de pâtir d’une empathie qui, en d’autres moments, lui convenait tout à fait. Quand elle était en confiance, son émotivité se révélait pleine de découvertes délicieuses et enthousiasmantes. Mais si l’environnement devenait hostile, ou flou, ou même incertain en termes de désirs et d’intention, tout pouvait chavirer, en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire, et elle se retrouvait au coeur d’un maelström de sentiments, de sensations et de pensées toutes plus déstabilisantes les unes que les autres.
Aussi n’avait-elle rien pu rétorquer au « vieux Schnock » dont l’attitude froide et rigide lui semblait parfois comme la lame glacée du Roi Liche juste au dessus de sa tête. Elle ne pouvait pas l’empêcher de venir, surtout avec ce type d’arguments, mais elle pouvait, elle devait même, lui montrer qu’il avait peut-être tort.
Face à Gwaenadynn Farral, elle avait donc décidé d’être elle-même, une femme bien trop émotive, certes, mais que l’on disait futée, positive et volontaire, une personne sur qui l’on pouvait compter, et dont la compagnie semblait appréciée.
Aussi, lorsque Marcel Pignac lui avait pour la seconde fois coupé la parole, n’avait-elle pas hésité à le sermonner, tout simplement. Prenant un ton quasi condescendant, ou vaguement maternel, elle lui avait intimé l’ordre, ou du moins l’avait-elle ressenti comme tel sur le moment, d’attendre son tour, d’autant qu’il voulait parler de « l’affaire des explosifs » alors qu’il n’était même pas présent.
A voir sa tête et sa façon de piquer du nez puis de tirer sur les poils de sa barbichette de façon quasi maladive, elle pensait qu’elle l’avait probablement blessé et s’attendait à un retour de bâton digne de figurer dans les annales de quelque académie de formation. Mais l’entretien s’était avéré concluant à bien des égards et c’est un Monsieur Pignac presque guilleret qui avait accepté d’aller « fêter ça » dans une taverne.
Même si son attitude dénotait une bien meilleure attention portée aux autres, comme par exemple l’effort qu’il faisait pour alléger ses difficultés face au cheval qu’il fallait monter, il n’avait pas pu s’empêcher de déverser sa bile devant Dame Beckris avec l’autre «affaire », celle de la réunion qui avait coûté son oeil à Tom. Le vieil homme ne décolérait pas, et rabâchait toute l’histoire dès qu’il le pouvait. Pour autant, la prise en compte officielle de ses déboires par la Chancellerie Royale lui redonnait tout de même un semblant de joie de vivre dont Lysange voulait profiter sans retenue. Tout pouvait encore arriver, ses responsabilités lui être retirées, le patron pouvait obliger Monsieur Pignac à reprendre du service, et elle pouvait tout aussi bien se retrouver obligée de plier l’échine devant un Pignac ragaillardi.
Aussi ce soir-là, tandis q’elle rentrait chez elle sous la protection de Ted Mangin, elle ne chercha pas à cacher ses questionnements et ses craintes. Elle se sentait seule, avait besoin de parler, et elle savait que son garde du corps garderait secrètes toutes ses pensées, même s’il trouvait qu’elle se montrait parfois trop vulnérable. Il la rassura comme il put. « Vous pensez être seule mais il vous soutient, madame. Jamais il ne vous le dira, car ce n’est pas dans ses manières, mais il vous aime bien, vous savez. Je ne crois pas qu’il vous reprenne ce qu’il vous a donné, sauf si cela vient de plus haut. Et ça, personne ne sait, même lui. »
C’est finalement Joe le chat qui eut le dernier mot, bien que muet. Tout pouvait arriver, le meilleur comme le pire, et Ted avait eu beau lui dire qu’ «on est toujours seul », on ne lui enlèverait pas de l’idée que cette solitude intime, certes bien réelle, pouvait être adoucie par un peu d’amour, quand bien même ce serait par bribes, par miettes ou par simples vibrations. « Parce que, tu comprends, je t’aime bien, le chat, mais j’espère bien qu’un jour tu devras laisser ta place dans mon lit … ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
La nouvelle avait parcouru la totalité du domaine Fossard comme une traînée de poudre, Lysange avait reçu un étui en cuir, simple mais de belle facture. ll avait été apporté par un coursier qui l’avait raconté aux soeurs Valbran qui passaient non loin. Lesquelles soeurs, en bonnes artisanes du cuir, s’étaient alors enquises de sa provenance, ce que le coursier avait été bien en peine de dire, stipulant simplement que l’étui était arrivé au port le matin même, en provenance d’un bateau du Norfendre.
