Au fil des jours chez Fossard.
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Si vraiment vous voulez savoir quand il arrive, écrivez lui donc !! Mais je doute qu’il reçoive votre courrier. Regardez donc une carte des mers et vous vous rendrez compte par vous même combien les routes maritimes sont tout aussi dangereuses que les routes terrestres, voire plus !». Le ton était sec et agacé et Marcel Pignac peinait à ne pas montrer combien il lui en voulait d’avoir reçu une lettre cachetée du patron. Lettre qu’il n’avait pu lire, comme la plupart des employés du domaine.
Il aurait pourtant dû être plus amène, la présentation de bêtes sur les quais s’étant très bien passée, hormis une altercation due à un homme qui les avait agressés en vitupérant et hurlant sa rage à travers les rues, ce qui avait eu pour effet d’attirer à eux une foule de badauds. Peut-être n’étaient ils tous venus que pour voir Marcel Pignac et Lysange Delabay se faire encore une fois agressés, mais peu importaient les raisons de leur venue, ils s’étaient précipités en nombre pour voir ce qui se passait et la soirée s’était avérée particulièrement productive en termes de notoriété et de commandes.
Mais il fallait croire qu’il n’y avait plus grand chose qui fasse plaisir au vieil homme qui n’avait de cesse de faire le vide autour de lui, personnellement ou professionnellement.
Sur le moment Lysange s’en était trouvée toute bête, mais l’idée avait fait son chemin tout au long de la nuit. Et en fin de mâtinée, il y avait une foultitude de papiers mis en boule dans la poubelle qui se trouvait sous son bureau.
Cher Monsieur Fossard,
Savoir que vous allez revenir bientôt nous a tous fait grand plaisir. Aussi, afin de préparer au mieux votre venue, j’aimerais savoir si….
Monsieur Fossard,
Je vous remercie de votre courrier et reviens vers vous pour avoir des précisions quant à la date de votre arrivée. En effet….
Mr Fossard,
J’ai pris bonne note de votre retour.
Auriez vous la possibilité de nous confirmer la date de votre arrivée.
En effet….
Finalement, au terme d’une longue série d’essais, elle décida d’en rester là.
Voilà qui n’était pas du tout dans sa nature et elle savait que ce faisant elle allait vivre des jours voire des semaines difficiles. Mais il n’y avait apparemment rien qu’elle ne puisse tenter qui ne soit stupide ou mal interprété. Elle devait simplement attendre. Compliqué mais faisable, du moins réussit-elle à s’en convaincre tandis qu’au loin sonnait la cloche annonçant le déjeuner.
Il serait bien temps d’aviser lorsque se déclarerait la prochaine crise émotionnelle.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais... je... ». Marcel Pignac la foudroyait du regard. « Vous… quoi ? C’est au dessus de vos forces d’aller nous prendre un rendez-vous ? ». Lysange regardait Marcel Pignac, interdite. «Mais non ! Bien sûr que non ! Mais si j’avais pu connaître la raison de ce rendez-vous j’aurais pu... ». Il lui coupa la parole, sèchement. « Vous en saurez plus lors du rendez-vous, puisque vous y serez !!!! ». La jeune femme prit sur elle en se mordant jusqu’au sang l’intérieur de la joue. Elle se contenta de soupirer, un goût de rage au fond de la gorge. « ...bien, j’irai ce soir avec Ted »
Le soir même il avait donc fallu se rendre en ville, tâcher de trouver la greffière de la Chancellerie afin de prendre rendez-vous avec l’Amiral, pour le compte de Môssieur Pignac.
« Et il ne vous a pas expliqué la raison de ce rendez-vous ? ». Monsieur Mangin suivait la jeune femme qui marchait d’un pas alerte en pestant contre le vieil homme. « Pensez vous !!! Rien !!! La seule chose que je sais c’est que je dois être présente et que c’est en lien avec ce projet que je gère pourtant seule depuis des semaines !!! Comme si tout à coup je n’étais pas digne de m’occuper de la personnalité qu’est l’Amiral !!! ».
Ted marchait à ses côtés sans cesser de surveiller tout ce qui traversait son périmètre proche. « C’est peut-être une demande de Monsieur Fossard ? ». Lysange sursauta et se retourna vers lui. « Et alors ?!? Je ne suis pas l’intendante ?!?! Pourquoi tout à coup c’est lui qui doit se faire valoir ? Non ! Vous voulez savoir ce que je pense ? ». Le garde du corps peinait à cacher son amusement, il secoua la tête. « Je suis sûre que tout ça c’est pour se donner de l’importance ! Il aurait bien pu m’expliquer pourquoi on doit le voir ! Mais non, ça serait trop pour lui de me montrer du respect ! J’en ai marre, vous savez, mais vraiment marre ! »
Le garde du corps ne souriait plus. « Il faut tenir madame, il est sur le départ et il ne vous arrive pas à la cheville. Voilà pourquoi il agit de la sorte, il n’accepte toujours pas l’importance que vous avez prise pour tous et surtout pour Monsieur Fossard »
« Mmh... j’en sais rien, franchement. » Le rendez-vous avait été demandé et la conversation continuait sur le perron de l’hôtel de ville. « J’ai l’impression de m’être racornie.... Non ? ». Elle regardait Ted, un peu perdue, mais il n’allait mieux. « Racornie ?!? ». Elle secoua la tête en soupirant. « Bah... vous m’avez pas connue avant, vous pouvez pas comparer. De toute façon, y’a guère que Junior qui pourrait le dire... Mais si, moi je trouve que je me suis racornie, ou... fermée, je sais pas... j’ai perdu en légèreté, en amabilité, je suis plus dure.... c’est sûrement à cause de lui. Et je pense que les gens le sentent. Y’a qu’à voir comment ça se passe : au mieux on m’ignore et au pire on me traite de chieuse.»
Le garde du corps semblait touché par ses confidences. « Vous ne devriez pas dire ça, madame, c’est faux. Et puis qu’avez vous à faire de l’avis des gens. Vous ne savez pas qui vous êtes ? »
Mais la question n’était pas là pour Lysange. Le problème n’était pas de prendre en compte, ou pas, l’opinion des uns et des autres, d’agir en fonction des avis positifs ou négatifs sur son comportement, de se laisser influencer par ce sentiment qu’on ne la voyait pas comme elle était réellement. Non, ce qui la préoccupait, de plus en plus, c’était de n’avoir aucune idée sur ce que le grand patron attendait d’elle, une fois qu’il serait revenu du Norfendre.
Tout laissait à penser, selon sa lettre, qu’il n’allait pas l’évincer, qu’au contraire même il comptait sur elle pour faciliter son arrivée, mais la jeune femme ne réussissait plus à surmonter les brimades et les rodomontades de Marcel Pignac sans en souffrir, en silence.
« Je ne pensais pas que vous appréciiez à ce point ma compagnie, c’est vrai, parce que… vous savez, j’ai parfois l’impression que… ». Ted avait fermé les volets de sa petite maison sur les quais et s’apprêtait à repartir, pressé de rentrer dans les faubourgs. Elle se contenta d’un Bonne nuit, sans insister sur ce qu’elle ressentait et dont il ne voulait apparemment rien entendre.
« Bien sûr que je sais qui je suis ! N’empêche… j’ai de plus en plus l’impression ne plus être moi-même, justement ! » pensait-elle en montant se coucher.
Le soir même il avait donc fallu se rendre en ville, tâcher de trouver la greffière de la Chancellerie afin de prendre rendez-vous avec l’Amiral, pour le compte de Môssieur Pignac.
« Et il ne vous a pas expliqué la raison de ce rendez-vous ? ». Monsieur Mangin suivait la jeune femme qui marchait d’un pas alerte en pestant contre le vieil homme. « Pensez vous !!! Rien !!! La seule chose que je sais c’est que je dois être présente et que c’est en lien avec ce projet que je gère pourtant seule depuis des semaines !!! Comme si tout à coup je n’étais pas digne de m’occuper de la personnalité qu’est l’Amiral !!! ».
Ted marchait à ses côtés sans cesser de surveiller tout ce qui traversait son périmètre proche. « C’est peut-être une demande de Monsieur Fossard ? ». Lysange sursauta et se retourna vers lui. « Et alors ?!? Je ne suis pas l’intendante ?!?! Pourquoi tout à coup c’est lui qui doit se faire valoir ? Non ! Vous voulez savoir ce que je pense ? ». Le garde du corps peinait à cacher son amusement, il secoua la tête. « Je suis sûre que tout ça c’est pour se donner de l’importance ! Il aurait bien pu m’expliquer pourquoi on doit le voir ! Mais non, ça serait trop pour lui de me montrer du respect ! J’en ai marre, vous savez, mais vraiment marre ! »
Le garde du corps ne souriait plus. « Il faut tenir madame, il est sur le départ et il ne vous arrive pas à la cheville. Voilà pourquoi il agit de la sorte, il n’accepte toujours pas l’importance que vous avez prise pour tous et surtout pour Monsieur Fossard »
« Mmh... j’en sais rien, franchement. » Le rendez-vous avait été demandé et la conversation continuait sur le perron de l’hôtel de ville. « J’ai l’impression de m’être racornie.... Non ? ». Elle regardait Ted, un peu perdue, mais il n’allait mieux. « Racornie ?!? ». Elle secoua la tête en soupirant. « Bah... vous m’avez pas connue avant, vous pouvez pas comparer. De toute façon, y’a guère que Junior qui pourrait le dire... Mais si, moi je trouve que je me suis racornie, ou... fermée, je sais pas... j’ai perdu en légèreté, en amabilité, je suis plus dure.... c’est sûrement à cause de lui. Et je pense que les gens le sentent. Y’a qu’à voir comment ça se passe : au mieux on m’ignore et au pire on me traite de chieuse.»
Le garde du corps semblait touché par ses confidences. « Vous ne devriez pas dire ça, madame, c’est faux. Et puis qu’avez vous à faire de l’avis des gens. Vous ne savez pas qui vous êtes ? »
Mais la question n’était pas là pour Lysange. Le problème n’était pas de prendre en compte, ou pas, l’opinion des uns et des autres, d’agir en fonction des avis positifs ou négatifs sur son comportement, de se laisser influencer par ce sentiment qu’on ne la voyait pas comme elle était réellement. Non, ce qui la préoccupait, de plus en plus, c’était de n’avoir aucune idée sur ce que le grand patron attendait d’elle, une fois qu’il serait revenu du Norfendre.
Tout laissait à penser, selon sa lettre, qu’il n’allait pas l’évincer, qu’au contraire même il comptait sur elle pour faciliter son arrivée, mais la jeune femme ne réussissait plus à surmonter les brimades et les rodomontades de Marcel Pignac sans en souffrir, en silence.
« Je ne pensais pas que vous appréciiez à ce point ma compagnie, c’est vrai, parce que… vous savez, j’ai parfois l’impression que… ». Ted avait fermé les volets de sa petite maison sur les quais et s’apprêtait à repartir, pressé de rentrer dans les faubourgs. Elle se contenta d’un Bonne nuit, sans insister sur ce qu’elle ressentait et dont il ne voulait apparemment rien entendre.
« Bien sûr que je sais qui je suis ! N’empêche… j’ai de plus en plus l’impression ne plus être moi-même, justement ! » pensait-elle en montant se coucher.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Tranquillement assis Marcel Pignac la regardait ranger les verres, tasses et bouteilles des boissons qui avaient été servies lors de la réunion. Il était question de l’arrivée imminente du grand patron et il s’étonnait. « Mais qu’est ce qui vous inquiète tant ? Quand on craint une rencontre c’est que l’on a quelque chose à cacher…. Vous avez quelque chose à vous reprocher Lysange ? ».
La jeune femme avait bondi, arguant qu’elle ne savait même pas mentir sans se faire démasquer. « Mais non !!! C’est juste que…. vous oubliez que je l’ai rencontré, moi, l’été dernier dans le Nord*, et ça ne s’était pas très bien passé, faut dire, alors … ben je me demande s’il aura oublié ou si…. ».
Ses craintes étaient irrationnelles et elle s’en rendait bien compte, mais ne réussissait pas à se convaincre que seuls comptaient les commentaires élogieux de la lettre arrivée récemment.
De plus Marcel Pignac était attentif, sans la hargne qu’elle lui connaissait, il ne faisait peut-être que vouloir l’aider. Mieux, ou pire ! En tout fin de réunion, il l’avait définie comme « un modèle de féminité » devant le Duc Fingal d’Althain et le Comte Gilderoy de Bergsang qui, lui, venait de vanter son esprit, ce qui avait eu pour effet de l’embarrasser encore plus.
Se pouvait-il que l’arrivée imminente du grand patron incite l’ancien l’intendant à instaurer un climat de confiance entre eux, avant son départ qu’il n’osait annoncer ? Voilà qui la questionnait presque autant que l’attitude à adopter face à celui dont elle craignait peut-être sans raison l’arrivée.
Elle en était donc toute retournée au moment de rentrer chez elle sous la protection de Monsieur Mangin, et elle aurait bien aimé lui demander ce qu’il pensait des commentaires sur sa féminité, si c’était, venant du vieil homme, une moquerie larvée ou un réel compliment. Mais comme à son habitude le garde du corps gardait ses distances, lui sortant du «madame » qui ne permettait pas beaucoup de possibilités de se confier, surtout sur un sujet aussi futile.
En se couchant ce soir-là, la tête farcie de questions, il lui sembla que le temps semblait s’être figé depuis quelques jours.
Tous travaillaient bien à la préparation de l’événement prévu et partiellement annoncé, mais à chaque fois qu’arrivait un détail à régler, une personne à contacter, une décision à prendre, le nom d’Oscar Fossard résonnait pour clore le débat. Il déciderait, il agirait, il ferait, il …. Au final tout tournait autour de son arrivée et même s’il était logique qu’on s’en réfère au propriétaire du domaine, cette attente devenait tout bonnement insupportable.
Mais avait-elle quelque chose à se reprocher…
Elle tournait et se retournait dans son lit en réfléchissant. Lorsqu’elle avait quitté le campement pour ramener le cheval commandé, elle n’avait pas su remercier, exprimer sa satisfaction d’un séjour somme toute agréable, voire même évoquer le souhait de les revoir. Trop de colère l’habitait. Mais n’était-ce pas de sa faute si cela s’était terminé sur un sentiment d’échec. Après tout, s’il l’avait laissée monter son ours, c’est bien qu’il l’en pensait capable. Certes, il avait montré des signes de moquerie en la mettant au défi, mais il l’avait bien laissée grimper sur son animal dressé, sans un mot. Certes encore, il avait été froid et distant au moment du départ, mais n’était-ce pas tout simplement parce qu’elle montrait, elle, des signes évidents d’évitement. Elle s’en souvenait encore très bien, une certaine rage l’habitait et il n’en était peut-être pas vraiment la cause. Et puis sa lettre était élogieuse, ses mots ne comportaient aucune ambiguïté, il semblait vouloir travailler avec elle, peut-être même se reposer sur elle pour certaines tâches.
En fait, se disait-elle tandis que le sommeil la gagnait, si elle avait bien une chose à se reprocher, c’était de n’avoir pas su lui rendre compte de son retour à Hurlevent, et par la suite de son travail. Elle avait fui toute possibilité de contact, se cachant derrière Marcel Pignac. Elle s’était enfoncée dans son impression négative, sans du tout chercher à comprendre ou rétablir une potentielle autre vérité.
«Bon... ben c’est comme d’hab’ quoi... tu moulines et tu moulines, toute seule dans ton coin, mais au final y’a rien qui te dit que ça va aussi mal que tu crois... si ça se trouve, il espère bien pouvoir se reposer sur toi.... comme si de rien n’était... ben oui, il s’est rien passé l'été dernier, rien de grave en tout cas, tout ça c’est dans ta tête, encore une fois... tu vas voir... ça va bien se passer en fait.... ».
Le lendemain matin, les voisins de Lysange Delabay l’entendirent chanter à tue-tête par la fenêtre ouverte tandis que les cloches de la cathédrale sonnaient les huit heures.
* épisode raconté sur le forum Fossard ici : http://maisonfossard.forumactif.com/t116-voyage-en-decouvertes ou sur KTRP avec le même nom.
La jeune femme avait bondi, arguant qu’elle ne savait même pas mentir sans se faire démasquer. « Mais non !!! C’est juste que…. vous oubliez que je l’ai rencontré, moi, l’été dernier dans le Nord*, et ça ne s’était pas très bien passé, faut dire, alors … ben je me demande s’il aura oublié ou si…. ».
Ses craintes étaient irrationnelles et elle s’en rendait bien compte, mais ne réussissait pas à se convaincre que seuls comptaient les commentaires élogieux de la lettre arrivée récemment.
De plus Marcel Pignac était attentif, sans la hargne qu’elle lui connaissait, il ne faisait peut-être que vouloir l’aider. Mieux, ou pire ! En tout fin de réunion, il l’avait définie comme « un modèle de féminité » devant le Duc Fingal d’Althain et le Comte Gilderoy de Bergsang qui, lui, venait de vanter son esprit, ce qui avait eu pour effet de l’embarrasser encore plus.
Se pouvait-il que l’arrivée imminente du grand patron incite l’ancien l’intendant à instaurer un climat de confiance entre eux, avant son départ qu’il n’osait annoncer ? Voilà qui la questionnait presque autant que l’attitude à adopter face à celui dont elle craignait peut-être sans raison l’arrivée.
Elle en était donc toute retournée au moment de rentrer chez elle sous la protection de Monsieur Mangin, et elle aurait bien aimé lui demander ce qu’il pensait des commentaires sur sa féminité, si c’était, venant du vieil homme, une moquerie larvée ou un réel compliment. Mais comme à son habitude le garde du corps gardait ses distances, lui sortant du «madame » qui ne permettait pas beaucoup de possibilités de se confier, surtout sur un sujet aussi futile.
En se couchant ce soir-là, la tête farcie de questions, il lui sembla que le temps semblait s’être figé depuis quelques jours.
Tous travaillaient bien à la préparation de l’événement prévu et partiellement annoncé, mais à chaque fois qu’arrivait un détail à régler, une personne à contacter, une décision à prendre, le nom d’Oscar Fossard résonnait pour clore le débat. Il déciderait, il agirait, il ferait, il …. Au final tout tournait autour de son arrivée et même s’il était logique qu’on s’en réfère au propriétaire du domaine, cette attente devenait tout bonnement insupportable.
Mais avait-elle quelque chose à se reprocher…
Elle tournait et se retournait dans son lit en réfléchissant. Lorsqu’elle avait quitté le campement pour ramener le cheval commandé, elle n’avait pas su remercier, exprimer sa satisfaction d’un séjour somme toute agréable, voire même évoquer le souhait de les revoir. Trop de colère l’habitait. Mais n’était-ce pas de sa faute si cela s’était terminé sur un sentiment d’échec. Après tout, s’il l’avait laissée monter son ours, c’est bien qu’il l’en pensait capable. Certes, il avait montré des signes de moquerie en la mettant au défi, mais il l’avait bien laissée grimper sur son animal dressé, sans un mot. Certes encore, il avait été froid et distant au moment du départ, mais n’était-ce pas tout simplement parce qu’elle montrait, elle, des signes évidents d’évitement. Elle s’en souvenait encore très bien, une certaine rage l’habitait et il n’en était peut-être pas vraiment la cause. Et puis sa lettre était élogieuse, ses mots ne comportaient aucune ambiguïté, il semblait vouloir travailler avec elle, peut-être même se reposer sur elle pour certaines tâches.
En fait, se disait-elle tandis que le sommeil la gagnait, si elle avait bien une chose à se reprocher, c’était de n’avoir pas su lui rendre compte de son retour à Hurlevent, et par la suite de son travail. Elle avait fui toute possibilité de contact, se cachant derrière Marcel Pignac. Elle s’était enfoncée dans son impression négative, sans du tout chercher à comprendre ou rétablir une potentielle autre vérité.
«Bon... ben c’est comme d’hab’ quoi... tu moulines et tu moulines, toute seule dans ton coin, mais au final y’a rien qui te dit que ça va aussi mal que tu crois... si ça se trouve, il espère bien pouvoir se reposer sur toi.... comme si de rien n’était... ben oui, il s’est rien passé l'été dernier, rien de grave en tout cas, tout ça c’est dans ta tête, encore une fois... tu vas voir... ça va bien se passer en fait.... ».
Le lendemain matin, les voisins de Lysange Delabay l’entendirent chanter à tue-tête par la fenêtre ouverte tandis que les cloches de la cathédrale sonnaient les huit heures.
* épisode raconté sur le forum Fossard ici : http://maisonfossard.forumactif.com/t116-voyage-en-decouvertes ou sur KTRP avec le même nom.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais … » . Barbara avait du mal à suivre le débit de Lysange, qui s’animait et racontait, volubile, sa soirée de la veille. « … il est arrivé comme ça, en plein rendez vous ? Vous n’étiez pas prévenue ? ».
« Mais non !!!! Et moi j’étais aux enclos, avec le client, en pleine visite, et là je l’entends hurler le nom de Pignac ! J’ai pas reconnu tout de suite la voix, forcément, c’est pas comme si je l’avais vu la veille, hein… « . Barbara terminait sa commande du jour, écoutant avec un plaisir évident les histoires de la jeune intendante. « Et… donc ? Il a fait quoi ? Il était comment ? Comme dans vos souvenirs ? ».
Habillée pour le dressage qu’elle pratiquait à ses heures perdues, Lysange sauta presque sur ses pieds. « Mais non ! Mais alors, pas du tout, hein !!! Pas du tout, du tout !!! Je sais pas si c’est d’avoir passé tant de temps en mer, ou si c’est qu’il était tout content de venir reprendre les affaires, ou si c’est moi qui était mal lunée quand je l’ai vu … mais … non, il était pas du tout comme dans mon souvenir, le contraire même ! ».
Barbara lui tendit un morceau de poire blette qu’elle venait d’ôter d’un des paniers pour la découper en tranches dégoulinantes de jus. « Et en quoi est-il si différent ? ». Lysange enfourna le morceau de poire dans sa bouche, les doigts collants de jus. « Ben… pas fermé du tout… riant, souriant, discutant avec moi comme avec le client, tout de suite prêt à m’aider en montant les chevaux… content d’être là, quoi ! Pas du tout méfiant ou désireux de se moquer ou même de m’écraser…. mais pas du tout ! ».
La rousse mangeait délicatement le morceau de poire, l’observant, amusée. « Et vous pensez vraiment qu’il aurait pu à ce point changer ? Ou… ?».
Lysange frotta sa main toujours humide sur son pantalon déjà tâché de terre et de boue. « Ben….. sur le moment, j’ai rien compris, j’avoue. Moi je m’attendais à tout sauf à ça, en fait… J’ai même du lui paraître complètement débile, à bafouiller, et pas savoir quoi dire… Même que le client il a rien compris, au début…. Lui, il voit arriver un gars que je lui présente comme mon patron, et comme M’sieur Fossard était tout content, ben il a discuté avec lui, tranquille, ravi même, et là il me voit perdre les moyens, comme si je savais même plus qui j’étais… j’ai bien vu qu’il y comprenait rien… je me suis sentie obligée de lui expliquer, parce que ça le faisait pas, vous comprenez ? ».
Barbara comprenait, de toute évidence. « Mmh. Donc…. ce Monsieur Fossard dont vous craigniez depuis des mois le retour…. il n’existait que dans vos peurs ? ». Lysange fronça le nez, piquée au vif. « Ouais ben c’est ça, dites tout de suite que j’ai tout inventé…. ». Elle regarda le bout de ses bottes et se perdit un instant dans le petit morceau de terre accroché là. « Je pense que…. ». Puis elle redressa la tête et planta son regard, simple et franc, dans celui de Barbara. « Je pense que quand j’y suis allée, je l’avais jamais vu et j’en avais peur, ça c’est sûr. Même si j’avais tout fait pour le rencontrer là-bas, ou peut-être parce que, justement j’avais un peu forcé le destin.... Et lui, il m’a vue arriver, bien énervée comme je peux être des fois, surtout quand je pousse les choses comme ça et... et il a du se méfier de moi….. J’le sais, hein, que des fois, je dois paraître bizarre, ou fêlée, ou…. ». Barbara éclata de rire. « Je dirais plutôt qu’il y a parfois un petit vent de folie qui vous accompagne, mais c’est rafraichissant quand on vous connaît mieux ! ».
Lysange observa la fermière, analysant cette information comme une de plus à ranger dans la boîte des données qui lui permettaient de mieux se comprendre. « Mmh….. ben c’est peut-être ça… il a perçu ce petit vent de folie, comme vous dites, et peut-être que ça lui a plu, ou pas, mais en tout cas il m’a un peu provoquée avec son ours là… et moi je l’ai mal pris et… enfin la suite vous savez, je vous l’ai racontée. »
Barbara finissait de noter dans son livre de comptes le nombre de paniers à livrer. « Donc…. il va se passer quoi maintenant ? ». Elle rajouta avec un sourire. « Vous pouvez m’aider à mettre tous ces paniers dans la carriole qui doit partir tout à l’heure ? ».
Lysange acquiesça tout en prenant un panier dans chaque main. « Ben…. là je dois le voir tout à l’heure, il m’a donné ma journée, parce qu’il voulait voir avec Pignac tous les dossiers en cours et après…. ». Elle s’arrêta et regarda Barbara. « Vous savez… hier soir, je lui ai dit que j’aimais trop mon travail d’intendante et … ben vous savez ce qu’il a dit ? ». Barbara ne s’arrêta pas mais lui adressa un sourire, l’invitant à continuer . « Il m’a dit que ça se voyait, que j’aimais mon travail et que… ben qu’il fallait pas que je m’inquiète pour mon poste … ».
La rousse souriait finement, ne disant rien, mais il était évident que rien de tout ce que Lysange racontait ne l’étonnait vraiment. Lysange continua. « En fait… j’crois bien qu’il va virer Pignac et qu’il va me laisser faire comme avant … mais vu comme il a rouspété après le vieux qui m’a lâchée, il va sans doute pas me laisser gérer tout, toute seule, et il va sans doute s’occuper aussi des petits clients ou des trucs emmerdants… ».
Barbara cala le dernier panier sur la carriole. « Et vous vous sentez de reprendre le travail avec lui, comme avec Monsieur Pignac avant son arrêt cardiaque ? ». L’intendante passa la main droite dans ses cheveux, l’autre main calée dans la poche arrière de son pantalon. « Ben…. c’est clair que là, hier soir, ça s’est très bien passé… alors si c’est pas juste qu’il était comme ça parce qu’il venait d’arriver…. ça devrait être facile…. agréable … très agréable même … alors….. ». Elle explosa de rire, ôta la main de sa poche et se recoiffa à la va-vite en riant toujours. « Et c’est là que vous vous dites en secret que je suis quand peut-être un tout petit peu fêlée ! ».
« Mais non !!!! Et moi j’étais aux enclos, avec le client, en pleine visite, et là je l’entends hurler le nom de Pignac ! J’ai pas reconnu tout de suite la voix, forcément, c’est pas comme si je l’avais vu la veille, hein… « . Barbara terminait sa commande du jour, écoutant avec un plaisir évident les histoires de la jeune intendante. « Et… donc ? Il a fait quoi ? Il était comment ? Comme dans vos souvenirs ? ».
Habillée pour le dressage qu’elle pratiquait à ses heures perdues, Lysange sauta presque sur ses pieds. « Mais non ! Mais alors, pas du tout, hein !!! Pas du tout, du tout !!! Je sais pas si c’est d’avoir passé tant de temps en mer, ou si c’est qu’il était tout content de venir reprendre les affaires, ou si c’est moi qui était mal lunée quand je l’ai vu … mais … non, il était pas du tout comme dans mon souvenir, le contraire même ! ».
Barbara lui tendit un morceau de poire blette qu’elle venait d’ôter d’un des paniers pour la découper en tranches dégoulinantes de jus. « Et en quoi est-il si différent ? ». Lysange enfourna le morceau de poire dans sa bouche, les doigts collants de jus. « Ben… pas fermé du tout… riant, souriant, discutant avec moi comme avec le client, tout de suite prêt à m’aider en montant les chevaux… content d’être là, quoi ! Pas du tout méfiant ou désireux de se moquer ou même de m’écraser…. mais pas du tout ! ».