L’étui avait été apporté directement au bureau, et Monsieur Pignac, matinal comme le sont souvent les vieux, l’avait immédiatement attrapé avec une sorte d’empressement, comme s’il lui était destiné, avant de s’apercevoir que l’étiquette portait le nom de Demoiselle Lysange Delabay, ce qui, aux dires de la personne qui faisait le ménage et avait observé la scène, avait eu l’air de l’agacer prodigieusement.
Toujours selon Maria, une femme entre deux âges qui passait tous les matins de bonne heure pour remettre en ordre bureau et maisonnée, le vieil homme avait essayé d’ouvrir l’étui, s’était un peu énervé en pestant, puis, comme il se sentait observé, il avait houspillé la femme pour son travail « qui manquait suffisamment de perfection pour qu’elle ne baille pas aux corneilles la moitié de son temps» avant de poser l’étui sur le bureau de Lysange en lâchant « si vous la voyez, dites à Lysange qu’elle a probablement reçu un courrier du patron, voilà qui devrait l’intéresser ».
Si bien qu’à peine après avoir fermé le grand portail qui clôturait le domaine, la nouvelle était arrivée aux oreilles ébahies de l’intendante : le patron lui aurait écrit et l’étui trônait sur son bureau, « il faut que vous sachiez que le vieux a cherché à l’ouvrir, mais heureusement il y avait Maria qui rangeait vos affaires, et il n’a pas osé devant elle », ce qui donna des ailes à la jeune femme.
Par chance, ou peut-être opportunément, Monsieur Pignac n’ était plus là lorsqu’elle arriva au bureau, et l’étui émettait une vibration intense, ou tout comme pour la jeune femme qui, la veille encore, se plaignait de n’avoir aucune nouvelle et d’angoisser à l’idée de ne pas être à la hauteur des attentes du Grand patron pour les projets à venir.
C’est donc avec fébrilité qu’elle ouvrit l’étui, après l’avoir admiré en le tournant dans ses mains comme on le ferait d’un cadeau du Grand Père Hiver, et déroula le parchemin, le coeur battant.
Le parchemin était simple mais de qualité, comme l’étui, et l’écriture qui courait avec régularité et vigueur sur la totalité de la feuille indiquait que son auteur avait l’assurance virile.
Dire que cette lettre la combla d’une joie quasi infantile pourrait sembler inapproprié pour une simple lettre professionnelle, adressée par un responsable d’entreprise à l’une de ses employés, mais c’est pourtant ainsi que la jeune femme la perçut.
Lisant et relisant le courrier, buvant avec gourmandise le flot régulier et fluide des phrases, se délectant de chaque expression, souriant à l’implicite qu’elle imaginait derrière certains termes pourtant très simples et uniquement professionnels, elle était restée près d’une heure dans le bureau sans bouger de sa chaise.
Lorsqu’elle sortit enfin, elle resplendissait d’un mélange de joie et de fierté. Le patron lui faisait confiance, et cela changeait tout. Non seulement il connaissait vraiment son existence, ce dont elle doutait encore la veille, mais il comprenait ses difficultés à devoir supporter Pignac et évoquait sa venue et donc une future collaboration.
Après avoir hésité, finalement assez peu, elle montra la lettre à tous ceux qui s’en enquéraient, et ils étaient suffisamment nombreux pour que cela l’occupe toute la matinée. Les unes remarquaient le ton respectueux, les autres les marques de confiance, tous lui faisaient remarquer que cette attention portée à sa paye, conservée malgré sa semaine passée au dispensaire, plus l’augmentation annoncée pour le poste d’intendante, étaient la preuve qu’elle comptait pour lui.