La rousse mangeait délicatement le morceau de poire, l’observant, amusée. « Et vous pensez vraiment qu’il aurait pu à ce point changer ? Ou… ?».
Lysange frotta sa main toujours humide sur son pantalon déjà tâché de terre et de boue. « Ben….. sur le moment, j’ai rien compris, j’avoue. Moi je m’attendais à tout sauf à ça, en fait… J’ai même du lui paraître complètement débile, à bafouiller, et pas savoir quoi dire… Même que le client il a rien compris, au début…. Lui, il voit arriver un gars que je lui présente comme mon patron, et comme M’sieur Fossard était tout content, ben il a discuté avec lui, tranquille, ravi même, et là il me voit perdre les moyens, comme si je savais même plus qui j’étais… j’ai bien vu qu’il y comprenait rien… je me suis sentie obligée de lui expliquer, parce que ça le faisait pas, vous comprenez ? ».
Barbara comprenait, de toute évidence. « Mmh. Donc…. ce Monsieur Fossard dont vous craigniez depuis des mois le retour…. il n’existait que dans vos peurs ? ». Lysange fronça le nez, piquée au vif. « Ouais ben c’est ça, dites tout de suite que j’ai tout inventé…. ». Elle regarda le bout de ses bottes et se perdit un instant dans le petit morceau de terre accroché là. « Je pense que…. ». Puis elle redressa la tête et planta son regard, simple et franc, dans celui de Barbara. « Je pense que quand j’y suis allée, je l’avais jamais vu et j’en avais peur, ça c’est sûr. Même si j’avais tout fait pour le rencontrer là-bas, ou peut-être parce que, justement j’avais un peu forcé le destin.... Et lui, il m’a vue arriver, bien énervée comme je peux être des fois, surtout quand je pousse les choses comme ça et... et il a du se méfier de moi….. J’le sais, hein, que des fois, je dois paraître bizarre, ou fêlée, ou…. ». Barbara éclata de rire. « Je dirais plutôt qu’il y a parfois un petit vent de folie qui vous accompagne, mais c’est rafraichissant quand on vous connaît mieux ! ».
Lysange observa la fermière, analysant cette information comme une de plus à ranger dans la boîte des données qui lui permettaient de mieux se comprendre. « Mmh….. ben c’est peut-être ça… il a perçu ce petit vent de folie, comme vous dites, et peut-être que ça lui a plu, ou pas, mais en tout cas il m’a un peu provoquée avec son ours là… et moi je l’ai mal pris et… enfin la suite vous savez, je vous l’ai racontée. »
Barbara finissait de noter dans son livre de comptes le nombre de paniers à livrer. « Donc…. il va se passer quoi maintenant ? ». Elle rajouta avec un sourire. « Vous pouvez m’aider à mettre tous ces paniers dans la carriole qui doit partir tout à l’heure ? ».
Lysange acquiesça tout en prenant un panier dans chaque main. « Ben…. là je dois le voir tout à l’heure, il m’a donné ma journée, parce qu’il voulait voir avec Pignac tous les dossiers en cours et après…. ». Elle s’arrêta et regarda Barbara. « Vous savez… hier soir, je lui ai dit que j’aimais trop mon travail d’intendante et … ben vous savez ce qu’il a dit ? ». Barbara ne s’arrêta pas mais lui adressa un sourire, l’invitant à continuer . « Il m’a dit que ça se voyait, que j’aimais mon travail et que… ben qu’il fallait pas que je m’inquiète pour mon poste … ».
La rousse souriait finement, ne disant rien, mais il était évident que rien de tout ce que Lysange racontait ne l’étonnait vraiment. Lysange continua. « En fait… j’crois bien qu’il va virer Pignac et qu’il va me laisser faire comme avant … mais vu comme il a rouspété après le vieux qui m’a lâchée, il va sans doute pas me laisser gérer tout, toute seule, et il va sans doute s’occuper aussi des petits clients ou des trucs emmerdants… ».
Barbara cala le dernier panier sur la carriole. « Et vous vous sentez de reprendre le travail avec lui, comme avec Monsieur Pignac avant son arrêt cardiaque ? ». L’intendante passa la main droite dans ses cheveux, l’autre main calée dans la poche arrière de son pantalon. « Ben…. c’est clair que là, hier soir, ça s’est très bien passé… alors si c’est pas juste qu’il était comme ça parce qu’il venait d’arriver…. ça devrait être facile…. agréable … très agréable même … alors….. ». Elle explosa de rire, ôta la main de sa poche et se recoiffa à la va-vite en riant toujours. « Et c’est là que vous vous dites en secret que je suis quand peut-être un tout petit peu fêlée ! ».
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
«Décidément.. malgré tout ce qu’on a pu en penser ou en dire… ». Barbara souriait finement à Lysange qui tenait dans ses mains une délicate boîte en bois ancien. « … il me semble que Monsieur Fossard est un homme de goût, qui vous a en respect et tient à vous garder auprès de lui. ».
Lysange ouvrait et refermait la boîte, comme une enfant qui, par plaisir, se recrée à l’envi un souvenir, celui de l’émotion ressentie au moment de la découverte d’un trésor caché dans une boîte enrubannée, trouvée sous le sapin de Grand Père Hiver. « Oui… vous pensez, vous aussi ? ». Son ton était tout à la fois rêveur, joyeux et encore étonné. « Vous savez… j’ai jamais eu d’aussi beau cadeau… jamais… et vous avez vu la couleur de l’encre ? Bleu comme les mers du Sud, comme celle de La Baie… il pouvait pas mieux tomber pour me faire plaisir … »
Elle ressortait la plume qu’elle avait déjà montrée. « .. et la plume… une plume d’un hippogivre, une race très rare du Norfendre, il m’a dit. Vous avez vu ces reflets bleu glacier ? c’est beau hein ? »
Barbara acquiesçait, pour la dixième ou douzième fois, quand arrivèrent les deux jumelles alertées par la rumeur qui courait partout dans le domaine : Lysange avait reçu un cadeau du patron. Minaudant sans excès, froufroutantes et souriantes, elles se posèrent sans façon sur les marches à côté de Lysange. « Oh.. mais c’est encore plus beau… » commença Djane, « … que ce qu’on en dit ! » complèta Peggy. Toutes deux tendirent les mains pour avoir la boîte en mains. Lysange hésita. « C’est fragile … enfin je veux dire… c’est rare quoi… ». Les jumelles éclatèrent d’un rire en cascade comme une mélodie à deux voix et lui prirent la boîte sans attendre. « Ne vous inquiétez pas ma chère… » susurra Peggy, « .. nous avons l’habitude des objets précieux… ».
Bien qu’elle ait toujours eu confiance dans les compétences des deux artisanes, l’intendante surveillait leurs gestes avec une attention presque maladive. « C’est un encrier en os de brochepelle ! C’est vraiment très fragile… Vous avez vu la finesse de la sculpture ? La blancheur de l’os ? ». Les laisser tripatouiller son cadeau était pure torture. Lysange peinait à ne pas le leur arracher des mains et les jumelles s’en amusaient sans vergogne. Elles en jouaient même avec gourmandise, se passant la boîte chaque fois que les mains de Lysange semblaient prêtes à la reprendre.
Tant et si bien qu’à la fin Lysange n’y tint plus et la leur arracha des mains. « Bon, ça suffit là ! Vous l’avez assez patouillée ma boîte de calligraphie! ». Ce qui entraîna le rire des deux soeurs Valbran. «Et bien.. il semble que ce cadeau vous touche bien plus... », commença Djane en reprenant une mine plus sérieuse, « .. qu’un simple cadeau professionnel… », minauda Peggy dans un sourire. « Mais il n’y a là rien de répréhensible, notez bien ! » complétèrent-elles de concert dans un sourire amusé.
Interdite, Lysange les observait sans comprendre. Toutes les données étaient traitées en même temps, à la vitesse d’une fusée éclairante, le tout pétaradant comme un feu d’artifice de la fête lunaire dans son cerveau en ébullition. « Hein ?!? … Quoi ?? … Mais ?!?…. hein ?!? ».
Les deux jumelles se levèrent dans un bruit feutré de coton et de cuir mélangés. «Bien, nous devons retourner travailler. Oh… Demoiselle Delabay… » commença Peggy, «.. nous voulions vous demander…. » continua Djane avec fluidité, « … il y a un homme, les cheveux, noirs, bien bâti, la trentaine, plutôt beau garçon, qui passe tous les jours en début d’après-midi, en tenue de sport, en courant le long de nos barrières… », Peggy sourit à Djane qui continua, « … vous ne le connaîtriez pas, par hasard ? ».
« Euh… non mais.. j’en sais rien moi !». La boîte serrée entre ses mains, tremblante et sous le coup de l’émotion, Lysange s’échauffait et son ton de voix tremblotant montait dans les aigus. « Mais c’est quoi vos insinuations, hein ?!? ».
Barbara se leva et se tourna vers Lysange sans même un regard pour les jumelles. « Vous venez déjeuner Lysange ? Laissons donc les demoiselles Valbran rêver du prince charmant devant un homme qui fait courir tous nos chiens à ses trousses chaque jour de la semaine…. Je gage qu’elles s’imaginent pouvoir lui ravauder le fond du pantalon.»
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
« C’est moi ou tu t’arranges pour être plus jolie ces temps ci ? Tu irradies là… ». Nealson venait de revoir avec Lysange les détails de la commande du jeune Duc Fingal d’Althain, venu en début de semaine avec un énorme chien de berger qui avait impressionné tout le monde, y compris le forgeron.
« Hein ? ». La jeune intendante rosit et détourna le regard un court instant. « Tu cherches à dire quoi ? ». Elle le regardait maintenant avec le nez froncé et les yeux plissés, méfiante, puis, comme décidée à s’en sortir par une pirouette, prit une mine faussement boudeuse. « Et d’ailleurs… avant, avant, ça veut dire quoi, avant ? Parce qu’avant j’étais pas jolie, peut-être ?». Il pencha la tête sur le côté et la regarda comme s’il la jaugeait, façon jury de beauté. « Mmh, si… t’as toujours été jolie, très attirante même… mais là, faut dire que ça frise l’excès.... et ça c’est depuis que l’patron est rentré et t’emmène partout… donc avant.. ben avant qu’il arrive !». Il souriait finement et elle haussa les épaules, agacée. Il continua sur le même ton, imperturbable. «D’ailleurs, j’imagine que quand il t’invite à boire un verre, le patron, ben tu dis pas non hein ? Forcément… le patron… c’est autre chose qu’un petit employé à la forge. »
Piquée au vif elle explosa d’une colère sourde. « Mais c’est n’importe quoi ! C’est le patron !!!! MON patron !!!! C’est normal que j’aille boire un verre avec lui, c’est pour LE TRAVAIL !!!! On bosse, on voit des partenaires ou des clients, si tu veux savoir ! C’est pas pour.. pour… Breeeef ! ».
Il souriait, tout content d’avoir réussi à la faire sortir de ses gonds.« Mouais… et tous les soirs, jusqu’à parfois très tard… tu vas en ville pour boire des coups et tu travailles ? Boire une bière avec un bonhomme pour qui tu te maquilles et tu te fais toute belle, c’est du boulot ? ». Il secoua les mains devant lui comme pour se prémunir d’une attaque, la voyant prête à exploser de nouveau. « Alleeeeez !!! C’est évident que tu fais plus attention à ton apparence et que tu as ta mine des bons jours... J’suis pas le seul à l’avoir remarqué, hein… ».
Elle rebondit sur place. « Mais c’est vraiment n’importe quoi !!! Avec Ted aussi j’allais boire des coups, hein ! Et là y’avait pas tous ces sous-entendus ! Vous avez quoi, tous, avec ça ? Faut que je vous le dise comment ? C’est mon PA-TRON et j’aime mon TRA-VAIL !!! Alors oui, je fais ce qu’il faut pour le faire bien, ce travail, et je suis toute contente parce que j’aime quand le travail est bien fait ! T’es pas comme ça, toi peut-être ? Tu bricoles à la va-vite au lieu de peaufiner ?!? T’es pas content quand tu peux fignoler ?».
Il partit dans un grand rire et s’approcha d’elle pour la prendre par l’épaule, tendre comme un grand frère. « Arrête… j’te charrie là, tu vois pas ? T’es trop mignonne quand tu grimpes sur tes grands chevaux… j’avoue, j’ai pas pu m’en empêcher. Mais on me la fait pas, je les vois tes regards, il te plaît, le gros, faudrait même être aveugle pour pas le voir… ».
Elle explosa de nouveau en le repoussant. « Mais il est pas gros !!! C’est quoi cette histoire ?!? Il a même une classe incroyable !!! Il est juste….. ». Elle capta son regard allumé et porta la main à sa bouche pour ravaler ses mots, mais trop tard, il venait une nouvelle fois de la pousser dans le piège et elle tombait dedans, avec toute sa naïveté. Un large sourire illuminait la face d’ordinaire si neutre du forgeron. « Ah ouais… c’est pire que ce que je croyais en fait… t’es accrochée là… ». Son ton était vaguement jaloux.
Elle se précipita sur lui pour le rouer de coups, il retrouva immédiatement sa gaité. « Rhaaaa !!!! » Il la prit dans ses bras en riant, l’enserrant tout d’abord légèrement, puis un peu plus qu’il ne le voulait, emporté par un désir qui n’allait pas tarder à devenir encombrant s’il n’y prenait pas garde, il la repoussa gentiment. « Allez… t’as le droit, hein ! Après tout, comme on dit, les goûts et les couleurs… ».
Mais Lysange semblait bouleversée, presque au bord des larmes. « Ben… Lyly… j’ai dit quoi… le prend pas mal…. ». Une main sur la nuque, l’autre calée dans la poche de pantalon, il l’observait, désemparé. « C’est pas si grave… si ? ».
« Mais si c’est grave !!! Je veux pas moi !!! Je veux pas qu’il me plaise ! C’est .... c’est trop dangereux, non... je veux pas ....». Lysange s’était toute repliée sur elle-même, dépitée. « Je peux pas me permettre ça, moi... non je peux plus... je dois pas même... ».
Nealson regrettait de l’avoir poussée à bout, elle le touchait plus qu’il ne pouvait le supporter quand elle se montrait aussi vulnérable. « Mais... me dis pas que ça compte .... Tu t’en fous qu’il soit patron, non ? .... ». L’intendante avait perdu le sourire, elle soupira. « Mais non ... c’est pas ça le problème, m’en fous, moi, du métier, du château ou même de sa tronche, tiens ... même si… ».
Le forgeron se rapprocha de nouveau. « Ben dis moi... c’est quoi ? ». Comme épuisée de lutter contre elle-même, Lysange posa sa tête sur le torse du forgeron, rendu inerte de surprise. « Je sais pas... y’a un truc qui se passe que j’avais pas imaginé... Moi je m’étais préparée à rester à distance, avec une attitude professionnelle, tu vois... J’avais gardé le souvenir d’un mec qui voulait bien bosser avec moi mais .. froid, neutre, sans émotion ni rien... juste pro, quoi... mais là.... ». Nealson luttait contre l’envie de la serrer tendrement entre ses bras. La douceur probable de sa peau l’attirait, tout comme le parfum qui émanait de son cou et de ses cheveux. « Et ... il est pas comme tu pensais ? ».
Elle soupira et se détendit un peu plus, s’abandonnant franchement contre lui. Le forgeron sentit grandir une vibration importune. Il inspira longuement, essayant de se concentrer sur les paroles. Inconsciente de ses difficultés, la jeune femme murmurait. « Ça... c’est sûr... il est tellement... je sais pas, gentil, attentionné, bienveillant, ouvert ... tout le contraire de Pignac… j’ai plus l’habitude moi…. et poète aussi... parfois il a une façon de dire les choses ... ça me touche, tu peux pas savoir ... tu vois... », elle se redressa et le regarda avec une intensité qui le vrilla sur place, « ... je l’aurais rencontré y’a ... quoi.. un an ... ou deux … c’est sûr, je serais déjà à tirer des plans sur la comète, à rêver de lui et à vouloir lui plaire, mais là... ». Il esquissa un sourire, tout prêt à se moquer de nouveau mais la sincérité de Lysange l’en empêcha. « ... là j’ai bien trop peur, en fait ».
« Mais… peur de quoi ? ». Elle eut un petit rire triste. « Peur de qui tu veux dire ». Nealson avait du mal à la suivre. « Quoi ? T’as peur de lui ?!? Mais… ». Lysange secoua doucement la tête. « Bah non... pas peur de lui… peur de moi... J’me connais tu sais... Si j’fais pas gaffe, j’vais plus savoir faire la part des choses et ... j’vais avoir mal. Très mal, même. Alors j’dois pas m'laisser ... »
Le forgeron lui pressa le bras avec plus de dureté qu’il n’aurait voulu. « C’est pas une question de devoir ceci ou devoir cela, Lyly. Tu peux pas toujours tout raisonner, tout décider, surtout pour ça. Faut te laisser vivre ! De toute façon, plus tu voudras l’occulter, et plus ça va te prendre la tête et le reste. Tu peux pas lutter contre ça, tu le sais non ? »
Elle explosa d’une colère triste. « Et ben si, je peux !!! Suffit de le vouloir !!! Qu’est-ce que tu crois ?!? Ça fait un bail que je tiens tout le monde à distance pour pas plonger, justement, et c’est très bien ! D’ailleurs même Ted il pense comme moi ! On est voué à être seul ! Tout le temps seul, même au milieu des gens, et plus vite on a compris ça, plus vite on est tranquille ! ».
Nealson la regarda un moment, touché au coeur, et prit un ton goguenard pour ne pas le montrer. « Ah ouais... que Ted ait pu dire et même penser une connerie pareille, ça m’étonne pas du tout venant de lui, mais toi .... toi t’es d’accord avec ça ? Vraiment ? ».
« Bah ! Qu’est ce que tu crois ?! Comment tu crois que j’ai supporté Pignac et sa mauvaise humeur pendant un an, hein ? Ben c’est simple ! J’ai ré-appris à me blinder, bien obligée ! Et maintenant ben… je suis aussi bien caparaçonnée qu’une bête que tu aurais parée pour la guerre. Et pis voilà ! C’est comme ça la vie !!! Faut faire avec !!!! ».
Dans un mouvement de rage, elle tourna les talons, reprenant le chemin des bureaux. Elle était déjà loin avant qu’il ait pu la rattraper et il retourna en maugréant vers sa forge. Pour une fois, aucune parole désagréable sur « les bonnes femmes » ne sortit de sa bouche tandis qu’il réanimait le feu. D'ailleurs, aucun son ne sortit de sa gorge de la journée.
« Hein ? ». La jeune intendante rosit et détourna le regard un court instant. « Tu cherches à dire quoi ? ». Elle le regardait maintenant avec le nez froncé et les yeux plissés, méfiante, puis, comme décidée à s’en sortir par une pirouette, prit une mine faussement boudeuse. « Et d’ailleurs… avant, avant, ça veut dire quoi, avant ? Parce qu’avant j’étais pas jolie, peut-être ?». Il pencha la tête sur le côté et la regarda comme s’il la jaugeait, façon jury de beauté. « Mmh, si… t’as toujours été jolie, très attirante même… mais là, faut dire que ça frise l’excès.... et ça c’est depuis que l’patron est rentré et t’emmène partout… donc avant.. ben avant qu’il arrive !». Il souriait finement et elle haussa les épaules, agacée. Il continua sur le même ton, imperturbable. «D’ailleurs, j’imagine que quand il t’invite à boire un verre, le patron, ben tu dis pas non hein ? Forcément… le patron… c’est autre chose qu’un petit employé à la forge. »
Piquée au vif elle explosa d’une colère sourde. « Mais c’est n’importe quoi ! C’est le patron !!!! MON patron !!!! C’est normal que j’aille boire un verre avec lui, c’est pour LE TRAVAIL !!!! On bosse, on voit des partenaires ou des clients, si tu veux savoir ! C’est pas pour.. pour… Breeeef ! ».
Il souriait, tout content d’avoir réussi à la faire sortir de ses gonds.« Mouais… et tous les soirs, jusqu’à parfois très tard… tu vas en ville pour boire des coups et tu travailles ? Boire une bière avec un bonhomme pour qui tu te maquilles et tu te fais toute belle, c’est du boulot ? ». Il secoua les mains devant lui comme pour se prémunir d’une attaque, la voyant prête à exploser de nouveau. « Alleeeeez !!! C’est évident que tu fais plus attention à ton apparence et que tu as ta mine des bons jours... J’suis pas le seul à l’avoir remarqué, hein… ».
Elle rebondit sur place. « Mais c’est vraiment n’importe quoi !!! Avec Ted aussi j’allais boire des coups, hein ! Et là y’avait pas tous ces sous-entendus ! Vous avez quoi, tous, avec ça ? Faut que je vous le dise comment ? C’est mon PA-TRON et j’aime mon TRA-VAIL !!! Alors oui, je fais ce qu’il faut pour le faire bien, ce travail, et je suis toute contente parce que j’aime quand le travail est bien fait ! T’es pas comme ça, toi peut-être ? Tu bricoles à la va-vite au lieu de peaufiner ?!? T’es pas content quand tu peux fignoler ?».
Il partit dans un grand rire et s’approcha d’elle pour la prendre par l’épaule, tendre comme un grand frère. « Arrête… j’te charrie là, tu vois pas ? T’es trop mignonne quand tu grimpes sur tes grands chevaux… j’avoue, j’ai pas pu m’en empêcher. Mais on me la fait pas, je les vois tes regards, il te plaît, le gros, faudrait même être aveugle pour pas le voir… ».
Elle explosa de nouveau en le repoussant. « Mais il est pas gros !!! C’est quoi cette histoire ?!? Il a même une classe incroyable !!! Il est juste….. ». Elle capta son regard allumé et porta la main à sa bouche pour ravaler ses mots, mais trop tard, il venait une nouvelle fois de la pousser dans le piège et elle tombait dedans, avec toute sa naïveté. Un large sourire illuminait la face d’ordinaire si neutre du forgeron. « Ah ouais… c’est pire que ce que je croyais en fait… t’es accrochée là… ». Son ton était vaguement jaloux.
Elle se précipita sur lui pour le rouer de coups, il retrouva immédiatement sa gaité. « Rhaaaa !!!! » Il la prit dans ses bras en riant, l’enserrant tout d’abord légèrement, puis un peu plus qu’il ne le voulait, emporté par un désir qui n’allait pas tarder à devenir encombrant s’il n’y prenait pas garde, il la repoussa gentiment. « Allez… t’as le droit, hein ! Après tout, comme on dit, les goûts et les couleurs… ».
Mais Lysange semblait bouleversée, presque au bord des larmes. « Ben… Lyly… j’ai dit quoi… le prend pas mal…. ». Une main sur la nuque, l’autre calée dans la poche de pantalon, il l’observait, désemparé. « C’est pas si grave… si ? ».
« Mais si c’est grave !!! Je veux pas moi !!! Je veux pas qu’il me plaise ! C’est .... c’est trop dangereux, non... je veux pas ....». Lysange s’était toute repliée sur elle-même, dépitée. « Je peux pas me permettre ça, moi... non je peux plus... je dois pas même... ».
Nealson regrettait de l’avoir poussée à bout, elle le touchait plus qu’il ne pouvait le supporter quand elle se montrait aussi vulnérable. « Mais... me dis pas que ça compte .... Tu t’en fous qu’il soit patron, non ? .... ». L’intendante avait perdu le sourire, elle soupira. « Mais non ... c’est pas ça le problème, m’en fous, moi, du métier, du château ou même de sa tronche, tiens ... même si… ».
Le forgeron se rapprocha de nouveau. « Ben dis moi... c’est quoi ? ». Comme épuisée de lutter contre elle-même, Lysange posa sa tête sur le torse du forgeron, rendu inerte de surprise. « Je sais pas... y’a un truc qui se passe que j’avais pas imaginé... Moi je m’étais préparée à rester à distance, avec une attitude professionnelle, tu vois... J’avais gardé le souvenir d’un mec qui voulait bien bosser avec moi mais .. froid, neutre, sans émotion ni rien... juste pro, quoi... mais là.... ». Nealson luttait contre l’envie de la serrer tendrement entre ses bras. La douceur probable de sa peau l’attirait, tout comme le parfum qui émanait de son cou et de ses cheveux. « Et ... il est pas comme tu pensais ? ».
Elle soupira et se détendit un peu plus, s’abandonnant franchement contre lui. Le forgeron sentit grandir une vibration importune. Il inspira longuement, essayant de se concentrer sur les paroles. Inconsciente de ses difficultés, la jeune femme murmurait. « Ça... c’est sûr... il est tellement... je sais pas, gentil, attentionné, bienveillant, ouvert ... tout le contraire de Pignac… j’ai plus l’habitude moi…. et poète aussi... parfois il a une façon de dire les choses ... ça me touche, tu peux pas savoir ... tu vois... », elle se redressa et le regarda avec une intensité qui le vrilla sur place, « ... je l’aurais rencontré y’a ... quoi.. un an ... ou deux … c’est sûr, je serais déjà à tirer des plans sur la comète, à rêver de lui et à vouloir lui plaire, mais là... ». Il esquissa un sourire, tout prêt à se moquer de nouveau mais la sincérité de Lysange l’en empêcha. « ... là j’ai bien trop peur, en fait ».
« Mais… peur de quoi ? ». Elle eut un petit rire triste. « Peur de qui tu veux dire ». Nealson avait du mal à la suivre. « Quoi ? T’as peur de lui ?!? Mais… ». Lysange secoua doucement la tête. « Bah non... pas peur de lui… peur de moi... J’me connais tu sais... Si j’fais pas gaffe, j’vais plus savoir faire la part des choses et ... j’vais avoir mal. Très mal, même. Alors j’dois pas m'laisser ... »
Le forgeron lui pressa le bras avec plus de dureté qu’il n’aurait voulu. « C’est pas une question de devoir ceci ou devoir cela, Lyly. Tu peux pas toujours tout raisonner, tout décider, surtout pour ça. Faut te laisser vivre ! De toute façon, plus tu voudras l’occulter, et plus ça va te prendre la tête et le reste. Tu peux pas lutter contre ça, tu le sais non ? »
Elle explosa d’une colère triste. « Et ben si, je peux !!! Suffit de le vouloir !!! Qu’est-ce que tu crois ?!? Ça fait un bail que je tiens tout le monde à distance pour pas plonger, justement, et c’est très bien ! D’ailleurs même Ted il pense comme moi ! On est voué à être seul ! Tout le temps seul, même au milieu des gens, et plus vite on a compris ça, plus vite on est tranquille ! ».
Nealson la regarda un moment, touché au coeur, et prit un ton goguenard pour ne pas le montrer. « Ah ouais... que Ted ait pu dire et même penser une connerie pareille, ça m’étonne pas du tout venant de lui, mais toi .... toi t’es d’accord avec ça ? Vraiment ? ».
« Bah ! Qu’est ce que tu crois ?! Comment tu crois que j’ai supporté Pignac et sa mauvaise humeur pendant un an, hein ? Ben c’est simple ! J’ai ré-appris à me blinder, bien obligée ! Et maintenant ben… je suis aussi bien caparaçonnée qu’une bête que tu aurais parée pour la guerre. Et pis voilà ! C’est comme ça la vie !!! Faut faire avec !!!! ».
Dans un mouvement de rage, elle tourna les talons, reprenant le chemin des bureaux. Elle était déjà loin avant qu’il ait pu la rattraper et il retourna en maugréant vers sa forge. Pour une fois, aucune parole désagréable sur « les bonnes femmes » ne sortit de sa bouche tandis qu’il réanimait le feu. D'ailleurs, aucun son ne sortit de sa gorge de la journée.
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
Lysange était assise avec Barbara pour leur petite pause du jour. « Mais si... je vous assure ... il était inquiet parce que j’avais brûlé ma main en prenant la lanterne au mur, vous savez... la lanterne pour visiter les enclos avec Monsieur Travill, un client qui voulait voir nos félins. Alors il a demandé à regarder et il a pris ma main dans la sienne et là.... il a caressé ma paume... si, si... comme ça... ». Elle refaisait doucement le geste d’Oscar Fossard sur sa main.
Barbara écoutait sa jeune amie avec une curiosité bienveillante mais amusée. « Et il a dit quoi ? ». Lysange semblait encore sous le charme, plus de 72 heures après. « Ben... le client m’avait donné une potion... et il m’avait déjà commandé de la boire parce que moi je me méfiais et là... il voulait vérifier si ça avait marché et... il était tout content en fait... oui tout content parce que c’était réparé... ».
La rousse observait l’intendante, attendrie. «Il est soucieux de votre bien-être, sans doute parce qu’il tient à vous, en quelque sorte, c’est plutôt une bonne chose, non ? ». Lysange redressa brusquement la tête sous le coup d’un souvenir. « Il a dit au client que j’étais comme un trésor mais qu’il fallait pas le répéter ! J’étais dans la cuisine mais j’ai entendu.. ».
Lysange esquissa un sourire puis soupira en regardant sa paume, intacte, et Barbara s’étonna. « Je ne comprends pas... vous semblez désolée.. c’est d’être guérie ou... ? ». L’intendante caressa sa paume, songeuse, avant de lever le nez vers Barbara. « Euh... non, non... bien sûr que non... ». Elle se reprit, s’essayant à rire. « Ben non ! J’aime pas trop ces trucs moitié magiques qu’on comprend pas, mais non ! »
Son rire sonnait faux, Barbara lui pressa doucement le bras. « Vous savez que vous pouvez me parler, n’est-ce pas ? Il y a quelque chose qui vous chiffonne... vous ne savez pas mentir Lysange... ».
La jeune femme était à nouveau en contemplation devant sa paume, elle redressa vivement la tête. « Non mais…. Vous auriez vu hier soir comment il a dégagé son chien, Truffe, en disant qu’il pensait qu’il était amoureux de lui… ça m’a fait froid dans le dos, vous pouvez pas savoir. Merci bien, hein, si c’est comme ça qu’il perçoit les êtres qui s’attachent à lui.. »
Barbara écarquilla les yeux. « Mais Lysange… vous vous entendez là ? Vous n’allez tout de même pas me dire que vous vous comparez à un chien ?!? »
« Ben non ! Mais c’est encore pire en fait ! Parce que y’a des gens s’ils donnent .. je sais pas moi.. cent à un animal de compagnie, ils vont même pas donner dix à une personne ! Alors je me dis que….. que je dois me méfier de moi et pas m’imaginer que ses gestes qui semblent tendres ou attentionnés c’est en rapport avec moi. C’est juste qu’il est comme avec ses bêtes, tant qu’elles restent à une distance affectueuse raisonnable, ça passe, mais si ça se rapproche trop, comme Truffe, ben… ça doit dégager parce que ça l’emmerde, c’est tout ! »
La rousse l’observait, interloquée. « Vous avez de drôles d’idées Lysange... excusez-moi mais j’ai du mal à vous suivre.. ».
Lysange haussa les épaules, fataliste. « Oui, je sais, je réfléchis trop, Nealson il me l’a dit, déjà. Mais... enfin bon, faut dire aussi qu’à ce moment là, y’avait la patronne de la Boumtique, en cuissardes, ça lui avait peut-être fait tourner la tête.... sûrement même.... ils sont tous comme des chiens devant un os quand elle débarque quelque part, ça les rend débiles… j’ai bien vu son regard... le même que Ted !"
La fermière l’observait, un petit sourire au coin des lèvres. « Mmh... il devait être troublé, c’est probable.... et elle était là pour quelle raison ? ».
L’intendante se redressa. « Ah mais... vous avez pas entendu le bruit de l’explosion hier soir ? Pourtant ça s’est répandu dans tout le domaine tellement ça a fait du bruit ! Monsieur Fossard l’avait fait venir pour faire sauter le coffre qui est dans le bureau ! C’est son truc, à elle, les explosifs ! Vous auriez vu ses yeux quand il lui a demandé si elle pouvait l’ouvrir, pour un peu elle lui aurait sauté dans les bras tellement elle était contente ! », Lysange mimait la scène telle qu’elle l’avait perçue.
Barbara faisait des efforts réels pour ne pas rire à ses mimiques. « Et donc ? Elle a fait sauter le coffre ? » Lysange avait retrouvé sa vivacité. « Ah ben oui ! Ça pour sauter, il a sauté ! BOUM ! Je vous dis, ça s’est entendu dans tous les faubourg, on me l’a dit ce matin en arrivant ». Elle riait d’un rire franc, Barbara en fut rassurée.« Et ? Vous avez trouvé ce que vous cherchiez ? »
L’intendante resta un court instant sans rien dire, songeuse. « Ben... non... il était vide... et franchement j’ai pas compris... je dis pas que Pignac avait pas ses défauts, hein… mais là... partir avec la caisse... jamais j’aurais imaginé que.... ».
On entendit l’appel du réfectoire et Barbara se releva en frottant son pantalon dans un geste gracieux. « Comme quoi... On ne connaît pas vraiment les gens... Vous venez ? On finira notre petite conversation en déjeunant. ». Lysange se redressa mais refusa d’un mouvement de tête. « Non... je dois voir un truc avec Matilda, on a vendu un sabre-de-nuit l’autre soir et je dois régler une histoire de paperasse. Et puis... j’ai pas très faim, là. »
Barbara écoutait sa jeune amie avec une curiosité bienveillante mais amusée. « Et il a dit quoi ? ». Lysange semblait encore sous le charme, plus de 72 heures après. « Ben... le client m’avait donné une potion... et il m’avait déjà commandé de la boire parce que moi je me méfiais et là... il voulait vérifier si ça avait marché et... il était tout content en fait... oui tout content parce que c’était réparé... ».
La rousse observait l’intendante, attendrie. «Il est soucieux de votre bien-être, sans doute parce qu’il tient à vous, en quelque sorte, c’est plutôt une bonne chose, non ? ». Lysange redressa brusquement la tête sous le coup d’un souvenir. « Il a dit au client que j’étais comme un trésor mais qu’il fallait pas le répéter ! J’étais dans la cuisine mais j’ai entendu.. ».
Lysange esquissa un sourire puis soupira en regardant sa paume, intacte, et Barbara s’étonna. « Je ne comprends pas... vous semblez désolée.. c’est d’être guérie ou... ? ». L’intendante caressa sa paume, songeuse, avant de lever le nez vers Barbara. « Euh... non, non... bien sûr que non... ». Elle se reprit, s’essayant à rire. « Ben non ! J’aime pas trop ces trucs moitié magiques qu’on comprend pas, mais non ! »
Son rire sonnait faux, Barbara lui pressa doucement le bras. « Vous savez que vous pouvez me parler, n’est-ce pas ? Il y a quelque chose qui vous chiffonne... vous ne savez pas mentir Lysange... ».
La jeune femme était à nouveau en contemplation devant sa paume, elle redressa vivement la tête. « Non mais…. Vous auriez vu hier soir comment il a dégagé son chien, Truffe, en disant qu’il pensait qu’il était amoureux de lui… ça m’a fait froid dans le dos, vous pouvez pas savoir. Merci bien, hein, si c’est comme ça qu’il perçoit les êtres qui s’attachent à lui.. »
Barbara écarquilla les yeux. « Mais Lysange… vous vous entendez là ? Vous n’allez tout de même pas me dire que vous vous comparez à un chien ?!? »
« Ben non ! Mais c’est encore pire en fait ! Parce que y’a des gens s’ils donnent .. je sais pas moi.. cent à un animal de compagnie, ils vont même pas donner dix à une personne ! Alors je me dis que….. que je dois me méfier de moi et pas m’imaginer que ses gestes qui semblent tendres ou attentionnés c’est en rapport avec moi. C’est juste qu’il est comme avec ses bêtes, tant qu’elles restent à une distance affectueuse raisonnable, ça passe, mais si ça se rapproche trop, comme Truffe, ben… ça doit dégager parce que ça l’emmerde, c’est tout ! »
La rousse l’observait, interloquée. « Vous avez de drôles d’idées Lysange... excusez-moi mais j’ai du mal à vous suivre.. ».
Lysange haussa les épaules, fataliste. « Oui, je sais, je réfléchis trop, Nealson il me l’a dit, déjà. Mais... enfin bon, faut dire aussi qu’à ce moment là, y’avait la patronne de la Boumtique, en cuissardes, ça lui avait peut-être fait tourner la tête.... sûrement même.... ils sont tous comme des chiens devant un os quand elle débarque quelque part, ça les rend débiles… j’ai bien vu son regard... le même que Ted !"
La fermière l’observait, un petit sourire au coin des lèvres. « Mmh... il devait être troublé, c’est probable.... et elle était là pour quelle raison ? ».
L’intendante se redressa. « Ah mais... vous avez pas entendu le bruit de l’explosion hier soir ? Pourtant ça s’est répandu dans tout le domaine tellement ça a fait du bruit ! Monsieur Fossard l’avait fait venir pour faire sauter le coffre qui est dans le bureau ! C’est son truc, à elle, les explosifs ! Vous auriez vu ses yeux quand il lui a demandé si elle pouvait l’ouvrir, pour un peu elle lui aurait sauté dans les bras tellement elle était contente ! », Lysange mimait la scène telle qu’elle l’avait perçue.
Barbara faisait des efforts réels pour ne pas rire à ses mimiques. « Et donc ? Elle a fait sauter le coffre ? » Lysange avait retrouvé sa vivacité. « Ah ben oui ! Ça pour sauter, il a sauté ! BOUM ! Je vous dis, ça s’est entendu dans tous les faubourg, on me l’a dit ce matin en arrivant ». Elle riait d’un rire franc, Barbara en fut rassurée.« Et ? Vous avez trouvé ce que vous cherchiez ? »
L’intendante resta un court instant sans rien dire, songeuse. « Ben... non... il était vide... et franchement j’ai pas compris... je dis pas que Pignac avait pas ses défauts, hein… mais là... partir avec la caisse... jamais j’aurais imaginé que.... ».
On entendit l’appel du réfectoire et Barbara se releva en frottant son pantalon dans un geste gracieux. « Comme quoi... On ne connaît pas vraiment les gens... Vous venez ? On finira notre petite conversation en déjeunant. ». Lysange se redressa mais refusa d’un mouvement de tête. « Non... je dois voir un truc avec Matilda, on a vendu un sabre-de-nuit l’autre soir et je dois régler une histoire de paperasse. Et puis... j’ai pas très faim, là. »
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais alors.... ça veut dire que tout ce que je pense, c’est faux ?!? Que tout ce que je crois décider, en fait c’est pas vrai ?!? Je décide de rien du tout ?!? » Barbara venait d’expliquer à Lysange l’enseignement qu’elle avait reçu de son ancien maître au Pic de la Sérénité et la jeune femme essayait d’en saisir les grands principes.
« C’est un peu ça, oui... Toutes nos actions reposent sur un fonctionnement biologique, sans volonté ni pensée, et ensuite nous construisons des explications pour tous ces comportements, pour leur donner un sens qui sinon n’existerait pas».
Lysange soupira. « Je comprends pas... C’est quoi le comportement biologique ? ». Barbara expliqua. « Et bien ce sont les réactions de votre corps à des stimuli extérieurs. Des réactions auxquelles vous ne pouvez rien, qui viennent de cinq moteurs différents et qui vous poussent à agir toujours dans le même sens. Nous sommes construits comme cela depuis la nuit des temps et nous n’y pouvons rien». Barbara souriait, essayant de rendre ses explications moins rébarbatives.
Lysange soupira de nouveau. « Mmh… cinq moteurs ? Genre ? ». Barbara, pédagogue, ne semblait pas sensible aux réticences pourtant palpables de sa jeune amie. « Alors, le premier est la nourriture, le second le sexe, le troisième le statut social ou la reconnaissance d’autrui, le quatrième la recherche du moindre effort et le cinquième le besoin d’informations ».
La curiosité de Lysange était enfin activée. « Et donc… ces moteurs se mettent en route sans qu’on y puisse rien, et nous poussent à agir… mais à agir pour faire quoi ? ». Barbara éclata d’un rire léger. « Oh.. mais c’est très simple ! Pour survivre, essentiellement, et donc pour acquérir plus de nourriture, plus de sexe, plus de statut social, plus d’informations et tout ça en en faisant le moins possible. »
Lysange plissa les yeux, toute à l’écoute. « Ah ouais… donc… tout ce que les gens font, même s’ils disent le contraire, c’est pour ça ? Plus de… tout ça ? ».
Barbara esquissa un sourire amusé. « Hé oui… troublant n’est ce pas ? ».
Lysange opina, sous le coup d’une réflexion intense. « Mmh… Ben je comprends mieux pourquoi on dit qu’une fille qui fait des bons petits plats est sûre de garder son bonhomme… si en plus elle fait tout à la maison, qu’elle lui laisse croire que c’est le roi du monde, et qu’en plus elle lui donne ce qu’il veut au lit, alors là… elle a pas de souci à se faire, il va pas la plaquer. Maintenant, est-ce qu’elle sera heureuse, ça… Surtout si elle est pas trop conne et qu’elle a envie d’exister par elle même…».
La rousse éclata d’un rire joyeux. « Et bien vous venez en quelques mots simples de décrire la situation classique de bien des ménages ! ». Lysange avait mis en route la machine à réflexion. « Mais tout de même, je comprends pas… Moi j’ai bien l’impression de décider, de choisir, de vouloir… tout ça c’est faux alors ? ».
Barbara dodelina de la tête, cherchant ses mots. « Et bien il semblerait en effet que si nous donnons bien un sens à nos actes, c’est en après-coup, en leur construisant à chaque fois une histoire, et non avant une décision, en réfléchissant aux solutions ou aux moyens. » Lysange n’en revenait pas. « Alors c’est mon corps qui décide sans que je sois au courant, moi, Lysange, et mon cerveau qui me raconte des histoires pour me faire croire que j’ai décidé ce que je faisais ?!? C’est ça ?!? »
L’ancienne moniale devenue fermière acquiesça gentiment. « En effet, c’est ce que pensent certains maîtres du Pic de la Sérénité. » L’intendante se redressa vivement. « Mais.... ?!?! Mais alors ça sert à rien de ... de ... de croire à quelque chose ou même à quelqu’un !!! Si c’est le corps qui décide de tout dans son coin ! On est juste des marionnettes !»
« Au contraire, il faut simplement... ». Barbara allait compléter, mais Lysange lui coupa la parole. « Mais alors Ted avait raison, on est tout seul avec notre corps qui n’en fait qu’à sa tête, c’est le cas de le dire ! Et c’est même pas la peine d’espérer rencontrer quelqu’un pour partager un peu de... un peu de ... !!! Rhaaaaa !!! Mais c’est horrible !!!»
Curieusement la jeune femme était au bord des larmes, comme sous le coup d’une révélation qui la détruisait. « Mais… on est pas plus malins que des animaux, alors ? Je croyais qu’on était intelligents, qu’on avait une conscience de ce qu’on faisait, une volonté de faire le bien ou le mal.. tout ça c’est faux alors ? ». Barbara posa sa main sur son bras et le pressa. « Hum... non, heureusement, ce n’est pas aussi noir... ».
Mais Lysange ne semblait pas rassurée.« Ben si… C’est horrible tout ça… c’est même plus la peine de vivre, là… autant aller se noyer tout de suite dans un tonneau de rhum… ». Barbara lui pressa de nouveau le bras, partagée entre sourire et compassion. « Lysange, ces comportements ont été mis en place pour nous permettre de survivre. Ils sont inscrits en nous, c’est un fait, mais justement, comme vous le dites, nous avons aussi une conscience de ce que nous sommes, une intelligence et une curiosité qui nous poussent à évoluer, et surtout un besoin de partage avec d’autres personnes pour nous construire. ».
La jeune femme était toujours profondément désemparée. « Moui.. mais de savoir que c’est ma tête qui invente tout seule des histoires pour me faire croire que tout ça a un sens… franchement y’a pas de quoi sauter de joie, je trouve… ». Lysange faisait la moue, Barbara compléta. « Mais toutes ces histoires sont les vôtres, Lysange ! Elles sont tout de même très personnelles. Vous les concevez à partir de vos expériences, de vos connaissances, vous êtes donc entièrement présente dans cette reconstruction, c’est vous qui vous exprimez dans ces histoires que votre intelligence invente, peut-être même plus que dans celles que vous subissez. Elle est là votre réalité.»
Lysange regarda la rousse avec circonspection. « Mmh… Donc ce sont des histoires et c’est quand même moi ? C’est ce que vous dites ? ». Barbara acquiesça de nouveau. « Dans les grandes lignes, oui. Il semble que nous ayons besoin de donner du sens à notre vie, par incapacité à profiter simplement du présent, comme l’enseignent les grands maîtres. C’est notre nouveau moyen de survie, en tant qu’êtres pensants et intelligents. »
La jeune intendante n’en pouvait plus de tenter de mettre en forme ce qu’elle comprenait peu à peu, et elle soupira longuement. Barbara s’en inquiéta. « Mais je vous sens fatiguée, ou inquiète, quelque chose ne va pas ? Si je vous embête, je… ».
« Non, non ça m’intéresse hein … mais je crois que je me prends beaucoup la tête en ce moment avec des trucs sans importance, exprès pour pas réfléchir à ce qui m’arrive. Parce que quand j’ai la tête farcie, c’est sûr, j’ai plus trop de place pour penser à … quelqu’ …. autre chose…»La question fusa. « Autre chose ? »
« Autre chose, ouais ». Un regard de biais vaguement noir et Barbara comprit qu’il ne valait mieux pas insister. « D’accord… donc vous vous remplissez la tête pour ne pas vous laisser inventer des histoires qui vous déplaisent…. vous voyez que l’on peut s’en débrouiller…. c’est là qu’agit votre personnalité, votre vivacité, votre intelligence ».
« Euh… ben non, justement, c’est pas une histoire qui me déplairait, bien au contraire. C’est justement pour pas tirer des plans sur la comète, que je m’enlise dans un maelström de trucs bien prenants.. Je me vois faire, hein… Mon corps décide peut-être pour moi, et ma tête invente peut-être toute seule des histoires pour m’expliquer pourquoi j’ai fait ceci ou cela, n’empêche que, moi, Lysange, ben j’me vois faire…. et ça m’bouffe, en fait, oui.. ça m’bouffe…. ».
Barbara se leva, marquant la fin de sa pause.« Je peux vous donner un conseil ? » Lysange se leva à son tour, prête à reprendre le chemin des bureaux. « Ben donnez toujours, mais je dis pas que je vais pouvoir le suivre… ». Barbara frottait doucement son pantalon. « Et bien comme dirait mon ancien Maître, le vénérable Tcheng : Prends la vie comme elle vient, car c’est un fleuve. Si tu nages à contre-courant, tu te noieras. Mais si tu veux aller plus vite que le courant, tu te noieras tout autant. Alors laisse toi simplement porter et profite du voyage ».
Lysange la regarda longuement, inspira une grande bouffée d’air puis la souffla rapidement, presque dépitée. « Moui… je voudrais pas être désobligeante, hein… c’est peut-être joli, comme métaphore, mais c’est bien plus facile à dire qu’à faire. Donc je crois que je vais rester avec ma tête farcie un bon moment si je veux pas me retrouver encore une fois sur le carreau à trop croire aux histoires que je m’invente … ».
« C’est un peu ça, oui... Toutes nos actions reposent sur un fonctionnement biologique, sans volonté ni pensée, et ensuite nous construisons des explications pour tous ces comportements, pour leur donner un sens qui sinon n’existerait pas».
Lysange soupira. « Je comprends pas... C’est quoi le comportement biologique ? ». Barbara expliqua. « Et bien ce sont les réactions de votre corps à des stimuli extérieurs. Des réactions auxquelles vous ne pouvez rien, qui viennent de cinq moteurs différents et qui vous poussent à agir toujours dans le même sens. Nous sommes construits comme cela depuis la nuit des temps et nous n’y pouvons rien». Barbara souriait, essayant de rendre ses explications moins rébarbatives.
Lysange soupira de nouveau. « Mmh… cinq moteurs ? Genre ? ». Barbara, pédagogue, ne semblait pas sensible aux réticences pourtant palpables de sa jeune amie. « Alors, le premier est la nourriture, le second le sexe, le troisième le statut social ou la reconnaissance d’autrui, le quatrième la recherche du moindre effort et le cinquième le besoin d’informations ».
La curiosité de Lysange était enfin activée. « Et donc… ces moteurs se mettent en route sans qu’on y puisse rien, et nous poussent à agir… mais à agir pour faire quoi ? ». Barbara éclata d’un rire léger. « Oh.. mais c’est très simple ! Pour survivre, essentiellement, et donc pour acquérir plus de nourriture, plus de sexe, plus de statut social, plus d’informations et tout ça en en faisant le moins possible. »
Lysange plissa les yeux, toute à l’écoute. « Ah ouais… donc… tout ce que les gens font, même s’ils disent le contraire, c’est pour ça ? Plus de… tout ça ? ».
Barbara esquissa un sourire amusé. « Hé oui… troublant n’est ce pas ? ».
Lysange opina, sous le coup d’une réflexion intense. « Mmh… Ben je comprends mieux pourquoi on dit qu’une fille qui fait des bons petits plats est sûre de garder son bonhomme… si en plus elle fait tout à la maison, qu’elle lui laisse croire que c’est le roi du monde, et qu’en plus elle lui donne ce qu’il veut au lit, alors là… elle a pas de souci à se faire, il va pas la plaquer. Maintenant, est-ce qu’elle sera heureuse, ça… Surtout si elle est pas trop conne et qu’elle a envie d’exister par elle même…».
La rousse éclata d’un rire joyeux. « Et bien vous venez en quelques mots simples de décrire la situation classique de bien des ménages ! ». Lysange avait mis en route la machine à réflexion. « Mais tout de même, je comprends pas… Moi j’ai bien l’impression de décider, de choisir, de vouloir… tout ça c’est faux alors ? ».
Barbara dodelina de la tête, cherchant ses mots. « Et bien il semblerait en effet que si nous donnons bien un sens à nos actes, c’est en après-coup, en leur construisant à chaque fois une histoire, et non avant une décision, en réfléchissant aux solutions ou aux moyens. » Lysange n’en revenait pas. « Alors c’est mon corps qui décide sans que je sois au courant, moi, Lysange, et mon cerveau qui me raconte des histoires pour me faire croire que j’ai décidé ce que je faisais ?!? C’est ça ?!? »
L’ancienne moniale devenue fermière acquiesça gentiment. « En effet, c’est ce que pensent certains maîtres du Pic de la Sérénité. » L’intendante se redressa vivement. « Mais.... ?!?! Mais alors ça sert à rien de ... de ... de croire à quelque chose ou même à quelqu’un !!! Si c’est le corps qui décide de tout dans son coin ! On est juste des marionnettes !»
« Au contraire, il faut simplement... ». Barbara allait compléter, mais Lysange lui coupa la parole. « Mais alors Ted avait raison, on est tout seul avec notre corps qui n’en fait qu’à sa tête, c’est le cas de le dire ! Et c’est même pas la peine d’espérer rencontrer quelqu’un pour partager un peu de... un peu de ... !!! Rhaaaaa !!! Mais c’est horrible !!!»
Curieusement la jeune femme était au bord des larmes, comme sous le coup d’une révélation qui la détruisait. « Mais… on est pas plus malins que des animaux, alors ? Je croyais qu’on était intelligents, qu’on avait une conscience de ce qu’on faisait, une volonté de faire le bien ou le mal.. tout ça c’est faux alors ? ». Barbara posa sa main sur son bras et le pressa. « Hum... non, heureusement, ce n’est pas aussi noir... ».
Mais Lysange ne semblait pas rassurée.« Ben si… C’est horrible tout ça… c’est même plus la peine de vivre, là… autant aller se noyer tout de suite dans un tonneau de rhum… ». Barbara lui pressa de nouveau le bras, partagée entre sourire et compassion. « Lysange, ces comportements ont été mis en place pour nous permettre de survivre. Ils sont inscrits en nous, c’est un fait, mais justement, comme vous le dites, nous avons aussi une conscience de ce que nous sommes, une intelligence et une curiosité qui nous poussent à évoluer, et surtout un besoin de partage avec d’autres personnes pour nous construire. ».
La jeune femme était toujours profondément désemparée. « Moui.. mais de savoir que c’est ma tête qui invente tout seule des histoires pour me faire croire que tout ça a un sens… franchement y’a pas de quoi sauter de joie, je trouve… ». Lysange faisait la moue, Barbara compléta. « Mais toutes ces histoires sont les vôtres, Lysange ! Elles sont tout de même très personnelles. Vous les concevez à partir de vos expériences, de vos connaissances, vous êtes donc entièrement présente dans cette reconstruction, c’est vous qui vous exprimez dans ces histoires que votre intelligence invente, peut-être même plus que dans celles que vous subissez. Elle est là votre réalité.»
Lysange regarda la rousse avec circonspection. « Mmh… Donc ce sont des histoires et c’est quand même moi ? C’est ce que vous dites ? ». Barbara acquiesça de nouveau. « Dans les grandes lignes, oui. Il semble que nous ayons besoin de donner du sens à notre vie, par incapacité à profiter simplement du présent, comme l’enseignent les grands maîtres. C’est notre nouveau moyen de survie, en tant qu’êtres pensants et intelligents. »
La jeune intendante n’en pouvait plus de tenter de mettre en forme ce qu’elle comprenait peu à peu, et elle soupira longuement. Barbara s’en inquiéta. « Mais je vous sens fatiguée, ou inquiète, quelque chose ne va pas ? Si je vous embête, je… ».
« Non, non ça m’intéresse hein … mais je crois que je me prends beaucoup la tête en ce moment avec des trucs sans importance, exprès pour pas réfléchir à ce qui m’arrive. Parce que quand j’ai la tête farcie, c’est sûr, j’ai plus trop de place pour penser à … quelqu’ …. autre chose…»La question fusa. « Autre chose ? »
« Autre chose, ouais ». Un regard de biais vaguement noir et Barbara comprit qu’il ne valait mieux pas insister. « D’accord… donc vous vous remplissez la tête pour ne pas vous laisser inventer des histoires qui vous déplaisent…. vous voyez que l’on peut s’en débrouiller…. c’est là qu’agit votre personnalité, votre vivacité, votre intelligence ».
« Euh… ben non, justement, c’est pas une histoire qui me déplairait, bien au contraire. C’est justement pour pas tirer des plans sur la comète, que je m’enlise dans un maelström de trucs bien prenants.. Je me vois faire, hein… Mon corps décide peut-être pour moi, et ma tête invente peut-être toute seule des histoires pour m’expliquer pourquoi j’ai fait ceci ou cela, n’empêche que, moi, Lysange, ben j’me vois faire…. et ça m’bouffe, en fait, oui.. ça m’bouffe…. ».
Barbara se leva, marquant la fin de sa pause.« Je peux vous donner un conseil ? » Lysange se leva à son tour, prête à reprendre le chemin des bureaux. « Ben donnez toujours, mais je dis pas que je vais pouvoir le suivre… ». Barbara frottait doucement son pantalon. « Et bien comme dirait mon ancien Maître, le vénérable Tcheng : Prends la vie comme elle vient, car c’est un fleuve. Si tu nages à contre-courant, tu te noieras. Mais si tu veux aller plus vite que le courant, tu te noieras tout autant. Alors laisse toi simplement porter et profite du voyage ».
Lysange la regarda longuement, inspira une grande bouffée d’air puis la souffla rapidement, presque dépitée. « Moui… je voudrais pas être désobligeante, hein… c’est peut-être joli, comme métaphore, mais c’est bien plus facile à dire qu’à faire. Donc je crois que je vais rester avec ma tête farcie un bon moment si je veux pas me retrouver encore une fois sur le carreau à trop croire aux histoires que je m’invente … ».