Mais Lysange n’écoutait pas les arguments matérialistes, assez peu sensible aux biens matériels, de quelque nature que ce soit. Seuls comptaient les commentaires sur les expressions et les sensations qu’elles pouvaient signifier, les seules richesses dont elle rêvait, et expliquait par son enfance. «Tu peux bien être la personne la plus riche de tout Azeroth, disait Ben’ qui savait de quoi il parlait, si t’as pas des gens qui savent qui tu es, au fond du fond, et te respectent pour ce qu’ils en perçoivent, t’es rien qu’une bourse vide » racontait-elle dans un rire, « mais il me disait ça quand je savais pas ce que pouvait être aussi une bourse, faut dire !!!! ».
L’apogée de sa joie fut de montrer l’étui et la lettre lors du déjeuner, sans pour autant laisser le parchemin filer entre toutes les mains tant il était devenu précieux au fil des heures. Se trouvaient là de nombreux employés qui, tous, la félicitèrent comme si elle venait de recevoir un diplôme, ce qui, à la voir, n’avait rien d’exagéré.
L’étui avait été apporté directement au bureau, et Monsieur Pignac, matinal comme le sont souvent les vieux, l’avait immédiatement attrapé avec une sorte d’empressement, comme s’il lui était destiné, avant de s’apercevoir que l’étiquette portait le nom de Demoiselle Lysange Delabay, ce qui, aux dires de la personne qui faisait le ménage et avait observé la scène, avait eu l’air de l’agacer prodigieusement.
Toujours selon Maria, une femme entre deux âges qui passait tous les matins de bonne heure pour remettre en ordre bureau et maisonnée, le vieil homme avait essayé d’ouvrir l’étui, s’était un peu énervé en pestant, puis, comme il se sentait observé, il avait houspillé la femme pour son travail « qui manquait suffisamment de perfection pour qu’elle ne baille pas aux corneilles la moitié de son temps» avant de poser l’étui sur le bureau de Lysange en lâchant « si vous la voyez, dites à Lysange qu’elle a probablement reçu un courrier du patron, voilà qui devrait l’intéresser ».
Si bien qu’à peine après avoir fermé le grand portail qui clôturait le domaine, la nouvelle était arrivée aux oreilles ébahies de l’intendante : le patron lui aurait écrit et l’étui trônait sur son bureau, « il faut que vous sachiez que le vieux a cherché à l’ouvrir, mais heureusement il y avait Maria qui rangeait vos affaires, et il n’a pas osé devant elle », ce qui donna des ailes à la jeune femme.
Par chance, ou peut-être opportunément, Monsieur Pignac n’ était plus là lorsqu’elle arriva au bureau, et l’étui émettait une vibration intense, ou tout comme pour la jeune femme qui, la veille encore, se plaignait de n’avoir aucune nouvelle et d’angoisser à l’idée de ne pas être à la hauteur des attentes du Grand patron pour les projets à venir.
C’est donc avec fébrilité qu’elle ouvrit l’étui, après l’avoir admiré en le tournant dans ses mains comme on le ferait d’un cadeau du Grand Père Hiver, et déroula le parchemin, le coeur battant.
Le parchemin était simple mais de qualité, comme l’étui, et l’écriture qui courait avec régularité et vigueur sur la totalité de la feuille indiquait que son auteur avait l’assurance virile.
Dire que cette lettre la combla d’une joie quasi infantile pourrait sembler inapproprié pour une simple lettre professionnelle, adressée par un responsable d’entreprise à l’une de ses employés, mais c’est pourtant ainsi que la jeune femme la perçut.
Lisant et relisant le courrier, buvant avec gourmandise le flot régulier et fluide des phrases, se délectant de chaque expression, souriant à l’implicite qu’elle imaginait derrière certains termes pourtant très simples et uniquement professionnels, elle était restée près d’une heure dans le bureau sans bouger de sa chaise.
Lorsqu’elle sortit enfin, elle resplendissait d’un mélange de joie et de fierté. Le patron lui faisait confiance, et cela changeait tout. Non seulement il connaissait vraiment son existence, ce dont elle doutait encore la veille, mais il comprenait ses difficultés à devoir supporter Pignac et évoquait sa venue et donc une future collaboration.