- HRP : Quand la science s’en mêle :
- J’ai essayé dans ce petit texte de faire passer des informations scientifiques récentes sur le fonctionnement de notre cerveau, parce que ce sont mes lectures du moment, que je les trouve passionnantes, et que cela m’amusait d’essayer de leur donner une coloration ludique. Si certains sont intéressés par ces mêmes théories, sérieusement expliquées, mais néanmoins accessibles, il y a « Le Bug humain » de Sébastien Bohler, Robert Laffon, 2019, et « Le cerveau est bête » de Nick Carter, Plon, 2018.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Lysange et Barbara papotaient comme chaque jour, assises sur les marches de la grande maison commune et attendant le service de midi., mais Lysange avait sa mine des mauvais jours, elle semblait fatiguée et perdue.
« Alors ? Et cette fête ? Elle aura lieu quand ? ».
« Ben… en fait M’sieur Fossard a décidé d’annuler. Purement et simplement. Trop de .. retournements. Ca date d’une bonne semaine, et on a déjà prévenu tous nos partenaires. On fera quand même une fête privée, sans doute d’ici l’été, pour ceux qui nous apprécient, avec un jeu amusant pour lequel on a dégotté un commentateur. Et puis, à côté de ça, on va soigner nos relations commerciales. Voilà. ». Lysange laissa échapper un petit soupir.
« Mmh… il doit être déçu tout de même. Lui qui s’en faisait une joie… ».
« Oui…. il est dégoûté en fait, mais bon… ça n’a pas trop l’air d’être le genre à se morfondre longtemps sur un échec… et ça, ça me convient bien. Faut regarder devant et pas derrière, sinon on passe son temps à chouiner, et c’est pas vraiment agréable, ni pour soi ni pour les autres. Enfin… disons que c’est pas comme ça que je fonctionne, donc ça me va bien. Même si je suis déçue aussi, je peux pas dire le contraire.... ».
« Je vois… c’est donc la raison de votre petite mine ? Mais ça va s’arranger maintenant que les choses sont claires ». Barbara souriait. « Euh… non, pas vraiment. Non, en fait ça m’occupait la tête, tout ça, donc c’était bien. Non… c’est que… ben non, c’est pas ça. »
« D’accord…». Barbara restait à l’écoute, mais Lysange hésitait à se confier, croisant et décroisant les mains. Enfin elle se lança. « Dites, hier soir je discutais avec une dame de l’église que j’apprécie et... ben j’aurais une question…». Barbara acquiesça. « Alors voilà... on parlait de son ancien mari, un gars bizarre que je connais un peu, on papotait sur les couples et tout ça, et là elle me demande si moi... enfin voyez... » Barbara allait répondre mais Lysange continua. « Enfin non, elle me demande direct comment ça se passe avec Monsieur Fossard… ». Lysange était rose de confusion. « Alors moi je lui dis qu’il est gentil et que ça se passe bien, mais voilà quoi ! »
« Mmh... Oui.... ». Barbara sentait qu’il valait mieux ne pas questionner. « Et là elle me dit que je devrais plus discuter avec lui parce que les hommes ils cherchent surtout une femme avec qui parler…. ». Lysange tourna la tête en cherchant le regard de Barbara. « Vous êtes d’accord avec ça vous ? »
« Et bien.... ». Mais Lysange n’eut pas la patience d’attendre sa réponse. « Non parce que, moi je vois bien les types qui travaillent ici hein... allez donc essayer de causer avec Tom, tiens ! Ou Nealson !!! Ou pire encore, Ted !!!! Moi je suis pas d’accord, c’est pas vrai, cette histoire là..... ces gars là n’ont pas envie de discuter. Ou alors pas avec moi..»
Même quand elle était désespérée Lysange trouvait le moyen de prêter à sourire. « Du coup j’étais toute perturbée et ... pfff.... pour un peu je faisais une vraie connerie... heureusement que je devais me coucher de bonne heure, sinon .... ».
Barbara l’observait, tout à coup soucieuse. « Une connerie… quel genre de.. ? ». Lysange haussa les épaules. « Boarf, rien de vraiment grave, hein… mais moi j’aurais pas été fière de moi, déjà que là…. ». Difficile pour Barbara de conserver sa neutralité, en savoir plus la démangeait. Elle pressa le bras de Lysange en lui adressant un sourire l’invitant à continuer.
« Bah… je suis allée à la taverne du quartier nain, vous savez celle où y’a des combats. Le patron m’avait repérée assise seule sur un banc après la discussion avec Dame Von Pelt. Il est venu près de moi, avec son videur, et il m’a invitée à venir goûter un cocktail créé par le tirassien. Moi je m’ennuyais c’est clair, alors j’y suis allée et là…. ». Elle soupira, songeuse, triturant ses mains. Barbara pressa de nouveau son bras avec douceur. « Là y’avaient trois types devant, que j’avais jamais vus, et maintenant je me dis qu’ils étaient là pour attirer des filles comme moi… Ils étaient tout sourires et y’en a un qui m’a carrément prise par le bras pour m’entrainer à l’intérieur. Je lui ai dit que j’avais pas besoin, que je connaissais le patron et même un serveur, mais il a fait comme s’il les connaissait pas et il m’a poussée vers le comptoir. Là y’avait le videur tirassien, alors je lui ai dit que je venais goûter son cocktail spécial. Et les deux étaient très contents… j’aurais dû me méfier… ».
Barbara écoutait, attentive et soucieuse. Lysange continua. « En fait, après il me l’a dit le videur, ce cocktail il est spécial parce qu’il a des effets différents selon les personnes. Apparemment moi j’ai eu de la chance, ça m’a juste rendue bien pompette d’un coup. J’ai vu tout flou et puis, apparemment plus rien. Mais ça m’avait bien sonnée… » Elle s’arrêta pour regarder Barbara. « Je dis pas ça pour me dédouaner, hein… mais c’est sûr que ça a joué, ou alors y’a autre chose qui me travaille, parce qu’en y repensant, là, je comprends toujours pas ce qui m’a pris… ».
Barbara essaya d’être rassurante. « Allez… je suis sûre que vous n’avez rien fait de mal… ».
Lysange haussa l’épaule, comme blasée d’elle même. « Bah.. non, rien de mal, c’est sûr, mais j’aurais préféré ne rien faire du tout. Surtout quand on voit comment le type s’est comporté après… Je vais plus oser y aller moi maintenant…. Bref…. le type m’a de nouveau prise par le bras et il a voulu m’emmener pour me montrer « quelque chose » et j’ai refusé, net. Il m’a alors piquée au vif en me disant que j’étais pas joueuse… bien évidemment moi j’ai réagi au quart de tour et j’ai dit que si, mais qu’il fallait pas me prendre pour une conne ».
Barbara souriait de nouveau. « Il a alors proposé un jeu, où on devait deviner un truc sur un client, ensuite on vérifiait et si on perdait on avait comme un gage. J’ai accepté… et bien évidemment au premier tour j’ai perdu…. ». Elle soupira. « Là, comme gage, il m’a demandé un baiser. Comme si je m’y attendais pas... ». Elle esquissa un sourire. « Mais je lui ai donné un baiser bien sonore sur la joue… Il était pas content mais j’avais pas triché puisqu’il avait juste parlé d’un baiser ».
Barbara essayait de ne pas rire. « Je vous vois hein… ça vous fait sourire… mais je vous assure que moi, je sentais déjà que ça n’allait pas et que je devais vite m’en aller… j’arrêtais pas de lui dire que si on s’était connus avant, j’aurais accepté bien plus mais que là, je pouvais pas faire mieux.. ça glissait je le sentais…. bref ! Au tour suivant, il a perdu et j’en ai profité pour lui dire que je devais rentrer mais que je gardais son gage pour une autre fois potentielle … Il était déçu mais il l’a pas trop montré…. Comme je voyais qu’il réagissait en gentilhomme en me souhaitant gentiment bonsoir… ». Elle soupira longuement. « C’est là que je m’en veux en fait….. donc là, je lui ai redonné un baiser, toujours sur la joue, mais différent, gentil… prometteur …. voyez ? » Lysange observait la réaction de son aînée qui acquiesça simplement. « Et là…. non mais j’ai honte rien qu’en y repensant…. vous savez pas ce qu’il a fait ? ». Barbara secoua la tête, essayant de rester le plus neutre possible. « Il m’a mis une superbe claque sur les fesses !!!! Juste quand je sortais !!! J'ai rien pu faire, j'étais sur le seuil de la porte... je suis partie sans demander mon reste.... »
Lysange se replia sur elle même, dépitée, en soupirant. Barbara attendait une autre péripétie. « Oui… Et..? ». Lysange explosa. « Mais vous vous rendez compte ?!?? C’est la honte ! La honte totale même !! Qu’est ce que je faisais dans cette taverne avec des … des …. filles qui vendent leurs charmes ! Et en plus accompagnée d’un type qui me servait du Poupée, du Chérie en veux-tu en voilà ! Moi ! Mais vous vous rendez compte si le patron venait à le savoir ?!??? De quoi j’aurais l’air moi ?!??».
Elle s’était levée et gesticulait en criant. Impossible de la raisonner. Barbara la laissa donc repartir. La cloche du déjeuner sonna, Lysange était repartie se cacher, on ne la revit plus de l’après-midi.
« Alors ? Et cette fête ? Elle aura lieu quand ? ».
« Ben… en fait M’sieur Fossard a décidé d’annuler. Purement et simplement. Trop de .. retournements. Ca date d’une bonne semaine, et on a déjà prévenu tous nos partenaires. On fera quand même une fête privée, sans doute d’ici l’été, pour ceux qui nous apprécient, avec un jeu amusant pour lequel on a dégotté un commentateur. Et puis, à côté de ça, on va soigner nos relations commerciales. Voilà. ». Lysange laissa échapper un petit soupir.
« Mmh… il doit être déçu tout de même. Lui qui s’en faisait une joie… ».
« Oui…. il est dégoûté en fait, mais bon… ça n’a pas trop l’air d’être le genre à se morfondre longtemps sur un échec… et ça, ça me convient bien. Faut regarder devant et pas derrière, sinon on passe son temps à chouiner, et c’est pas vraiment agréable, ni pour soi ni pour les autres. Enfin… disons que c’est pas comme ça que je fonctionne, donc ça me va bien. Même si je suis déçue aussi, je peux pas dire le contraire.... ».
« Je vois… c’est donc la raison de votre petite mine ? Mais ça va s’arranger maintenant que les choses sont claires ». Barbara souriait. « Euh… non, pas vraiment. Non, en fait ça m’occupait la tête, tout ça, donc c’était bien. Non… c’est que… ben non, c’est pas ça. »
« D’accord…». Barbara restait à l’écoute, mais Lysange hésitait à se confier, croisant et décroisant les mains. Enfin elle se lança. « Dites, hier soir je discutais avec une dame de l’église que j’apprécie et... ben j’aurais une question…». Barbara acquiesça. « Alors voilà... on parlait de son ancien mari, un gars bizarre que je connais un peu, on papotait sur les couples et tout ça, et là elle me demande si moi... enfin voyez... » Barbara allait répondre mais Lysange continua. « Enfin non, elle me demande direct comment ça se passe avec Monsieur Fossard… ». Lysange était rose de confusion. « Alors moi je lui dis qu’il est gentil et que ça se passe bien, mais voilà quoi ! »
« Mmh... Oui.... ». Barbara sentait qu’il valait mieux ne pas questionner. « Et là elle me dit que je devrais plus discuter avec lui parce que les hommes ils cherchent surtout une femme avec qui parler…. ». Lysange tourna la tête en cherchant le regard de Barbara. « Vous êtes d’accord avec ça vous ? »
« Et bien.... ». Mais Lysange n’eut pas la patience d’attendre sa réponse. « Non parce que, moi je vois bien les types qui travaillent ici hein... allez donc essayer de causer avec Tom, tiens ! Ou Nealson !!! Ou pire encore, Ted !!!! Moi je suis pas d’accord, c’est pas vrai, cette histoire là..... ces gars là n’ont pas envie de discuter. Ou alors pas avec moi..»
Même quand elle était désespérée Lysange trouvait le moyen de prêter à sourire. « Du coup j’étais toute perturbée et ... pfff.... pour un peu je faisais une vraie connerie... heureusement que je devais me coucher de bonne heure, sinon .... ».
Barbara l’observait, tout à coup soucieuse. « Une connerie… quel genre de.. ? ». Lysange haussa les épaules. « Boarf, rien de vraiment grave, hein… mais moi j’aurais pas été fière de moi, déjà que là…. ». Difficile pour Barbara de conserver sa neutralité, en savoir plus la démangeait. Elle pressa le bras de Lysange en lui adressant un sourire l’invitant à continuer.
« Bah… je suis allée à la taverne du quartier nain, vous savez celle où y’a des combats. Le patron m’avait repérée assise seule sur un banc après la discussion avec Dame Von Pelt. Il est venu près de moi, avec son videur, et il m’a invitée à venir goûter un cocktail créé par le tirassien. Moi je m’ennuyais c’est clair, alors j’y suis allée et là…. ». Elle soupira, songeuse, triturant ses mains. Barbara pressa de nouveau son bras avec douceur. « Là y’avaient trois types devant, que j’avais jamais vus, et maintenant je me dis qu’ils étaient là pour attirer des filles comme moi… Ils étaient tout sourires et y’en a un qui m’a carrément prise par le bras pour m’entrainer à l’intérieur. Je lui ai dit que j’avais pas besoin, que je connaissais le patron et même un serveur, mais il a fait comme s’il les connaissait pas et il m’a poussée vers le comptoir. Là y’avait le videur tirassien, alors je lui ai dit que je venais goûter son cocktail spécial. Et les deux étaient très contents… j’aurais dû me méfier… ».
Barbara écoutait, attentive et soucieuse. Lysange continua. « En fait, après il me l’a dit le videur, ce cocktail il est spécial parce qu’il a des effets différents selon les personnes. Apparemment moi j’ai eu de la chance, ça m’a juste rendue bien pompette d’un coup. J’ai vu tout flou et puis, apparemment plus rien. Mais ça m’avait bien sonnée… » Elle s’arrêta pour regarder Barbara. « Je dis pas ça pour me dédouaner, hein… mais c’est sûr que ça a joué, ou alors y’a autre chose qui me travaille, parce qu’en y repensant, là, je comprends toujours pas ce qui m’a pris… ».
Barbara essaya d’être rassurante. « Allez… je suis sûre que vous n’avez rien fait de mal… ».
Lysange haussa l’épaule, comme blasée d’elle même. « Bah.. non, rien de mal, c’est sûr, mais j’aurais préféré ne rien faire du tout. Surtout quand on voit comment le type s’est comporté après… Je vais plus oser y aller moi maintenant…. Bref…. le type m’a de nouveau prise par le bras et il a voulu m’emmener pour me montrer « quelque chose » et j’ai refusé, net. Il m’a alors piquée au vif en me disant que j’étais pas joueuse… bien évidemment moi j’ai réagi au quart de tour et j’ai dit que si, mais qu’il fallait pas me prendre pour une conne ».
Barbara souriait de nouveau. « Il a alors proposé un jeu, où on devait deviner un truc sur un client, ensuite on vérifiait et si on perdait on avait comme un gage. J’ai accepté… et bien évidemment au premier tour j’ai perdu…. ». Elle soupira. « Là, comme gage, il m’a demandé un baiser. Comme si je m’y attendais pas... ». Elle esquissa un sourire. « Mais je lui ai donné un baiser bien sonore sur la joue… Il était pas content mais j’avais pas triché puisqu’il avait juste parlé d’un baiser ».
Barbara essayait de ne pas rire. « Je vous vois hein… ça vous fait sourire… mais je vous assure que moi, je sentais déjà que ça n’allait pas et que je devais vite m’en aller… j’arrêtais pas de lui dire que si on s’était connus avant, j’aurais accepté bien plus mais que là, je pouvais pas faire mieux.. ça glissait je le sentais…. bref ! Au tour suivant, il a perdu et j’en ai profité pour lui dire que je devais rentrer mais que je gardais son gage pour une autre fois potentielle … Il était déçu mais il l’a pas trop montré…. Comme je voyais qu’il réagissait en gentilhomme en me souhaitant gentiment bonsoir… ». Elle soupira longuement. « C’est là que je m’en veux en fait….. donc là, je lui ai redonné un baiser, toujours sur la joue, mais différent, gentil… prometteur …. voyez ? » Lysange observait la réaction de son aînée qui acquiesça simplement. « Et là…. non mais j’ai honte rien qu’en y repensant…. vous savez pas ce qu’il a fait ? ». Barbara secoua la tête, essayant de rester le plus neutre possible. « Il m’a mis une superbe claque sur les fesses !!!! Juste quand je sortais !!! J'ai rien pu faire, j'étais sur le seuil de la porte... je suis partie sans demander mon reste.... »
Lysange se replia sur elle même, dépitée, en soupirant. Barbara attendait une autre péripétie. « Oui… Et..? ». Lysange explosa. « Mais vous vous rendez compte ?!?? C’est la honte ! La honte totale même !! Qu’est ce que je faisais dans cette taverne avec des … des …. filles qui vendent leurs charmes ! Et en plus accompagnée d’un type qui me servait du Poupée, du Chérie en veux-tu en voilà ! Moi ! Mais vous vous rendez compte si le patron venait à le savoir ?!??? De quoi j’aurais l’air moi ?!??».
Elle s’était levée et gesticulait en criant. Impossible de la raisonner. Barbara la laissa donc repartir. La cloche du déjeuner sonna, Lysange était repartie se cacher, on ne la revit plus de l’après-midi.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Très tôt dans la matinée, aux premières lueurs du jour, quand le domaine Fossard commencera à se réveiller et que les domestiques s'activeront pour accomplir leurs premières tâches matinales, une odeur nauséabonde pourra être sentie à la fois du côté des écuries ayant dix enclos et près de l'habitation servant de bureau administratif. Les chiens du domaine auront aboyés plus que d'habitude et c'est finalement le bruit d'un objet de poterie éclaté sur le sol par une servante et son hurlement qui auront donné l'alerte; une tête tranchée d'un des canassons de l'écurie était là, déposée sur le pas de la porte du bureau. Le reste du corps appartenant au cheval fût laissé à l'intérieur de l'enclos.
Les rares traces laissées sont celles de traces de pas mélangées à celles des sabots de chevaux et des serviteurs du domaine sur la terre.
Qui aurait pu commettre un tel acte ? Et plus important encore, qu'est-ce que cela signifie ?
Les rares traces laissées sont celles de traces de pas mélangées à celles des sabots de chevaux et des serviteurs du domaine sur la terre.
Qui aurait pu commettre un tel acte ? Et plus important encore, qu'est-ce que cela signifie ?
Roscoe Kingswood- Citoyen
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Date d'inscription : 02/04/2019
Re: Au fil des jours chez Fossard.
~ Huit heures plus tard ~
- " Fumiers … "
- " Salopards … "
- " Sales bâtards … "
- " Bande de lâches … "
A chaque coup de pelle enfoncée dans la terre meuble puis éjectée deux mètres plus loin, une insulte fuse de la bouche des deux hommes occupés à creuser.
En ce début d'après midi, le soleil du printemps se montre chaud et généreux, les oiseaux entament des concours de chants mélodieux dans les nombreux arbres alentours, semblant vouloir occulter la scène qui se passe là, juste en dessous.
Derrière la grange, ils sont penchés tout deux, trempés de sueur et torses nus, les muscles saillants et les coups de pelles réguliers, toujours ponctués de noms d'oiseaux lâchés tout bas et empreints d'une colère noire. Après deux bonnes heures d'efforts soutenus et d'insultes crachées à la petite brise tiède de l'après midi, ils s'arrêtent enfin et plantent leurs pelles à côté du trou qu'ils jugent tous deux 'de bonne taille'.
A vingt cinq mètres de là, dans la même lignée, les deux alterans dépêchés au Domaine Fossard par la Maison Coeur de Lion érigent les deux nouveaux petits enclos qui leur ont été commandés, travaillant quasiment sans mot dire, ambiance écrasante oblige …
Les mains l'une sur l'autre, appuyées sur le manche de la pelle, le menton posé sur celles-ci, Oscar les regarde faire, reprenant son souffle le temps de cette pause. Tom, lui, attrape l'outre d'eau fraîche et se désaltère avant de s’asseoir au bord du trou, les jambes dans le vide. Puis il lève son seul œil valide vers Oscar dont le regard semble égaré dans des idées noires, fixé sur les alterans qu'il ne voit sûrement plus, le tressaillement régulier et bien marqué de ses maxillaires témoignant d'une ébullition interne difficile à contenir.
- " Ça va patron ? "
- " Hmmmm …. "
Extirpé de ses pensées par la voix de Tom, il le regarde un petit moment et tente le début d'un sourire. Raté.
- " T'sais quoi … L'aut' soir avec Lysange on a été boire un verre à la taverne de m'dame Doubhée. Arrivés là haut, y avait deux nabots sur la terrasse, un gars, une fille .. Moi j'les avais jamais vus ces deux là, jamais. Le temps d'dire bonsoir à la dame devant la porte et v'là l'nain qui m'traite d'abruti .. comme ça, sans raison … Moi j'demande des explications, j'dis que je le connais pas, qu'il s'trompe.
Mais non il remet ça, encore et encore … et là il m'raconte qu'il a la rancune tenace, qu'on s'en est pris à son 'Vénérable' et qu'on doit payer pour c'qu'on a fait … "
Tom bondit alors et lève la voix !
- " Ce qu'on a fait ? Mais patron ? Ils m'ont crevé un OEIL ses fils de catin ! "
- " JE SAIS TOM ! Je SAIS ! Mais laisse moi finir ! Alors comme il a commencé à me déblatérer tout un tas d'insultes à Lysange et à moi, et ben j'ai fait pareil, lui conseillant de retourner su- … se soumettre comme un esclave à son Vénérable ! Et qu'en prime, ses mœurs j'en ai rien à faire, j'suis pas un nabot moi ! Bref ça s'est mal passé, il m'a cherché il m'a trouvé .. m'dame Doubhée est sortie, il l'a agressée aussi. Finalement j'suis entré dans la taverne et lui s'est fait virer ... "
Un court silence s'installe alors, Oscar repose son regard sur les alterans besogneux puis dévie sur sa gauche et revient près de Tom, les sourcils froncés et le visage crispé comme par une douleur subie et encaissée, mais silencieuse et sournoise.
A côté du trou, à côté du petit mont de terre, un jeune étalon kultirassien est couché sur le flanc. Sa crinière dorée et sa robe sable sont souillés de son sang. Sa tête, tranchée, est posée à côté, les yeux clos. Son harnais d'entraînement, sa selle, ses étriers, tout est regroupé là, en petit tas.
Après avoir déglutit difficilement, il revient vers Tom, la voix rauque et cinglante.
- " J'suis sûr que c'te raclure de latrines de nabot est capable d'avoir fait ça … On m'fera pas croire le contraire ! "
D'un geste rageur, il se passe le dos de la main sur le front, puis sur sa bouche grimaçante, essuyant la sueur et sûrement quelques larmes échappées, puis inspire profondément, expirant un long soupir entre ses dents serrées.
- " Bon allez .. faut l'mettr' dans l'trou … Qu'il s'en aille vite galoper dans les ténèbres … "
Une fois le sale boulot fait, Tom s'enferma dans la grange, Oscar dans son bureau et on les revit pas de l'après midi.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
«En fait… je comprends pas. Je suis peut-être à m’imaginer des choses qui ne sont pas vraies, mais tout de même, à force…. certains faits semblent démontrer qu’il y a des gens, en ville, qui nous veulent du mal, sans raison, et qui font tout pour nous plomber en se mettant d’accord pour nous pourrir la vie et nous faire passer pour ce qu’on est pas… ». La fermière regarda l’intendante, attentive. « Comment ça, expliquez moi ».
Les deux femmes discutaient près de la maison commune, attendant l’heure du déjeuner dans une ambiance tendue, sous le regard attentif d’une demie douzaine de membres des Expéditionnaires qui s’étaient depuis la veille proposés pour garantir la sécurité du domaine qu’ils sillonnaient en se relayant.
« Et bien en fait, hier soir, après la journée horrible qu’on avait déjà vécue …. », la jeune femme s’arrêta, « Vous savez que chaque fois que je passe devant chez les nains y’en a toujours un ou deux qui me crachent dessus comme si j’étais une pestiférée ! Alors moi, avant, ça me faisait rire, j’avoue, mais là, avec l’altercation de la semaine dernière devant la Chope, plus les attaques dont j’ai été l’objet hier soir, non seulement c’est glauque mais en plus c’est louche».
Barbara coula un regard vers le mage des Expéditionnaires qui venait de refaire un arc de protection autour des champs. « De quoi parlez vous ? »
« Ben... pour ce qui est de la semaine dernière, j’étais avec Monsieur Fossard, il était dans les 23 heures et on venait juste rendre visite à Doubhée pour une soirée, voyez ? ». Barbara se contenta d’acquiescer. « Et là... devant, y‘avait un couple de nains, que je connaissais même pas, et le bonhomme dit à la bonne femme de se méfier de moi parce que je suis de la Maison Fossard et qu’on est tous des salopards. Là, la naine lui répond qu’elle le sait parce qu’elle a été agressée verbalement par mon « petit copain » qui a dit être de cette même Maison ! Alors moi je cherche à comprendre, parce que je vois même pas de qui elle cause, mais Monsieur Fossard s’avance aussi, et là le nain le traite d’abruti ! Puis il continue avec tout un tas de noms d’oiseaux, pour moi aussi d’ailleurs … »
« Je vois… Et vous avez fait quoi ? »
« Ben j’ai essayé de calmer le patron... mais bon, une fois que l’autre l’avait traité d’abruti sans même l’avoir jamais vu avant, c’est sûr que.... », Lysange grimaçait, « au final je suis rentrée dans la taverne, j’ai expliqué à Doubhée ce qui se passait et elle est sortie pour dire aux deux nains de quitter sa terrasse... et heureusement parce que le nain faisait tout pour que M’sieur Fossard se batte avec lui !!! C’est fou non ?!? »
« C’est surtout une tentative de manipulation et un manque de maturité… venant de la part de personnes qui ont probablement passé les deux centaines d’années de vie sur ce monde, ce n’est plus de la méchanceté infantile, c’est juste de la connerie, intrinsèque et éternelle, excusez-moi d’être aussi directe ».
« Mmh… oui, je crois que c’est le mot adéquat, mais le problème est que cette connerie là, elle s’étend à d’autres et que ça commence à devenir sérieusement louche… ».
« Expliquez moi ».
« Hier soir, on avait une livraison, pour un gars qui avait acheté un cheval la veille au marché. Le patron lui avait fait une fleur, parce que à 80 argentées le cheval dressé, franchement.. Bref ! Le gars il vient, et comme Monsieur Fossard est occupé au bureau, je le fais patienter en papotant. Comme il est de la septième Légion, je lui dis que je connais son chef, Oberson, puisqu’il est venu l’an dernier acheter un cheval pour sa femme. Je m’en souviens parce que c’était un cadeau qu’elle avait payé elle même, ce que j’avais trouvé étonnant. Là le gars il me dit que c’est « son ancienne femme » et il précise que c’est «une conne » … lui, hein… c’est le gars qui dit ça ! ».
« Oui… et ? »
« Bon, donc on lui livre le cheval qu’il emmène, selle et harnais offerts en plus, et ensuite avec M’sieur Fossard, on part à la Garde pour aller déposer plainte suite à… enfin vous savez quoi».
Barbara se contenta d’acquiescer en grimaçant, le regard se portant vers l’un des gardes en poste non loin.
« Là bas on trouve personne… comme souvent… alors on décide d’aller voir sur la place centrale. Là on croise Oberson, entouré de sa troupe de déb…. de soi disant militaires, qui m’alpague, carrément, en pleine rue devant tout le monde, et qui me parle comme si j’étais une écervelée en me disant que je colporte des rumeurs !!! Moi, des rumeurs !!! Il a vu ça où ? Je cause à personne !!! Il me dit que c’est son gars qui lui a répété « mes propos »… MES PROPOS !!! Le même gars qui a dit que son ex-femme était une conne, non mais…. !!! ». Lysange était hors d’elle.
« Calmez vous… continuez ».
« Oui.. bon… Je me laisse pas faire, je m’en vais, je dis à Monsieur Fossard de les laisser et que je vais lui raconter ce que j’avais vu avec Ted et que j’avais raconté à la Chancelière Royale, cette histoire de collaboration bizarre avec les nains, le soir où ils avaient bouché la rue. Il m’écoute, il dit qu’il comprend et rouspète après le client qui colporte des mensonges sur mon compte… Là il le voit, le client, plus loin près de la Cathédrale, qui discute avec Oberson et d’autres. Alors, ni une ni deux, il va vers lui, lui tape sur l’épaule et lui jette à la figure les 80 argentées du prix du cheval…. ».
« Ah oui… ». Barbara soupira.
« Ouais… devant tout le monde… c’est reparti comme en l’an zéro, je vous dis… comme avec Pignac… Mais c’est après que j’ai commencé à trouver tout ça très louche. Parce que moi j’étais derrière le patron, alors j’ai pas eu le temps de réagir pour le suivre vers le port, et ils m’ont cernée, et là ils se sont mis à me harceler, me traiter comme une débile et surtout…. ». Lysange s’arrêta, le regard noir.
« … surtout en me parlant exactement comme les nains ont pu le faire… mêmes mots… mêmes expressions… mêmes comportements … mêmes façons de me signifier que je suis toujours à suivre mon patron… mêmes attaques … comme avec Pignac et les nains… comme avec Tom et les nains… tout pareil, même rage, même connerie, même mauvaise fois, même jalousie…. ».
« Oui… Il y a collusion, c’est évident ». Lysange regarda son aînée avec étonnement. « Collusion ? ».
«Et bien… il semble que plusieurs personnes se soient mises d’accord pour vous nuire, en suivant un ou deux qui leur dictent les paroles, les gestes, les actes qui vous feront du mal, d’où la similarité de ces comportements ».
« Mmh… une ou deux personnes… oui… ça doit être ça, ce sont tous des moutons débiles qui suivent un autre tout aussi débile mais bien plus méchant … Mais pourquoi ? Qu’est ce que je leur ai fait ? Juste parce que je veux bien faire mon travail ? En quoi ça les dérange ? ».
« Vous savez, Lysange, les moutons ne supportent pas celui qui ne suit pas le mouvement général. En voulant simplement rester vous-même, vous dérangez donc le petit ordre établi par le chef du troupeau, et vous mettez en danger son maigre pouvoir. Vous êtes comme un caillou dans la chaussure d’un marcheur qui va tout faire pour s’en débarrasser… ». Barbara suivait des yeux une paire de gardes armés qui commentaient leur ronde.
« Ouais…. ben j’en ai marre de déranger. Ça me remplit pas, moi, toutes ces conneries… c’est pas moi en plus, ça me ressemble pas de vivoter là dedans… je crois que je devrais lâcher l’affaire».
« Comment ça, lâcher l’affaire ? »
Lysange soupira lourdement, l’émotion palpable. « J’me sens seule, en fait, j’ai froid, tout au fond de moi, et je commence à me dire que ça va pas s’arrêter. Donc c’est logique de vouloir passer à autre chose, non ? ».
La fermière avait le visage soucieux. « Et bien…. j’avoue ne pas vous suivre… si c’est la solitude qui vous tourmente, pourquoi ne pas répondre aux avances de ceux qui viennent vers vous ? ».
«Parce que …. je le sens que ça n’ira pas, que j’en attends plus qu’ils ne pourront ou voudront partager. Je frappe pas à la bonne porte, en fait. Ou je suis pas à la bonne place ». Les épaules basses et le dos courbé, la jeune femme faisait peine à voir.
« Allez… vous dites ça parce que vous êtes touchée par ce qui se passe, ça vous passera, sûrement… ».
Lysange hoqueta. « Bah !…. Je sais bien, que ça me passera. Mais justement, c’est ça qui m’inquiète. Je vais me laisser distraire par des enfantillages, ça va me prendre la tête, je vais oublier, mais comme le problème de fond n’est pas réglé, il reviendra me prendre à revers et ça recommencera, encore et encore, et de pire en pire. Je suis en train de me fourvoyer, là… c'est clair que je perds mon temps ».
« Mmh… vous vous souvenez de ma métaphore sur le fleuve ? » Lysange acquiesça en soupirant « Alors, pourquoi ne pas juste profiter du voyage ? »
L’intendante explosa. « Parce que vous trouvez que le voyage vaut le coup, là ? Non mais… franchement ?!? Vous croyez que ça m’amuse de voir le patron se transformer et se durcir, à mesure que le temps passe ?!? Vous croyez que ça me plaît de me faire traiter de pisseuse, de commère ou de gamine sans cervelle, par des types dont je voudrais même pas comme paillasson ! De quoi je profite là, moi, hein ? De la débilité ambiante ? De la connerie crasse de salauds à la petite semaine, qui m’imposent leur mauvaise foi et me bouffent mon énergie et ma bonne humeur ? Non mais, allez y, expliquez-moi, parce que là, moi, je le vois plus le côté positif du voyage ! J'ai bien besoin de vos lumières !!! »
D’un bond, elle se leva, comme un diable surgissant d’une boîte de jeu. « Et puis merde à la fin !!! Personne me comprend ici ! Tout le monde s’en fout, au fond, de moi !!! C’est évident que ça sert plus à rien !! JE sers plus à rien !!! Rien de rien !! J'en ai MARRE ! MARRE, MARRE, MARRE !!!».Toutes les têtes s'étaient tournées vers les deux femmes. La brune, debout devant la rouquine, hurlait, des larmes dans la voix.
Assise interdite sur les marches, Barbara n’eut pas le temps de la rattraper, Lysange avait filé vers l'enclos aux ours, animée d’une rage telle qu’elle ne fit aucun cas de Filou, qui lui avait emboîté le pas en frétillant.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Comme chaque jour, l’ensemble du personnel présent sur le domaine attendait que la cloche de la gouvernante annonce le déjeuner, les uns discutant sur le perron, les autres finissant quelque travail. Barbara et Lysange s’étaient assises sur les marches et l’intendante avait sorti une petite affiche pliée en quatre qu'elle avait partiellement dépliée.
« Ah oui… tout ça… ». Barbara venait de lire le contenu et repliait le parchemin. « Je comprends mieux pourquoi Matilda est débordée. Tous nos enclos sont bien remplis, il va falloir vendre, dites moi. » Son était enjoué mais son regard trahissait son inquiétude. « Lysange… vous avez l’air désespérée, vous êtes tellement… différente, je ne vous reconnais pas. ».
La jeune femme reprit le papier plié et le glissa dans sa poche de pantalon, esquissant un tout petit sourire. « Bah, je suis la même hein… » Elle avait cet air crâne de ceux qui tentent de nier l’évidence. La fermière secoua la tête. « Non. D’ordinaire vous rayonnez, vous illuminez l’espace que vous occupez. Tout le monde en profite. Or là…. et bien vous êtes éteinte ».
Lysange se voûta tout en attrapant le cou de Filou, le chien du patron qui ne la lâchait plus. « Oui… je suis désolée…. je sais pas cacher ce que je ressens, j’essaye hein, mais ça se voit quand même. Peut-être que j’essaye pas assez fort, ou peut-être que c’est trop dur pour moi, je sais pas. Mais c’est vrai, apparemment tout le monde le voit. »
« Tout le monde ? »
« Mmh… oui ». Elle avait le regard perdu dans le vague, toute à ses caresses au chien. « Tous les gens que je côtoie, ici et ailleurs, ils me le disent. Faut croire que ça doit bien se voir. Même le patron, hier soir, qui m’a dit que mes nuages étaient bien bas… »
« Et .. vous avez une idée de la cause de ce désespoir ? Vous donnez le sentiment d’être en cours de deuil.. vous avez perdu quelqu’un ?».
La jeune femme regarda son aînée, perplexe. « Euh…. ben non. Pourquoi vous dites ça ? ».
La rousse suivait ses gestes, vaguement souriante. « Lysange, vous connaissez le processus de deuil ? Ses étapes ? ». La jeune femme se contenta de secouer la tête en signe de négation, signifiant néanmoins qu’elle était curieuse de savoir. « Il y a, dit-on, cinq étapes dans le processus de deuil, le déni, la colère, la négociation, la dépression et, enfin, l'acceptation ».
Lysange écoutait, sa main passant et repassant sur les flancs de l’animal. Barbara continua. « Je vous ai vue très en colère la semaine dernière… », Lysange opina, «… puis je vous ai vue en fin de semaine, vous replier sur vous même et tenter de vous faire à l’idée que c’était un moment difficile à passer… », Lysange opina de nouveau, esquissant un vague sourire désolé, « …. et là je vous vois désespérée, profondément triste… et ce sans raison apparente… alors j’ai bien l’impression que vous êtes en cours de deuil, en effet. »
La jeune femme arrêta son geste. Le chien glissa son museau sur ses genoux. « Mais … deuil de qui ? de quoi ? ». Barbara passa rapidement sa main sur la tête du chien. « Je ne sais pas, si vous n’avez perdu personne, alors c’est le deuil d’une idée, d’un projet, voire même d’un idéal de vie, cela peut être tout aussi destructeur vous savez ».
L’intendante réfléchissait tout en gratouillant la tête du chien qui s’était collé contre ses jambes, couché sur ses pieds et la tête sur ses cuisses. « Ben…. ça pourrait être l'idée que j’ai plus rien de bien à vivre par ici, et …. du coup, que je dois arrêter d’y croire ».
La fermière se redressa. « Mais… ici, comme vous dites, cet environnement, le monde dans lequel nous évoluons.. tout ça n’est qu’illusion… vous le savez n’est-ce pas ? ». D’un geste Barbara montrait le domaine alentour. « Donc vous ne pouvez rien en attendre de plus que… ».
Mais Lysange explosa et Filou leva la tête, étonné. « Bien sûr que je le sais ! Mais moi ce que je ressens, c’est vrai ! C’est pas du tout une illusion, et … » , elle regarda son aînée en plissant les yeux, le regard de nouveau noir de colère… « et puis, vous savez quoi ? Ben j’en ai marre de toutes ces idées sur l’illusion des mondes … s’il y a bien une chose de vraie, partout où je vais, c’est ce que je ressens dans mon corps. Mes émotions, mes sentiments, mes rêves ! ça c’est moi, pour de vrai ! ».
Barbara acquiesça, touchée par ce cri du coeur. « Je comprends. Donc.. ce qui vous rend si triste, ce serait le deuil d'un sentiment.. ou d'un d’un rêve ? ».
Lysange la regarda longuement, interdite, figée. Seul son regard trahissait l’ébullition de son cerveau. Soudain son visage se décomposa, ses yeux devinrent brillants, et un mouvement de la mâchoire indiqua qu’elle luttait intérieurement pour ne pas s’effondrer en larmes. Elle hocha doucement la tête. « Ben…. oui.. oui, faut croire que c’est ça. Je suis en deuil d’un rêve ».
Un petit sourire triste éclaira ses traits d’un éclat sombre. « Ouais…. ben merci… c’est bon, vous avez mis le doigt dessus, je … je vais sans doute pouvoir tourner la page, finalement ».
Elle se leva en repoussant doucement du pied le chien. « C’est l’acceptation, la dernière étape, c’est ça ? Alors c’est peut-être ça que j'dois faire, accepter la réalité et quitter ce monde où je n’ai plus ma place ». Elle s’apprêtait manifestement à partir, et Barbara attrapa sa main comme on attrape celle d’un noyé qui s’enfonce avant de disparaître à jamais. « Lysange ! Mais non ! Non, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire ! S’il y a acceptation, cela ne veut pas dire qu’il faut nous quitter ! Bien sûr que non ! ».
La brune regardait sa main inerte, prise dans celle, pressante, de la rousse. « Ben dites moi, alors, parce que là, franchement, je vois pas… ». Barbara tira un peu sur la main, l’incitant à se rasseoir, rassurée de la voir obtempérer. Filou se réinstalla sur ses pieds, et comme si de rien n’était reposa son museau sur ses cuisses, confiant, en attente de caresses.
Barbara laissa passer quelques instants, sans doute le temps pour elle de mettre en ordre ses idées. « Et bien… tout est illusion et question de point de vue, n’est ce pas ? ». Lysange acquiesça, reposant sa main entre les oreilles du chien. « Peut-être alors pourriez vous envisager que le regard que vous portez sur ce monde et l’attente que vous en avez, n’est pas la totalité de ce que vous avez à vivre ? ».
Lysange soupira. « Je comprends pas…. ».
« Et bien… il est peut-être possible de trouver ici une partie de ce qui vous manque , et d’aller chercher ailleurs, l’autre partie ? Vous ne pensez pas ? ».
« Ah mais…je sais pas faire ça moi… c’est bien trop compliqué… Je dis pas que j’y ai pas pensé, hein, d’ailleurs vous êtes pas la première à me le dire… mais je saurais pas… ».
« Mais vous avez essayé ? Vraiment ? ».
Lysange arrêta son geste, prise dans une réflexion qui la sortit du monde un long moment sans que Barbara intervienne. C’est Filou qui la ramena au présent, d’un coup de langue sur la main. La jeune femme regarda sa main, puis le chien, et enfin son amie. « Je sais pas… je pensais que oui, mais peut-être pas. Faut voir… mais ça voudrait dire que je deviens une autre, en quelque sorte… et là… ».
« Vous savez ce qu’on dit, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas. Or vous êtes loin d’en être une, non ? »
« Mais c’est pas une question d’intelligence là ! C’est bien plus profond que ça. Vous me demandez de changer de personnalité, et ça…. je sais pas si ça vaut le coup en fait… ».
Barbara s’exclama avec un sourire encourageant. « Mais si ! Puisque le monde est ce qu’on en fait, c’est à vous de le déterminer, et pas le contraire ! Et ça vaut aussi pour vous ! ».
La jeune femme se releva, indiquant au chien qu’il fallait la suivre alors qu’elle se dirigeait vers la maison commune. Elle se tourna vers Barbara, hésita un court instant, ouvrit la bouche, ravala ses paroles, soupira, haussa les épaules et se mit finalement en route avec un petit sourire désolé. « Mmh……..si vous le dites… ».
« Ah oui… tout ça… ». Barbara venait de lire le contenu et repliait le parchemin. « Je comprends mieux pourquoi Matilda est débordée. Tous nos enclos sont bien remplis, il va falloir vendre, dites moi. » Son était enjoué mais son regard trahissait son inquiétude. « Lysange… vous avez l’air désespérée, vous êtes tellement… différente, je ne vous reconnais pas. ».
La jeune femme reprit le papier plié et le glissa dans sa poche de pantalon, esquissant un tout petit sourire. « Bah, je suis la même hein… » Elle avait cet air crâne de ceux qui tentent de nier l’évidence. La fermière secoua la tête. « Non. D’ordinaire vous rayonnez, vous illuminez l’espace que vous occupez. Tout le monde en profite. Or là…. et bien vous êtes éteinte ».
Lysange se voûta tout en attrapant le cou de Filou, le chien du patron qui ne la lâchait plus. « Oui… je suis désolée…. je sais pas cacher ce que je ressens, j’essaye hein, mais ça se voit quand même. Peut-être que j’essaye pas assez fort, ou peut-être que c’est trop dur pour moi, je sais pas. Mais c’est vrai, apparemment tout le monde le voit. »
« Tout le monde ? »
« Mmh… oui ». Elle avait le regard perdu dans le vague, toute à ses caresses au chien. « Tous les gens que je côtoie, ici et ailleurs, ils me le disent. Faut croire que ça doit bien se voir. Même le patron, hier soir, qui m’a dit que mes nuages étaient bien bas… »
« Et .. vous avez une idée de la cause de ce désespoir ? Vous donnez le sentiment d’être en cours de deuil.. vous avez perdu quelqu’un ?».
La jeune femme regarda son aînée, perplexe. « Euh…. ben non. Pourquoi vous dites ça ? ».
La rousse suivait ses gestes, vaguement souriante. « Lysange, vous connaissez le processus de deuil ? Ses étapes ? ». La jeune femme se contenta de secouer la tête en signe de négation, signifiant néanmoins qu’elle était curieuse de savoir. « Il y a, dit-on, cinq étapes dans le processus de deuil, le déni, la colère, la négociation, la dépression et, enfin, l'acceptation ».
Lysange écoutait, sa main passant et repassant sur les flancs de l’animal. Barbara continua. « Je vous ai vue très en colère la semaine dernière… », Lysange opina, «… puis je vous ai vue en fin de semaine, vous replier sur vous même et tenter de vous faire à l’idée que c’était un moment difficile à passer… », Lysange opina de nouveau, esquissant un vague sourire désolé, « …. et là je vous vois désespérée, profondément triste… et ce sans raison apparente… alors j’ai bien l’impression que vous êtes en cours de deuil, en effet. »
La jeune femme arrêta son geste. Le chien glissa son museau sur ses genoux. « Mais … deuil de qui ? de quoi ? ». Barbara passa rapidement sa main sur la tête du chien. « Je ne sais pas, si vous n’avez perdu personne, alors c’est le deuil d’une idée, d’un projet, voire même d’un idéal de vie, cela peut être tout aussi destructeur vous savez ».
L’intendante réfléchissait tout en gratouillant la tête du chien qui s’était collé contre ses jambes, couché sur ses pieds et la tête sur ses cuisses. « Ben…. ça pourrait être l'idée que j’ai plus rien de bien à vivre par ici, et …. du coup, que je dois arrêter d’y croire ».
La fermière se redressa. « Mais… ici, comme vous dites, cet environnement, le monde dans lequel nous évoluons.. tout ça n’est qu’illusion… vous le savez n’est-ce pas ? ». D’un geste Barbara montrait le domaine alentour. « Donc vous ne pouvez rien en attendre de plus que… ».
Mais Lysange explosa et Filou leva la tête, étonné. « Bien sûr que je le sais ! Mais moi ce que je ressens, c’est vrai ! C’est pas du tout une illusion, et … » , elle regarda son aînée en plissant les yeux, le regard de nouveau noir de colère… « et puis, vous savez quoi ? Ben j’en ai marre de toutes ces idées sur l’illusion des mondes … s’il y a bien une chose de vraie, partout où je vais, c’est ce que je ressens dans mon corps. Mes émotions, mes sentiments, mes rêves ! ça c’est moi, pour de vrai ! ».
Barbara acquiesça, touchée par ce cri du coeur. « Je comprends. Donc.. ce qui vous rend si triste, ce serait le deuil d'un sentiment.. ou d'un d’un rêve ? ».
Lysange la regarda longuement, interdite, figée. Seul son regard trahissait l’ébullition de son cerveau. Soudain son visage se décomposa, ses yeux devinrent brillants, et un mouvement de la mâchoire indiqua qu’elle luttait intérieurement pour ne pas s’effondrer en larmes. Elle hocha doucement la tête. « Ben…. oui.. oui, faut croire que c’est ça. Je suis en deuil d’un rêve ».
Un petit sourire triste éclaira ses traits d’un éclat sombre. « Ouais…. ben merci… c’est bon, vous avez mis le doigt dessus, je … je vais sans doute pouvoir tourner la page, finalement ».
Elle se leva en repoussant doucement du pied le chien. « C’est l’acceptation, la dernière étape, c’est ça ? Alors c’est peut-être ça que j'dois faire, accepter la réalité et quitter ce monde où je n’ai plus ma place ». Elle s’apprêtait manifestement à partir, et Barbara attrapa sa main comme on attrape celle d’un noyé qui s’enfonce avant de disparaître à jamais. « Lysange ! Mais non ! Non, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire ! S’il y a acceptation, cela ne veut pas dire qu’il faut nous quitter ! Bien sûr que non ! ».
La brune regardait sa main inerte, prise dans celle, pressante, de la rousse. « Ben dites moi, alors, parce que là, franchement, je vois pas… ». Barbara tira un peu sur la main, l’incitant à se rasseoir, rassurée de la voir obtempérer. Filou se réinstalla sur ses pieds, et comme si de rien n’était reposa son museau sur ses cuisses, confiant, en attente de caresses.
Barbara laissa passer quelques instants, sans doute le temps pour elle de mettre en ordre ses idées. « Et bien… tout est illusion et question de point de vue, n’est ce pas ? ». Lysange acquiesça, reposant sa main entre les oreilles du chien. « Peut-être alors pourriez vous envisager que le regard que vous portez sur ce monde et l’attente que vous en avez, n’est pas la totalité de ce que vous avez à vivre ? ».
Lysange soupira. « Je comprends pas…. ».
« Et bien… il est peut-être possible de trouver ici une partie de ce qui vous manque , et d’aller chercher ailleurs, l’autre partie ? Vous ne pensez pas ? ».
« Ah mais…je sais pas faire ça moi… c’est bien trop compliqué… Je dis pas que j’y ai pas pensé, hein, d’ailleurs vous êtes pas la première à me le dire… mais je saurais pas… ».
« Mais vous avez essayé ? Vraiment ? ».
Lysange arrêta son geste, prise dans une réflexion qui la sortit du monde un long moment sans que Barbara intervienne. C’est Filou qui la ramena au présent, d’un coup de langue sur la main. La jeune femme regarda sa main, puis le chien, et enfin son amie. « Je sais pas… je pensais que oui, mais peut-être pas. Faut voir… mais ça voudrait dire que je deviens une autre, en quelque sorte… et là… ».
« Vous savez ce qu’on dit, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas. Or vous êtes loin d’en être une, non ? »
« Mais c’est pas une question d’intelligence là ! C’est bien plus profond que ça. Vous me demandez de changer de personnalité, et ça…. je sais pas si ça vaut le coup en fait… ».
Barbara s’exclama avec un sourire encourageant. « Mais si ! Puisque le monde est ce qu’on en fait, c’est à vous de le déterminer, et pas le contraire ! Et ça vaut aussi pour vous ! ».
La jeune femme se releva, indiquant au chien qu’il fallait la suivre alors qu’elle se dirigeait vers la maison commune. Elle se tourna vers Barbara, hésita un court instant, ouvrit la bouche, ravala ses paroles, soupira, haussa les épaules et se mit finalement en route avec un petit sourire désolé. « Mmh……..si vous le dites… ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« C’est un peu.. bizarre non ? »
Lysange avait dans les mains le jeu de gnomos réalisées par Mr Tchyze pour Oscar Fossard où on pouvait la voir dans différentes tenues, lors de la soirée de Madame Hurlevent. Elle les avait montrées à Barbara et ne cessait de les regarder, l’une après l’autre, troublée.
« Qu’est ce qui est bizarre ? Que vous ayez gagné ? ». Barbara éclata de rire. « Non.. je ne crois vraiment pas. Si j’en crois les commentaires que l’on m’a faits ce matin au petit marché du dimanche… en fait vous les avez tous éblouis, vraiment ».
Lysange leva le nez et regarda son aînée en forçant le nez. « Nan… je parlais pas de ça… désolée… ». Elle s’arrêta sur la gnomo où on la voyait en robe de soie et la lui montra, le rose aux joues. « Dites moi franchement ce que vous en pensez, ne réfléchissez pas et répondez moi ! ». Barbara se figea et hocha simplement la tête, la jeune femme semblait en proie à de vives émotions.
« Vous…. à votre avis…. je…… enfin il…. Euh… Dites moi ! Pourquoi il a voulu avoir des gnomos de cette soirée, à votre avis ? ».
Barbara ne comprenait pas. « Mais… qui ? De qui parlez vous ? ». La jeune femme s’emporta. « Mais le patron bien sûr !! C’est bien lui qui a commandé ces gnomos, non ?!? ».
La fermière resta interdite quelques secondes puis porta son regard sur la gnomo tout en réfléchissant. Enfin elle leva les yeux vers Lysange. "Et bien…. je dirais que… vous faites probablement partie des personnes qui comptent pour lui et… comme c’était un événement important, pour vous, mais aussi pour lui du fait de votre statut… il voulait en garder trace ? ».
La jeune femme se replia sur elle même en soupirant. « Mmh…. oui, voilà, c’est bien ce que je me disais aussi… ». Barbara fronça les yeux. « J’avoue ne pas tout saisir, Lysange. On dirait que cela vous désespère… ».
Lysange hochait simplement la tête, les yeux sur une image qu’elle ne regardait pas vraiment, toute à ses pensées. « Non mais laissez… je suis en train de me faire des idées et forcément, j’essaye de vous entraîner dedans pour me conforter… c’est fou comme je peux devenir bête dans ce genre de situation… ».
Barbara posa sa main sur son avant-bras avec bienveillance. « De quoi parlez vous ? Je suis sûre que vous vous faites des idées, mais pas comme vous le pensez. Racontez moi… ».
Qu’y avait-il à raconter ? Pas grand chose, un échange de regards qui vrille l’estomac, une main frôlée d’un baiser et le coup de chaud qui s’en suit, une gêne partagée, un déséquilibre passager dans une relation parfaitement cadrée et rodée, déséquilibre vite régularisé par l’arrivée opportune d’un tiers, du non-dit, de l’implicite, rien de tangible et donc de racontable. Mais Lysange essaya quand même, avec ses mots bafouillants, ses émotions débordantes et sa vivacité communicative.
Il ne fallut pas longtemps à Barbara pour saisir ce qui perturbait sa cadette. « Vous êtes sensible à sa présence, n’est ce pas ? … je veux dire… sa présence réelle, pas son statut de patron ou son identité ? ». Lysange hocha plusieurs fois la tête, l’air abattue. « C’est la catastrophe, hein… juste le piège dans lequel il fallait surtout pas que je tombe… C’est tout moi, ça…. ».
« En quoi est-ce un piège ? De ce que vous me dites, il semble lui aussi sensible à votre présence, il n’y a donc pas d’embrouille ou de ruse à craindre. Et puis il ne me semble pas être ce genre de personnes qui…». Lysange lui coupa la parole, l’air tout aussi abattue. «Nan mais… c’est pas ce que je voulais dire. Le piège, c’est moi qui le fabrique toute seule, vous comprenez pas…. ».
« Effectivement, je ne comprends pas. Expliquez moi alors.. ». La jeune intendante se redressa en inspirant longuement. « Ca fait des mois que je borde tout dans ma tête et dans mon corps, pour contenir mes émotions et pas avoir de nouveau mal d’aimer trop fort… mais si … si je me laisse écouter ce que je ressens… alors je vais plus savoir me protéger, vous comprenez ? Je vais redevenir vulnérable, je vais perdre le contrôle et…. et je sais pas trop ce que ça va donner, parce que soit je me fais des idées et je vais prendre cher….. soit je m’en fais pas et… je risque encore une fois de tout gâcher… ».
Ses yeux remplis de larmes débordèrent sans prévenir et elle s’effondra dans les bras de Barbara qui naturellement l’enveloppèrent. « On ne peut pas toujours tout contrôler, Lysange… c’est épuisant, et qui plus est malsain.…. Il faut vous laisser vivre, accepter de vous tromper, accueillir l’inconnu qui se présente à vous, vous verrez bien si… ».
La jeune femme se redressa d’un bond, rejetant violemment les bras de son aînée. « Nan mais ! Me laisser vivre !!! C’est facile à dire ça !!! Parce que vous croyez que j’essaye pas, peut-être ? Je fais que ça, même ! Tellement que j’en peux plus de tout ressentir comme si j’avais pas de peau, ou pas de.. de… de limites ! Je prends tout dans la tête, moi ! Tout dans mon corps ! C’est pour ça que je dois tout border ! Tout ! TOUT !!!! Vous comprenez ?!? ».
La jeune femme ramassa ses gnomos et s’enfuit en soupirant vers la sortie du domaine, suivie par Filou qui ne la quittait plus. Barbara la laissa partir sans chercher à la retenir. S’il y avait bien une qualité qu’elle lui reconnaissait, c’était cette capacité très particulière de toujours rebondir positivement. Elle reviendrait travailler sans que nul ne puisse se douter de son trouble du matin, sauf à être réellement sensible à sa personne.
Lysange avait dans les mains le jeu de gnomos réalisées par Mr Tchyze pour Oscar Fossard où on pouvait la voir dans différentes tenues, lors de la soirée de Madame Hurlevent. Elle les avait montrées à Barbara et ne cessait de les regarder, l’une après l’autre, troublée.