Après avoir hésité, finalement assez peu, elle montra la lettre à tous ceux qui s’en enquéraient, et ils étaient suffisamment nombreux pour que cela l’occupe toute la matinée. Les unes remarquaient le ton respectueux, les autres les marques de confiance, tous lui faisaient remarquer que cette attention portée à sa paye, conservée malgré sa semaine passée au dispensaire, plus l’augmentation annoncée pour le poste d’intendante, étaient la preuve qu’elle comptait pour lui.
Mais Lysange n’écoutait pas les arguments matérialistes, assez peu sensible aux biens matériels, de quelque nature que ce soit. Seuls comptaient les commentaires sur les expressions et les sensations qu’elles pouvaient signifier, les seules richesses dont elle rêvait, et expliquait par son enfance. «Tu peux bien être la personne la plus riche de tout Azeroth, disait Ben’ qui savait de quoi il parlait, si t’as pas des gens qui savent qui tu es, au fond du fond, et te respectent pour ce qu’ils en perçoivent, t’es rien qu’une bourse vide » racontait-elle dans un rire, « mais il me disait ça quand je savais pas ce que pouvait être aussi une bourse, faut dire !!!! ».
L’apogée de sa joie fut de montrer l’étui et la lettre lors du déjeuner, sans pour autant laisser le parchemin filer entre toutes les mains tant il était devenu précieux au fil des heures. Se trouvaient là de nombreux employés qui, tous, la félicitèrent comme si elle venait de recevoir un diplôme, ce qui, à la voir, n’avait rien d’exagéré.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Tandis que lorsque Lysange arrivait pour une petite pause en cours d’après-midi, Barbara était à préparer les paniers hebdomadaires, remplis de légumes, qu’elle irait distribuer aux réfugiés. Elle adressa un sourire à l’intendante. « Alors ? Vous avez entendu la rumeur ? ».
Lysange la regarda avec circonspection. « Euh… non, laquelle ? ». La fermière l’observait. « Sur l’arrivée de Monsieur Fossard ! On parle bien de la fin de ce mois ci, non ? ».
Lysange resta interdite un bon moment, le regard froncé. « …….. Comment ça ? Qui vous a dit ça ? C’est Pignac ?». Barbara secoua la tête. « Oh non, je ne crois pas, c’est aux cuisines, et cela semblait venir de Maria. Mais vous savez, une rumeur, difficile de savoir d’où elle vient, peut-être de Monsieur Pignac ? ».
Lysange changea de ton. « Mais….. mais justement ! Qui vous dit qu’elle n’est pas fausse, puisque c’est une rumeur ?!! ». Barbara s’était arrêtée de remplir ses paniers et la regardait, étonnée. «Je ne comprends pas… vous n’êtes pas contente ? Vous semblez inquiète ».
La jeune femme se redressa comme un ressort sortant d’une boîte à mystères. « Forcément que je suis inquiète !! Vous vous rendez compte !!! Toute ma vie en dépend là !!! ». La rousse retint un rire. « Lysange.. n’exagérez pas.. je vous reconnais bien là… votre vie ne dépend pas de l‘arrivée du grand patron ».
Mais Lysange s’échauffait de ne pas être prise au sérieux. « Mais si ! Vous croyez que je suis à mon aise, à tout faire toute seule ? Et bien pas du tout !! Je suis pas autocrate comme Marcel Pignac moi ! ». Elle fronça le nez. « Mais bon… je m’habitue faut dire… et chaque jour qui passe je.. oui je m’habitue à tout gérer seule ».
L’intendante semblait tout à coup perplexe, et Barbara l’observait, amusée. « Oui…. et ? ». Lysange la regarda, sous le coup d’une prise de conscience. « Comment je vais faire une fois qu’il sera là ? Il va vouloir tout prendre en mains, c’est normal !! Il va s’enfermer avec Marcel dans le petit bureau et dehors la bonne femme ! ».
Barbara éclata d’un rire franc qui étonna les ouvriers travaillant plus loin. « Vous avez une bien curieuse opinion des hommes, Lysange ». Mais la jeune femme n’en démordait pas. « Bah !!! osez me dire que ça ne se passe pas comme ça des fois ! Et puis je suis désolée, mais m’sieur Pignac, hein… ». Elle faisait un geste de la main signifiant qu’il n’était pas loin de penser ainsi.
Barbara tenta de reprendre son sérieux, mais son sourire perdurait. « Je vous l’accorde, cela ne se passe pas toujours très bien pour les femmes, et Monsieur Pignac vous a mené la vie dure. Mais la lettre que m’avez montrée laisse présager d’une autre façon de faire. Cet homme là, je parle de Monsieur Fossard, il n’a pas l’air de faire la différence entre un homme et une femme, du moment que le travail est bien fait, vous ne croyez pas ? »
Lysange opina vaguement, encore méfiante. « Mmh… moi je crois que ce que je vois. Et pour le moment… je l’ai vu, le bonhomme… et.. bon… on peut pas dire que ça s’est vraiment très bien passé, tout de même… ». Elle grimaça pour montrer combien elle se méfiait. Barbara vint lui prendre le bras. « Je crois que vous vous inquiétez pour rien, même si je comprends. Selon moi, vous avez tout à gagner ». Il restait un fond de défiance. « Mouais…. qui vivra verra comme on dit ».
Ce n’est que bien plus tard, en toute fin de journée, qu’elle finit par admettre que cette annonce pouvait effectivement être une bonne nouvelle. Elle venait de passer une bien étrange soirée en compagnie de l’homme à l’écharpe, cet inconnu qui l’avait sauvée face au worgen. Il n’avait eu de cesse, tout au long de cette soirée passée à la Chope puis au port, de chercher à déstabiliser son garde du corps qui, lui, avait été d’une patience exemplaire.
Ted était, selon Lysange, un modèle de rigueur professionnelle, et elle avait toute confiance en lui. Si cet homme là, qui ne lui voulait que du bien, pensait comme Barbara que cela allait la décharger, l’aider et lui rendre la vie plus facile, il n’y avait peut-être pas de raisons de s’inquiéter.
C’est donc sur cette idée qu’elle s’endormit ce soir-là, se demandant tout de même ce qui avait bien pu inciter Jarod, l’homme à l’écharpe, à vouloir passer cette soirée en sa compagnie.
Lysange la regarda avec circonspection. « Euh… non, laquelle ? ». La fermière l’observait. « Sur l’arrivée de Monsieur Fossard ! On parle bien de la fin de ce mois ci, non ? ».
Lysange resta interdite un bon moment, le regard froncé. « …….. Comment ça ? Qui vous a dit ça ? C’est Pignac ?». Barbara secoua la tête. « Oh non, je ne crois pas, c’est aux cuisines, et cela semblait venir de Maria. Mais vous savez, une rumeur, difficile de savoir d’où elle vient, peut-être de Monsieur Pignac ? ».
Lysange changea de ton. « Mais….. mais justement ! Qui vous dit qu’elle n’est pas fausse, puisque c’est une rumeur ?!! ». Barbara s’était arrêtée de remplir ses paniers et la regardait, étonnée. «Je ne comprends pas… vous n’êtes pas contente ? Vous semblez inquiète ».
La jeune femme se redressa comme un ressort sortant d’une boîte à mystères. « Forcément que je suis inquiète !! Vous vous rendez compte !!! Toute ma vie en dépend là !!! ». La rousse retint un rire. « Lysange.. n’exagérez pas.. je vous reconnais bien là… votre vie ne dépend pas de l‘arrivée du grand patron ».
Mais Lysange s’échauffait de ne pas être prise au sérieux. « Mais si ! Vous croyez que je suis à mon aise, à tout faire toute seule ? Et bien pas du tout !! Je suis pas autocrate comme Marcel Pignac moi ! ». Elle fronça le nez. « Mais bon… je m’habitue faut dire… et chaque jour qui passe je.. oui je m’habitue à tout gérer seule ».