« Qu’est ce qui est bizarre ? Que vous ayez gagné ? ». Barbara éclata de rire. « Non.. je ne crois vraiment pas. Si j’en crois les commentaires que l’on m’a faits ce matin au petit marché du dimanche… en fait vous les avez tous éblouis, vraiment ».
Lysange leva le nez et regarda son aînée en forçant le nez. « Nan… je parlais pas de ça… désolée… ». Elle s’arrêta sur la gnomo où on la voyait en robe de soie et la lui montra, le rose aux joues. « Dites moi franchement ce que vous en pensez, ne réfléchissez pas et répondez moi ! ». Barbara se figea et hocha simplement la tête, la jeune femme semblait en proie à de vives émotions.
« Vous…. à votre avis…. je…… enfin il…. Euh… Dites moi ! Pourquoi il a voulu avoir des gnomos de cette soirée, à votre avis ? ».
Barbara ne comprenait pas. « Mais… qui ? De qui parlez vous ? ». La jeune femme s’emporta. « Mais le patron bien sûr !! C’est bien lui qui a commandé ces gnomos, non ?!? ».
La fermière resta interdite quelques secondes puis porta son regard sur la gnomo tout en réfléchissant. Enfin elle leva les yeux vers Lysange. "Et bien…. je dirais que… vous faites probablement partie des personnes qui comptent pour lui et… comme c’était un événement important, pour vous, mais aussi pour lui du fait de votre statut… il voulait en garder trace ? ».
La jeune femme se replia sur elle même en soupirant. « Mmh…. oui, voilà, c’est bien ce que je me disais aussi… ». Barbara fronça les yeux. « J’avoue ne pas tout saisir, Lysange. On dirait que cela vous désespère… ».
Lysange hochait simplement la tête, les yeux sur une image qu’elle ne regardait pas vraiment, toute à ses pensées. « Non mais laissez… je suis en train de me faire des idées et forcément, j’essaye de vous entraîner dedans pour me conforter… c’est fou comme je peux devenir bête dans ce genre de situation… ».
Barbara posa sa main sur son avant-bras avec bienveillance. « De quoi parlez vous ? Je suis sûre que vous vous faites des idées, mais pas comme vous le pensez. Racontez moi… ».
Qu’y avait-il à raconter ? Pas grand chose, un échange de regards qui vrille l’estomac, une main frôlée d’un baiser et le coup de chaud qui s’en suit, une gêne partagée, un déséquilibre passager dans une relation parfaitement cadrée et rodée, déséquilibre vite régularisé par l’arrivée opportune d’un tiers, du non-dit, de l’implicite, rien de tangible et donc de racontable. Mais Lysange essaya quand même, avec ses mots bafouillants, ses émotions débordantes et sa vivacité communicative.
Il ne fallut pas longtemps à Barbara pour saisir ce qui perturbait sa cadette. « Vous êtes sensible à sa présence, n’est ce pas ? … je veux dire… sa présence réelle, pas son statut de patron ou son identité ? ». Lysange hocha plusieurs fois la tête, l’air abattue. « C’est la catastrophe, hein… juste le piège dans lequel il fallait surtout pas que je tombe… C’est tout moi, ça…. ».
« En quoi est-ce un piège ? De ce que vous me dites, il semble lui aussi sensible à votre présence, il n’y a donc pas d’embrouille ou de ruse à craindre. Et puis il ne me semble pas être ce genre de personnes qui…». Lysange lui coupa la parole, l’air tout aussi abattue. «Nan mais… c’est pas ce que je voulais dire. Le piège, c’est moi qui le fabrique toute seule, vous comprenez pas…. ».
« Effectivement, je ne comprends pas. Expliquez moi alors.. ». La jeune intendante se redressa en inspirant longuement. « Ca fait des mois que je borde tout dans ma tête et dans mon corps, pour contenir mes émotions et pas avoir de nouveau mal d’aimer trop fort… mais si … si je me laisse écouter ce que je ressens… alors je vais plus savoir me protéger, vous comprenez ? Je vais redevenir vulnérable, je vais perdre le contrôle et…. et je sais pas trop ce que ça va donner, parce que soit je me fais des idées et je vais prendre cher….. soit je m’en fais pas et… je risque encore une fois de tout gâcher… ».
Ses yeux remplis de larmes débordèrent sans prévenir et elle s’effondra dans les bras de Barbara qui naturellement l’enveloppèrent. « On ne peut pas toujours tout contrôler, Lysange… c’est épuisant, et qui plus est malsain.…. Il faut vous laisser vivre, accepter de vous tromper, accueillir l’inconnu qui se présente à vous, vous verrez bien si… ».
La jeune femme se redressa d’un bond, rejetant violemment les bras de son aînée. « Nan mais ! Me laisser vivre !!! C’est facile à dire ça !!! Parce que vous croyez que j’essaye pas, peut-être ? Je fais que ça, même ! Tellement que j’en peux plus de tout ressentir comme si j’avais pas de peau, ou pas de.. de… de limites ! Je prends tout dans la tête, moi ! Tout dans mon corps ! C’est pour ça que je dois tout border ! Tout ! TOUT !!!! Vous comprenez ?!? ».
La jeune femme ramassa ses gnomos et s’enfuit en soupirant vers la sortie du domaine, suivie par Filou qui ne la quittait plus. Barbara la laissa partir sans chercher à la retenir. S’il y avait bien une qualité qu’elle lui reconnaissait, c’était cette capacité très particulière de toujours rebondir positivement. Elle reviendrait travailler sans que nul ne puisse se douter de son trouble du matin, sauf à être réellement sensible à sa personne.
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais….. vous voulez dire que si le patron .. ? ». Barbara arrêta son geste et regarda sa cadette, étonnée.
« Bah !… quand il m’a dit que si Filou ne m’obéissait pas comme il fallait, ça donnerait une mauvaise image du Domaine, ben… dès le soir, j’ai pris sur moi et j’ai changé d’attitude avec lui … le chien je veux dire… ». Lysange aidait la fermière à remplir les paniers pour les réfugiés qui, contre toute attente, n’avaient pas trouvé de logements et vivaient toujours dans le campement des faubourgs.
« Je voulais pas qu’il pense du mal de moi… le patron... ». Lysange avait de nouveau rougi, preuve pour Barbara qu’elle abordait un sujet qui la touchait plus qu’elle ne pouvait le cacher, elle esquissa un sourire en rangeant le panier rempli avec les autres dans la carriole.
« Mmh… et.. ça marche apparemment … ». Barbara observait le chien du patron, allongé à quelques mètres d’elle, suivant sagement des yeux tous les faits et gestes de l’intendante.
Lysange suivit son regard « Oh, sur le chien ? Ah ben ça… oui, il a intérêt ». Elle haussa une épaule, fataliste. « S’il avait pas suivi, je l’aurais rendu au patron, il a dû le sentir ».
Barbara l’observait, un petit sourire amusé au coin des lèvres. « Et… Monsieur Fossard l’a remarqué ? ».
Lysange avait la tête dans les nuages, elle mit quelques secondes à répondre. « Euh.. ah ben oui… enfin je crois, oui. Il m’a donné des conseils hier soir en me raccompagnant.. enfin… » . Elle resta figée quelques secondes de plus, puis secoua la tête. « Oui.. je crois que c’est hier soir.. je sais plus… ».
« Vous ne savez plus ? » Barbara avait le ton léger de ceux qui cherchent à en savoir plus, l’air de rien. Lysange la regarda longuement avant de répondre, l’air perdu. « Ben… oui, je…. comme il me ramène tous les soirs maintenant … comme un petit rituel, voyez … agréable en plus … surtout que… il .. il me prend la main pour.. ». Elle soupira légèrement. « Je sais plus trop, en fait ». Elle adressa un sourire contrit à son aînée.
«Mmh.. je vois… la rumeur dit donc vrai.. ». La fermière empilait les paniers au mieux dans la petite carriole déjà bien remplie.
Lysange s’arrêta, quelques légumes prêts à s’échapper de ses bras. « Comment ça, la rumeur ? Où ça ? Quelle rumeur ?». Barbara se tourna vers elle, attrapant son carnet de commandes posé plus loin. Elle répondit sans la regarder. « Mmh.. oui.. une rumeur qui vient des gardes… ça cause entre hommes.. comme souvent, ceci dit, mais là……. ». Elle redressa la tête et sourit à l’intendante. « Il se dit que, depuis quelques jours, le patron a l’air perturbé quand il rentre le soir après vous avoir raccompagnée ».
Barbara reprit son rangement de paniers après avoir noté quelques chiffres sur le carnet, l’air de nouveau absorbée par sa tâche. « Vous savez comme sont les gardes quand il s’agit du patron. Ils sont là pour sa sécurité alors ils se croient permis de le gnomographier chaque fois qu’il passe devant eux. Et….. ». Elle esquissa un rire et retourna sans finir sa phrase vers la grande table où étaient entreposés les paniers à remplir.
Lysange posa les légumes qui l’encombraient sur la grande table et vint se poster devant Barbara, sourcils froncés. Elle la prit par le bras, presque en colère. « Et ? ».
« Et… ». Barbara observait la main de la jeune femme serrée autour de son avant bras. Lysange le lâcha, s’empourprant, Barbara lui adressa un sourire compréhensif. « … Et comme je vous le disais, depuis quelques jours, il a la tête ailleurs, ne cherche pas de conversation avec eux, parfois même il ne semble pas comprendre, ou même entendre, ce que l’un ou l’autre cherche à dire, et… ». Lysange buvait les paroles de son aînée. « … et ils en donc conclu que … vous étiez sans doute à l’origine de ce changement d’attitude ? ».
Le ton interrogatif de la fermière donnait l’air d’attendre un démenti de l’intendante, mais son sourire indiquait qu’elle n’en pensait rien. Pour elle aussi, il y avait changement d’attitudes, de part et d’autre, mais elle ne souhaitait pas mettre sa jeune amie en difficultés. La faire admettre ce qui n’était encore qu’un ressenti de tous ceux qui les côtoyaient ne l’aiderait pas, du moins tant qu’elle ne se questionnerait pas sur le sujet.
Lysange la regarda longuement, puis secoua la tête, sourcils froncés, et finalement reprit son remplissage de paniers avec une détermination palpable. « N’importe quoi ! Il a eu peur que je sache pas faire avec Filou… oui… et aussi que je sache pas dire ce que je pense, pour les affaires, parce qu’il arrête pas de me dire qu’il est pas Pignac et que je dois pas avoir peur d’être moi-même. Mais sinon….. non… enfin.. il…. ».
Elle s’arrêta et regarda Barbara, tout à coup embarrassée. « Dites … Quand un homme donne l’air qu’il aime bien votre parfum, c’est….. enfin…. ça veut dire quelque chose, vous pensez ? ». La fermière la regardait sans comprendre, incitant la jeune femme à continuer. « Ben…. hier soir… au moment de m’embrasser la main, c’est comme si…. je sais pas … c’est comme si.. il s’était rempli les poumons avec ce parfum .. vous voyez ? ».
Barbara ne put empêcher son sourire de s’élargir. Mais elle se contenta d’un hochement de tête avant de lâcher, d’un ton qui se voulait anodin. « Oh.. et bien… on ne peut pas dire que cela n’a aucune signification, bien sûr… sans doute apprécie-t-il votre présence sensible ? ».
« Ma présence sensible ? ». Lysange grimaçait sous le coup de la réflexion, son regard passant de Filou à Barbara. « Ça veut dire quoi, ça encore ? ».
Barbara se remit au travail, de nouveau apparemment concentrée sur les légumes qu’il fallait glisser dans chaque panier. « Et bien… c’est un peu comme s’il avait essayé de capter un peu de ce qui émane sensiblement de vous … je pense que … Oui, c’est ça… il avait peut-être envie d’emmener un peu de vous avec lui…… »
Lysange resta de longues secondes à regarder Barbara qui travaillait comme si de rien n’était. La fixité de son regard indiquait que l’information faisait son chemin. C’est finalement Filou qui la sortit de ses songes, d’un coup de langue sur la main. Sans réfléchir elle s’agenouilla pour le câliner vigoureusement. « Bon… t’as été sage… on va se promener un peu ? Parce que là, moi j’ai besoin de …. de m’aérer la tête ! … Allez ! Hop ! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Ah mais si… je vous assure… nous étions sur les remparts, au port, pour notre vente du mardi, la semaine dernière, et… », Matilda souriait tout en parlant « … Monsieur Fossard était debout devant elle, assise sur le cheval tirassien que j’ai dressé le mois dernier, toute souriante, et ils étaient à évoquer les différentes tenues du patron pour une réunion où il voulait faire bonne impression.
Barbara écoutait, franchement amusée. Il n’y avait aucune raison de ne pas croire Matilda, présente au moment des faits, même si elle avait du mal à imaginer Monsieur Fossard en train de deviser sur sa tenue vestimentaire, qui plus est avec une femme, fût-elle son intendante. Et puis elle avait, elle même, remarqué de nombreux regards qui ne trompaient pas, du patron sur l’intendante, tout comme plusieurs réflexions anodines de la jeune femme qui montraient que l’homme habitait en permanence ses pensées.
« Ces deux là jouent au chat et à la souris, vous ne pensez pas ? ». Matilda s’était assise sur le perron de la grande maison commune en attendant l’heure du déjeuner, sa réflexion n’en était pas une, tout juste était-ce une façon de converser agréablement.
Barbara l’observa un moment, y réfléchissant. « Hum.. je ne sais pas… qui serait le chat ? et qui la souris ? Peut-être que les rôles ne sont pas aussi clairs. »
Malgré leurs dissensions apparentes, les deux femmes étaient en accord, la relation de l’imposant tirassien et de la frêle humaine évoluait, et tout cela n’avait rien qui puisse inquiéter, à n’en pas douter. Aussi furent-elles bien étonnées des réactions de Lysange lorsqu’elle arriva pour déjeuner.
« Qu’est ce qui vous faire rire ? ». Lysange se tenait devant elles, sa mine enjouée ne permettant pas d’imaginer ce qui allait suivre. Matilda lui rappela ce qu’elle avait vu, Barbara enchaîna sur l’idée d’un jeu de séduction qui lui semblait presque anodin tellement il était courant, et toutes deux félicitèrent la jeune femme de s’ouvrir enfin à l’idée d’une rencontre.
Lysange les regardait toutes deux, éberluée, effarée et même sidérée. Elle plissa les yeux, et son visage exprima tout à coup une défiance à laquelle ses deux collègues ne s’attendaient vraiment pas.
« Euh… C’est quoi cette histoire ? De quoi vous vous mêlez d’abord ? Qui vous a dit que c’était un jeu ? Vous l’avez entendu en parler ? Il s’amuse avec moi ? Ou c’est juste que ça vous amuse, vous, de me voir glisser dans un puits sans fonds ? ».
La dresseuse et la fermière se regardèrent, abasourdies. Toues deux s’exclamèrent de concert. « Mais non !! ».
Barbara se leva immédiatement pour prendre les mains de Lysange, qui se dégagea, une colère sourde palpable dans le tremblement de son corps. Le ton de sa voix avait profondément changé.
« Non parce que y’a rien d’amusant du tout là, hein !!! ».
La dresseuse n’avait pas bougé mais s’était tendue, observant l’intendante. Ce que Lysange exprimait n’avait effectivement rien d’amusant et elle regrettait de l’avoir laissé entendre. Elle prit un ton très doux, calme mais ferme, le même ton qu’elle employait lorsqu’elle tentait d’amadouer une bête sauvage dans les premières heures du dressage.
« Lysange.. loin de moi l’idée et surtout l’envie de te causer du tort … tu le sais parfaitement.. Si nous t’avons blessée, j’en suis la première responsable puisque j’ai raconté ce qui s’était passé lors du marché de mardi dernier. Je ne pensais vraiment pas que tu puisses être mal avec cette façon qu’il a de te parler ou te regarder puisque… ».
Mais l’intendante lui coupa la parole, le corps tendu d’une colère qui semblait pouvoir exploser d’un moment à l’autre. « Quelle façon ? De quoi tu parles ? Il se passe quoi ?!? ». Son agressivité était pour le moins étonnante, comme si elle n’avait pas conscience de ce qui se passait ou qu’elle n’en voulait pas, alors que tout indiquait le contraire. Matilda coula un regard vers Barbara qui s’était reculée pour se tenir à une distance respectable de Lysange. Elle répondit à la place de la dresseuse.
« Je l’ai vu aussi, Lysange. Vous n’êtes pas indifférents l’un à l’autre, c’est une évidence que tout le monde ici peut constater chaque jour. Et c’est même un sujet de conversation récurrent. Mais nous avons eu tort d’évoquer un jeu, surtout vous connaissant. J’en suis désolée, Lysange, sincèrement, mais… les faits sont là. Mr Fossard vous apprécie, et vous même avez de… l’intérêt pour lui. Il n’y a rien là que vous puissiez réfuter … non ? ».
La jeune femme la regardait d’un air mauvais. « Oui… et ? Parce qu’on s’intéresse à quelqu’un ça veut dire qu’on joue un jeu alors ? C’est ça votre vision de la vie, des relations entre les gens, de … de…. l’… ». Elle s’arrêta, incapable de prononcer le mot qui lui brûlait les lèvres. « Et puis merde à la fin !!! ».
Sans que les deux femmes puissent intervenir, la jeune femme s’effondra en larmes, la main sur le front et le dos plié. La détresse l’avait tout à coup envahie et elle ne cherchait pas à se cacher. Touchée par cet accès de vulnérabilité, Barbara la prit dans les bras et l’incita à s’asseoir sur les marches près de Matilda avant de se placer de l’autre côté, les deux femmes entourant la plus jeune. Elles la laissèrent pleurer, toutes deux simplement présentes, dans un silence compréhensif.
Au bout de quelques minutes, Lysange se redressa et aspira l’air de sa bouche grande ouverte, un tout petit sourire dépité sur le visage. « Ouais… bon… désolée… je voulais pas…. excusez-moi… je…. ». Elle soupira longuement. « Je suis morte de trouille, moi, en fait.. bien sur que je vois bien qu’il me regarde pas pareil… tous les soirs j’ai l’impression qu’il va m’embrasser ou… me prendre dans ses bras ou je sais pas quoi… et … j’en ai autant envie que peur… et je vois vraiment pas ça comme un jeu, mais alors… vraiment pas ».
Matilda entoura ses épaules de son bras, compatissante. « Mais pourquoi ? Il te respecte, il t’apprécie, et même… je crois qu’il t’admire, à sa façon…. et toi tu…. et bien ça se voit, il te plaît.. beaucoup même….. alors pourquoi cette peur ? ».
Lysange secoua la tête, croisant et décroisant ses mains dans un geste nerveux, « J’en sais rien… Bien sûr que j’en ai envie, mais…. mais j’ai vraiment peur de me perdre, tu vois.. Pour le moment, y’a comme une barrière qui nous sépare et… c’est comme un garde-fou…. », elle la regarda, presque implorante, « … tu comprends ? ». Matilda se contenta d’acquiescer, pressant doucement ses épaules, Lysange continua. « Pour le moment, je… je sais pas comment faire autrement, mais je gère… c’est là, entre nous, c’est une possibilité et ça me tente, mais…… je me connais…. ».
Elle regardait à nouveau ses mains qu’elle avait entrepris de gratter vigoureusement et soupira. « Une fois que j’aurai laissé la barrière s’effacer, même un peu…. moi je vais glisser, je le sais…. je vais plus savoir prendre du recul, garder mes distances pour ne pas avoir mal… je vais être attentive à tout ce qu’il dit, fait, pense…même si je le suis déjà, en fait, mais là ça va être pire… je vais pas savoir le sortir de ma tête… et…. si…. ben….. si c’est un jeu, comme vous dites…. moi je vais pas savoir y jouer, c’est aussi simple que ça ». Elle soupira de nouveau, ses mains devenaient rouges à force d’être grattées. « Lui il a ses règles et ce sera pas les mêmes que les miennes, c’est couru d’avance. Alors je vais avoir mal, très mal, de plus en plus mal à mesure que je vais me laisser glisser et… ben non…ça, je peux pas ».
Barbara prit ses deux mains dans les siennes, l’empêchant de se gratter. « Lysange… pourquoi vouloir absolument voir le mal partout. Qui vous dit que le bonheur que vous allez en retirer sera plus fort que le risque que vois prenez. Qui vous dit que ses règles seront nécessairement différentes des vôtres… Et puis aussi, vous le savez, il ne sert à rien de vouloir tout contrôler.. si Mr Fossard vous plaît, et c’est évident qu’il vous plaît, vous ne saurez pas vous empêcher de glisser, comme vous dites, mais vous serez victime de ce glissement, alors que vous pourriez en être l’auteure, ou du moins l’accompagner. Vous ne voyez pas que vous vous faites bien plus de mal que de bien, en agissant ainsi ? ».
L’intendante haussa l’épaule, fataliste. « Mmh… possible que vous ayez raison… mais là….. moi je sais pas faire". Elle soupira de nouveau et se leva d'un bond. "Bon.. allez… j’ai un contrat à réécrire, pour le partenariat avec le Duc, j’y retourne ! ». Elle se mit en route vers les bureaux. Matilda la héla. « Mais… Lysange !!! Tu n’as pas déjeuné !!! ».
Elle cria sans se retourner. « J’ai pas faim ! Mets ma part dans un coin, je la donnerai à Filou !!! ».
Barbara écoutait, franchement amusée. Il n’y avait aucune raison de ne pas croire Matilda, présente au moment des faits, même si elle avait du mal à imaginer Monsieur Fossard en train de deviser sur sa tenue vestimentaire, qui plus est avec une femme, fût-elle son intendante. Et puis elle avait, elle même, remarqué de nombreux regards qui ne trompaient pas, du patron sur l’intendante, tout comme plusieurs réflexions anodines de la jeune femme qui montraient que l’homme habitait en permanence ses pensées.
« Ces deux là jouent au chat et à la souris, vous ne pensez pas ? ». Matilda s’était assise sur le perron de la grande maison commune en attendant l’heure du déjeuner, sa réflexion n’en était pas une, tout juste était-ce une façon de converser agréablement.
Barbara l’observa un moment, y réfléchissant. « Hum.. je ne sais pas… qui serait le chat ? et qui la souris ? Peut-être que les rôles ne sont pas aussi clairs. »
Malgré leurs dissensions apparentes, les deux femmes étaient en accord, la relation de l’imposant tirassien et de la frêle humaine évoluait, et tout cela n’avait rien qui puisse inquiéter, à n’en pas douter. Aussi furent-elles bien étonnées des réactions de Lysange lorsqu’elle arriva pour déjeuner.
« Qu’est ce qui vous faire rire ? ». Lysange se tenait devant elles, sa mine enjouée ne permettant pas d’imaginer ce qui allait suivre. Matilda lui rappela ce qu’elle avait vu, Barbara enchaîna sur l’idée d’un jeu de séduction qui lui semblait presque anodin tellement il était courant, et toutes deux félicitèrent la jeune femme de s’ouvrir enfin à l’idée d’une rencontre.
Lysange les regardait toutes deux, éberluée, effarée et même sidérée. Elle plissa les yeux, et son visage exprima tout à coup une défiance à laquelle ses deux collègues ne s’attendaient vraiment pas.
« Euh… C’est quoi cette histoire ? De quoi vous vous mêlez d’abord ? Qui vous a dit que c’était un jeu ? Vous l’avez entendu en parler ? Il s’amuse avec moi ? Ou c’est juste que ça vous amuse, vous, de me voir glisser dans un puits sans fonds ? ».
La dresseuse et la fermière se regardèrent, abasourdies. Toues deux s’exclamèrent de concert. « Mais non !! ».
Barbara se leva immédiatement pour prendre les mains de Lysange, qui se dégagea, une colère sourde palpable dans le tremblement de son corps. Le ton de sa voix avait profondément changé.
« Non parce que y’a rien d’amusant du tout là, hein !!! ».
La dresseuse n’avait pas bougé mais s’était tendue, observant l’intendante. Ce que Lysange exprimait n’avait effectivement rien d’amusant et elle regrettait de l’avoir laissé entendre. Elle prit un ton très doux, calme mais ferme, le même ton qu’elle employait lorsqu’elle tentait d’amadouer une bête sauvage dans les premières heures du dressage.
« Lysange.. loin de moi l’idée et surtout l’envie de te causer du tort … tu le sais parfaitement.. Si nous t’avons blessée, j’en suis la première responsable puisque j’ai raconté ce qui s’était passé lors du marché de mardi dernier. Je ne pensais vraiment pas que tu puisses être mal avec cette façon qu’il a de te parler ou te regarder puisque… ».
Mais l’intendante lui coupa la parole, le corps tendu d’une colère qui semblait pouvoir exploser d’un moment à l’autre. « Quelle façon ? De quoi tu parles ? Il se passe quoi ?!? ». Son agressivité était pour le moins étonnante, comme si elle n’avait pas conscience de ce qui se passait ou qu’elle n’en voulait pas, alors que tout indiquait le contraire. Matilda coula un regard vers Barbara qui s’était reculée pour se tenir à une distance respectable de Lysange. Elle répondit à la place de la dresseuse.
« Je l’ai vu aussi, Lysange. Vous n’êtes pas indifférents l’un à l’autre, c’est une évidence que tout le monde ici peut constater chaque jour. Et c’est même un sujet de conversation récurrent. Mais nous avons eu tort d’évoquer un jeu, surtout vous connaissant. J’en suis désolée, Lysange, sincèrement, mais… les faits sont là. Mr Fossard vous apprécie, et vous même avez de… l’intérêt pour lui. Il n’y a rien là que vous puissiez réfuter … non ? ».
La jeune femme la regardait d’un air mauvais. « Oui… et ? Parce qu’on s’intéresse à quelqu’un ça veut dire qu’on joue un jeu alors ? C’est ça votre vision de la vie, des relations entre les gens, de … de…. l’… ». Elle s’arrêta, incapable de prononcer le mot qui lui brûlait les lèvres. « Et puis merde à la fin !!! ».
Sans que les deux femmes puissent intervenir, la jeune femme s’effondra en larmes, la main sur le front et le dos plié. La détresse l’avait tout à coup envahie et elle ne cherchait pas à se cacher. Touchée par cet accès de vulnérabilité, Barbara la prit dans les bras et l’incita à s’asseoir sur les marches près de Matilda avant de se placer de l’autre côté, les deux femmes entourant la plus jeune. Elles la laissèrent pleurer, toutes deux simplement présentes, dans un silence compréhensif.
Au bout de quelques minutes, Lysange se redressa et aspira l’air de sa bouche grande ouverte, un tout petit sourire dépité sur le visage. « Ouais… bon… désolée… je voulais pas…. excusez-moi… je…. ». Elle soupira longuement. « Je suis morte de trouille, moi, en fait.. bien sur que je vois bien qu’il me regarde pas pareil… tous les soirs j’ai l’impression qu’il va m’embrasser ou… me prendre dans ses bras ou je sais pas quoi… et … j’en ai autant envie que peur… et je vois vraiment pas ça comme un jeu, mais alors… vraiment pas ».
Matilda entoura ses épaules de son bras, compatissante. « Mais pourquoi ? Il te respecte, il t’apprécie, et même… je crois qu’il t’admire, à sa façon…. et toi tu…. et bien ça se voit, il te plaît.. beaucoup même….. alors pourquoi cette peur ? ».
Lysange secoua la tête, croisant et décroisant ses mains dans un geste nerveux, « J’en sais rien… Bien sûr que j’en ai envie, mais…. mais j’ai vraiment peur de me perdre, tu vois.. Pour le moment, y’a comme une barrière qui nous sépare et… c’est comme un garde-fou…. », elle la regarda, presque implorante, « … tu comprends ? ». Matilda se contenta d’acquiescer, pressant doucement ses épaules, Lysange continua. « Pour le moment, je… je sais pas comment faire autrement, mais je gère… c’est là, entre nous, c’est une possibilité et ça me tente, mais…… je me connais…. ».