L’intendante semblait tout à coup perplexe, et Barbara l’observait, amusée. « Oui…. et ? ». Lysange la regarda, sous le coup d’une prise de conscience. « Comment je vais faire une fois qu’il sera là ? Il va vouloir tout prendre en mains, c’est normal !! Il va s’enfermer avec Marcel dans le petit bureau et dehors la bonne femme ! ».
Barbara éclata d’un rire franc qui étonna les ouvriers travaillant plus loin. « Vous avez une bien curieuse opinion des hommes, Lysange ». Mais la jeune femme n’en démordait pas. « Bah !!! osez me dire que ça ne se passe pas comme ça des fois ! Et puis je suis désolée, mais m’sieur Pignac, hein… ». Elle faisait un geste de la main signifiant qu’il n’était pas loin de penser ainsi.
Barbara tenta de reprendre son sérieux, mais son sourire perdurait. « Je vous l’accorde, cela ne se passe pas toujours très bien pour les femmes, et Monsieur Pignac vous a mené la vie dure. Mais la lettre que m’avez montrée laisse présager d’une autre façon de faire. Cet homme là, je parle de Monsieur Fossard, il n’a pas l’air de faire la différence entre un homme et une femme, du moment que le travail est bien fait, vous ne croyez pas ? »
Lysange opina vaguement, encore méfiante. « Mmh… moi je crois que ce que je vois. Et pour le moment… je l’ai vu, le bonhomme… et.. bon… on peut pas dire que ça s’est vraiment très bien passé, tout de même… ». Elle grimaça pour montrer combien elle se méfiait. Barbara vint lui prendre le bras. « Je crois que vous vous inquiétez pour rien, même si je comprends. Selon moi, vous avez tout à gagner ». Il restait un fond de défiance. « Mouais…. qui vivra verra comme on dit ».
Ce n’est que bien plus tard, en toute fin de journée, qu’elle finit par admettre que cette annonce pouvait effectivement être une bonne nouvelle. Elle venait de passer une bien étrange soirée en compagnie de l’homme à l’écharpe, cet inconnu qui l’avait sauvée face au worgen. Il n’avait eu de cesse, tout au long de cette soirée passée à la Chope puis au port, de chercher à déstabiliser son garde du corps qui, lui, avait été d’une patience exemplaire.
Ted était, selon Lysange, un modèle de rigueur professionnelle, et elle avait toute confiance en lui. Si cet homme là, qui ne lui voulait que du bien, pensait comme Barbara que cela allait la décharger, l’aider et lui rendre la vie plus facile, il n’y avait peut-être pas de raisons de s’inquiéter.
C’est donc sur cette idée qu’elle s’endormit ce soir-là, se demandant tout de même ce qui avait bien pu inciter Jarod, l’homme à l’écharpe, à vouloir passer cette soirée en sa compagnie.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
C’était étrange, du moins l’était-ce suffisamment aux yeux de Lysange pour qu’elle ne puisse s’empêcher de se questionner. Et quand elle se questionnait, ça bouclait vite dans sa tête…
Tout tournait autour de l’arrivée annoncée du grand patron pour la fin du mois, et de ce qui allait en découler pour sa vie quotidienne. En effet, malgré les commentaires rassurants des uns et des autres, subsistait une grande inconnue : quel allait être son rôle véritable, une fois le propriétaire Fossard revenu du Norfendre, et que l’ensemble des contacts qu’elle gérait seule auraient vite fait de la reléguer au second plan.
En effet, certains évènements récents, qu’elle jugeait étranges, tendaient à prouver que tout risquait de véritablement changer.
Ainsi, le soir de la réunion avec la Chancelière Farral, en présence de Marcel Pignac pour une fois de sortie, elle était allée boire un verre à la Chope, avec lui puisqu’il était satisfait de la teneur de la réunion. Il n’y avait là rien de bien extraordinaire. Pourtant la patronne l’avait vouvoyée, sans même vraiment la voir. Elle en avait été vaguement blessée, d’autant que la présence de son agresseur au marché ne l’avait pas aidée à prendre du recul. Doubhée semblait très perturbée face au vieux qui, il faut bien l’admettre, la mettait mal à l’aise en rabâchant sa rage contre ceux qui avaient abîmé Tom. La présence de Marcel Pignac semblait donc la rendre invisible.
Par contre, après la visite dimanche soir d’un employé du Septième Verre venu admirer les bêtes sauvages et reparti ravi d’avoir pu voir fauves et ours, elle avait voulu offrir un remontant à Monsieur Mangin qui avait fait office de montreur alors qu’il n’aimait pas approcher les ours. Et là, même invisibilité mais en l’absence de Pignac ! C’était cette fois l’Amiral qui l’avait superbement ignorée. Il était passé devant elle, entouré de ses marins, et avait sciemment évité de la regarder, empêchant donc tout contact. Elle n’avait pas su réagir et le regrettait. Se pouvait-il que l’absence du vieil homme indique aux yeux du Chancelier des Affaires Urbaines qu’il n’y avait aucune attention à porter à la nouvelle intendante ? C’était vraiment étrange.
Lysange en était là de ses réflexions qu’elle raccordait à une petite phrase lancée d’un air narquois par l’homme à l’écharpe, quelques jours plus tôt. « Vous aimez bien être le centre du monde, n’est ce pas ? ». Ce à quoi elle avait réagi par la négative, vaguement fâchée. Mais avec ces deux événements, tout à la fois similaires, sur son invisibilité, et contraires de par la présence de l’ancien intendant, il y avait de quoi s’interroger.
Aimait-elle à ce point être « le centre du monde », l’avait-elle même jamais ressenti, vécu, ou espéré ?
Il était évident que depuis les dix mois de sa présence en ville, elle avait changé. Elle l’avait d’ailleurs expliqué à Jarod, face au port. Mais avait-elle à ce point changé qu’elle n’acceptait plus de rester au second plan sans en éprouver quelque dépit.
Elle avait beau tourner et retourner le problème, elle n’arrivait pas à se satisfaire de cette simple assertion. Oui, elle était au centre du monde, avant, tout simplement parce que ce monde était le sien, et juste le sien. Ce serait tout de même dommage de n’être pas au centre du monde que l’on se construit jour après jour. Mais ce monde était à sa mesure, petit, simple, léger, sans autre responsabilité que d’écrire le meilleur texte possible.
Comment était son monde, désormais ? Bien plus vaste, certainement, et elle ne s’en plaignait pas. Mais elle était désormais bien loin d’en être le centre. Elle n’était qu’un satellite parmi d’autres, et ne sortirait jamais de ce rôle de collaboratrice, certes efficace et zélée, mais soumise aux aléas des décisions prises au dessus d’elle. D’où cette invisibilité qui l’avait blessée, un peu, vaguement, juste assez pour se retrouver à mouliner dans sa tête comme un hamster dans sa cage.
Devait-elle s’en satisfaire ? Pouvait-elle même s’en satisfaire ? On lui aurait posé la question il y a une dizaine de jours, elle aurait répondu par l’affirmative. Mais cette rumeur grandissante du retour du grand patron la perturbait bien plus qu’elle ne le souhaitait. Et si…. si… si…. trop de questions restaient en suspens.
Il était peut-être temps de retrouver un peu de son autonomie, en écrivant peut-être, histoire de ne pas se retrouver totalement inerte face à un patron qui ne s’embarrasserait probablement pas de ses états d’âme.
Tout tournait autour de l’arrivée annoncée du grand patron pour la fin du mois, et de ce qui allait en découler pour sa vie quotidienne. En effet, malgré les commentaires rassurants des uns et des autres, subsistait une grande inconnue : quel allait être son rôle véritable, une fois le propriétaire Fossard revenu du Norfendre, et que l’ensemble des contacts qu’elle gérait seule auraient vite fait de la reléguer au second plan.
En effet, certains évènements récents, qu’elle jugeait étranges, tendaient à prouver que tout risquait de véritablement changer.