Elle regardait à nouveau ses mains qu’elle avait entrepris de gratter vigoureusement et soupira. « Une fois que j’aurai laissé la barrière s’effacer, même un peu…. moi je vais glisser, je le sais…. je vais plus savoir prendre du recul, garder mes distances pour ne pas avoir mal… je vais être attentive à tout ce qu’il dit, fait, pense…même si je le suis déjà, en fait, mais là ça va être pire… je vais pas savoir le sortir de ma tête… et…. si…. ben….. si c’est un jeu, comme vous dites…. moi je vais pas savoir y jouer, c’est aussi simple que ça ». Elle soupira de nouveau, ses mains devenaient rouges à force d’être grattées. « Lui il a ses règles et ce sera pas les mêmes que les miennes, c’est couru d’avance. Alors je vais avoir mal, très mal, de plus en plus mal à mesure que je vais me laisser glisser et… ben non…ça, je peux pas ».
Barbara prit ses deux mains dans les siennes, l’empêchant de se gratter. « Lysange… pourquoi vouloir absolument voir le mal partout. Qui vous dit que le bonheur que vous allez en retirer sera plus fort que le risque que vois prenez. Qui vous dit que ses règles seront nécessairement différentes des vôtres… Et puis aussi, vous le savez, il ne sert à rien de vouloir tout contrôler.. si Mr Fossard vous plaît, et c’est évident qu’il vous plaît, vous ne saurez pas vous empêcher de glisser, comme vous dites, mais vous serez victime de ce glissement, alors que vous pourriez en être l’auteure, ou du moins l’accompagner. Vous ne voyez pas que vous vous faites bien plus de mal que de bien, en agissant ainsi ? ».
L’intendante haussa l’épaule, fataliste. « Mmh… possible que vous ayez raison… mais là….. moi je sais pas faire". Elle soupira de nouveau et se leva d'un bond. "Bon.. allez… j’ai un contrat à réécrire, pour le partenariat avec le Duc, j’y retourne ! ». Elle se mit en route vers les bureaux. Matilda la héla. « Mais… Lysange !!! Tu n’as pas déjeuné !!! ».
Elle cria sans se retourner. « J’ai pas faim ! Mets ma part dans un coin, je la donnerai à Filou !!! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
«Je vous sens bouleversée, Lysange, que se passe-t-il ? Un problème au travail ou … ? ». Barbara s’était arrêtée de travailler en voyant l’intendante entrer, les épaules basses, dans la grange où elle rangeait les paniers vides.
Lysange soupira. Son coeur semblait trop lourd pour elle seule. Elle était là pour tenter de l’alléger. « Non… le travail ça va… on a des commandes par dessus la tête, et des projets avec différents partenaires, ça nous occupe bien et c’est plutôt une bonne chose… ». Lysange se tenait devant la fermière, la main droite dans la fourrure de Filou qui s’était collé à sa cuisse.
« Donc… c’est personnel ? ». Barbara observait les gestes de sa cadette, toute prête à l’écouter.
Lysange suivit son regard « Vous avez vu … il me lâche plus le Filou... c’est plus son chien, maintenant, c’est le mien…. enfin….. ». Elle esquissa un sourire mitigé. »… vous savez ce qu’il m’a dit un soir ? Que c’était notre chien à tous les deux… c’est étrange, vous trouvez pas ?». Lysange avait légèrement rougi, Barbara se contenta d’acquiescer puis enchaîna. « C’est donc Monsieur Fossard qui vous préoccupe ? ».
Lysange mit quelques secondes à réagir. «Euh... Non… enfin si…. Disons que … mais y’a rien de grave, hein ! Au contraire même.... ça se passe de mieux en mieux, en fait. Mais… » . Elle resta quelques secondes à chercher ses mots puis soupira. « Je sais plus trop comment être avec lui... surtout en dehors du travail en fait... il est tellement gentil, et doux et attentionné et …… et moi je... j’aimerais tellement que... En fait plus ça va et plus je… Des fois j’ai des idées... Heureusement que je vais pas jusqu’au bout parce que... ».
Barbara ne bougeait pas, attendant simplement que la jeune femme retrouve le fil de ses idées. Mais Lysange attrapa un panier sur la pile, s’empressant d’aider la fermière tout en changeant de sujet.
« Vous savez ce qu’un client m’a dit l’autre soir ?». Barbara esquissa un sourire amusé mais rétorqua comme si de rien n’était. «Et bien non… mais racontez moi ! ». La fermière avait repris le travail et les deux femmes s’activaient à déplacer les paniers nécessaires à la livraison du jour jusqu’à la carriole qui attendait dehors.
« Bon, c’est pas comme si je tenais vraiment compte de ce que ce type là me dit, tellement il est mal élevé, mais … ». Elle adressa un sourire vaguement contrit à son aînée. « Il est lourd, vous pouvez pas savoir…. Mais bon…. l’autre soir il m’a dit comme ça que je devrais me trouver un amoureux, parce que j’étais vraiment désagréable et que d’en avoir un me rendrait certainement plus aimable…».
Barbara réfréna un petit rire, sans pour autant la regarder, continuant à déplacer les paniers. « Voilà bien le genre de remarques que font les hommes lorsqu’on les éconduit… j’en déduis donc que c’est ce que vous faisiez... ». Elle lui adressa un sourire de connivence. «... Je me trompe ?».
Lysange se redressa et retrouva un ton presque joyeux. « Bah ! Depuis qu’il m’a ramenée blessée au dispensaire il se croit des droits sur moi, et il me parle comme si on était proches ! Mais en fait moi je m’en contrefiche de ce type et … oui, ça a l’air de bien l’énerver ! ». Elle resta songeuse quelques secondes, vaguement souriante, deux paniers à la main, puis reprit son rangement en haussant l’épaule.
« Enfin bon…. il est pénible mais il m’a dit un truc qui m’a fait réfléchir… et je me demande s’il n’a pas raison…. Parce que.... ben c’est vrai que je me trouve vraiment pas aimable, depuis quelques temps… même moi je me trouve pénible, alors… ».
Barbara agençait correctement les paniers vides dans la carriole. Elle lui adressa un regard interrogatif puis voyant que Lysange n’irait pas plus loin, elle enchaîna « Vous êtes manifestement troublée par sa présence, tout le monde ici en est conscient. Cela vous rend vulnérable, et donc parfois un peu à vif…. mais de là à imaginer qu’un hypothétique amoureux vous permettrait de retrouver votre personnalité avenante, c’est tout de même étrange » . Elle se tourna vers sa cadette et lui adressa un sourire bienveillant. Vous ne devriez pas écouter ce genre de conseils qui n’en sont pas, Lysange. Il est manifestement jaloux et ne sait plus comment vous interpeller, voilà tout. »
Lysange pencha la tête sur le côté. Non mais… je sais bien que je dois pas l’écouter … Il est lourd, je vous dis. Mais quand même, je le vois, hein, que j’ai plus autant d’entrain qu’avant, que je sais plus aller et venir en ville sans peur de tomber sur un gars comme lui et devoir le repousser en étant revêche plutôt que simplement rieuse, je vois bien que je ne sais plus profiter de mes promenades et papoter avec les uns et les autres le coeur léger. Elle s’arrêta et regarda gravement la fermière. «C’est évident que j’étais pas comme ça avant…. j’ai changé, et c’est pas vraiment en mieux, faut avouer ».
Barbara attrapa les derniers paniers pour les caser au milieu des autres puis se tourna avec détermination vers la jeune femme. « Lysange… vous vous souvenez de notre dernière conversation ? » L’intendante fronça les yeux en haussant l’épaule, sans s’arrêter. Barbara continua d’une voix douce.
« Vous êtes en train de de glisser, je reprends votre expression, et cela vous fait peur, ce qui est normal quand on est sincère et lucide comme vous l’êtes. Vous perdez le contrôle et vous vous voyez faire sans pouvoir l’empêcher. Alors vous vous repliez sur vous-même, comme si vous vous raccrochiez au bord du vide…» Lysange écoutait et n’opposait aucun démenti, même inconscient. De fait Barbara ne lui apprenait rien qu’elle n’ait déjà compris.
Barbara la regarda un instant avant de continuer. «Mais ce qui me paraît encore plus important, Lysange, c’est que vous êtes terrassée par le doute. Et c’est ce doute qui vous met dans cet état d’angoisse et de tristesse. »
L’intendante fronça le nez, perplexe. « Le doute ? Mais de quoi ? Quel doute ? Je comprends pas où vous voulez en venir....»
Barbara vérifia une toute dernière fois le chargement des paniers, prenant le temps de tourner au mieux sa phrase.«Lysange….. Si vous aviez l’assurance que vos sentiments sont partagés, si vous étiez certaine d’être aussi importante pour lui qu’il l’est pour vous… ». Elle observait l’intendante qui ne perdait pas une miette de ses paroles. i]« … ou même, tenez, si l’on vous disait qu’il est tout comme vous au bord d’un gouffre qui l’attire et lui fait peur, sans pour autant rien en montrer… ». [/i] Lysange écoutait très attentivement. « N’auriez vous pas à nouveau le coeur léger ? Ne seriez vous pas capable, comme avant, d’éconduire les gêneurs en riant ?».
La jeune femme dodelina de la tête en observant la plus âgée, dubitative. « Ben… si sans doute.. j’en sais rien, moi, c’est totalement hypothétique, ce que vous me dites là. Forcément que je vivrais pas les choses de la même façon, si…. Ben oui ».
« Essayez d’aller au bout de vos craintes… ». Barbara incita la mule à venir se placer devant la carriole pleine de paniers. Lysange l’aidait, le chien sur les talons. « Pfff.. vous en avez de ces questions….. Vraiment j’en sais rien… J’imagine que oui, déjà je me poserais pas toutes ces questions, je dirais simplement ce que j’ai envie au moment où j’en ai envie, et c’est sûr que déjà, j’irais bien mieux. »
Barbara installait le licol de la mule tout en l’observant. «A quoi pensez vous ? Parce que, là, vous pensez à un fait précis, c’est évident ». L’intendante secoua la tête mais se laissa raconter. « Ben… L’autre soir, en attendant un client, il me disait que pour qu’un échange soit réel entre deux personnes, il fallait qu’il y ait équité. Lui il parlait du coup de poing qu’il avait donné au type qui lui avait mis un coup de boule au marché. Mais moi, je sais pas pourquoi, à ce moment-là, j’ai pensé à ce geste qu’il fait chaque soir en me raccompagnant chez moi, ce baiser sur ma main, vous savez… ».
Barbara indiqua d’un mouvement de tête qu’elle la suivait dans ses explications. Lysange contempla ses mains un long moment puis reprit. « En fait…. ça fait plusieurs jours que j’imagine sa main sur ma joue, ou plutôt … non… ma joue posée sur sa main, et … oui, voilà, je rêve de pouvoir poser ma tête dans sa main, tellement large, avec ses gros doigts gourds et pourtant tellement délicats dans certains gestes… ».
Barbara l’incita d’un sourire à continuer. « Alors quand il m’a parlé de cet échange équitable, moi j’ai repensé à ses lèvres sur ma main, et au geste que moi j’aurais aimé … échanger en posant ma joue sur la sienne, de main.
Elle racontait en regardant dans le vide, toute à son souvenir. « Après l’image ne m’a plus quittée, et pendant tout le chemin jusqu’à chez moi, ce soir-là, j’y ai pensé. Surtout qu’il avait tressé trois pâquerettes pour les glisser à ma boutonnière et que j’en avais été touchée… beaucoup… trop… enfin beaucoup trop pour ne pas en être encore touchée une heure plus tard…. ».
Barbara avait fini d’installer la mule qui était prête à se mettre en route. « Et ? ».
L’intendante s’était reculée et la laissait faire sans bouger, la main simplement perdue dans la fourrure de Filou. « Ben rien. J’ai essayé de lui dire, mais bien évidemment, j’ai pas réussi .. et puis je lui aurais dit quoi… complètement folle la fille, en fait… avoir juste envie de ça…. poser ma joue sur sa main et fermer les yeux pour en profiter…. n’importe quoi…».
Barbara donna un coup de longe sur le flanc de la mule pour lui intimer l’ordre de se mettre en route. « Donc vous n’avez rien dit, rien montré de votre attente, rien laissé passer de votre désir ? ». Elle se mit en route aux côtés de la mule qui marchait au pas. Lysange suivait de près. « Ben… et s’il s’était mis à se moquer, à rire, à me couper tous mes effets…. autant ne rien dire, même s’il a bien senti que j’hésitais et que ça l’a questionné …. , mais forcément, il pouvait pas deviner… alors on s’est quittés comme chaque soir, comme si….. ben comme s’il n’y avait rien entre nous… rien de plus que ce petit geste courtois qui ne signifierait rien s’il n’était pas répété tous les soirs depuis des semaines ».
La carriole avançait en brinquebalant, de la grange vers les serres où il allait falloir remplir les paniers de légumes tout juste cueillis. «Et donc…. si vous saviez avec assurance qu’il est dans les mêmes dispositions que vous…. vous pensez que vous auriez su lui demander ? »
Lysange soupira longuement. « Ben…. oui…… enfin…. non ….mais j’en sais rien, moi ! ». Elle hésita puis lâcha dans un souffle «Non, j’aurais rien demandé… je sais pas faire ça, de toute façon… non… je pense que j’aurais simplement posé ma tête sur sa main et que… ben peut-être qu’ensuite il m’aurait prise dans ses bras, et qu’ensuite… je sais pas, et je m’en fiche en fait….. moi je voulais juste ça, déjà, et j’en avais tellement envie que ça m’a rendue triste toute la nuit de pas avoir été capable de le lui dire ».
Barbara se tourna vers elle, bienveillante. « Mmh … donc vous regrettez votre incapacité ? ». La jeune femme secoua la tête, à moitié dépitée. « Ben… non, je regrette pas, ce qui est fait est fait, et puis j’étais pas capable de le dire, de toute façon, j’aurais dû le savoir à l’avance…. mais je suppose que vous avez raison et que si je doutais pas, ce serait probablement bien différent parce que je me poserais pas toutes ces questions».
Barbara s’approcha de la jeune intendante et lui prit le bras avec affection. « Donc vous savez ce qu’il vous reste à faire ». Mais Lysange la regardait sans comprendre. « Il n’y a qu’un seul moyen, pour empêcher ce doute de vous pourrir la vie, c’est de l’effacer de vos pensées ! Cessez de douter, et prenez la vie comme elle vient ! Ecoutez votre coeur et non pas votre raison».
Lysange éclata d’un petit rire triste. « La belle affaire ! Faudra que vous m’expliquiez comment on fait, alors. Parce que, moi, de base, je suis pas équipée pour, et si je laisse mon coeur faire à sa guise, ça rate pas, y’a tout qui foire !»
Un sourire de dépit, un petit geste d’adieu et déjà elle s’éloignait vers les bureaux, la main toujours sur la tête de Filou, caressante. Mais là faut que j’y retourne, et j’ai pas vraiment l’intention de fouiller dans sa tête pour voir s’il pense comme moi, si vous voulez savoir. J’aurais bien trop peur de le voir s’enfuir à toutes jambes au fin fond du Norfendre ! Allez, à plus tard !!! ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
« Mais... Nealson... il s’est passé quoi aux Hinterlands chez le Comte ? Tu veux pas essayer de m’expliquer pourquoi l’apprenti ne veut plus travailler avec toi ? Parce que je ne sais pas qu’en faire moi... Lui il dit qu’il ne veut pas te déranger plus que ça mais... bon je te connais Nealson... il s’est forcément passé quelque chose…». Son petit carnet en main, l’intendante discutait à la forge avec Nealson.
Elle était devant lui et se recula d’un bon, il venait d’exploser. « Aaaaah !!! m’embête pas avec ça ! Moi non plus, je veux plus jamais avoir à faire à lui ! C’est simple, si je le retrouve dans mes pattes, je lui fiche de nouveau mon poing sur le nez, ça fera pas un pli !!! »
Lysange ne l’avait jamais vu autant en colère. Quand il était dans cet état il dégageait une énergie presque sensuelle qui ne cadrait pas du tout avec son calme habituel, elle en était toute intimidée. « Ah.. de nouveau.. donc.... il s’est bien passé quelque chose ... ».
Sa masse en main, Nealson exultait en la faisant tourner sur elle-même. « Non mais !! Cet enfoiré s’est permis de cracher dans la soupe en critiquant nos manières de faire avec les réfugiés ! Devant le client !!! Moi je l’engueule et c’est moi qui passe pour un mufle parce que je le remets en place !! Et je devrais l’accepter ?!??! Tu trouves ça normal ? »
L’intendante ne savait plus comment le calmer, il grondait devant le feu de sa forge. Nealson attrapa la pièce chauffée à blanc, la plaça sur l’enclume et entrepris de la façonner à grands coups de marteau.« Mais... ».
Il arrêta de nouveau son geste, marteau en l’air, le regard mauvais. « Écoute, c’est simple. Si on m’oblige à le reprendre avec moi, je me barre !!! Du boulot en ville ça manque pas !!! Je vais pas me laisser emmerder par un salopard de la pire espèce ! C’est moi ou c’est lui, tu peux le dire comme ça au patron !! ». Il appliqua un grand coup de marteau avec violence sur l’enclume. Le son du métal résonna dans l’atelier. Lysange sursauta.
« Je... Non je vais pas lui dire ça comme ça, il peut écouter ta version... Si tu lui dis qu’il le fallait, que Tahar t’a poussé à bout ... à mon avis, il devrait comprendre. Il ... il n’est pas comme Pignac tu sais. Il... est très attentif, et bienveillant … et aussi très.. ».
Mais Nealson lui coupa la parole, le ton rageur et l’air mauvais. « Et patati et patata !!! Non mais arrête d’en parler comme si c’était ton nouveau dieu, hein !!! Tout le monde le sait, ici, qu’il t’a mise dans son lit !! Si c’est pas honteux de mélanger travail et gaudriole !!! ».
Le sang de Lysange ne fit qu’un tour, elle jeta à terre carnet et crayon de graphite pour venir le prendre par le bord de son gilet, sans prendre garde aux étincelles qui crépitaient venant de la forge.
« Quoi ?!?!?? Répète un peu pour voir !!! Gaudriole !!! Moi !!! Non mais tu m’as bien regardée ?!?? Je suis pas un mec qui pense qu’avec sa queue hein !!!! Je sais pas ce que c’est que la gaudriole moi, Môssieur l’affamé !!! Tu ferais mieux d’aller te vider quelque part au lieu d’asséner ce genre de conneries et de diffamer sur mon compte !!! Il m’a pas mise dans son lit, si tu veux savoir !!! Et c’est pas demain la veille parce que ça se fera seulement si je veux et quand MOI je l’aurais décidé !!! Et ce sera sûrement pas pour calmer une faim comme la tienne !!! ».
De haut de son mètre cinquante cinq, dressée sur la pointe des pieds comme sur des ergots, prenant appui sur le bord du gilet qu’elle agrippait avec détermination, elle lui crachait tous ses mots au visage, le visage rouge et les cheveux en bataille. Interdit, il la regarda faire puis éclata d’un rire amusé, tendre et vaguement admiratif.
Dans un geste doux, il détacha ses mains de son gilet et la regarda dans les yeux, le sourire coquin. « Mais c’est une vraie tigresse que j’ai là dans mes mains... tu sais que c’est encore plus excitant ? ... tu vas le rendre fou si tu lui gueules dessus comme ça... et t’embrasses pareil, dis moi ? ».
Tout en parlant il avait approché son visage de celui de Lysange, qui, à son tour médusée par ses paroles, ne semblait plus capable de s’opposer. Il l’embrassa simplement, pressant ses lèvres sur celles de la jeune femme, avec une infinie douceur, sans qu’elle l’en empêche. Il se redressa lentement pour constater qu’elle avait fermé les yeux et s’en trouva profondément touché, hésitant, tout près de recommencer.
Mais elle les rouvrit en sursaut et dans un petit cri d’effroi soufflé, le repoussa sans violence. «Non mais... tu fais quoi là... ». Elle était troublée et lui jeta un regard inquiet. « Va pas t’imaginer je sais pas quoi, là, hein !!! ». Nealson se détourna pour masquer son sourire et reprit tranquillement sa masse. « Ah mais j’imagine rien moi... je prends ce qu’on m’donne... ».
« Mais ?!?! J’ai rien donné là !!! .,. Arrête !!! Tu me fais marcher ! Hein ?!? ». Le ton était réellement inquiet, la voix tremblotante.
Il ne la regardait plus, le sourire comme imprimé sur son visage buriné par la forge en plein air. « Tu pourras dire au patron que je dois lui parler de la commande... et du gars Tahar. Je vais tout lui raconter, et ensuite il décidera. Pour la suite, je m’en débrouillerai. Ça ira. ».
Lysange resta encore quelques instants à l’observer, espérant un regard qui viendrait démentir le sentiment d’être allée trop loin. Mais il semblait ailleurs, loin, dans ses pensées, ou ses rêves. Elle marmonna. « Bon ben... d’accord... je vais lui dire... euh... à plus tard alors... ».
Une fois qu’elle eut tourné les talons, il redressa la tête et la regarda marcher jusqu’aux bureaux, le sourire toujours présent.
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
Tandis que le brouhaha emplissait la salle, la grande porte s’ouvrit et le silence se fit pendant quelques secondes. « Oh mais…. » Barbara, attablée avec ses apprentis dans la grande salle commune, suivit le regard de tous vers l’entrée, « … mais c’est Lysange ! ».
L’intendante venait tout juste d’entrer dans la grande pièce commune où déjeunaient plusieurs employés, attablés avec des réfugiés régulièrement conviés à partager les repas contre quelques petits travaux, et tous, hommes et femmes, la regardaient en silence.
Lysange avait quitté le bureau du patron après un « A tout à l’heure, alors ! », probablement adressé à celui dont le rire tonitruant sonnait aux oreilles de tous depuis le matin, puis elle avait traversé tout le domaine en chantonnant, suivie par Filou qui semblait tout aussi fou qu’elle.
Pourtant vêtue comme à l’ordinaire, d’une chemise blanche immaculée, d’une jupe de coton et d’une ceinture assortie, elle attirait tous les regards. Elle irradiait d’une telle énergie, comme enfantine mais sensuelle, et vibrait d’une joie de vivre tellement communicative, que nul ne pouvait la voir passer sans s’arrêter.
Arrivée à la salle commune et avisant son amie, elle traversa le réfectoire, sans du tout prêter aux regards, sauf peut-être celui de Nealson, jaloux et noir, et vint s’asseoir face à elle, souriante.
« Je vous cherchais mais j’aurais dû me douter que vous seriez encore au café ! ». Elle attrapa dans la corbeille posée là, une pomme qu’elle croqua à pleines dents, les yeux brillants. Barbara esquissa un sourire amusé, observant l’ensemble du personnel chuchoter. « Ainsi … c’est donc vrai ».
L’intendante la regarda, moyennement étonnée, mastiquant la pomme. « Qu’est-ce qui est vrai ?». Barbara se pencha par dessus la table pour murmurer dans un sourire. « Et bien…. ce que tout le monde raconte depuis ce matin, partout dans le domaine… non ?».
Lysange sembla tout à coup se réveiller et sentir combien sa présence attirait les regards, amusée elle regarda autour d’elle, vit les yeux brillants et les sourires, les questions et les sous-entendus, peut-être même les jalousies et les rancoeurs, et elle haussa légèrement le ton, bien décidée à assumer ce qui la rendait si joyeuse. « Oh ! Vous voulez dire le fait qu’Oscar ait passé la nuit chez moi et compte bien y passer les prochaines ?!? ».
Sans crânerie mais avec amusement, elle avait appuyé sur le prénom du patron, sachant délibérément qu’ainsi elle changeait de statut, tout en marquant une rupture avec les jours précédents. Elle croqua de nouveau dans la pomme et adressa un immense sourire à Barbara. « Vous êtes radieuse Lysange, et ce n’est pas parce que vous êtes fière de pouvoir vous afficher, ce n’est pas votre genre, n’est-ce pas ? ».
La jeune femme secoua la tête, le sourire tout à coup tendre. « Ce qui m’arrive est merveilleux Barbara… jamais je n’aurais imaginé tout ça… Je pensais vraiment qu’il m’en voulait, pour le baiser de Nealson, mais en fait il s’agissait d’un malentendu. Il est tellement… différent des autres types que j’ai pu rencontrer. Je suis la plus heureuse des femmes et je veux qu’Azeroth tout entier le sache… ». Elle se pencha à son tour par dessus la table pour murmurer. « … mais j’aurais quand même bien aimé vous parler en privé, si vous avez terminé ».
Barbara acquiesça tout en se levant, et lui fit signe de la suivre dehors. Tout en quittant la salle commune, elle se sentit brûlée par le regard de Nealson, mais Lysange lui emboîta le pas, insensible au regard jaloux du forgeron.
Une fois dehors, Barbara marchait tranquillement, observant sa cadette. « Je ne sais pas si Monsieur Fossard est aussi différent que vous le dites, mais vous êtes de toute évidence sous le charme, Lysange, et vous le parez des plus beaux atours. Mais cela vous va à ravir, quoi qu’il en soit… ».
Lysange s’emporta légèrement. « Ah mais si ! Il est complètement différent, moi je vous dis !!! N’importe quel type que je connais m’en aurait voulu, aurait cherché à en savoir plus, se serait énervé contre moi sans me faire confiance, mais lui non ! Pas du tout ! Voilà pourquoi il y a eu malentendu ! J’ai bien fait de vouloir m’expliquer avec lui en tout cas ! ».
« Mmh… donc vous m’avez écoutée et vous êtes allée lui parler ? ». Lysange opina vivement et lui prit le bras. « Oui ! C’est pour ça que je voulais vous voir … pour vous remercier. Et pour vous raconter !». Elle parlait avec animation, le ton joyeux.
« En fait… j’ai déménagé hier après-midi, comme vous savez. Et comme je voulais lui parler, je me suis dit que j’allais le faire devant mon nouveau logement, au bord du canal. Franchement… j’avais pas du tout pensé au fait qu’il voudrait visiter… ». La fermière coula un regard vers Lysange et esquissa un sourire amusé. C’était pourtant évident qu’un homme entreprenant profiterait de l’occasion, mais manifestement Lysange disait vrai. « Mmh.. et donc ? ».
Une fois arrivées à la grange, Barbara se mit à ranger et Lysange fit de même, naturellement. « Et bien… donc je lui ai fait visiter… il a dit qu’il le trouvait charmant, que j’avais bien fait, et ensuite.. il s’est assis devant la table, et m’a demandé ce que j’avais à lui dire. Je lui ai proposé à boire et.. nous avons bu un peu de mon rhum arrangé et ensuite… ben j’ai commencé à lui parler de la veille au soir, quand il m’avait raccompagnée et qu’il était parti fâché…. je voulais m’excuser et voir si on pouvait passer à autre chose, parce que moi j’en étais toute triste et… enfin j’allais pas bien quoi ».
«Ça… c’est peu de le dire, je ne vous avais pas vue aussi mal en point depuis bien longtemps. Et donc ? ». Lysange attrapa un panier et le lança au dessus d’une pile avec un sourire vainqueur, le panier s’était installé sur la pile, parfaitement posé par dessus les autres. « Ben… en fait moi je croyais qu’il m’en voulait… puisqu’il avait dit qu’il en avait assez entendu et qu’il voulait rentrer, et c’est pour ça que j’avais lâché sa main et que je m’étais reculée, par dépit disons…. plutôt que de me faire larguer, j’ai réagi… c’est tout moi ça… ».
Barbara lâcha un petit rire, acquiesçant. « Mais lui… de me voir lâcher sa main, il a pensé que j’avais choisi Nealson. Il a pas du tout pensé que j’avais mal compris parce que… ben justement parce qu’il est différent ! ». Lysange avait posé ses mains sur ses hanches, emportée par sa démonstration. « En fait.. j’ai compris un truc hier soir et… euh… ». Elle rosit. « …aussi cette cette nuit ». Barbara coula un regard dans sa direction, sans cesser de trier les légumes. « En fait.. Il est un peu … tout d’un bloc, voyez ? C’est pas quelqu’un qui fait des salamalecs, disons. Quand il dit qu’il veut plus en parler, c’est juste qu’il estime que tout a été dit, réglé même, puisqu’il a cogné Nealson, et qu’on doit passer à autre chose….. autre chose de plus… simple à comprendre, peut-être ». Elle s’était arrêtée de parler et semblait réfléchir à ses propres paroles.
« Plus simple à comprendre ? C’est moi qui ne saisis pas, Lysange…. Mr Fossard me semble tout à fait capable de comprendre de quoi il retourne… non ? ». La jeune femme sursauta en secouant la tête. « Non ! C’est pas ce que je voulais dire ! Non c’est que… ben…. après…. toute la nuit en fait… y’avait pas besoin de mots là… voyez ? … y’avait pas de malentendu non plus d’ailleurs, et c’était… tellement différent…. tellement…. ». La jeune intendante s’était tue et semblait revivre sa nuit, le regard dans le vide et le visage attendri.
Barbara toussota légèrement. « Je crois que je saisis, Lysange. Il n’est que de voir votre visage pour comprendre que la nuit a été longue.. ou plutôt courte, vous avez les traits tirés par manque de sommeil, mais vous respirez la joie de vivre, et même.. à dire vrai, vous émettez tellement de sensualité que j’en aurais presque peur de vous laisser seule avec certains de nos employés… ».
Elle termina sa phrase dans un ton faussement inquiet, puis se mit à rire en la voyant froncer les yeux. «Je vous taquine, Lysange, et je suis très heureuse pour vous. Prenez simplement garde à ne pas vous attirer trop de jalousie. Les rumeurs vont déjà bon train et certains vont peut-être essayer de vous blesser. Enfin… vous êtes tellement… différente, vous aussi, qu’on ne peut que vouloir votre bonheur et il faudrait être aveugle pour ne pas voir combien votre joie de vivre nous illumine tous … cela fera le tri entre tous. Je suis même certaine que passés quelques jours, Nealson sera de nouveau l’ami fidèle qu’il était auparavant ».
Lysange observa longuement Barbara puis se mit à rire en haussant l’épaule. « Il fera bien comme il veut, franchement je m’en fiche complètement ! ».
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
Depuis quelques jours, l’ambiance n’était plus la même dans le domaine Fossard. Le travail se faisait tout aussi sérieusement, les commandes étaient tout aussi bien traitées, les clients tout aussi bien accueillis, mais tout semblait plus léger, plus simple et probablement plus agréable.
En un mot, l’ambiance générale était à l’unisson de ce qui se tramait dans les bureaux, ou plutôt entre le patron et son intendante. De fait, depuis qu’Oscar Fossard était revenu de chez Lysange Delabay en la tenant par la main pour mettre en route le domaine, trois jours auparavant, il y avait de quoi cancaner dans la bonne humeur.
Même les commères des faubourgs n’en perdaient pas une miette, les observant matin et soir, cachées derrière leurs rideaux ou parfois même à la porte de leurs petites maisons pour s’adresser mutuellement un petit sourire entendu. La brunette avait le sourire radieux et la démarche légère, le rire communicatif et les gestes tendres, le verbe haut et une sensualité naturelle qui ne trompaient personne et surtout pas les vieilles femmes. Leur cadette était amoureuse et se sentait aimée en retour, c’est ce qui la rendait aussi lumineuse, à n’en pas douter !
Et comme celui qui l’accompagnait ne semblait pas en reste, dans un registre plus protecteur voire même possessif que la jeune femme semblait apprécier, tout laissait à penser qu’une idylle démarrait là, sous leurs yeux attendris, et qu’on avait pas fini d’en entendre parler.
Mais il n’y avait nulle magie à deviner ce qui ne pouvait se dire, car tout ce que Lysange ne racontait pas de ses nuits, était parfaitement compréhensible par tous. Sur son visage, dans son regard, et même au coeur de son attitude « La p’tiote » n’avait plus aucune raison de le cacher, elle était « à sa place ». Une place qu’elle attendait depuis bien longtemps et qui, désormais, semblait tout aussi naturelle que l’eau d’une source limpide, celle d’une femme qui s’offre sans partage à l’homme qu’elle aime et à qui elle rêvait d’appartenir.
Voilà pourquoi, lorsqu’elle se promenait simplement en ville, sa main glissée dans celle d’Oscar, qui, lui, la serrait comme un trésor, il n’était pas difficile d’imaginer ce que la nuit leur réservait de passion et de tendresse mélangées.
Par voie de conséquence, heureuse comme jamais depuis qu’elle avait débarqué à Hurlevent, Lysange fourmillait d’idées pour tout ! Déménager dans une petite maison au bord du canal n’était que le début de sa nouvelle vie et elle n’hésitait pas à proposer à Oscar tout un tas de nouvelles idées pour leurs affaires communes. Embaucher, restaurer, aménager, décorer, accueillir plus de réfugiés, offrir plus de services, tout y passait à la vitesse de l’éclair et il fallait vraiment que le tirassien soit amoureux et donc partiellement aveugle, pour la suivre dans ses inventions et même remettre en cause des idées que pourtant il défendait bec et ongles la veille.
Aussi les commères n’étaient-elles probablement pas très loin de la vérité, il allait y avoir des changements sur le domaine Fossard et peut-être même pourraient-elles en profiter !
En un mot, l’ambiance générale était à l’unisson de ce qui se tramait dans les bureaux, ou plutôt entre le patron et son intendante. De fait, depuis qu’Oscar Fossard était revenu de chez Lysange Delabay en la tenant par la main pour mettre en route le domaine, trois jours auparavant, il y avait de quoi cancaner dans la bonne humeur.
Même les commères des faubourgs n’en perdaient pas une miette, les observant matin et soir, cachées derrière leurs rideaux ou parfois même à la porte de leurs petites maisons pour s’adresser mutuellement un petit sourire entendu. La brunette avait le sourire radieux et la démarche légère, le rire communicatif et les gestes tendres, le verbe haut et une sensualité naturelle qui ne trompaient personne et surtout pas les vieilles femmes. Leur cadette était amoureuse et se sentait aimée en retour, c’est ce qui la rendait aussi lumineuse, à n’en pas douter !
Et comme celui qui l’accompagnait ne semblait pas en reste, dans un registre plus protecteur voire même possessif que la jeune femme semblait apprécier, tout laissait à penser qu’une idylle démarrait là, sous leurs yeux attendris, et qu’on avait pas fini d’en entendre parler.
Mais il n’y avait nulle magie à deviner ce qui ne pouvait se dire, car tout ce que Lysange ne racontait pas de ses nuits, était parfaitement compréhensible par tous. Sur son visage, dans son regard, et même au coeur de son attitude « La p’tiote » n’avait plus aucune raison de le cacher, elle était « à sa place ». Une place qu’elle attendait depuis bien longtemps et qui, désormais, semblait tout aussi naturelle que l’eau d’une source limpide, celle d’une femme qui s’offre sans partage à l’homme qu’elle aime et à qui elle rêvait d’appartenir.
Voilà pourquoi, lorsqu’elle se promenait simplement en ville, sa main glissée dans celle d’Oscar, qui, lui, la serrait comme un trésor, il n’était pas difficile d’imaginer ce que la nuit leur réservait de passion et de tendresse mélangées.
Par voie de conséquence, heureuse comme jamais depuis qu’elle avait débarqué à Hurlevent, Lysange fourmillait d’idées pour tout ! Déménager dans une petite maison au bord du canal n’était que le début de sa nouvelle vie et elle n’hésitait pas à proposer à Oscar tout un tas de nouvelles idées pour leurs affaires communes. Embaucher, restaurer, aménager, décorer, accueillir plus de réfugiés, offrir plus de services, tout y passait à la vitesse de l’éclair et il fallait vraiment que le tirassien soit amoureux et donc partiellement aveugle, pour la suivre dans ses inventions et même remettre en cause des idées que pourtant il défendait bec et ongles la veille.
Aussi les commères n’étaient-elles probablement pas très loin de la vérité, il allait y avoir des changements sur le domaine Fossard et peut-être même pourraient-elles en profiter !
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
Lorsque les hommes du Nord venus valider la commande importante de chevaux pour le front, avaient finalement quitté les bureaux d’Oscar Fossard, ils étaient certainement bien loin d’imaginer l’impact de leur visite sur le maître des lieux.
Jusqu’au moment où la très lourde bourse remplie d’or avait fait son apparition sur le bureau, tout avait semblé irréel, même si toutes les équipes Fossard s’étaient mises en quête de chevaux susceptibles d’être dressés, partout où Oscar Fossard avait des amis, du personnel ou des relations, c’est à dire sur la totalité des terres disponibles à la capture de chevaux.
Mais lorsque l’or avait été posé lourdement sur la table, il était alors apparu qu’il fallait rapidement tout mettre en oeuvre pour le protéger.
Voilà pourquoi les commères des faubourgs avaient eu un choc en voyant passer Mr Fossard sur son énorme rhinocéros, le fusil en mains, prêt à tirer sur tout ce qui approcherait de trop près. Heureusement, la présence de la brunette derrière lui, perchée sur un simple cheval tirassien, avait amoindri la vision guerrière qui les avait inquiétées.
Il fallut attendre le lendemain pour apprendre, à mots couverts, que le dirigeant de la maison Fossard avait simplement souhaité mettre hors de danger l’acompte substantiel d’une mirifique commande. De toute évidence, les affaires Fossard se portaient bien.
Jusqu’au moment où la très lourde bourse remplie d’or avait fait son apparition sur le bureau, tout avait semblé irréel, même si toutes les équipes Fossard s’étaient mises en quête de chevaux susceptibles d’être dressés, partout où Oscar Fossard avait des amis, du personnel ou des relations, c’est à dire sur la totalité des terres disponibles à la capture de chevaux.
Mais lorsque l’or avait été posé lourdement sur la table, il était alors apparu qu’il fallait rapidement tout mettre en oeuvre pour le protéger.
Voilà pourquoi les commères des faubourgs avaient eu un choc en voyant passer Mr Fossard sur son énorme rhinocéros, le fusil en mains, prêt à tirer sur tout ce qui approcherait de trop près. Heureusement, la présence de la brunette derrière lui, perchée sur un simple cheval tirassien, avait amoindri la vision guerrière qui les avait inquiétées.
Il fallut attendre le lendemain pour apprendre, à mots couverts, que le dirigeant de la maison Fossard avait simplement souhaité mettre hors de danger l’acompte substantiel d’une mirifique commande. De toute évidence, les affaires Fossard se portaient bien.
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
Au petit matin du mercredi 3 du mois sept de l’an 39, une longue caravane de bêtes de diverses races quitta le Domaine Fossard sous l’oeil attentif d’une demie douzaine d’employés.
Prenant garde de ne pas déranger les commères qui, en cette heure matinale, dormaient encore sous leurs draps de coton blanchi au soleil, les employés avaient peur mission de prendre le tram pour passer sous la montagne et emmener les bêtes chez un ami d’Oscar Fossard à la Ferme Distillambre afin d’attendre sous bonne garde le vendredi soir.
Tout avait été minutieusement préparé par le maître des lieux pour le marché artisanal qui devait se dérouler le vendredi suivant dans Forgefer. Les bêtes avaient été choisies avec soin, les deux dresseurs habilités à présenter les bêtes, avaient, eux, été conviés à organiser leur soirée en fonction, les billets de tram achetés d’avance, les papiers de passage prêts pour tout contrôle et même de quoi se restaurer pour tous, au cas où le transfert durerait plus longtemps que prévu.
Pour sa part, le dirigeant et son intendante avaient prévu de faire le voyage dans la journée du vendredi avec les dresseurs, afin de récupérer l’ensemble des bêtes qui patienteraient bien au chaud dans les étables de la ferme Distillambre.
A n’en pas douter, Oscar Fossard prenait très au sérieux le nouveau marché de la ville naine.
Prenant garde de ne pas déranger les commères qui, en cette heure matinale, dormaient encore sous leurs draps de coton blanchi au soleil, les employés avaient peur mission de prendre le tram pour passer sous la montagne et emmener les bêtes chez un ami d’Oscar Fossard à la Ferme Distillambre afin d’attendre sous bonne garde le vendredi soir.
Tout avait été minutieusement préparé par le maître des lieux pour le marché artisanal qui devait se dérouler le vendredi suivant dans Forgefer. Les bêtes avaient été choisies avec soin, les deux dresseurs habilités à présenter les bêtes, avaient, eux, été conviés à organiser leur soirée en fonction, les billets de tram achetés d’avance, les papiers de passage prêts pour tout contrôle et même de quoi se restaurer pour tous, au cas où le transfert durerait plus longtemps que prévu.
Pour sa part, le dirigeant et son intendante avaient prévu de faire le voyage dans la journée du vendredi avec les dresseurs, afin de récupérer l’ensemble des bêtes qui patienteraient bien au chaud dans les étables de la ferme Distillambre.
A n’en pas douter, Oscar Fossard prenait très au sérieux le nouveau marché de la ville naine.
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Re: Au fil des jours chez Fossard.
La jeune femme était pourtant éclatante de joie la veille au soir ! Elle était passée au bras de « son fiancé d’amour », comme elle le présentait, en robe de soie jaune d’or, en route pour un bal où elle pensait devoir être présente.
Mais il avait dû y avoir un incident car elle avait perdu son sourire le lendemain matin. Pire elle était arrivée aux abords des faubourgs pour sa prise de travail en râlant contre Azeroth tout entier, et elle n’avait pas accepté, comme d’ordinaire, de s’arrêter pour raconter sa soirée.
C’était donc bien trop tentant pour la brave Marthe qui, si elle n’avait pas son pareil pour colporter toutes les rumeurs du quartier, celles des petites gens, n’en était pas moins avide d’en avoir de la haute société. Il s’était passé « quelque chose » et elle devait savoir !
Elle décida donc rapidement d’une stratégie et mis Ernestine dans la confidence. Celle-ci, bien plus timorée, avait d’abord refusé. Mais comme elle ne s’était toujours pas remise du départ du vieux Marcel, et pensait pouvoir grappiller quelques informations sur l’intendant, elle avait finalement accepté.
Armées d’une douzaine de madeleines tout juste sorties du four, les deux femmes avaient donc réussi à passer le portail en offrant quelques petites viennoiseries préparées à cet effet, et elle se présentèrent la bouche en coeur au bureau où Lysange qui préparait la commande de chevaux pour le Nord.
Elle n’osa pas renvoyer les deux commères et se trouva donc obligée de leur offrir du thé pour accompagner les madeleines qui embaumaient et n’attendaient plus que d’être dégustées.
Une fois débitées les banalités d’usage sur le temps, l’époque bénie d’avant la guerre ou la dernière mode vestimentaire, il fallût bien en venir aux raisons de la rage que la pauvre Lysange ne réussissait pas à cacher.
« Bah… c’est toujours pareil. Cette ville est pourrie et certains se sont mis en tête de nous faire payer une histoire vieille de plus d’un an… et pendant le même temps, le même qui nous a pourri la vie et agit contre la loi en toute impunité, tente de de corrompre une gourdasse qui n’arrête pas de s’esbaudir devant lui, pendant le discours de la commandante de la Garde … et avec ça un petit con de garde qui saute sur Oscar sous prétexte qu’il a simplement rembarré deux gnomes qui n’arrêtaient pas de nous embêter… Pour un peu il le mettait en geôle… pour avoir juste parlé un peu fort !!! Non mais vous vous rendez compte ?!??? Où va le monde là ? C’est vraiment n’importe quoi !!! Et le petit con qui me traite de casse-burnes en plus, vous imaginez un peu ?!? S’il avait pu Oscar l’aurait empalé !! Mais c’était voulu, je pense, de la part du garde, tout pour le faire sortir de ses gonds et après nous accuser de jouer les victimes !!! C’est de la pire espèce tout ça !!!"
La jeune femme s’animait, parlait en faisant de grands gestes, manquant faire tomber tasses et madeleines.
« Ouh là ! Moins vite !! Moins vite, mon petit !!! » Marthe jubilait, elle n’en demandait pas tant. « Reprenez tout depuis le début… de quoi parlez vous exactement ? De corruption à haut niveau ou seulement au ras des pâquerettes ? ».
La jeune intendante ne savait plus où donner de la tête, emportée par sa rage qu’elle avait pourtant réussi à endiguer la veille au soir.
« Bah… si pour vous le garde lambda c’est le ras des pâquerettes, alors oui. Mais tout ça était fait en public, devant leur Commandant même ! Alors c’est un peu facile d’aller accuser la voletaille, hein ! S’ils se permettent tout et n’importe quoi c’est bien parce que les officiers les laissent faire … ou pire ils participent !! »
« Oh .. Lysange… tout de même, comme vous y allez… vous vous rendez compte de ce que vous dites ? Comment cela se pourrait ? ». Marthe était aux anges. Elle en avait pour des heures de ragots à colporter.
« Ah ben c’est simple !!!! Soit ils sont complètement débiles, soit ils sont tout autant corrompus que leurs imbéciles de subordonnés !!!" La jeune femme les regarda toutes deux, le visage empreint de perplexité. « Ceci dit je commence à me demander sérieusement si ce n’est pas la première solution… parce que là tout de même ça frise le non-sens absolu !! »
« Que voulez dire… je ne vous suis pas.. ». Marthe en redemandait mais Lysange commençait à regretter de s’être laissée emportée.
« Mais… vous gardez ça pour vous, hein ?!?"
« Pensez donc !! Hein Ernestine ? ». Marthe regarda sa complice avec des airs de conspiration. Mais la vieille femme était totalement dépassée par les paroles de sa cadette. Comment pouvait-on ainsi critiquer une institution aussi respectable, cela n’était pas convenable. Elle opina pour Marthe, puis prit le bras de Lysange avec embarras.
« Mais… vous …. est-ce que vous avez essayé d’en parler à cette femme qui m’a l’air très bien… comment s’appelle-t-elle déjà… Hellenlich, oui, voilà, une vieille famille, j’ai bien connu son oncle.. ou son grand-père….enfin bref. Est-ce que vous lui en avez touché deux mots ? »
Lysange inspira longuement, essayant de retrouver son calme.
« Bah… oui. Mais vraiment, elle m’a déçue. Alors qu’elle m’avait fait très forte impression lorsque j’étais allée porter plainte … pour je ne sais plus quoi tellement on nous a malmenés… là….. elle a laissé ce nain corrompre une de ses gardes devant ses yeux, ou si elle n’a pas vu le nain tenter de soudoyer la gourdasse, elle ne peut pas ne pas l’avoir vu danser avec la fille de la Garde toute la soirée. Ensuite, elle a vu le petit con de garde engueuler Oscar pour rien, elle m’a vue aussi tenter de le défendre, elle a forcément entendu le petit con me traiter de casse-burnes, et pourtant elle ne bougeait pas, rien. Il a fallu que j’aille la houspiller pour qu’elle bouge, et ça, après m’avoir demandé de me comporter calmement… Bien évidemment ! C’est tellement facile de critiquer ceux qui sont calomniés et qui sont seuls pour se défendre… non, vraiment… elle m’a bien déçue ».
Ernestine ne pouvait accepter cette vision cauchemardesque de son monde normalement si bien rangé. « Mais.. finalement tout s’est bien terminé ? Mr Fossard n’a pas fini à la caserne et… ».
Lysange fit un bond sur sa chaise. « Ben encore heureux !!!! pour avoir demandé à des gnomes de se taire ?!? Bon… ensuite un coup de tête sur le garde, mais il m’avait traitée de casse-burnes, il pouvait pas rester sans rien faire ! J’ai cru comprendre qu’elle a dit à Oscar qu’elle le recevrait… mais je n’y crois plus. Des belles paroles pour endormir le monde » . Elle soupira. « Enfin.. Oscar y croit, lui. Il veut déposer plainte et il espère pouvoir lui expliquer son point de vue sur la collusion qui règne dans son régiment. Alors moi, et bien… bah…. Du moment que je suis bien avec mon fiancé d’amour, hein…. le reste ! »
Elle enfourna une madeleine en les regardant tour à tour, retrouvant le sourire. « Délicieuses ces madeleines dites donc… il faudra que vous m’en donniez la recette, je suis sûre qu’Oscar apprécierait. ».
Mais il avait dû y avoir un incident car elle avait perdu son sourire le lendemain matin. Pire elle était arrivée aux abords des faubourgs pour sa prise de travail en râlant contre Azeroth tout entier, et elle n’avait pas accepté, comme d’ordinaire, de s’arrêter pour raconter sa soirée.
C’était donc bien trop tentant pour la brave Marthe qui, si elle n’avait pas son pareil pour colporter toutes les rumeurs du quartier, celles des petites gens, n’en était pas moins avide d’en avoir de la haute société. Il s’était passé « quelque chose » et elle devait savoir !
Elle décida donc rapidement d’une stratégie et mis Ernestine dans la confidence. Celle-ci, bien plus timorée, avait d’abord refusé. Mais comme elle ne s’était toujours pas remise du départ du vieux Marcel, et pensait pouvoir grappiller quelques informations sur l’intendant, elle avait finalement accepté.
Armées d’une douzaine de madeleines tout juste sorties du four, les deux femmes avaient donc réussi à passer le portail en offrant quelques petites viennoiseries préparées à cet effet, et elle se présentèrent la bouche en coeur au bureau où Lysange qui préparait la commande de chevaux pour le Nord.
Elle n’osa pas renvoyer les deux commères et se trouva donc obligée de leur offrir du thé pour accompagner les madeleines qui embaumaient et n’attendaient plus que d’être dégustées.
Une fois débitées les banalités d’usage sur le temps, l’époque bénie d’avant la guerre ou la dernière mode vestimentaire, il fallût bien en venir aux raisons de la rage que la pauvre Lysange ne réussissait pas à cacher.
« Bah… c’est toujours pareil. Cette ville est pourrie et certains se sont mis en tête de nous faire payer une histoire vieille de plus d’un an… et pendant le même temps, le même qui nous a pourri la vie et agit contre la loi en toute impunité, tente de de corrompre une gourdasse qui n’arrête pas de s’esbaudir devant lui, pendant le discours de la commandante de la Garde … et avec ça un petit con de garde qui saute sur Oscar sous prétexte qu’il a simplement rembarré deux gnomes qui n’arrêtaient pas de nous embêter… Pour un peu il le mettait en geôle… pour avoir juste parlé un peu fort !!! Non mais vous vous rendez compte ?!??? Où va le monde là ? C’est vraiment n’importe quoi !!! Et le petit con qui me traite de casse-burnes en plus, vous imaginez un peu ?!? S’il avait pu Oscar l’aurait empalé !! Mais c’était voulu, je pense, de la part du garde, tout pour le faire sortir de ses gonds et après nous accuser de jouer les victimes !!! C’est de la pire espèce tout ça !!!"
La jeune femme s’animait, parlait en faisant de grands gestes, manquant faire tomber tasses et madeleines.
« Ouh là ! Moins vite !! Moins vite, mon petit !!! » Marthe jubilait, elle n’en demandait pas tant. « Reprenez tout depuis le début… de quoi parlez vous exactement ? De corruption à haut niveau ou seulement au ras des pâquerettes ? ».
La jeune intendante ne savait plus où donner de la tête, emportée par sa rage qu’elle avait pourtant réussi à endiguer la veille au soir.
« Bah… si pour vous le garde lambda c’est le ras des pâquerettes, alors oui. Mais tout ça était fait en public, devant leur Commandant même ! Alors c’est un peu facile d’aller accuser la voletaille, hein ! S’ils se permettent tout et n’importe quoi c’est bien parce que les officiers les laissent faire … ou pire ils participent !! »
« Oh .. Lysange… tout de même, comme vous y allez… vous vous rendez compte de ce que vous dites ? Comment cela se pourrait ? ». Marthe était aux anges. Elle en avait pour des heures de ragots à colporter.
« Ah ben c’est simple !!!! Soit ils sont complètement débiles, soit ils sont tout autant corrompus que leurs imbéciles de subordonnés !!!" La jeune femme les regarda toutes deux, le visage empreint de perplexité. « Ceci dit je commence à me demander sérieusement si ce n’est pas la première solution… parce que là tout de même ça frise le non-sens absolu !! »
« Que voulez dire… je ne vous suis pas.. ». Marthe en redemandait mais Lysange commençait à regretter de s’être laissée emportée.
« Mais… vous gardez ça pour vous, hein ?!?"
« Pensez donc !! Hein Ernestine ? ». Marthe regarda sa complice avec des airs de conspiration. Mais la vieille femme était totalement dépassée par les paroles de sa cadette. Comment pouvait-on ainsi critiquer une institution aussi respectable, cela n’était pas convenable. Elle opina pour Marthe, puis prit le bras de Lysange avec embarras.
« Mais… vous …. est-ce que vous avez essayé d’en parler à cette femme qui m’a l’air très bien… comment s’appelle-t-elle déjà… Hellenlich, oui, voilà, une vieille famille, j’ai bien connu son oncle.. ou son grand-père….enfin bref. Est-ce que vous lui en avez touché deux mots ? »
Lysange inspira longuement, essayant de retrouver son calme.
« Bah… oui. Mais vraiment, elle m’a déçue. Alors qu’elle m’avait fait très forte impression lorsque j’étais allée porter plainte … pour je ne sais plus quoi tellement on nous a malmenés… là….. elle a laissé ce nain corrompre une de ses gardes devant ses yeux, ou si elle n’a pas vu le nain tenter de soudoyer la gourdasse, elle ne peut pas ne pas l’avoir vu danser avec la fille de la Garde toute la soirée. Ensuite, elle a vu le petit con de garde engueuler Oscar pour rien, elle m’a vue aussi tenter de le défendre, elle a forcément entendu le petit con me traiter de casse-burnes, et pourtant elle ne bougeait pas, rien. Il a fallu que j’aille la houspiller pour qu’elle bouge, et ça, après m’avoir demandé de me comporter calmement… Bien évidemment ! C’est tellement facile de critiquer ceux qui sont calomniés et qui sont seuls pour se défendre… non, vraiment… elle m’a bien déçue ».
Ernestine ne pouvait accepter cette vision cauchemardesque de son monde normalement si bien rangé. « Mais.. finalement tout s’est bien terminé ? Mr Fossard n’a pas fini à la caserne et… ».
Lysange fit un bond sur sa chaise. « Ben encore heureux !!!! pour avoir demandé à des gnomes de se taire ?!? Bon… ensuite un coup de tête sur le garde, mais il m’avait traitée de casse-burnes, il pouvait pas rester sans rien faire ! J’ai cru comprendre qu’elle a dit à Oscar qu’elle le recevrait… mais je n’y crois plus. Des belles paroles pour endormir le monde » . Elle soupira. « Enfin.. Oscar y croit, lui. Il veut déposer plainte et il espère pouvoir lui expliquer son point de vue sur la collusion qui règne dans son régiment. Alors moi, et bien… bah…. Du moment que je suis bien avec mon fiancé d’amour, hein…. le reste ! »
Elle enfourna une madeleine en les regardant tour à tour, retrouvant le sourire. « Délicieuses ces madeleines dites donc… il faudra que vous m’en donniez la recette, je suis sûre qu’Oscar apprécierait. ».
Invité- Invité
Re: Au fil des jours chez Fossard.
Depuis une semaine maintenant, le domaine de la maison Fossard voyait défiler de nombreux ouvriers portant les couleurs des Industries Allen. Le chantier avait débuté le quinzième jour du mois, au petit matin après une réunion de présentation. A peine la rencontre achevée, les ouvriers s'étaient mis à l'oeuvre avec entrain, certains commençant à décharger les caisses marquées de l'emblème de l'entreprise pendant que d'autres prennaient les mesures directement sur le terrain, marquant le sol de quelques piquets. Dès le lendemain, les bruits mécaniques des engins et outils envahirent le domaine de la maison Fossard. Les jours de la semaine se suivirent ainsi, d'après une routine bien établie commençant à l'aube et terminant le soir aux alentours de la vingtième heure. En ce vingt-deuxième jour du septième mois, des trous profonds continuent d'être creusé par les employés des Industries alors qu'à la forge du domaine, d'autres ouvriers s'activent à assembler des tuyaux.
Elana Milloin- Citoyen
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