Ainsi, le soir de la réunion avec la Chancelière Farral, en présence de Marcel Pignac pour une fois de sortie, elle était allée boire un verre à la Chope, avec lui puisqu’il était satisfait de la teneur de la réunion. Il n’y avait là rien de bien extraordinaire. Pourtant la patronne l’avait vouvoyée, sans même vraiment la voir. Elle en avait été vaguement blessée, d’autant que la présence de son agresseur au marché ne l’avait pas aidée à prendre du recul. Doubhée semblait très perturbée face au vieux qui, il faut bien l’admettre, la mettait mal à l’aise en rabâchant sa rage contre ceux qui avaient abîmé Tom. La présence de Marcel Pignac semblait donc la rendre invisible.
Par contre, après la visite dimanche soir d’un employé du Septième Verre venu admirer les bêtes sauvages et reparti ravi d’avoir pu voir fauves et ours, elle avait voulu offrir un remontant à Monsieur Mangin qui avait fait office de montreur alors qu’il n’aimait pas approcher les ours. Et là, même invisibilité mais en l’absence de Pignac ! C’était cette fois l’Amiral qui l’avait superbement ignorée. Il était passé devant elle, entouré de ses marins, et avait sciemment évité de la regarder, empêchant donc tout contact. Elle n’avait pas su réagir et le regrettait. Se pouvait-il que l’absence du vieil homme indique aux yeux du Chancelier des Affaires Urbaines qu’il n’y avait aucune attention à porter à la nouvelle intendante ? C’était vraiment étrange.
Lysange en était là de ses réflexions qu’elle raccordait à une petite phrase lancée d’un air narquois par l’homme à l’écharpe, quelques jours plus tôt. « Vous aimez bien être le centre du monde, n’est ce pas ? ». Ce à quoi elle avait réagi par la négative, vaguement fâchée. Mais avec ces deux événements, tout à la fois similaires, sur son invisibilité, et contraires de par la présence de l’ancien intendant, il y avait de quoi s’interroger.
Aimait-elle à ce point être « le centre du monde », l’avait-elle même jamais ressenti, vécu, ou espéré ?
Il était évident que depuis les dix mois de sa présence en ville, elle avait changé. Elle l’avait d’ailleurs expliqué à Jarod, face au port. Mais avait-elle à ce point changé qu’elle n’acceptait plus de rester au second plan sans en éprouver quelque dépit.
Elle avait beau tourner et retourner le problème, elle n’arrivait pas à se satisfaire de cette simple assertion. Oui, elle était au centre du monde, avant, tout simplement parce que ce monde était le sien, et juste le sien. Ce serait tout de même dommage de n’être pas au centre du monde que l’on se construit jour après jour. Mais ce monde était à sa mesure, petit, simple, léger, sans autre responsabilité que d’écrire le meilleur texte possible.
Comment était son monde, désormais ? Bien plus vaste, certainement, et elle ne s’en plaignait pas. Mais elle était désormais bien loin d’en être le centre. Elle n’était qu’un satellite parmi d’autres, et ne sortirait jamais de ce rôle de collaboratrice, certes efficace et zélée, mais soumise aux aléas des décisions prises au dessus d’elle. D’où cette invisibilité qui l’avait blessée, un peu, vaguement, juste assez pour se retrouver à mouliner dans sa tête comme un hamster dans sa cage.
Devait-elle s’en satisfaire ? Pouvait-elle même s’en satisfaire ? On lui aurait posé la question il y a une dizaine de jours, elle aurait répondu par l’affirmative. Mais cette rumeur grandissante du retour du grand patron la perturbait bien plus qu’elle ne le souhaitait. Et si…. si… si…. trop de questions restaient en suspens.
Il était peut-être temps de retrouver un peu de son autonomie, en écrivant peut-être, histoire de ne pas se retrouver totalement inerte face à un patron qui ne s’embarrasserait probablement pas de ses états d’âme.
Invité- Invité
Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Sujets similaires
» [01/07/39] Convocation de FOSSARD, Oscar
» Toutes les annonces de "Chez Mao"
» Une explosion chez les dingues.
» Massacre chez un noble
» Affiche : Ouverture de la taverne "Chez Mao" !
» Toutes les annonces de "Chez Mao"
» Une explosion chez les dingues.
» Massacre chez un noble
» Affiche : Ouverture de la taverne "Chez Mao" !
Page 1 sur 3
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum